Le funambule des labyrinthes
90 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Le funambule des labyrinthes , livre ebook

90 pages
Français

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Description

Victime d'un grave accident de voiture, Jean-Paul Deller décide de se reconstruire à travers l'écriture.

Ma nouvelle gestation se fait coma et rend le temps ambigu. Éjecté, expulsé de la matrice chaude et fracassée de ma voiture, j’évolue plusieurs semaines
dans un monde étrange, foetus cassé et fiévreux, accouché mais toujours nourri par le cordon ombilical d’une poche suspendue. Étendu, pas encore re-né dans
le berceau blanc d’un lit d’hôpital. Je m’abandonne à des heures parturientes qui ne s’écoulent pas en larmes de joie.
Mais, contrairement au sommeil utérin classique, le mien est déjà peuplé d’histoires...

Avec sa sensibilité de sculpteur, l'auteur nous raconte ses trois semaines de coma et le long chemin vers la guérison.

EXTRAIT

Mon périple aventureux commence par une banale escapade en voiture, tranquille, dans mon cabriolet acheté de seconde main. Formule que je trouve
dorénavant... malicieuse. Sur un chemin pierreux, je roule détendu, accompagné de mon épouse et d’un couple d’amis.
Puis je me la joue un peu, en souvenir des autos cross que j’appréciais. Démarrage brutal, dérapage.
Rigolade. Le moteur ronfle ; les pneus crissent et nos rires fusent comme les pierres. Certaines – pas trop – atterrissent dans un champ voisin, clôturé. Rien de particulier : des amis qui animent une campagne assoupie. D’habitude, je sculpte les pierres. Aujourd’hui, je les fais voler. Petites ou grandes, j’entretiens avec elles d’excellentes relations. Pourtant, cette fois, elles vont me trahir : semées dans ce champ, elles vont pousser en forme de fameux emmerdements...

À PROPOS DE L'AUTEUR

Le manuscrit, plusieurs fois travaillé, a longtemps noté Paul Del. Ce pseudonyme dénonçait mes mutilations visibles et secrètes. Lui, ce double tourmenté, a voulu l’écriture, l’écriture réparatrice. Or, le livre finalisé, je le signerai Jean-Paul Deller. Oui, cette substitution laborieuse m’a permis sa traversée pour atteindre une nouvelle complétude.

À PROPOS DE LA COLLECTION

Si «l’histoire est un roman vrai» (Paul Veyne), la collection Romans vrais offre au lecteur des itinéraires personnels dont les acteurs, au coeur de la société, ont atteint le moment où ils se proposent de rendre au monde entier ce qu’ils ont reçu de la vie.

Informations

Publié par
Date de parution 06 mars 2018
Nombre de lectures 0
EAN13 9782390030249
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0050€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Préface
A combien de personnes devrai-je dédier ce livre ?
A un grand nombre, certes…
Ma famille, ma femme, ma fille, mes deux petites filles chéries, mes proches…
Pourtant, je pense d’abord à Alain – mon ami très cher, mon frère de sens qui vient de s’en aller…
Alain, tu es un des acteurs de ce bouquin. Et quel comédien ! Tu ne pourras le lire. Tu ne pourras lire les mots que je t’adresse ici, ni vains, ni rien…
Ne vous tracassez pas madame, je m’en occupe… !
Cette phrase, mon épouse ne l’oubliera jamais. La mort n’avait pas voulu de moi. Tu m’as pris en charge. Tu m’as redonné l’espoir. Tu m’as appris le dépassement de soi-même.
La dérision, l’autodérision, l’humour étaient tes chevaux de bataille.
Au centre de revalidation, tu te jouais de la réalité. Tu l’avais dépassée depuis longtemps. Ta force m’a conquis. Tes propres souffrances, inexprimées, étaient dignes de la sagesse que tout homme devrait acquérir.
Inoubliable Alain. Séparé de tes amis de mésaventure, de douleurs, ton combat au quotidien est devenu de plus en plus rude. Inégal.
Ton esprit et ton corps usés par la maladie et les médicaments ont eu raison de toi. Mais jusqu’au bout, tu t’es battu, invitant la presse écrite, la télévision, pour dénoncer les conditions dans lesquelles tu vivais. Lourdement handicapé, tu ne demandais qu’un logement décent. Des fonctionnaires bornés n’ont rien compris, s’en tenant aux règles prescrites par une législation obsolète, inhumaine.
Louis t’a soutenu sans compter.
Merci Louis au nom de ton frère Alain, devenu aussi le mien.
Merci ! Ciao l’ami…
La performance du danger

Le démon de midi.
Oui, il s’agit bien de ça : le démon de midi. Cette bouffée narcissique qui fait revenir les élans de jeunesse, rejaillir les envolées de conquêtes…
Un prêt à tout quitter pour recommencer ailleurs , plus ou moins conscient et assumé. Banal sans doute, même si ma version de ce moment turbulent est singulière.
L’homme mûr retourne en adolescence. Tout lui (re)devient permis…
Moi, je suis carrément revenu en enfance.
Pour tout dire, j’ai recommencé ma naissance à plus de cinquante balais… Et au forceps, s’il vous plaît !
De nouveau, une première émotion, un premier regard, un premier geste, un premier mot, un premier art.
Sculpteur de moi-même, cette fois-ci : devenu une de mes pièces, vivante et sensible de l’intérieur…
Douloureuse.
Si douloureuse…
Cette seconde naissance, à travers un arrachement, est à la fois différence et point commun avec la première : souvenir de mon existence précédente et fragilité d’un être tributaire des autres.
Ma nouvelle gestation se fait coma et rend le temps ambigu. Éjecté, expulsé de la matrice chaude et fracassée de ma voiture, j’évolue plusieurs semaines dans un monde étrange, fœtus cassé et fiévreux, accouché mais toujours nourri par le cordon ombilical d’une poche suspendue. Etendu, pas encore re-né dans le berceau blanc d’un lit d’hôpital.
Je m’abandonne à des heures parturientes qui ne s’écoulent pas en larmes de joie.
Mais, contrairement au sommeil utérin classique, le mien est déjà peuplé d’histoires, connectées à celles qui m’ont amené
Comme un bizarre nouveau-né déjà grand, j’apprends les mots qui (re) disent l’existence. Qui la prouvent.
Les prononcer, oui.
Les écrire, apprendre à façonner les lettres qui créent, deux fois oui.
J’ai donc ajouté à ma panoplie de sculpteur un burin en forme de plume. Ecrire. Ecrire ce tourbillon, cette spirale merveilleuse qu’est la vie. Notre vie, en écho de vos propres expériences, amis lecteurs.
Elles vous ont sans doute conduits aussi loin que moi, par des moyens différents, j’espère…
Je vous convie donc à suivre mes nouveaux premiers pas, à reconnaître la trace des anciens. A parcourir cet entre-deux qui mêle souvenirs, rêves, délires, desseins, réalités. Cet entre-deux qui tisse les fibres subtiles de notre psychologie, qui fait œuvre de fécondation, comme le geste amoureux qui lui appartient.
Fécondation. Naissance.
Je regarde mes mains. Le compte des doigts n’est pas bon. Peu importe désormais : tel mon sang qui déborderait encore, coulent de la chair et des os mes volontés de sculpter le bois, la pierre, le métal. Le papier… et le monde !
Je reprends les outils.
Je prolonge ma présence éphémère dans cet univers incertain, à l’écoute de notre écho réciproque. Je pense à cette phrase de Roger Munier : « L’homme n’est pas sûr de connaître le monde, de le voir, de l’entendre. Sinon il n’y aurait pas de peinture, de poésie, de musique ».
Ni de sculpture.
Nous sommes nos propres labyrinthes. Comme vous, je glisse en équilibre sur un fil changeant et fragile. Sans cesse, il me sauve de la claustration, de la solitude, de la déréliction : fil conducteur qui chantourne les sentiments et les arts…
Au cœur du livre se trouvent plusieurs figures de mon travail et des impressions critiques, témoignages de la seule réussite à vouloir : le partage de mes sincérités artistiques, tel celui qui fait se rejoindre les intimités spirituelles et sensuelles, gage d’humanité.
Ces figures ne sont pas que respirations à mi-chemin. Les « antérieures » envisagent une passion vitale. Les « postérieures » disent combien cette dernière est reliée au faux étranger que constitue le spectateur.
Une confidence s’y ajoute : celle de l’œuvre qui me refait sculpteur après l’accident.
Ce milieu de chemin se veut également l’ articulation d’un miroir double et déformant, visions et reflets de mes itinéraires.
La première partie du diptyque inscrit mes délires en italique . Appropriez-vous leurs séquences aux contours parfois bruts et maladroits. Pour une fois, vous parcourrez d’abord le monde onirique, laissant à sa marge la réalité commune… pour mieux y revenir ! ( 1 )
En effet (miroir…), la seconde partie exprime les sinuosités de ma vie consciente, découpée par l’accident en avant et après .
Le manuscrit, plusieurs fois travaillé, a longtemps noté PAUL DEL. Ce pseudonyme dénonçait mes mutilations visibles et secrètes. Lui, ce double tourmenté, a voulu l’écriture, l’écriture réparatrice. Or, le livre né, je le signerai JEAN-PAUL DELLER. Oui, cette substitution laborieuse m’a permis sa traversée pour atteindre une nouvelle complétude. Un équilibre réinventé au fil des mots imprimés…
( 1 ) La vie… Elle m’a de nouveau accroché par la mise en images du désir, du sexe, comme un premier élan revenu, fantasmatique… Oserai-je vous proposer les deux séquences post délirium qui le montrent, toujours liées à une prise massive de médicaments ? Après tout, vous aurez déjà parcouru les voies intérieures de mon coma voyageur… Puis le sexe ne permet-t-il pas à l’homme de prendre une certaine hauteur ? Comme l’écrit Frédéric Dard : « Le sexe masculin est ce qu’il y a de plus léger au monde, une simple pensée le soulève ».
Mon périple aventureux commence par une banale escapade en voiture, tranquille, dans mon cabriolet acheté de seconde main. Formule que je trouve dorénavant… malicieuse.
Sur un chemin pierreux, je roule détendu, accompagné de mon épouse et d’un couple d’amis. Puis je me la joue un peu, en souvenir des autos cross que j’appréciais. Démarrage brutal, dérapage. Rigolade.
Le moteur ronfle ; les pneus crissent et nos rires fusent comme les pierres. Certaines – pas trop – atterrissent dans un champ voisin, clôturé. Rien de particulier : des amis qui animent une campagne assoupie. D’habitude, je sculpte les pierres. Aujourd’hui, je les fais voler. Petites ou grandes, j’entretiens avec elles d’excellentes relations.
Pourtant, cette fois, elles vont me trahir : semées dans ce champ, elles vont pousser en forme de fameux emmerdements…
Je lève enfin le pied. Un bonheur simple irradie nos visages.
Nous nous approchons d’un petit massif boisé. Au détour d’un talus broussailleux, nous apercevons un restaurant fermé. Un écriteau indique « À vendre ».
Intéressés, ou plutôt curieux, nous nous y arrêtons : visite superficielle et rêveuse de cet endroit idyllique. Des plans su

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