LES DISPARUS D ÉLY
85 pages
Français

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Description

Il semble que ce soit maintenant une tradition : cet automne, le milieu littéraire a été de nouveau secoué par le kidnapping de neuf auteurs. Au moment de leur libération, neuf jours plus tard, on a pu constater qu’ils avaient respecté les volontés d’un certain marquis d’Ély en écrivant chacun une nouvelle, toutes rassemblées dans ce recueil. Selon leur témoignage, l’aventure fut aussi intrigante qu’inspirante, mais eux seuls savent réellement ce qui s’est passé. Cependant, ils ont bien voulu dévoiler le thème qui a uni leur création : MORTELS.
STÉPHANIE BOULAY L’animal
SIMON BOULERICE Portrait-robot de ma furie
MARIE-EVE BOURASSA Le bal de la reine
JEAN-PAUL DAOUST Le petit salon espadon
JULIEN DESCHÊNES La colère du King
NATASHA KANAPÉ FONTAINE Sky dancer
ALEXANDRA GILBERT La loutre
JONATHAN HARNOIS Peter
PASCALE MONTPETIT Patate chaude

Informations

Publié par
Date de parution 23 septembre 2019
Nombre de lectures 3
EAN13 9782764438244
Langue Français
Poids de l'ouvrage 5 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0550€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Projet dirigé par Véronique Marcotte, directrice artistique et Stéphane Dompierre, directeur littéraire

Conception graphique et mise en pages : Nathalie Caron
Révision linguistique : Isabelle Pauzé
Illustration en couverture : Valaska
Conversion en ePub : Marylène Plante-Germain

Québec Amérique
7240, rue Saint-Hubert
Montréal (Québec) Canada H2R 2N1
Téléphone : 514 499-3000, télécopieur : 514 499-3010


Nous remercions Louis-Armand Bombardier et sa boîte de développement culturel L-A be (let artists be) d’avoir permis la réalisation de la résidence des Disparus d’Ély.
Nous reconnaissons l’aide financière du gouvernement du Canada.
Nous remercions le Conseil des arts du Canada de son soutien. We acknowledge the support of the Canada Council for the Arts.
Nous tenons également à remercier la SODEC pour son appui financier. Gouvernement du Québec – Programme de crédit d’impôt pour l’édition de livres – Gestion SODEC.


Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada

Titre : Les disparus d’Ély / sous la direction de Stéphane Dompierre.
Autres titres : Nouvelles de la rivière Noire. | Mortels.
Noms : Dompierre, Stéphane, éditeur intellectuel.
Description : Premier tome publié antérieurement sous le titre : Les nouvelles de la rivière Noire. 2018. | Sommaire incomplet : [1]. Perdus -- [2]. Mortels.
Identifiants : Canadiana 20190020644 | ISBN 9782764439128 (vol. 1) | ISBN 9782764438220 (vol. 2)
Vedettes-matière : RVM : Nouvelles québécoises—21 e siècle.
Classification : LCC PS8329.5.Q4 D57 2019 | CDD C843/.010806—dc23
ISBN 978-2-7644-3823-7 (PDF)
ISBN 978-2-7644-3824-4 (ePub)

Dépôt légal, Bibliothèque et Archives nationales du Québec, 2019
Dépôt légal, Bibliothèque et Archives du Canada, 2019

Tous droits de traduction, de reproduction et d’adaptation réservés

© Éditions Québec Amérique inc., 2019.
quebec-amerique.com



PRÉFACE
Je rêvais depuis longtemps de vivre une histoire prodigieuse, une histoire avec tant de détails saisissants que je ne serais pas obligée, plus tard, de la raconter en la magnifiant, comme je le fais systématiquement. C’est épuisant de sans cesse exagérer pour se rendre intéressant. Ce fantasme de n’avoir qu’à noter la simple réalité pour scier l’audience était bien présent. Chaque matin, je me disais : c’est aujourd’hui, c’est maintenant que je vais créer des souvenirs fabuleux à raconter, que j’épaterai la galerie, qu’on enviera ma chance d’avoir une vie si délirante.
Pourtant, la première expérience m’a obligée à rester silencieuse. J’étais tétanisée par ce que je venais de vivre, murée douze mois d’affilés, à ne pas vouloir en entendre parler, même par les collègues qui avaient vécu le traumatisme avec moi. De toute manière, pour des auteurs comme Patrick Senécal ou Ghislain Taschereau, ce qu’on avait subi était presque banal. Ils ont intégré cet aléa dans leur quotidien comme si de rien n’était. C’est lorsque j’ai revu Marie-Ève Bourassa, puis Alexandra Gilbert et Jonathan Harnois que j’ai eu envie d’en parler. Ceux-là avaient été perturbés tout autant que moi. Et puis beaucoup d’autres également.
Le 18 septembre 2017, à l’aube, une voiture brun bois de tilleul s’est garée en face de mon modeste appartement. Deux femmes bâties comme des pins blancs en sont sorties pour foncer chez moi. En une fraction de seconde, je me suis retrouvée loup au visage, mains ligotées. J’ai cru qu’on célébrait une seconde fois mon quarantième anniversaire, que je me dirigeais vers une journée festive avec champagne et fondues parmesan. Mais non. Les deux femmes m’ont enfermée dans le coffre de la voiture brun cœur d’artichaut et nous sommes parties.
Le problème, il est là. Cette histoire que je veux raconter depuis toujours avec tambours et trompettes, il m’est impossible de la transmettre. Parce que moi ainsi que les neuf auteurs qui se sont retrouvés au même endroit avons été victimes de chantage. Nos ravisseurs étaient bien renseignés. Si nous dévoilions ne serait-ce que le nom du responsable de ces disparitions, que vous devinerez peut-être, nous risquions tous de voir apparaître sur les réseaux sociaux ce petit secret que l’on se fabrique quand on est seuls le soir. Vous savez, cette chose que l’on désire ardemment garder pour nous parce qu’elle est un peu gênante, bénigne, mais… embarrassante ? Au risque de voir notre double vie étalée aux amateurs d’histoires piquantes, nous devons nous taire.
Lorsque la même voiture est arrivée l’année suivante, je savais à quoi m’attendre. Les costaudes avaient pris un peu d’âge en un an, mais elles étaient toujours aussi vigoureuses. Hors de question pour moi de résister. Là-bas, j’ai pris soin de partager mon expérience et d’avertir les nouvelles victimes qu’elles n’avaient qu’une chose à faire pour que tout se passe bien : écrire selon le thème suggéré par vous devinez qui. L’année d’avant, le chef des preneurs d’otages nous avait bien nargués avec le thème PERDUS. Cette année, il en remettait une couche avec le thème MORTELS.
Je ne sais pas si, en septembre prochain, je verrai débarquer ce même véhicule couleur havane. N’est-il pas ironique de se faire kidnapper chaque année à une date précise ? Si ça arrive, je serai docile et silencieuse, comme les fois précé dentes. Je tiens à ma réputation. Peut-être qu’un jour, lorsque tout ce manège cessera, je pourrai raconter ce qui se passe lors de ces huis clos. Mais pour le moment, tout ce que je peux dire c’est que depuis deux ans, neuf auteurs disparaissent durant neuf jours et reviennent avec neuf nouvelles.

Véronique Marcotte, disparue d’Ély


PORTRAIT-ROBOT DE MA FURIE
Simon Boulerice
Très tôt dans ma vie, je me suis mise à tisser des liens entre Sissy Spacek et moi.
Hormis notre rousseur commune et nos traits anguleux, la corrélation la plus manifeste entre elle et moi concerne Carrie . Dans mon film d’horreur préféré, vu à un âge indécent parce qu’il traînait au salon et qu’il semblait murmurer mon nom, Sissy se nomme Carrie White ; moi, je m’appelle Blanche Carrier.
Pourtant, et tout en jouant dans ses plates-bandes, je m’inscris fondamentalement en négatif de l’actrice américaine. Elle est petite ; je suis géante. Elle a du divin dans la voix quand elle chante ; moi, j’ai un chat en petite furie, pas dégriffé, qui s’occupe de mes cordes vocales. Elle est lumineuse, même au seuil de ses 70 ans ; je suis un crépuscule ambulant de 17 ans qui termine ses études secondaires dans quelques mois.
C’est mon père qui a nourri la mythologie spacekienne dans ma vie. Le jour de mes 12 ans, il m’a offert l’affiche de Carrie , le film que je regardais en boucle dans le salon. Je m’étais sentie près du personnage ; nous vivions nos premières menstruations au diapason. Cette affiche, il l’avait encadrée et fixée devant mon lit. Carrie White, l’élève ensanglantée et incandescente au milieu du feu, veillait sur moi comme une madone. Mieux : comme une mère que je n’ai pas eue.
Quand je broyais du noir, j’espérais qu’elle devienne malveillante avec moi. Je l’implorais : Carrie, s’il te plaît, utilise tes pouvoirs en faisant basculer ce meuble sur moi . Carrie, me ferais-tu le plaisir de perforer mon thorax avec cette tringle à rideau ? Carrie, déploie ta télékinésie et fais s’effondrer sur moi tous les étages de ce palace.
Ensevelis-moi.
Ensevelis-moi.
Ensevelis-moi.
Qu’est-ce qui ne va pas avec moi ? Je me le demande bien.
Je vis au sous-sol d’une maison aussi vaste que fascinante. Mon père, ex-joueur de baseball au lancer féroce, a une fixation pour le tournant des années 70 et 80. Grâce à un héritage indécent, il s’est amusé à concrétiser la moindre de ses petites lubies de décoration. Mon père : superbe drop-out d’un bac en design d’intérieur. Il n’est jamais à la maison. Il passe sa vie sur les routes pour dénicher des meubles vintage. Il parcourt le pays ; ses haltes ne sont que pour garnir son truck de babioles démodées, marchandées à coût modique dans d’obscures ventes de garage et autres vide-greniers dont lui seul a eu vent. Pendant ce temps, j’erre sans but au milieu de ses artefacts qui prolifèrent. Les objets qui m’entourent sont des plantes grimpantes. Sauf que tout le matériel absorbe mon oxygène.
Je m’asphyxie au centre du décor.
Tout dans notre maison inspire la fin des seventies : les rideaux de lamelles argentées, les machines à boules Playboy , les cendriers voluptueux, les lampes aux abat-jour à franges western.
Il y a plus : sur des pré

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