Utopique Atlantide , livre ebook

icon

147

pages

icon

Français

icon

Ebooks

2011

Écrit par

Publié par

icon jeton

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Lire un extrait
Lire un extrait

Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne En savoir plus

Découvre YouScribe et accède à tout notre catalogue !

Je m'inscris

Découvre YouScribe et accède à tout notre catalogue !

Je m'inscris
icon

147

pages

icon

Français

icon

Ebooks

2011

icon jeton

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Lire un extrait
Lire un extrait

Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne En savoir plus

Karine Leblanc, étudiante en langues étrangères, se retrouve propulsée, bien malgré elle, sur l'île mythique d'Atlantide alors que celle-ci est en pleine perdition. Après des débuts chaotiques dus autant à son nouvel environnement qu'à une parfaite incompréhension des évènements qui l'y ont amenée, cette jeune femme sera finalement convaincue de la nécessité de sa présence en ce lieu étrange et aura pour seul objectif de sauver ce continent ainsi que ses habitants, parfois hostiles, dans l'unique but de pouvoir enfin rentrer chez elle. Mais rien n'est jamais certain et de nombreux obstacles se dressent sur sa route... Entre la présence de bêtes étranges et la peur irraisonnée des Atlantes, Karine finira par comprendre que, quelle que soit l'issue de son voyage, jamais elle ne pourra reprendre son ancienne vie....


Voir icon arrow

Publié par

Date de parution

19 juillet 2011

EAN13

9782917089569

Langue

Français

Poids de l'ouvrage

2 Mo

cover.jpg

 Adeline Neetesonne

 

 

 

Utopique Atlantide

 

 

 

LES EDITIONS SHARON KENA 

 

 

 

© Les Editions Sharon Kena. 2011. 

 

 

 

 

À ma famille, à mes proches

et à tous ceux qui m’ont soutenue.

 

 

 

 

                                          L’Atlantide est utopique,

                                          Si vous trouvez cela cynique,

                                          C’est que vous savez la vérité

                                          Sur sa soudaine obscurité.

 

                                          Toutes nos craintes sont fondées,

                                          Vous pouvez donc abandonner

                                          Tous vos espoirs éphémères ;

                                          La vie est sombre et amère.

 

                                          Notre futur est incertain

                                          Et si notre monde parvint

                                          À survivre à l’humanité,

                                          Il aura tout de même changé.

 

                                          Méfiez-vous des apparences,

                                          Ne croyez plus en l’innocence,

                                          Nous avons définitivement

                                          Perdu nos belles âmes d’enfant.

 

 

 

 

Table des matières

 

 

 

 

Chapitre 1

Chapitre 2

Chapitre 3

Chapitre 4

Chapitre 5

Chapitre 6

Chapitre 7

Chapitre 8

Chapitre 9

Chapitre 10

Chapitre 11

Chapitre 12

Chapitre 13

Chapitre 14

Chapitre 15

Chapitre 16

Chapitre 17

Chapitre 18

Chapitre 19

Chapitre 20

Chapitre 21

Chapitre 22

Épilogue

 

 

 

 

1

 

 

 

Aussi loin qu’elle s’en souvienne, Karine avait toujours vu ses parents travailler dur. Le résultat était visible à l’œil nu. Ils possédaient une grande propriété, à quelques mètres de l’océan, et n’avaient jamais manqué de rien. Logiquement, et même si elle avait parfois souffert de l’absence de ses parents et, plus particulièrement de son père, la jeune fille avait pris exemple sur eux et avait toujours donné le meilleur d’elle-même à l’école.

Toutefois, arrivée à l’adolescence, elle avait rapidement compris qu’il n’était pas aisé de combiner une vie professionnelle riche et prospère avec une famille heureuse et aimante. En effet, Karine était souvent seule et avait dû apprendre à se débrouiller dès son plus jeune âge. Face à ce dilemme, elle avait pris conscience qu’elle devrait un jour faire un choix. Mais, pour le moment, tout ce qui lui importait était sa réussite universitaire.

Elle aurait bien le temps, plus tard, de s’inquiéter d’une éventuelle famille. Après tout, elle n’avait jamais été très douée avec les enfants.

Elle préférait de loin discuter avec ses quelques amis, peu nombreux, mais toujours fidèles, prêts à l’aider et à la soutenir. Karine avait toujours été une solitaire, peu encline à faire la fête tous les soirs, comme la plupart des autres étudiants. Elle s’était toujours contentée d’une poignée d’amis pour l’entourer, des amis qui lui ressemblaient et élevaient le travail au rang d’objectif, et non de moyen.

Ses journées étaient donc studieuses et monotones. Elle ne se préoccupait plus guère de la vie de ses parents, qu’elle se contentait de croiser, la plupart du temps. Son existence se divisait entre l’effervescence de l’université et la sérénité douce et chaleureuse de sa chambre. Le reste n’était plus que détail.

Son quotidien était parfaitement huilé, à tel point que le moindre grain de sable dans le rouage la terrifiait.

Karine avait passé la moitié de la nuit à réviser son italien pour son prochain partiel. Elle était en première année à l’université de Bordeaux, à quelques kilomètres de chez elle. La jeune femme avait de grandes capacités, mais avait tendance à être un peu trop exigeante envers elle-même. Du coup, elle travaillait souvent très tard et en faisait souvent plus que ce que ses professeurs lui demandaient. Elle voulait être la meilleure en tout ce qu’elle faisait.

–    Karine ?

La jeune femme, âgée de tout juste dix-huit ans, se leva en grognant. Il était dix heures du matin, mais on était samedi et elle avait bien l’intention de profiter de son week-end pour se reposer un peu, dans l’atmosphère sereine de sa chambre impeccablement rangée.

–    Qu’est-ce que tu veux, papa ? hurla-t-elle en restant sur le seuil de sa porte.

–    Tu peux venir, s’il te plait. Il faut que je te parle.

Karine s’exécuta en traînant des pieds. Elle était épuisée et aurait bien aimé dormir davantage.

Lorsque la jeune femme entra dans le salon richement meublé où l’attendaient ses parents, assis côte à côte sur le canapé en cuir brun, elle eut une certaine appréhension. Ils étaient rarement ainsi. Généralement, ils vivaient chacun de l’autre côté, comme deux colocataires indifférents au sort de l’autre. Elle s’installa face à eux, dans un fauteuil assorti au reste du salon, et leur lança un regard interrogateur qui s’avéra en fait trahir son anxiété.

–    Nous avons une surprise pour toi, commença la mère de Karine.

–    Oui, reprit le père. Nous avons constaté que tu passais beaucoup de temps à travailler tes cours depuis que tu es entrée à l’université. Je sais aussi que tu as toujours pris l’école très au sérieux et nous avons été très fiers de toi lorsque tu as obtenu ton bac avec la mention très bien. Seulement, nous trouvons que tu ne t’amuses pas beaucoup, que tu ne profites pas de ta jeunesse… Aussi, afin de te détendre tout en continuant à apprendre les langues, ta mère et moi avons pensé que tu pourrais passer les vacances de février en Italie.

–    Quoi ? s’exclama Karine. Vous m’offrez des vacances ?

La jeune femme n’en revenait pas. Ses parents ne partaient eux-mêmes jamais en voyage. Ils étaient tout aussi obsédés par leur travail qu’elle.

–    En effet, ma chérie, reprit son père. Nous t’avons pris un billet aller-retour pour Rome et réservé une chambre d’hôtel pour quinze jours. Cela te fera du bien de changer d’air. Tu travailles trop et tu es toute pâle ! Et puis, il faudra que tu parles italien, là-bas. Cela te permettra d’améliorer ton accent… Alors, tu es d’accord ?

Un voyage gratuit, tous frais payés ! Bien sûr qu’elle était d’accord ! Quinze jours loin de ses parents et de la pression de l’université ! Quinze jours d’indépendance totale ! De quoi pouvait-elle rêver de mieux ?

Karine ne prenait jamais de vacances que ce soit avec ses amis ou avec sa famille, préférant généralement rester seule, chez elle mais, là, c’était différent. Elle serait complètement coupée de son petit monde. Elle n’aurait aucune règle à respecter et pourrait donc pleinement profiter de son séjour, sans compter que son père avait raison, elle reviendrait avec un parfait accent italien. Pour une fois, elle pourrait vraiment décompresser et avait bien l’intention d’en profiter un maximum.

Karine attendrait donc le jour du départ avec impatience. Elle remercia et embrassa chaleureusement ses parents puis téléphona aussitôt à Julie, sa meilleure amie, pour lui annoncer la nouvelle. Elle s’avéra aussi excitée qu’elle par ce cadeau impromptu. Elles discutèrent pendant des heures, projetant des fêtes et des sorties imaginaires qui emplirent Karine d’impatience.

 

Les trois semaines séparant la jeune femme de son voyage lui parurent les plus longues de sa vie. Tous ses amis étaient ravis et envieux de l’opportunité de la jeune femme. Ses bagages furent prêts trois jours à l’avance et elle tournait en rond dans sa chambre, impatiente comme jamais. Ses parents étaient contents de la réaction de leur fille et anticipaient déjà son retour enjoué. Sa mère lui offrit un appareil photo numérique en lui demandant de prendre tout ce que la jeune femme pouvait en photo, à croire qu’elle aussi aurait eu envie de partir. C’était d’ailleurs sûrement le cas. Karine pensait que sa mère devait parfois se sentir un peu seule et coincée entre sa famille et son travail d’infirmière qui lui laissait peu de temps pour les loisirs.

Quant à son père, Karine trouvait qu’il manquait souvent de compréhension vis-à-vis de son épouse. Il était toujours absent à cause de son travail. Il était responsable des ventes dans une grosse entreprise de fabrication de matériels informatiques. Il passait le plus clair de son temps sur les routes, à la recherche de nouveaux clients ou négociant des contrats avec les autres.

Mais Karine savait bien que ce n’était pas la seule raison de son absence. Son père avait de nombreuses maîtresses. Tout le monde le savait. Mais personne ne disait jamais rien. D’ailleurs, la jeune femme ne comprenait pas que sa mère se laisse piétiner de la sorte, mais que pouvait-elle y faire ? Elle n’avait pas à interférer dans la vie privée de ses parents. Pourtant, la souffrance de sa mère ne la laissait pas indifférente. De même, elle aimait son père et n’avait pas envie de lui gâcher la vie en provoquant un esclandre à propos de ses maîtresses qui, soit dit en passant, avaient le bon goût de rester discrètes.

Et puis, dans quelques jours, elle serait dans l’avion, en direction de Rome. Elle allait enfin pouvoir souffler. Plus de pression d’aucune sorte ! La liberté !

Dans sa chambre aux murs peints en mauve, assise sur son lit au pied duquel reposaient ses deux sacs de voyage en toile, Karine s’imaginait déjà visitant les musées et se baladant dans la capitale italienne. Ce séjour serait parfait. Elle n’en avait aucun doute. D’ailleurs, comment pourrait-il en être autrement ? Elle avait déjà tout prévu et tout anticipé afin qu’il demeure inoubliable.

 

La mère de Karine regardait la jeune femme s’affairer dans sa chambre depuis l’annonce de son prochain départ. Elle était ravie de la réaction de Karine pour laquelle elle s’inquiétait souvent. En effet, elle trouvait son enfant souvent trop sérieuse et trop mûre pour son âge. Elle avait visiblement besoin de décompresser, loin de son quotidien. C’était pour cette raison que la mère de Karine avait proposé à son époux cette idée de cadeau, certes onéreuse, mais qui ne pouvait être que profitable à leur fille unique.

Cependant, elle se rendait compte à présent que l’absence de Karine risquait de lui peser, car, même si elle aimait énormément son travail, sa vie de couple était un véritable désastre et elle allait se retrouver toute seule, dans cette grande maison toujours impeccable, aseptisée, froide. Les quinze jours qui s’annonçaient risquaient de s’avérer beaucoup plus longs et déprimants que prévu pour elle et cette perspective lui arracha quelques larmes de dépit.

D’un geste courroucé, elle essuya ses joues du revers de la main et monta dans la chambre de sa fille afin de l’aider dans ses derniers préparatifs et de profiter de ses derniers jours de présence avant son départ. 

 

 

 

2

 

 

 

Le ciel était couvert, mais l’air était plutôt doux pour un mois de février. Karine faisait patiemment la queue devant le guichet des musées du Vatican.

Elle s’était installée la veille, dans un magnifique hôtel avec piscine en plein centre-ville, et avait eu envie de visiter toutes les merveilles de Rome. Sa première journée avait été plutôt calme. Elle avait pleinement profité de la piscine couverte et avait flâné jusqu’au soir. Elle était particulièrement épuisée du voyage. Il faut dire que c’était la première fois qu’elle prenait l’avion et une crainte sourde l’avait envahie pendant tout le trajet qui s’était pourtant très bien déroulé.

Après avoir demandé conseil au réceptionniste – très craquant, d’ailleurs – elle avait eu envie de visiter les musées mondialement célèbres du Vatican. Karine avait donc pris le bus de bonne heure et descendit juste devant l’entrée.

Et demain, elle ferait du shopping avec l’argent de ses parents. Eh oui ! Son père lui avait confié sa carte bleue ! Elle avait beau ne pas être dépensière d’habitude, cette fois, elle allait sacrément en profiter !

La file d’attente s’amenuisait pendant qu’elle rêvassait. C’était enfin son tour. Elle demanda son billet dans un italien presque parfait, tendit les treize euros que lui demandait la femme à l’accueil puis entama directement la visite. Il était déjà près de onze heures et elle espérait ne pas sortir trop tard. Elle passerait donc rapidement sur ce qui l’intéressait le moins. Au pire, elle pourrait déjeuner sur place.

Karine commença par le musée grégorien égyptien, puis poursuivit sagement en suivant ses envies et ses coups de cœur. Elle aimait pouvoir flâner ainsi au milieu d’œuvres d’art. Pourtant, la jeune femme n’avait rien d’une artiste. Son truc, c’était plutôt les langues. Mais elle s’était toujours sentie bien dans les expositions et musées. Tout y était tellement calme et reposant !

Elle erra ainsi pendant plusieurs heures, passant d’une salle à l’autre. Sa visite s’avéra plus longue que prévu. Les couloirs étaient immenses et les salles, nombreuses.

Karine, épuisée et les pieds en compote, ne sortit du musée qu’à trois heures de l’après-midi. Elle prit un mini-sandwich qu’elle avala en quelques bouchées, assise sur le banc de l’arrêt d’autobus.

Lorsqu’elle fut de nouveau dans sa chambre d’hôtel, elle retira vivement ses chaussures, s’allongea lourdement sur le lit et resta ainsi jusqu’à ce que le téléphone la tirât de ses rêveries, vers quatre heures et demie de l’après-midi.

–    Allô ? répondit la jeune femme d’une voix pâteuse, à moitié endormie.

–    Ma chérie ! Comment vas-tu ?

–    Maman ?

–    Oui. C’est moi. Qu’est-ce qui se passe ? Ça n’a pas l’air d’aller…

–    Si, tout va bien, maman, reprit Karine d’une voix plus assurée. Juste un peu de fatigue. Ne t’inquiète pas.

–    Ah oui. C’est sûrement à cause du voyage. Les trajets fatiguent toujours un peu. Est-ce que tu as quand même pu profiter un peu de ta journée ?

–    Oui, bien sûr. Je suis même allée au musée ce matin.

–    Bien. Écoute, je vais te laisser te reposer et je te rappellerai plus tard. D’accord ?

Karine acquiesça avant de raccrocher. En fait, elle se sentait beaucoup mieux. Ses pieds ne lui faisaient plus mal du tout et, après une bonne douche, tout serait parfait. Elle se faufila donc sous le jet d’eau brûlant, se frictionna activement puis ressortit en peignoir de la salle d’eau.

Maintenant, elle avait une faim de loup. Elle remit ses vêtements qui traînaient, épars, dans la chambre et descendit dans le hall de l’hôtel. Dans un italien parfait, elle demanda au réceptionniste où elle pouvait se restaurer à cette heure-là. On lui indiqua une sandwicherie à quelques pas de l’hôtel.

La jeune femme profita de cette sortie pour flâner dans les rues de Rome. Elle dévora un monstrueux sandwich en chemin, profitant ainsi de la douce chaleur de ce magnifique après-midi.

Elle fit quelques emplettes : des cartes postales pour les amis, des petits cadeaux pour ses parents et des vêtements pour elle.

Ce fut donc les bras remplis de paquets qu’elle retourna dans sa chambre. Là, elle sortit la jupe noire et le top crème qu’elle venait d’acheter, les enfila puis, admira le résultat dans le miroir en pied. Parfait. Ce n’était ni trop sexy, ni trop sage. Karine glissa ses cheveux d’un noir de jais derrière ses oreilles, empoigna son sac et fila directement dehors. Elle était en vacances alors, elle avait bien l’intention de faire la fête !

 

La jeune femme rentra à l’hôtel vers cinq heures du matin. Elle était épuisée et avait de nouveau mal aux pieds, mais avait passé une excellente soirée. Elle s’était amusée comme une petite folle. Rien de mieux qu’une nuit en discothèque pour oublier tous ses soucis ! Elle avait fait connaissance avec un tas de gens et avait trouvé les italiens beaucoup moins dragueurs qu’elle ne l’aurait cru. Comme quoi, il ne faut jamais se fier à des préjugés et stéréotypes sans fondement !

Elle jeta ses vêtements au pied de son lit, tout en songeant que ses parents seraient surpris de la voir ainsi. D’ailleurs, elle-même ne se reconnaissait plus. Il fallait croire que ce séjour faisait ressortir en elle tout ce qu’elle s’était sagement obligée à rester cachée, depuis son enfance. Elle se sentait enfin comme une de ses étudiantes banales de son université et en était follement heureuse.

Karine enfila son pyjama et s’allongea dans son lit. Il faisait frais à cette heure et la douceur qui régnait dans sa chambre la fit s’endormir rapidement.

 

Karine se trouvait dans une clairière verdoyante, entourée d’une forêt épaisse et luxuriante. Des piaillements enthousiastes d’oiseaux lui enchantaient les oreilles. Au milieu de cette mélodie féerique, il faisait incroyablement doux et elle se sentait bien. Une légère brise caressait son visage et ses bras nus. En baissant les yeux, elle s’aperçut qu’elle portait encore le top qu’elle avait mis la veille. Il lui allait vraiment à ravir !

La jeune femme fit quelques pas sur le tapis d’herbes fraîchement coupées puis inspira profondément pour en humer le parfum si subtil et agréable.

–    Karine ! Tu dois les sauver !

Cette voix rauque et pourtant claire la sortit de son si court moment de bien-être.

Karine se retourna aussitôt et se retrouva nez à nez avec un homme mystérieux. Il devait avoir une cinquantaine d’années, portait une courte barbe grisonnante et son visage reflétait une sérénité qui détonait avec le ton inquiet de sa voix.

–    Karine… reprit-il, coupant court aux pensées vagabondes de la jeune femme.

–    Qui êtes-vous ? fit-elle, soudain méfiante.

–    Platon, se contenta-t-il de répondre.

Karine haussa les sourcils, sceptiques, puis observa les alentours. Ils étaient seuls et son interlocuteur ne paraissait pas menaçant. Par ailleurs, il semblait parfaitement évident qu’elle était en train de rêver alors, elle ne risquait rien.

–    Et qui dois-je sauver ? demanda-t-elle d’un ton quelque peu hésitant.

–    Dans l’espace d’un seul jour et d’une seule nuit, néfastes, tout ce qu’ils ont de combattant sera englouti d’un seul coup dans la terre et l’île Atlantide, s’abîmant dans la mer, disparaîtra de même…

Un silence pesant s’installa et Karine tentant de comprendre le message de son interlocuteur en fronçant les sourcils.

–    L’Atlantide est un mythe, fit-elle enfin. Et elle a déjà sombré sous les eaux. Si ma mémoire est bonne, c’est d’ailleurs vous-même qui l’avez écrit…

–    Oui. Sur cette terre, l’Atlantide n’est plus et le déclin des esprits et de la sagesse a commencé. Tout périclite. Mais, ailleurs, l’utopie existe toujours et ne doit pas prendre fin ou la totalité des mondes s’écroulera comme un château de cartes dans une folie meurtrière qui anéantira tout. Tu dois sauver cette utopie. Tu dois sauver les derniers Atlantes. Ce monde ne croit plus depuis longtemps à cette île mythique qui a pourtant existé, ici ou ailleurs. Plusieurs noms lui ont été donnés : Éden, Avalon, Cerné, Atlantide. Le péril est en marche.

–    Je ne comprends pas, fit Karine après un silence. Qu’attendez-vous de moi ? Que dois-je faire exactement ?

–    Réveillez l’Atlantide. Sauvez les Atlantes. Préservez l’utopie…

Karine s’apprêtait à demander comment elle pouvait s’y prendre lorsque Platon disparut subitement sous ses yeux ébahis.

Elle regarda autour d’elle et appela, mais elle était seule. Toute seule. La splendide clairière verdoyante commença à devenir noire, comme brûlée. La douce odeur de l’herbe coupée se transforma en une puanteur sans nom. La forêt se calcina avec une rapidité inconcevable pour ne devenir qu’un tas de bois sombre, semblable à du charbon. Le ciel s’assombrit et prit une teinte rouge foncé. Une épaisse fumée rousse envahit l’air et la jeune femme commençait à étouffer…

 

 

 

3

 

 

 

Karine se réveilla en sursaut, inhalant instinctivement une grande bouffée d’air. Elle avait bien cru que sa dernière heure était arrivée. Mais tout ceci n’était finalement qu’un cauchemar.

La jeune femme secoua la tête afin de recouvrer ses esprits et jeta un œil sur sa montre : neuf heures trente. Il n’était donc pas trop tard pour profiter de la matinée. Elle se dirigea aussitôt vers la salle de bain carrelée de bleu et s’aspergea le visage d’eau froide. Ensuite, elle s’inspecta dans le miroir. De longues traînées noires, semblables à de la suie, couvraient ses joues et son front. Comment était-ce possible ?

Non, cela n’avait rien à voir avec son cauchemar. Elle s’était juste couchée sans se démaquiller. Elle avait seulement dû mettre beaucoup plus d’eye-liner que d’habitude, même si elle n’en conservait pas le souvenir.

La jeune femme se doucha donc pour ôter tout ce maquillage – cette suie ? – de son visage puis feuilleta les dépliants touristiques fournis par l’hôtel et restés jusque-là sur la table de chevet en bois verni de sa chambre. Églises, musées et fontaines étaient à l’honneur. Quelques autres visites telles que le château Saint-Ange, les catacombes ou le Colisée étaient également proposées. Cela étant, rien ne semblait vraiment intéresser Karine. En réalité, elle était toujours perturbée par son cauchemar. Tout y paraissait tellement vrai, cela en était particulièrement angoissant ! Toutefois, elle avait la chance inouïe de pouvoir profiter de deux semaines de vacances loin de son quotidien affligeant et ne se laisserait pas déstabiliser par un simple cauchemar, aussi réaliste soit-il !

La jeune femme remit donc les dépliants à leur place d’origine et décida de se promener dans la ville, sans objectif particulier. Après tout, elle trouverait peut-être des visites plus pittoresques à faire en dehors des sentiers battus !

Karine sortit donc de sa chambre et vagabonda au gré de ses envies. Elle visita une exposition d’art moderne, mangea dans un mignon petit restaurant puis se promena dans un parc incroyablement vert et fleuri pour la saison. Elle y observa des enfants s’ébattre joyeusement, sous l’œil protecteur de leurs parents. Elle ne se souvenait pas avoir déjà été dans un endroit pareil, dans son enfance. Mais sa famille n’avait jamais été comme les autres et Karine s’était toujours sentie très seule, pour ne pas dire abandonnée. Elle profita donc de ce sentiment de joyeuse innocence infantile qui régnait dans le parc, tentant de se l’approprier, pour quelques merveilleuses et trop courtes minutes.

Puis, la jeune femme finit son errance dans une splendide bibliothèque ancienne tenue par un vieil homme tout à fait charmant. Les étagères en bois sculpté et les livres poussiéreux qui les recouvraient donnaient un cachet tout à fait surprenant à la boutique et le bibliothécaire y était parfaitement à sa place, avec sa barbe blanche, ses lunettes en demi-lune et son gilet démodé.

Ils discutèrent un instant de la pluie et du beau temps. Le vieil homme expliqua à Karine à quel point il était difficile aujourd’hui d’intéresser les jeunes générations à la littérature. Son affaire était de moins en moins florissante et les visiteurs se faisaient rares. Il était donc ravi d’avoir un peu de visite de temps à autre. Cependant, face à la splendeur de la boutique, la jeune femme avait du mal à croire aux difficultés financières du vieil homme.

Au bout d’un moment, toujours tracassée par son cauchemar, Karine ne put s’empêcher de demander au bibliothécaire s’il possédait le livre de Platon dans lequel était citée la disparition de l’Atlantide.

–    On aime les classiques, répondit le vieil homme. En réalité, ma chère, Platon a évoqué cette île mythique dans deux de ses œuvres : « Le Timée » et « Le Critias ». Je dois bien avoir un exemplaire de chaque quelque part, ajouta-t-il en se dirigeant au fond du magasin. Cependant, il faut savoir que « Le Critias » est un récit inachevé.

Tout en parlant encore et encore du sujet somme toute passionnant des écrits de Platon, le bibliothécaire finit par trouver les deux livres en question, dans un carton posé à même le sol. Ils étaient couverts de poussière et il les nettoya avec sa manche avant de les présenter à la jeune femme.

–    Tenez, dit-il. Je vous les offre. C’est tellement gentil à vous de m’avoir tenu compagnie.

Karine balbutia quelques remerciements et partit avec ses deux livres. L’esprit quelque peu confus, elle retourna à l’hôtel. En fait, elle avait hâte de savoir avec précision ce que contenaient ces ouvrages. Elle entama donc sa lecture à peine la porte de sa chambre fermée.

Elle fut quelque peu déçue en constatant que, dans les deux livres, Platon ne consacrait que quelques lignes à l’histoire de l’Atlantide.

Toutefois, elle fut éberluée lorsqu’elle s’aperçut que les termes employés dans « Le Timée » étaient exactement les mêmes que ceux utilisés par son interlocuteur dans son cauchemar. Seul le temps des verbes changeait. Dans son rêve, il évoquait un avenir proche alors que dans le livre, il écrivait au passé. Que cela signifiait-il ? Comment pouvait-elle connaître avec tellement de précision un livre qu’elle n’avait jamais ouvert ?

Mais, après tout, peut-être en avait-elle lu des passages au lycée, en cours de philosophie ? Ce ne pouvait être que ça ! Elle ne se rappelait pas clairement l’avoir fait, mais son subconscient devait en avoir gardé la trace, quelque part…

Karine se contenta de cette explication approximative, pour ne pas dire improbable. Elle se rappelait avec une extrême précision du programme de terminal et Platon n’en faisait pas partie. Toutefois, elle laissa cela de côté et rangea les livres dans le tiroir de sa table de chevet avant de redescendre dans le hall de l’hôtel. Elle avait faim et se mélanger à la foule lui changerait les idées.

–    Bonsoir, lui lança le réceptionniste, accoudé au comptoir lustré de l’accueil. Vous êtes passée tellement vite tout à l’heure et vous sembliez si préoccupée que je n’ai pas eu le temps de vous interpeller. Vous avez un message de votre mère. Elle demande à ce que vous la rappeliez dès que possible.

–    Très bien, répondit Karine. Je vous remercie.

Elle avait été tellement accaparée par ce cauchemar stupide et obsédant qu’elle en avait complètement oublié ses parents. Sa mère devait sûrement s’inquiéter suite à son appel de la veille. Il fallait absolument qu’elle la recontacte ce soir.

Elle remonta précipitamment dans sa chambre et se jeta littéralement sur le téléphone. Elle composa de mémoire le numéro de ses parents et n’eut pas à attendre longtemps avant que sa mère ne décrochât. Visiblement, elle attendait auprès du téléphone. Karine fit de son mieux pour prendre une voix calme et posée malgré sa course précipitée à travers l’hôtel.

–    Bonjour, maman. Désolée de ne pas t’avoir rappelée avant.

–    C’n’est pas grave, ma chérie. Je comprends. Seulement… tu me connais… je m’inquiète pour un rien !

–    Il n’y a aucune raison, maman. Tout va bien. Je m’amuse comme une folle !

–    Tant mieux… As-tu visité le Colisée ?

–    Pas encore, répondit Karine. Mais j’irai demain.

Le Colisée ! Comment avait-elle pu ne pas y penser plus tôt ? Elle était tellement obnubilée par l’étrangeté de son rêve qu’elle en omettait l’essentiel ! Il fallait qu’elle se reprenne au plus vite si elle ne voulait pas complètement gâcher ses vacances.

La conversation s’acheva sur un ton léger. À peine eut-elle raccroché le téléphone que Karine redescendit dans le hall, bien décidée à dîner et terminer la soirée tranquillement. Elle devait mettre un terme à cette folie rocambolesque.

En passant devant l’accueil de l’hôtel, elle fit un petit signe au réceptionniste pour lui demander si une table était libre et engagea carrément la conversation, flirtant ouvertement avec ce charmant jeune homme qui l’invita à sortir le soir même.

Voilà ! Ça, c’étaient de vraies vacances !

Évidemment, Karine accepta l’invitation et passa une excellente soirée....

Voir icon more
Alternate Text