Le Temps comme la rivière

Pierre Bonmariage

Description

1943, le monde est en guerre. La campagne wallonne reste imperturbable. Si la vie de Pierre bascule, c’est pour une tout autre raison: il rentre à l’internat et devient pensionnaire dans un illustre séminaire. Il a treize ans et soif d’apprendre. Mais il ne peut admettre tous les éléments d’une éducation religieuse qui voit plus souvent les étudiants à l’église qu’au terrain de foot, qui craint l’évolution normale de la sexualité des étudiants, qui ne permet pas de poser les vrais problèmes qui l’occupent. Si Pierre ne rencontrera pas dans ce pensionnat l’aide suffisante pour mener à bien son adolescence, il réussira malgré tout, grâce à l’énergie que lui confèrent sa famille, son village, ou encore sa relation intime avec la nature et la paysannerie… En puisant avec nostalgie dans son enfance et son adolescence, Pierre Bonmariage ressuscite la fantaisie et l’insouciance de la jeunesse, tout en réglant ses comptes avec l’éducation catholique. Non sans humour, il livre une chronique légère mais critique d’une époque à part.

Sujets

• Sexualité

Informations

• Publié par: publibook
• Nombre de lectures: 68
• EAN13: 9782748362848
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 2 Mo

Extrait

Le Temps comme la rivière

Du même auteur

On n’enferme pas le vent, éditions Publibook, 2009

Pierre Bonmariage Le Temps comme la rivière Mémoires d’un adolescent

Publibook

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Reste encor’ cette nuit. Dors auprès de moi Sur ce feuillage frais. Nous aurons de bons fruits, Fromage en abondance et des tendres châtaignes. Vois, ou lointain, déjà les toits des fermes fument Et le sombre des monts grandit jusqu’à nous. Texte de Virgile. Traduction de Paul Valéry

1 Pour un gars bien planté sur ses deux jambes, le nez au vent, les joues en feu, le souffle puissant, le temps consa- cré au jeu paraît étonnamment court. Il est trop long pour l’écolier que le vol d’une hirondelle attire plus que le de- voir de conjugaisons. Trois heures de course folle dans la nature à la recher- che de nouvelles aventures, au dépistage de traces inconnues, à la quête de personnages insolites au gré de l’enfant, tout ce temps ne dure guère. Toutes ces liturgies nouvelles que tout enfant veut édifier pour construire son propre culte, ces liturgies ne durent guère plus que l’instant qu’il lui faut pour reprendre son souffle. L’eau claire de la rivière que je touche du dos de la main, cette eau si fraîche, je ne l’effleurerai pas deux fois. Cette eau unique est passée et ne me caressera plus jamais la main. Le présent est ce moment furtif d’exception. Il est indomptable si ce n’est que dans le passé, on eut pu pré- voir une conduite à réaliser tel jour à telle heure. Combien de contingences peuvent provoquer l’échec de cette conduite, sa perte dans l’espace-temps ? Le temps a la valeur qu’on souhaite lui accorder. Il faut aussi considé- rer le temps et la liberté dans ce que l’un et l’autre ont de commun. Le temps et la liberté constituent l’essence même de l’engagement de chaque être à la recherche de son bon- heur.

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Dans le monde qui sera le mien demain, quelle part d’autonomie m’accorderai-je avec le temps dont je dispo- serai ? Quelle part de temps pourrais-je garder pour moi seul ? Pourrais-je le prendre à ma façon, le manipuler, le cajoler, le rejeter. ? Pourrais-je le transformer comme on façonne une pâte molle ? Ou lui suffira-t-il de me caresser la main et ensuite de disparaître. Le temps fugace, le passé sans retour, le présent qu’on ne peut retenir, intouchable, le présent maniable quelques fractions de seconde, le futur incertain, dubitatif, indécis. Il n’est aisé pour personne de dominer le temps. Il suf- fit, sans doute, de ne pas négliger les leçons du passé, d’en tenir compte pour préparer l’avenir, nous plier à toutes ses mesures, jour, année, heure, siècle, centenaire, millénaire. Il nous suffit, c’est une tâche ardue, de combler ces es- paces temps par nos souvenirs, par la commémoration de personnes et de faits qui ont écrit les pages du temps. Jusqu’à présent, j’avais pris du bon temps lorsqu’il m’en venait l’envie. Peu de contraintes m’étaient impo- sées, quelques-unes, sans doute, qui ne me pressaient guère parce qu’elles étaient répétitives, donc prévisibles. Pour demain, je ne me faisais aucune illusion, mes aînés m’avaient averti, ayant emprunté avant moi cette voie à sens unique, des blocages qui allaient entraver ma quête de liberté. Le temps, celui de l’horloge, le temps physique défile seconde après seconde, imperturbablement. Nous ne pou- vons ni le maîtriser, ni l’arranger à notre guise. Si le moment que nous vivons est agréable, nous ne le prolon- gerons pas à notre gré, nous ne pourrons le renouveler. Cette perspective dans le temps du futur, me déplaît. J’imagine les heurs et les malheurs qui se bousculeront au portail de cette nouvelle existence. Qu’y faire ?

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