Les représentations de l oral chez Lagarce
171 pages
Français

Les représentations de l'oral chez Lagarce , livre ebook

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171 pages
Français

Description

L'ouvrage interroge d'un point de vue strictement linguistique le texte théâtral de Jean Luc Lagarce "Juste la fin du monde", et plus précisément à travers les modalités de la représentation de l'oral qu'il construit tant sur le plan énonciatif que typographique et syntaxique. Si la langue ici montrée emprunte à l'oral ordinaire des formes linguistiques qui rendent saillante la discontinuité du flux de paroles spontané, dans le même temps, elle exhibe également la continuité du fil du discours qui se voit toujours relancé.

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Date de parution 04 mai 2012
Nombre de lectures 48
EAN13 9782296489738
Langue Français

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Extrait

SCIENCES DU LANGAGECarrefour des études actuelles plus générales sur la langue
CARREFOURS ET POINTS DE VUEorale, le texte de Lagarce est un lieu d’accueil des plus
provocateurs pour débattre des différents points de vue
sur les représentations de la langue orale dans le texte
littéraire. L’ouvrage interroge, d’un point de vue strictement
linguistique, le texte théâtral de Lagarce Juste la fin du
monde, dans ses spécificités de texte littéraire destiné à
« faire oral », et plus précisément à travers les modalités
de la représentation de l’oral qu’il construit tant sur le plan
énonciatif (chapitre 1) que typographique (chapitre 2) et
syntaxique (chapitres 3 à 5). Si la langue ici montrée emprunte
à l’oral ordinaire des formes linguistiques qui rendent
sailELISABETH RICHARD lante la discontinuité du flux de paroles spontané, dans le
même temps, elle exhibe également la continuité du fil du ET CLAIRE DOQUET (DIR.)
discours qui se voit toujours, d’une façon ou d’une autre,
rattrapé, relancé. LES REPRÉSENTATIONS
DE L’ORAL
CHEZ LAGARCE
CONTINUITÉ,
Élisabeth Richard est Maître de Conférences en linguistique française à
l’Université Rennes 2. Elle étudie les spécificités syntaxiques de la langue DISCONTINUITÉ, REPRISE
orale, notamment les phénomènes de répétition, de reformulation et de
parenthèses.
Claire Doquet est Professeur en Sciences du langage à l’Université
Paris 3-Sorbonne Nouvelle. Linguiste de l’écrit, elle travaille sur l’écriture
dans ses dimensions spatiale et temporelle, notamment la distinction entre
énonciation écrite et énonciation orale que permet l’approche génétique
des textes.
SCIENCES DU LANGAGE
CARREFOURS ET POINTS DE VUE
9 7 8 - 2 - 8 0 6 1 - 0 0 5 6 - 6
WWW.EDITIONS-ACADEMIA.BE
ELISABETH RICHARD
LES REPRÉSENTATIONS DE L’ORAL CHEZ LAGARCE
ET CLAIRE DOQUET (DIR.)Sciences du langage :
Carrefours et points de vue
Collection dirigée par Irène Fenoglio
(CNRS, Paris, ITEM/Ens d’Ulm)
La collection « Sciences du langage : Carrefours et points de vue »
accueille tout ouvrage offrant au lecteur une confrontation entre
divers points de vue sur une même question ou notion, un même
auteur, une même œuvre dans le domaine de la linguistique et des
sciences du langage. Elle s’adresse aux spécialistes (étudiants,
enseignants, chercheurs) comme à tout lecteur curieux de la façon dont
dif f érentes appro ches permettent, par la discussion, une avancée des
connaissances sur le langage et les faits de langue.
1) F rédéric Tor TEra T, Approches grammaticales contemporaines.
Constructions et opérations, 2010.
2) Nadège LEChEvrEL, Les approches écologiques en linguistique.
Enquête critique, 2010.
3) Émilie BruNET et r udolf MahrEr, Relire Benveniste. Réceptions
actuelles des « Problèmes de linguistique générale », 2011.
4) J ean-Mic hel adaM, Genres de récits. Narrativité et généricité des
textes, 2011.
5) Catherine dELaruE-BrET oN, Expérience scolaire et expérience
culturelle. De l’usage du paradoxe en éducation, 2012.
6) Élisabeth riChard et Claire d oquET , Les représentations de l’oral
chez Lagarce. Continuité, discontinuité, reprise, 2012.Les représentations
de l’oral chez Lagarce
Continuité, discontinuité,
reprise
Élisabeth RichaRd
Claire doquet (dir.)
Sciences du langage :
Carrefours et points de vue
n° 6Présentation
Mise en page : CW Design
D/2012/4910/13 ISBN : 978-2-8061-0056-6
© L’Harmattan-Academia s.a.
Grand’Place, 29
B-1348 Louvain-la-neuve
Tous droits de reproduction, d’adaptation ou de traduction, par quelque procédé que
ce soit, réservés pour tous pays sans l’autorisation de l’éditeur ou de ses ayants droit.
www.editions-academia.bePrésentation
Une conversation
pas tout à fait
ordinaire : la langue
de Lagarce
Élisabeth RichaRd et Claire doquet
Les relations complexes entre le théâtre et l’oralité posent la double
question de l’imitation, par le texte théâtral, naturalitéde la « » des
échanges spontanés, et de la construction par le même texte d’un
référentiel communicable aux spectateurs et dont les personnages,
pour lesquels il est censément partagé, se font néanmoins les
porteparole. Cette double contrainte du texte de théâtre, magistralement
analysée par Larthomas dans son étude fondatrice sur le langage
dramatique (Larthomas, 1972), conduit à envisager le texte comme
en tension entre deux pôles, celui de la cohérence narrative et celui
de l’oralité représentée. Entre ces pôles, la dramaturgie classique et
le théâtre de situation (farce, comédies de mœurs etc.) semblent
privilégier la cohérence: chez les « g rands classiques » de la tragédie
et de la comédie, mais aussi chez des auteurs comme Feydeau,
Anouilh ou plus récemment Obaldia, on a affaire à des
conversations orales très écrites, avec ces morceaux spécifiques au théâtre
que sont les monologues destinés à construire, pour le public, des
ensembles d’informations manquantes, avec le système des apartés
qui manifestent cette recherche de cohérence et le souci d’assurer
la compréhension de l’intrigue. Chez Brecht, malgré les différents
procédés destinés à assurer la distanciation du spectateur par
rapport au référent construit sur la scène, la recherche de cohérence
est première: s’il importe d’éviter aux spectateurs les pièges de la 6 Les représentations de l’oral chez Lagarce
catharsis, sa position d’analyste réfléchissant rend nécessaire sa
compréhension, et même une compréhension très précise, des
contraintes dans lesquelles se débattent les personnages.
Depuis le développement, à la suite de Pirandello ou de
Beckett, d’un « théâtr e de l’absur»,de c’est en cr eux que s’installent
la cohérence narrative et la représentation de l’oral, avec des textes
où se manifeste précisément l’indigence des liens entre les
personnages, entre les personnages et l’extérieur à la scène, entre la langue
et le réel.
Dans la tension entre ces deux pôles de l’imitation de l’oral et
1de la cohérence narrative, Jean-Luc Lagar fait le choix de l’imice -
tation en ne signifiant rien, ou presque, de la vie des personnages
ailleurs que dans l’ici-maintenant de la scène théâtrale. Il fait
également des choix dans l’imitation, au sens où les représentations de
l’oral dont il use ne reprennent pas les moyens traditionnels mis en
œuvre par les dramaturges : stichom ythie, interruptions de parole,
écarts dans les niveaux de langue, lexique dit « de l’oral », r
elâchements syntaxiques, etc. En regard des manières plus usuelles d’écr ire
le théâtre, Lagarce prend le parti du naturel qui ne s’en donne pas les
airs, en mettant en scène des personnages dont le spectateur ne sait
rien au début de la pièce, dont il ne saura guère davantage à la fin sur
le plan des événements vécus – des aventures, de l’intrigue – mais
qu’il aura entendus parler, cette parole même étant, dans sa
matérialité, porteuse de signification. Loin de constituer des adresses au
public conventionnellement destinées à donner des informations
sur la diégèse, les monologues ressemblent à des discours intérieurs
qui s’extériorisent mais ne sont destinés à personne sauf leur
énonciateur lui-même :
1. L’œuvre de Lagarce est essentiellement composée de vingt-quatre pièces
de théâtre, mais il a aussi écrit trois récits (l’apprentissage, le bain, le voyage à
la Haye), un livret d’opéra (Quichotte) et a tenu toute sa vie durant un
journal composé de vingt-trois cahiers. Il est aussi le fondateur de la maison
d’édition Les Solitaires intempestifs.
En 1990, il rédige Juste la fin du monde, à Berlin, bénéficiant alors d’une bour se
d’écriture (Villa Médicis hors les murs, Prix Léonard de Vinci). La pièce sera
partout refusée. Jean-Luc Lagarce décède en 1995 du sida, depuis de
nombreuses mises en scènes de ses textes ont été réalisées. En France, il est
actuellement l’auteur contemporain le plus joué, et ses pièces sont traduites
dans de nombreuses langues.
Pour des commentaires biographiques, ou sur l’actualité de Lagarce on
renvoie au site qui lui est consacr : wwwé .lagarce.net Présentation 7
« Plus tard, l’année d’après
j’allais mourir à mon tour – 
j’ai près de trente-quatre ans maintenant et c’est à cet âge que je mourrai,
l’année d’après,
de nombreux mois déjà que j’attendais à ne rien faire, à tricher, à ne plus
savoir,
de nombreux mois que j’attendais d’en avoir fni […] » (p. 7)
2Le prologue de Juste la Fin du Monde – premier monologue de
Louis, le revenant, l’exclu de lui-même, l’éternel solitaire – ouvre
la pièce in media oratione et pose d’emblée la mission que le héros
se fixe – à laquelle il ne pourvoira pas – et ses difficultés, figurées
par cette énonciation hachée, cette peine à dire qui est celle de
Louis et qui atteint, chacun à sa manière, tous les personnages. Car
c’est du dialogue – ou de son manque – qu’il s’agit presque
toujours dans Juste la Fin du Monde. Dans ce huis clos familial, la parole
est comme bloquée, saturée de non-dit ; elle se pr end elle-même
pour objet, avec ces marquages divers qui vont du méta-discours
explicite (chapitre 1 de cet ouvrage) à des répétitions insistantes
(chapitre 5), en passant par un jeu de reprises qui anaphorisent très
souvent des éléments langagiers (chapitre 4). On la trouve par ailleurs
émiettée, avec des dislocations syntaxiques (chapitre 3) mais aussi
une ponctuation rythmique qui segmente les unités grammaticales
pour mettre au jour des unités énonciatives (chapitre 2).
Alors que la plupart des études de Juste la Fin du Monde aborent d
3des problématiques littéraires, ou de dramaturg , c’est, ie on le voit,
4d’un point de vue strictement linguistique que nous interrogeons
2. Les extraits travaillés dans le présent ouvrage s’appuient sur Juste la fin du
monde, Besançon, Les Solitaires intempestifs, 2010.
3. Une « année Lagarce» en 2006-2007, a permis l’organisation de plusieurs
manifestations scientifiques qui ont été publiées aux éditions créées par le
dramaturge Les Solitaires intempestifs: I. Problématiques

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