Anthrop eau. L anthropologie de l eau racontée aux hydrologues, ingénieurs et autres professionnels de l eau
138 pages
Français

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Anthrop'eau. L'anthropologie de l'eau racontée aux hydrologues, ingénieurs et autres professionnels de l'eau , livre ebook

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Description

Ce livre nous entraîne à travers le labyrinthe des instances internationales en faisant de l'eau le fil conducteur vers deux droits humains fondamentaux souvent oubliés : les droits à l'eau et à l'assainissement. Cette aventure humaine expose comment et pourquoi l'anthropologie peut contribuer à instaurer un développement véritablement "humain et durable" avec la participation pleine et entière des populations concernées.

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Informations

Publié par
Date de parution 01 mars 2012
Nombre de lectures 25
EAN13 9782296486713
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0600€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Anthrop’eau
L’anthropologie de l’eau racontée aux hydrologues, ingénieurs et autres professionnels de l’eau
Dans la même collection

Ethique médicale interculturelle. Regards francophones
Sous la direction de Nicolas Kopp, Marie-Pierre Rethy, Claudine Brelet et François Chapuis

Les Hommes-panthères. Rites et pratiques magico-thérapeutiques chez les Wè de Côte d’Ivoire
Bony Guiblehon - Préface de Claudine Brelet

Du même auteur

Anthropologie de l’ONU. Utopie et fondation
Claudine Brelet

Jacques Bergier. Une légende, un mythe
Sous la direction de Claudine Brelet
Claudine Brelet
Membre de l’Académie de l’Eau
Anthrop’eau
L’anthropologie de l’eau racontée aux hydrologues, ingénieurs et autres professionnels de l’eau
© L’Harmattan, 2012
5-7, rue de l’École-Polytechnique ; 75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr
ISBN : 978-2-296-56962-1
EAN : 9782296569621
Introduction
La vie humaine peut s’enrichir et s’embellir (…), mais si l’humanité n’assouvissait pas d’abord ses besoins essentiels, elle cesserait de progresser .
J. G. Frazer, Le Rameau d’Or 1
« Choisit-on l’objet de ses études ou, aussi paradoxal que cela puisse paraître, est-ce l’objet qui vient vous chercher, s’accroche à vous, s’impose à votre réflexion ? » se demandait l’un de mes maîtres, le Professeur Roger Bastide, dans l’introduction de son article sur « Les Hommes de Couleur dans une Société blanche » 2 . Créer une anthropologie de l’eau s’est imposé comme une évidence à ma réflexion lorsqu’en 2002, un changement majeur s’est amorcé dans les sciences de l’eau, tandis que le Sixième Programme hydrologique international (PHI) 3 introduisait un nouveau paradigme recommandant aux professionnels de ce secteur d’intégrer la dimension culturelle de l’eau à partir de deux thèmes. L’un était intitulé « l’eau et la société » et l’autre, « l’éducation relative à l’eau et le renforcement des capacités ».
Implicitement, ces thèmes intégraient le droit à l’eau qui serait défendu un an plus tard, avec la plus grande ardeur par les peuples autochtones, pendant le Troisième Forum mondial de l’eau organisé à Kyoto.
En automne 2001, le directeur de la division des sciences de l’eau de l’UNESCO 4 , où se préparait ce changement de paradigme, me demanda de développer ces thèmes du point de vue anthropologique. – « C’est une anthropologie de l’eau qu’il faudrait créer ! » me suis-je alors exclamée. – « Pourquoi pas ! Vous qui aimez les défis… allez-y ! » me répondit-il.
La route serait longue, mais passionnante, depuis 2001 à Paris jusqu’à Bamako en 2008 lorsqu’en mission en tant que senior expert dans le cadre d’un projet intitulé « Niger-Loire : gouvernance et culture », coordonné par l’UNESCO avec l’appui de la Convention France-UNESCO et cofinancé par l’Union Européenne (programme Facilité Eau), j’ai pu présenter le projet de créer un Centre de recherche en Anthropologie de l’Eau au Professeur Salif Berthé, alors doyen de la Faculté des lettres, langues, arts et sciences humaines (FLASH) de l’Université de Bamako. Le Doyen Berthé 5 et le Professeur Isaie Dougnon 6 , mon collègue anthropologue spécialiste des migrations, adoptèrent immédiatement ce projet.
Il est certain que l’idée de concevoir une anthropologie de l’eau a été nourrie (abreuvée !) par mes expériences acquises sur des terrains très variés depuis maintenant bien longtemps, depuis la Bulgarie où je fis mes premiers terrains dans les années 1960 jusqu’à l’Organisation mondiale de la Santé où, au début des années 1980, carte blanche m’y fut confiée pour développer son Bulletin de technologie appropriée pour la Santé. Les médecins avec lesquels j’y travaillais, tous des hommes de terrain, avaient exercé leur métier dans des conditions difficiles, voire parfois périlleuses. Le respect de la dimension culturelle de la santé et du droit à la santé faisait partie de leur credo. Tous s’attachaient avec enthousiasme à promouvoir la stratégie des soins de santé primaires dont l’accès à l’eau salubre et l’assainissement font partie, mais dont l’absence est la cause d’un taux terrifiant de mortalité infantile.
La recherche scientifique et la création artistique ont en commun d’être des processus guidés par l’imaginaire et par l’amour de son métier. Michel Leiris, dont l’œuvre et les combats ont marqué les étudiants qui, dans les années 1960, s’initiaient à l’ethnologie au Musée de l’Homme, affirmait que sa vocation tournée vers les Autres fait de l’anthropologue « l’avocat désigné, celui qui plus que quiconque doit s’attacher à faire admettre leurs droits ». L’anthropologue peut vraiment contribuer à ce que les droits à l’eau et à l’assainissement deviennent des réalités.
L’un des objectifs d’une anthropologie de l’eau est de mettre en évidence la complexité des interactions entre l’eau et les humains. L’analyse paradigmatique des cosmologies, mythes et légendes liés à l’eau, peut aider les professionnels de l’eau à mieux comprendre les croyances des populations dont ils cherchent à améliorer la vie quotidienne.
Bien que l’eau soit un élément chargé d’une forte puissance symbolique féminine, prometteuse à la fois de fécondité et de fertilité, et bien que les femmes soient concernées au premier chef, elles sont malheureusement très souvent les grandes absentes des projets hydrauliques. De graves lacunes subsisteront dans le domaine des sciences hydrologiques tant que les femmes ne participeront pas, à pied d’égalité avec les hommes, aux programmes d’enseignement des sciences de l’eau, ainsi qu’à toutes les étapes des projets hydrauliques – de leur conception à leur mise en place et à leur maintenance.
Le dialogue avec les différents groupes socioéconomiques, ou les différentes ethnies comme dans plusieurs régions d’Afrique, qui partagent le même milieu, est essentiel pour que les différentes parties prenantes puissent mieux se comprendre. Il peut contribuer à renforcer les capacités locales, améliorer les savoir-faire locaux, voire les conjuguer à des techniques modernes ou moderniser les anciennes. C’est d’ailleurs ce dont il a été débattu, lors de la conférence internationale sur « l’avenir des ressources en eau et l’environnement » organisée à Bangkok, en janvier 2009, par le Professeur Shahbaz Khan, responsable de l’écohydrologie pour le Programme hydrologique international (PHIUNESCO) 7 .
Le futur de notre planète et de ses passagers est entre nos mains à tous. C’est pourquoi il est devenu plus que jamais nécessaire que les sciences de l’eau s’intéressent à cette science de l’homme qu’est l’anthropologie et à ses applications.
Le droit à l’eau et le droit à l’assainissement sont désormais reconnus au même titre que les droits humains fondamentaux dont tout anthropologue respectueux de l’éthique de sa profession est « l’avocat désigné », selon l’expression de Michel Leiris. L’anthropologie de l’eau peut rendre de grands services aux hydrologues en les aidant à les mettre en pratique. Les applications de cette science de l’homme (en grec, anthropos signifie « homme » et « logo s », science), malheureusement encore trop souvent enfermée dans les universités et laboratoires de certains pays, gagnent à être mieux connues des hydrologues et autres spécialistes des questions relatives à l’eau. Mieux comprendre la manière de vivre, la culture des populations dont ils s’efforcent d’améliorer la qualité de la vie, leur permettrait de mieux répondre aux contraintes et aux besoins locaux, notamment aux besoins tels qu’ils sont ressentis .
Avec la sémantique générale, les sciences cognitives et l’écologie humaine, l’anthropologie est la cadette des sciences sociales et humaines classiques (histoire, économie, sociologie). Fondée au début des années 1930 par Bronislaw Malinowski, alors professeur à la London School of Economics 8 , l’anthropologie a trouvé ses premières applications pratiques à l’échelle internationale pendant la Seconde Guerre mondiale, grâce à l’approche transdisciplinaire et systémique qui la caractérise. En effet, c’est alors dans l’urgence que des chercheurs appartenant à des disciplines habituellement séparées ont uni leurs connaissances et leurs expériences pour, selon la célèbre expression de Roosevelt, « gagner la guerre et construire la paix ». Margaret Mead évoque ainsi cette solidarité entre collègues de différentes disciplines : « Notre paradigme central – l’unité psychique de l’espèce humaine et la valeur de la diversité culturelle des peuples qui la composent – étant attaq

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