La banque des États de l Afrique Centrale
286 pages
Français

La banque des États de l'Afrique Centrale , livre ebook

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286 pages
Français

Description

Depuis 2009, la Banque des États de l'Afrique Centrale (BEAC) traverse une période trouble de son histoire. Les mesures adoptées par les autorités décisionnaires n'ont pas été à la hauteur du redressement attendu. L'auteur poursuit sa réflexion sur le devenir de la banque centrale à travers cette "lettre ouverte". Il expose son analyse des mœurs au sein de cette institution qui tient un rôle de premier plan dans la Communauté Économique et Monétaire de l'Afrique Centrale (CEMAC).

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Date de parution 15 novembre 2015
Nombre de lectures 41
EAN13 9782336396132
Langue Français
Poids de l'ouvrage 8 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,1250€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Mahamat Massoud
La Banque des États de l’Afrique CentraleLettre ouverte au gouverneur
LA BANQUE DES ÉTATSDE LAFRIQUE CENTRALE
Mahamat Massoud La Banque des États de l’Afrique CentraleLettre ouverte au gouverneur L’HARMATTAN
© L’HARMATTAN, 2015 5-7, rue de l’École-Polytechnique ; 75005 Pariswww.harmattan.fr diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan1@wanadoo.fr ISBN : 978-2-343-06303-4 EAN : 9782343063034
Avant-propos Après avoir lu le projet de la lettre ouverte au gouverneur de la banque des Etats de l’Afrique Centrale (BEAC), des personnes amies, que nous considérons comme des autorités morales, ont accepté de si-gner la préface. Ce fut un honneur. Nous avons déduit de leur approba-tion que notre démarche n’est pas superflue. Nous ne faisons pas fausse route. Tout en les remerciant chaleureusement, nous n’avons pas sou-haité les impliquer dans une démarche qui peut paraitre polémique. En effet, aux yeux des destinataires de la lettre, une telle prise de position pourrait passer pour une compromission. Pour ceux qui refusent la transparence, appeler au respect des règles et inciter à mieux gouverner sont suspects sinon iconoclastes. Nous avons préféré laisser la place de préfacier et l’hommage qui y 1 sied aux écrits du professeur Pierre Bourdieu . Au vu du cadre dont nous débattons, ce choix nous paraît judicieux. Nous faisons de notre filiation à ses idées et de sa vision des comportements humains un garde-fou. Nous suggérons au lecteur d’approfondir le sujet en se réfé-rant aux nombreuses publications de l’auteur. En nous éclairant des lumières du Professeur pour fixer la ligne di-rectrice de notre propos, notre objectif est d’interpeller les représentants de la puissance publique. Nous partons du principe que, lorsque l’Etat ou ses démembrements sont dirigés ou représentés par des hommes et des femmes peu soucieux de leurs mandats, le risque de précipitation ou d’action inappropriée n’est jamais loin. Or, à un moment de sa vie, tout citoyen peut se trouver en butte à la puissance publique dans ce qu’elle représente de plus contestable. Lors-que le service public et l’intérêt général sont perdus de vue, c’est que l’Etat s’est déchargé de son rôle d’acteur au service de tous, notamment des plus humbles.
1 Pierre Bourdieu, Sur l’Etat, Cours au Collège de France, 1989-1992.
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De nos jours, un Etat agissant heurte les bien-pensants. Le maître-mot utilisé en toute circonstance, comme un vadémécum, estliberté. Dans la problématique relative au service public, la pensée conserva-trice dominante focalise l’attention sur la liberté d’agir sans normes, sans contraintes. Le prétexte est tout trouvé : les normes sont trop con-traignantes ou dépassées. Pourtant, lorsque la liberté débridée s’impro-vise libre-arbitre, elle promeut, volontairement ou non, le comporte-ment du loup dans la bergerie en règle de gestion sociétale.
Notre perception de l’Etat n’est pas sociologique. Nous n’en avons pas la prétention. Nous lui donnons le sens d’une instance qui établit et maintient la concorde au sein d’une communauté et entre les groupes qui la composent.
Il revient à l’Etat de veiller pour que le puissant n’écrase pas le faible ou que le riche ne le soit pas au détriment du démuni. Tel nous semble la juste dimension de son action. Il est neutre mais agissant. Il garantit la liberté certes mais il préserve l’équité, l’équilibre, la justice. Il met à contribution ceux qui peuvent se passer de surplus pour éviter que certains se trouvent abandonnés au bord de la route. Il veille pour que la communauté trouve, en elle-même, des solutions et des voies sinon un espoir de réponse aux préoccupations majoritaires.
L’existence d’un Etat neutre dépend d’abord de la qualité de ses commisqui sont supposés faire preuve de désintéressement et de dis-cernement. Ils doivent, dans chaque prise de décision, être en quête d’équilibre entre la solidarité, la justice et la liberté. Ils doivent se don-ner en exemple pour que nul ne soit tenté de transgresser la loi sans en subir les conséquences. Lecommisrigoureux, objectif et équitable at-tend de ses administrés du respect pour la loi et de la solidarité en tant que citoyens. Il croit ces vertus possibles parce qu’il se les applique avant de les exiger des autres.
Parlant de ceux qui se destinent au service de l’Etat, Pierre Bourdieu disait que leur position implique des critiques. Voilà pourquoi ils doi-vent s’observer pour se convaincre qu’ils n’ont de priorité que le service public. Leur attitude n’est pas totalement désintéressée. Ils y trouvent un sens à leur vie, comme les religieux trouvent dans le sacerdoce un lien avec Dieu. Les uns comme les autres s’exposent aux railleries et
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aux tracasseries. Le bonheur de rendre service, dans le désintéresse-ment, compense les blessures gratuites infligées par ceux qui pensent peu, agissent encore moins et parlent à tort et à travers. A un niveau bien moindre, nous tentons, à travers notre expérience de vingt-six années d’activité à la Banque des Etats de l’Afrique Cen-trale (BEAC), de présenter une illustration du dévoiement du titre de commis de l’Etat. Les dirigeants de la BEAC ont tout pour se conduire en représentants exemplaires des Etats. Pris dans le feu de l’action, tout se passe comme s’ils y ont obstinément et délibérément renoncé. Ils ont tout à gagner en s’inspirant de Pierre Bourdieu et de ses cours au Col-lège de France. A leur attention, nous citons son cours du 7 novembre 1991 intituléL’exemple de la corruption institutionnalisée en Chine 2 : les purs. Nous en reproduisons quelques courts extraits dans le docu-ment 1. 2 Document 1. Extrait des cours au Collège de France du pro-fesseur par Pierre Bourdieu "Les purs détruisent l’équilibre lié à la corruption fonctionnelle, parce que l’intégrité sans compromis a un effet de révélateur … Dans l’histoire récente, vous avez des gens à qui il arrive des mésaventures parce qu’ils font simplement ce qu’il est dit que les autres font, mais que les autres ne font pas … Les purs sont à la fois suspectés, combat-tus, diffamés et en même temps admirés, parce qu’on ne peut pas ne pas reconnaître qu’ils rendent hommage, fût-ce hypocritement, aux vertus que tout le monde célèbre officiellement." Un adage populaire enseigne qu’on ne peut avoir raison contre tout le monde. Une lecture simpliste de cette sagesse fait dire que le solitaire a forcément tort. Il serait dans le faux parce qu’il est contre l’avis ma-joritaire. En refusant de faire comme les autres, il se met dans la posture du perdant. Parce qu’ilmet les pieds dans le plat, il est exclu. Il est montré du doigt. La répétition de ces sentences et plus encore la pres-sion sociale des proches, famille, amis ou collègues, l’obligent à s’in-terroger. Il se pose des questions sur la pertinence du combat qu’il mène en considération de l’intérêt général. Comment avoir raison contre la
2  Bourdieu Pierre,Sur l’Etat cours au collège de France 1989-1992, Seuil, Paris, 2011.
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