Penser pour l action : Un fondateur de l’Europe
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Description

Comment un jeune professeur de philosophie participe-t-il à l'action pour la reconstruction de la France et, aux côtés de Jean Monnet, pour l'édification de l'Europe ? Comment son action a-t-elle évolué face au gaullisme, puis avec la montée de la gauche socialiste ?Pierre Uri (1911-1992), économiste, fut membre du Commissariat au Plan, professeur à l'ENA et à l'université de Paris IX-Dauphine.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 avril 1991
Nombre de lectures 0
EAN13 9782738161031
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0900€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

OUVRAGES DU MÊME AUTEUR
La réforme de l’enseignement, Rieder-1937.
Le fonds monétaire international, ISEA -1945.
La crise de la zone de libre-échange, Plon-1959.
Dialogue des continents, Plon-1963.
Une politique monétaire pour l’Amérique latine, Plon-1965.
Pour gouverner, Robert Laffont-1967.
La Grande-Bretagne rejoint l’Europe, Institut atlantique-1967.
Un avenir pour l’Europe agricole, Institut atlantique-1971.
Plan quinquennal pour une révolution, Fayard-1973.
L’Europe se gaspille, Hachette Littérature-1973.
Développement sans dépendance, Calmann-Lévy-1974.
Changer l’impôt (pour changer la France), Ramsay-1981.
Aider le tiers monde à se nourrir lui-même, Economica-1981.
Réduire les inégalités, Documentation française-1983.
Fragments de politique économique, PUG -1989.
Présentateur de :
Trade and investment Policies for the 70’s, Institut atlantique-1971.
Israel and the Common Market, Weidenfeld. Jérusalem-1971.
North South : A New Relationship, Institut Atlantique-1976.
RAPPORTS PUBLIÉS
Rapport de la Commission du bilan national, 1947.
Rapport de la délégation française sur le plan Schuman, 1951.
Rapport du comité intergouvernemental créé par la conférence de Messine (Rapport Spaak), 1956.
Rapport sur la situation économique de la Communauté, 1958.
Rapport sur la capacité concurrentielle de la Communauté économique européenne, 1972.
Rapport sur une imposition généralisée des plus-values, 1975.
© O DILE J ACOB, AVRIL 1991 15 RUE SOUFFLOT, 75005 PARIS
ISBN : 978-2-7381-6103-1
Le code de la propriété intellectuelle n'autorisant, aux termes de l'article L. 122-5 et 3 a, d'une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l'usage du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute représentation ou réproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (art. L. 122-4). Cette représentation ou reproduction donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo .
Préface

Penser pour l’action , c’est la mise en œuvre d’une volonté, c’est aussi une formule ramassée pour décrire une vie qui passe de la philosophie à l’économie, de la théorie économique à la politique économique, de la France à l’Europe et au modèle qu’elles doivent offrir au monde.
Je n’ai pas oublié le mot de Paul Valéry, « avec l’histoire c’est l’avenir du passé qui est sans cesse remis en jeu ». C’est ainsi tout d’abord que je l’entends. Ceux qui ont eu la chance de participer à l’action sans pouvoir la rendre publique sont impatients d’en redresser le récit. Mais la contribution à l’histoire possède un double sens : la reconstitution du passé, la construction de l’avenir. Si ce qui a été fait prolonge ses conséquences, si ce qui a été proposé doit encore être mis en œuvre, alors le passé a un avenir.
Ce livre traduit donc une double ambition : révéler ce qu’on ignore, remettre au jeu des idées qui ont eu leur part dans de vastes transformations et qui pourraient encore les poursuivre ou les sauver.
Il n’y a pas si longtemps que des colloques ont réuni historiens et témoins ou acteurs de l’histoire. Il est bien vrai que les témoignages doivent être soumis à un regard critique. Inversement, ne s’en remettre qu’aux documents, c’est ignorer s’ils ont été connus des responsables, au point de justifier une inquiétude concernant l’histoire des temps pour lesquels il n’existe plus de témoins. Il n’y a donc pas d’autre méthode que la confrontation des sources. J’ai assez publié, ou mes initiales figurent sur assez de papiers officiels, ou enfin j’ai réuni dans un livre assez d’inédits dont la paternité n’est pas contestée pour que le contrôle réciproque s’opère de lui-même.
Un ami s’étonnait il y a peu que ma participation au redressement de la France, à la construction de l’Europe, au progrès du tiers monde, au débat politique ne fût pas plus généralement connue. C’est peut-être que j’ai toujours pensé davantage à ce qu’il faudrait faire demain qu’à ce qui avait été accompli la veille. Ce désintéressement m’a-t-il privé de fonctions qui m’auraient permis de mieux servir ? Je n’ai de regrets que pour celles qui ont été mal remplies. On peut toujours se dire que ce qu’on a fait est plus important que ce que l’on a été. Je m’amuse à penser que, lorsque les noms resurgissent, ils ont d’autant plus d’écho, tels ceux des hommes que j’admire le plus, Stendhal, Van Gogh et Jean Monnet.
CHAPITRE 1
Une famille d’agrégés

1911-1939


Famille – Études – Normale – Agrégation de philosophie – Le service – Les États-Unis – Professeur – Réforme de l’enseignement.

Je suis né à Paris en plein Quartier latin. Ma mère aussi était parisienne. Mais si l’on remonte aux grands-parents, tous venaient d’Alsace ou de Lorraine. Aucun membre, même les plus éloignés, de cette famille n’était resté là-bas sous l’annexion allemande. Cette origine n’est pas dépourvue de sens pour un homme qui a été mêlé centralement à la réconciliation des Européens.
Le père de mon père, que je n’ai pas connu, avait comme instituteur quitté l’Alsace dès 1850 pour une Algérie qui n’était pas encore totalement pacifiée. C’est de la sorte que mon père est né à Tlemcen. Mais pour qu’il puisse poursuivre ses études la famille s’est transportée à Oran et finalement à Paris.
Si j’ai un regret, c’est de n’avoir pas mesuré le bond qu’il avait accompli. Agrégé de grammaire à vingt et un ans, docteur ès lettres à vingt-six ans, obligé de refuser une maîtrise de conférence à Bordeaux parce que sa mère ne voulait pas quitter Paris, on lui crée un poste à la Sorbonne où il fera toute sa carrière à la fois administrative et enseignante ; secrétaire de la Faculté des Lettres, ses col lègues pensent qu’un latiniste comme lui, qui a publié des recueils de textes et de magnifiques traductions, ne devait pas être perdu pour les étudiants. Et ses cours pour la licence d’histoire, je l’ai vu les préparer en accumulant des notes sur les textes qu’il commentait mot à mot.
L’agrégation est le signe commun de toute la famille. Ma mère avait été une des premières femmes à en acquérir une, qui couvrait à la fois la physique, la chimie et les sciences naturelles, ma sœur a passé physique et chimie, et ma femme ce qui était encore histoire et géographie.
Ma sœur étant un peu plus âgée que moi, je pouvais, dans les petites classes, et bien avant que les études soient mixtes, être admis au même lycée qu’elle : c’est ce petit garçon de la classe qui a obtenu le premier prix de couture.
En 1918 les avions qu’on appelait « les taubs » et les canons à longue portée dits « la Bertha » bombardaient Paris. D’où un départ pour Lyon, sauf mon père retenu par ses fonctions.
Encore une fois j’étais au lycée de filles. J’ai retrouvé, dix-sept ans après seulement, la très gentille maîtresse d’école qui se souvenait de ce petit réfugié ; mais lui, dans le même établissement, enseignait cette fois la philosophie en première supérieure pour les candidates à l’École normale supérieure de Sèvres.
C’est en huitième que je suis entré à Henri-IV, que j’ai commencé à être premier de classe, pour y passer dix ans jusqu’à l’hypokhâgne d’où j’ai été reçu directement à l’École normale à dix-sept ans.
Presque tous les ans et presque dans tous les domaines, les professeurs étaient extraordinaires, certains étaient poètes, tous insistaient sur le style en nous apprenant à éviter les clichés et à reconnaître que notre langue appelait une prose cadencée. Le latin et le grec, ce n’était pas du mot à mot, mais l’obligation d’inventer des transpositions fidèles, respectant à la fois le sens et la tournure propres des phrases.
Mon professeur de première n’avait pas été choqué quand j’avais revêtu une longue chemise et un morceau de tissu rouge pour réciter, en les jouant, Les fureurs d’Oreste jusqu’à m’écrouler sur le sol comme je pense qu’on le fait à la scène dans Andromaque.
Pour la fête du lycée, nous avions joué Hernani. Je ne me contentais pas du principal rôle, mais soufflais à mes camarades les répliques qu’ils avaient oubliées.
Mon professeur de philosophie Louis Lavelle est entré plus tard au Collège de France. Mais ce qui est inoubliable, c’est mon hypokhâgne : c’était la première année que l’on avait séparé les deux classes préparatoires, le célèbre Alain avait accepté de cumuler, et j’ai été l’un des derniers à profiter de sa manière inimitable. Avant son entrée en salle, nous écrivions des phrases sur le tableau qu’il se prêtait à commenter. Nous pouvions lui remettre autant de papiers libres que nous voulions, on ne peut donc pas les appeler devoirs, et il les corrigeait de sa plume appuyée, écartant tous les néologismes, insistant pour que les phrases fussent rigoureusement liées entre elles, et préférant les longs paragraphes qui obligent à l’approfondissement et à la cohérence des idées.
Il y avait encore peu de khâgnes en France, la plus peuplée était à Louis-le-Grand, mais Henri-IV attirait les garçons brillants de toutes origines : l’un de mes camarades était Maurice Schumann, un autre le futur Julien Gracq. Un petit groupe s’était formé qui se réunissait à la fois pour discuter les idées et pour lire les uns aux autres les poèmes que nous composions. Moi qui avais déjà écrit des sonnets à douze ans en respectant la prosodie la plus stricte, c’est dans cette dernière année de lycée que j’ai commis mes derniers vers.
Un trait que je ne voudrais pas manquer de souligner : prêt à me présenter au bout d’un an, je n’avais fait que l’histoire grecque, et j’ai dû en quelques jours absorber l’histoire romaine. Quant à l’histoire moderne, qui pour nous commençait en 1789, je n’avais abordé que la première moitié du programme. Alors que j’étais un concurrent,

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