Une exhumation - Un cours libre sous l Empire, 1863-1865
95 pages
Français

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Une exhumation - Un cours libre sous l'Empire, 1863-1865 , livre ebook

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Description

Le professeur, pour ce premier entretien, avait pris son sujet en quelque sorte dans les circonstances mêmes. Il inaugurait un ensemble de cours publics dus à la fois à l’initiative individuelle et à l’initiative locale : il s’est attaché à mettre en lumière, d’une part, la nécessité de l’instruction — spécialement de la diffusion des connaissances économiques — d’autre part, la grandeur et l’importance du rôle qui revient au zèle personnel dans cette œuvre immense et multiple.Fruit d’une sélection réalisée au sein des fonds de la Bibliothèque nationale de France, Collection XIX a pour ambition de faire découvrir des textes classiques et moins classiques dans les meilleures éditions du XIXe siècle.

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EAN13 9782346029129
Langue Français

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Extrait

À propos de Collection XIX
Collection XIX est éditée par BnF-Partenariats, filiale de la Bibliothèque nationale de France.
Fruit d’une sélection réalisée au sein des prestigieux fonds de la BnF, Collection XIX a pour ambition de faire découvrir des textes classiques et moins classiques de la littérature, mais aussi des livres d’histoire, récits de voyage, portraits et mémoires ou livres pour la jeunesse…
Édités dans la meilleure qualité possible, eu égard au caractère patrimonial de ces fonds publiés au XIX e , les ebooks de Collection XIX sont proposés dans le format ePub3 pour rendre ces ouvrages accessibles au plus grand nombre, sur tous les supports de lecture.
Frédéric Passy
Une exhumation
Un cours libre sous l'Empire, 1863-1865
SÉANCE D’OUVERTURE
Le professeur, pour ce premier entretien, avait pris son sujet en quelque sorte dans les circonstances mêmes. Il inaugurait un ensemble de cours publics dus à la fois à l’initiative individuelle et à l’initiative locale : il s’est attaché à mettre en lumière, d’une part, la nécessité de l’instruction — spécialement de la diffusion des connaissances économiques — d’autre part, la grandeur et l’importance du rôle qui revient au zèle personnel dans cette œuvre immense et multiple.
C’est à la première proposition, comme à la principale, que M.F. Passy a consacré la majeure partie de son Discours. Non que l’instruction, à son avis, soit aujourd’hui l’objet d’attaques directes bien sérieuses ; personne sans doute ne ferait ouvertement, désormais, le panégyrique de l’ ignorance . Mais il reste dans bien des esprits, à défaut de cette hostilité réfléchie et avouée, des préventions vagues ; il renaît au fond de presque tous, à certaines heures, des défiances et des-doutes, sur lesquels il est nécessaire, pour ne pas marcher davantage à d’aventure, que le jour se fasse enfin. Il faut nous entendre avec nous-mêmes et savoir décidément dans quelles voie nous voulons et nous devons marcher.
Attaquant aussitôt le problème de front et dans sa partie vive, M.F. Passy a examiné et apprécié rapidement ce grand fait, objet tantôt d’orgueil et tantôt de terreur, souvent d’orgueil et de terreur tout ensemble, et dont le nom seul rappelle et soulève les sentiments les plus divers, la démocratie. Sans amertume pour le passé, qui a été le germe du présent, mais sans complaisance non plus pour les théories rétrogrades qui réclament en faveur d’institutions éteintes autre chose que le respect dû aux morts, il a signalé hautement, dans le régime nouveau du droit commun, la grand caractère et le grand honneur de notre âge, et n’a pas hésité à déclarer à ce litre le progrès de la démocratie indissolublement lié au progrès de l’égalité civile et de la dignité humaine, qui n’est rien moins que l’application aux relations sociales des principes de la justice naturelle et des préceptes de la loi évangélique.
Il s’agit de savoir, a-t-il dit avec M. de Tocqueville, non si nous aurons la démocratie ou l’aristocratie, mais si nous aurons une démocratie tyrannique et grossière ou une démocratie éclairée et libérale ; si le rapprochement graduel des conditions sera une élévation ou un abaissement ; s’il se fera par l’indépendance croissante de la personne humaine ou par son absorption dans une servitude et une nullité communes.
Mais s’il en est ainsi (et qui en pourrait douter ?) que faut-il faire ? Eclairer les individus, ou les retenir dans l’ignorance et dans ses ombres dangereuses ? Développer la pensée, ou la restreindre ? Etouffer le jugement personnel et le sens de la responsabilité, ou leur donner, avec les moyens de s’exercer librement, l’habitude de le faire ?
La réponse peut-elle être un instant douteuse ? Il est évident que ce n’est qu’en formant des hommes honnêtes, éclairés et sages qu’on peut obtenir des sociétés paisibles, industrieuses et heureuses ; et ce n’est pas l’excès des lumières, c’est leur insuffisance qui a mis en péril, de nos jours, qui pourrait y mettre encore, les intérêts et les droits les plus sacrés. « Tout est perdu, disait Voltaire, non quand on met le peuple en état de s’apercevoir qu’il a un esprit, mais quand on le traite comme une troupe de taureaux, car, tôt ou tard, ils vous frappent de leurs cornes ».
De rapides mais vives allusions aux faits contemporains, et quelques importantes et décisives citations sont venues, dans la bouche du professeur, rendre pour ainsi dire visible et tangible cette conclusion ; et c’est en quelque sorte avec l’évidence irrésistible de la nécessité présente et de l’impérieux devoir qu’il a amené l’auditoire à répéter avec lui ces paroles de Channing, qui eussent pu lui servir de texte : «  Tonte espérance de stabilité qui ne repose pas sur le progrès du peuple sera trompée infailliblement  ».
Mais comment élever ses semblables, si l’on ne prêche soi-même et de précepte et d’exemple ? Il faut donc, si nous voulons amener à la lumière (hors de laquelle il n’y a pas de paix), à l’indépendance (hors de laquelle il n’y a pas de dignité ni de justice), nos semblables encore moins avancés que nous ; il faut, a dit le professeur, et travailler nous-mêmes à nous éclairer et à nous élever, et mettre nous-mêmes la main à l’instruction et à la moralisation de nos semblables. C’est là une œuvre de tous les lieux et de tous les instants ; ce doit être une œuvre de toutes les intelligences, de tous les cœurs et de toutes les mains.
C’est à ce point de vue surtout que le professeur a cru devoir bien augurer de l’enseignement nouveau dont il avait l’honneur d’être le premier organe. Il a félicité hautement la ville de Nice, d’être l’une des premières à donner l’exemple. La Chambre de commerce, qui l’a appelé, l’administration municipale qui a voulu offrir l’hospitalité à la science ; et les honorables collègues qui viennent également donner leur temps au bien public, ont eu naturellement leur part de ces félicitations et de ces remerciements bien légitimes.
Mais M.F. Passy n’a pas voulu se borner à ces espérances générales, et qui eussent pu être communes à d’autres villes. Il lui a semblé qu’à Nice, en ce lieu où se rassemblent et se touchent tous les peuples, de plus larges et plus belles espérances pouvaient être permises, qu’elles étaient commandées peut-être. Et, jetant un regard hardi sur l’avenir, il s’est plu à nous faire entrevoir, comme un couronnement de l’œuvre modeste qui s’essaie aujourd’hui, comme un fruit magnifique de l’humble semence que nous venons de semer, la création graduelle dans notre ville d’une vaste Faculté internationale, réunissant toutes les sciences comme toutes les langues, et donnant, par la fraternité de l’intelligence, un avant-goût de cette fraternité des peuples qui est le rêve de l’avenir, et qui sera un jour, a-t-il dit énergiquement, la réalité du présent.
C’est sur cette grande idée, rattachée aussitôt, par quelques traits des plus nets, et aux principes généraux de la science économique et aux préoccupations les plus vives de la politique présente, que le professeur a voulu laisser son auditoire « de toute langue et de toute nation. » Et c’est comme à une prédication de paix, de paix sociale et de paix internationale, qu’il l’a convié à revenir l’entendre 1 .
PREMIÈRE ET DEUXIÈME LEÇONS
La PROPRIÉTÉ, d’abord dans son essence, puis dans ses manifestations principales, tel a été le sujet commun des deux premières leçons proprement dites du Cours d’économie politique de M. Frédéric Passy. L’étendue du sujet ne pouvait permettre au professeur de le traiter en une séance. Il a dû se résigner à le diviser ; mais il nous a paru préférable, pour la clarté comme pour la briéveté de l’exposition, de résumer ces deux leçons en un seul compte-rendu.
Les raisons qui ont déterminé M.F. Passy, contrairement à l’usage généralement adopté par les maîtres de la science, à commencer par cette question en apparence délicate et difficile, sont de celles qui frappent aisément tous les esprits. La Propriété est, de nos jours, le point menacé, celui sur lequel, dans des luttes récentes dont toutes traces ne sont pas effacées, s’est concentré principalement l’effort de l’attaque et l’effort de la résistance. C’est donc, au point de vue de la paix publique, le premier des problèmes à éclaircir. C’est le premier aussi, au point de vue de la science, le problème pivotal (pour emprunter un mot à la langue de Fourier) ; puisqu’il n’y a pas, à vrai

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