Hélène Jégado
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Description

Pierre Bouchardon (1870-1950)



"Annoncé assez longtemps à l’avance, redouté par beaucoup, plaisanté par d’autres, le choléra fit son apparition à Paris le 26 mars 1832. En quelques heures, il tua quatre personnes, dont le cuisinier du maréchal Lobau. Le 31 mars, on comptait déjà trois cents cas mortels. Alors, ce fut la grande peur et inlassablement le fléau décima la capitale, les corbillards ne suffisant plus à évacuer les cadavres.


Puis, il s’en alla comme il était venu, mais non sans avoir visité la province. Capricieux du reste et désordonné dans sa marche, car il se plut à enjamber plusieurs départements, épargnant ici et ravageant là, dédaignant une grande ville et s’arrêtant à un village.


Explora-t-il la basse Bretagne ? Peut-être, car, en l’année 1833, sous le toit hospitalier de l’abbé Le Drogo, premier vicaire de la paroisse de Guern, canton de Pontivy, se produisirent, dans un intervalle de quelques semaines, une série de décès foudroyants, mystérieux, inexplicables, accompagnés des mêmes symptômes.


Le 28 juin, Joseph Le Drogo père succomba le premier, après huit jours de maladie, à la suite d’incoercibles et continuels vomissements. Le 5 juillet, ce fut le tour de sa femme, née Guillemette Eveno. Le 17, la nièce du vicaire, Marie-Louise Lindevat, une fillette de sept ans, périt de la même mort. Le 23 août, une journalière, Marguerite André, habituellement employée et nourrie au presbytère, rendait l’âme après une horrible agonie, identique aux trois précédentes. Le 28 septembre, l’abbé Le Drogo lui-même était emporté en trente-deux heures, et cependant, jeune encore et vigoureusement constitué, il semblait de taille à défier la mort.


L’épidémie ne s’en tint pas là."



Hélène Jégado, considérée comme la plus grande tueuse en série française, est née dans le Morbihan en 1803. Sa route est jonchée d'empoisonnements : on en dénombre pratiquement une centaine causant la mort de 60 personnes. Mais ce n'est seulement que pour les cinq derniers meurtres (du fait de la prescription pour certains) qu'elle est jugée et condamnée à mort, en 1851.

Sujets

Informations

Publié par
Nombre de lectures 0
EAN13 9782374639291
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0015€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Hélène Jégado
L’empoisonneuse bretonne


Pierre Bouchardon


Juillet 2021
Stéphane le Mat
La Gibecière à Mots
ISBN : 978-2-37463-929-1
Couverture : pastel de STEPH'
lagibeciereamots@sfr.fr
N° 928
À mon ami Edmond Durand.
P. B.

I
Le choléra ?

Annoncé assez longtemps à l’avance, redouté par beaucoup, plaisanté par d’autres, le choléra fit son apparition à Paris le 26 mars 1832. En quelques heures, il tua quatre personnes, dont le cuisinier du maréchal Lobau. Le 31 mars, on comptait déjà trois cents cas mortels. Alors, ce fut la grande peur et inlassablement le fléau décima la capitale, les corbillards ne suffisant plus à évacuer les cadavres.
Puis, il s’en alla comme il était venu, mais non sans avoir visité la province. Capricieux du reste et désordonné dans sa marche, car il se plut à enjamber plusieurs départements, épargnant ici et ravageant là, dédaignant une grande ville et s’arrêtant à un village.
Explora-t-il la basse Bretagne ? Peut-être, car, en l’année 1833, sous le toit hospitalier de l’abbé Le Drogo, premier vicaire de la paroisse de Guern, canton de Pontivy, se produisirent, dans un intervalle de quelques semaines, une série de décès foudroyants, mystérieux, inexplicables, accompagnés des mêmes symptômes.
Le 28 juin, Joseph Le Drogo père succomba le premier, après huit jours de maladie, à la suite d’incoercibles et continuels vomissements. Le 5 juillet, ce fut le tour de sa femme, née Guillemette Eveno. Le 17, la nièce du vicaire, Marie-Louise Lindevat, une fillette de sept ans, périt de la même mort. Le 23 août, une journalière, Marguerite André, habituellement employée et nourrie au presbytère, rendait l’âme après une horrible agonie, identique aux trois précédentes. Le 28 septembre, l’abbé Le Drogo lui-même était emporté en trente-deux heures, et cependant, jeune encore et vigoureusement constitué, il semblait de taille à défier la mort.
L’épidémie ne s’en tint pas là.
Le 2 octobre, elle faisait une nouvelle victime en la personne d’une seconde journalière, Françoise Auffret, femme Le Morhulec, autre habituée du logis.
Enfin, le 3, Anna Jégado, qui était venue assister aux obsèques du vicaire Le Drogo son ancien maître, ne repassait le seuil du presbytère que couchée dans un cercueil.
Ainsi donc, du 28 juin au 3 octobre, dans la même demeure, sept personnes étaient tombées en quelque sorte les unes sur les autres, comme des capucins de cartes. Et le docteur Martel, qui, à toutes, avait prodigué ses soins, avait assisté impuissant à cette hécatombe. Il s’était penché sur les matières rejetées sans interruption par les malades et avait hoché la tête. Il avait alors songé au choléra, et même glissé le mot à l’oreille du maire, Joseph Le Cam, tout en s’expliquant assez peu que le mal parisien fût venu prendre racine dans une seule maison de Guern.
Il essaya de lever ses doutes, en procédant, avec l’autorisation de la famille, à l’autopsie de l’infortuné vicaire Le Drogo.
Pour cette opération, il se fit assister de son neveu, le Dr François Galzain, exerçant à Pontivy. Il eût désiré la présence de plusieurs notables du bourg, mais tous ceux qui furent pressentis se dérobèrent.
Le maire seul, surmontant sa douleur et son émoi, car il avait été l’ami intime du défunt, consentit à regarder. Il vit alors que l’estomac était « rouge comme du feu » et que l’intestin présentait deux ou trois perforations de la grandeur d’une tête d’épingle. Mais les médecins, après avoir constaté ces désordres, s’abstinrent d’en tirer aucunes conclusions. Soit que l’autopsie ne leur eût rien révélé d’important, soit que le choléra-morbus, qui, l’année précédente, avait ravagé Paris, leur fût mal connu dans ses symptômes et dans ses effets, soit que, plutôt, ils eussent jugé préférable de ne pas alarmer la population, ils se gardèrent de prononcer tout haut le mot qu’à l’occasion du décès de la jeune Lindevat le Dr Martel avait articulé tout bas devant le maire. Pas davantage, d’ailleurs, M. Louis-Marie Martel, pharmacien à Pontivy, n’avait pu ou voulu émettre une opinion, quand, profitant de sa présence à Guern, son frère le médecin lui avait montré les vomissements de cette enfant agonisante : des matières albumineuses et légèrement teintées de bleu.
Il ne restait plus qu’à fermer la porte de la maison des morts et à déposer la clef sur le seuil, puisque tous les occupants étaient passés de vie à trépas. Tous, non. Une seule personne avait survécu par miracle : la servante en titre du vicaire, Hélène Jégado.
Née le 28 prairial an XI, c’est-à-dire le 17 juin 1803, au hameau de Kordevin, commune de Plouhinec, dans l’arrondissement de Lorient, elle avait perdu, toute jeune, son père et sa mère, deux modestes cultivateurs. Recueillie alors par l’abbé Riallan, recteur de Bubry, chez lequel servaient deux de ses tantes maternelles, Marie-Jeanne et Hélène Liscouët, elle avait, beaucoup plus tard, suivi la seconde chez l’abbé Conan, recteur de Séglien. Et, en 1833, quoiqu’elle fût loin encore de l’âge canonique – mais il y avait d’autres femmes dans la maison – elle était venue remplacer sa sœur Anna, à Guern, chez le vicaire Le Drogo.
Elle avait vécu tout le drame. Envers les sept victimes de l’épidémie auxquelles la mort avait infligé d’intolérables souffrances, elle s’était montrée d’un dévouement sans bornes. Elle avait passé les nuits à leur chevet ; elle les avait assistées jusqu’à leur dernier soupir ; elles les avait pleurées comme des êtres chers ; elle avait longuement prié pour elles et demandé à Dieu de leur ouvrir les portes du ciel.
Cette conduite, dont chacun avait été édifié, méritait récompense. Aussi, le nouveau recteur de Bubry, l’abbé Lorho, offrit-il la place d’Anna à la rescapée. Celle-ci reprit donc le chemin du presbytère où s’étaient déjà écoulées plusieurs années de sa vie.
Portait-elle malheur ? Bien qu’immunisée pour son propre compte contre le choléra, était-elle susceptible d’en recéler à son insu le germe et de l’inoculer aux autres ? On ne sait. Toujours est-il que, dès qu’elle en eût franchi la porte, la maison curiale de Bubry devint le théâtre de lamentables événements.
Trois personnes, jusqu’alors en robuste santé, trépassèrent coup sur coup : Marie-Jeanne Liscouët tout d’abord, l’une des deux tantes dont il a été parlé déjà ; puis, la sœur du curé, Jeanne-Marie Lorho ; enfin, la nièce de celui-ci, Jeanne-Marie Kerfontain, une jeune fille de dix-huit ans. Et chez toutes, ce furent les mêmes symptômes morbides : constriction de la gorge et du pharynx, brûlures à l’estomac, diarrhée profuse, soif ardente, refroidissement des extrêmités, surtout vomissements sans fin. On remarqua de plus qu’après la mort, le visage de Jeanne-Marie Lorho était parsemé de petites taches violettes. Et le recteur lui-même fut à l’article de la mort. Son était parut à ce point critique, que le vicaire de la paroisse, l’abbé Jean Hervé, vint lui administrer l’extrême-onction.
En cette dramatique occurence, le Dr Martel songea encore à une attaque de choléra. Telles étaient bien, en effet, les manifestations de ce fléau, à s’en rapporter aux traités de médecine et aux gazettes de Paris. Toutefois, pour expliquer ces morts soudaines et multiples, groupées dans la même demeure, d’autres hypothèses furent envisagées. Certains profanes crurent à la fièvre typhoïde et ils y crurent d’autant mieux, qu’une épidémie de ce genre sévissait alors dans la région avec une rare virulence. Des familles entières avaient été exterminées et l’abbé Jean Hervé ne tarda pas à payer son tribut à la contagion. Et comme le recteur Lorho, il ne se rétablit qu’à grand peine.
Pâle, coiffée du capot des paysannes de Plouhinec et lestée de son modeste bagage, la fille Jégado quitta le bourg et alla vers d’autres destins. Bien qu’ayant dépassé la trentaine, elle était encore trop jeune pour demeurer, seule femme, chez le recteur de Bubry, après les morts successive

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