Les Bastides du département de Lot-et-Garonne
183 pages
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Les Bastides du département de Lot-et-Garonne , livre ebook

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Description

Le Moyen Âge connut le temps des Cathédrales qui concerna toute la chrétienté, tant l’aspiration en la foi, la sublimation du Divin, la peur de la vie et de la mort revêtaient une importance extrême dans cette époques superstitieuses. On connaît moins le temps des Bastides qui n’intéressa dans leur forme spécifique que le midi de la France, alors partagée entre la suzeraineté du roi de France, celle du roi d’Angleterre-duc d’Aquitaine et de leurs vassaux respectifs. Ces fondations durèrent à peine un siècle et demi, mais sont caractéristiques d’une édification urbaine générale qui influa durablement sur la sociologie et la politique des états en perpétuels bouleversements.


Plusieurs dizaines de villes neuves surgirent des sols que Français et Anglo-Gascons, ducs et comtes, se disputaient sur ce territoire morcelé en une foule de fiefs. Aujourd’hui, que reste-il de ces bastides adaptées aux conditions économiques et militaires d’alors, que sont-elles devenues après 700 ans d’histoire ? L’ouvrage tente de retrouver les traces de toutes celles qui furent fondées en Lot-et-Garonne, une soixantaine au bas mot. De nombreux documents sont perdus, leur souvenir effacé, mais après une enquête minutieuse, une réflexion approfondie, certaines d’entre-elles resurgissent, pour notre plus grand plaisir, des limbes dans lesquelles l’oubli les avait plongées...


Serge Pacaud, historien et chercheur, a publié de nombreux écrits sur divers sujets concernant les départements aquitains et gascons. Dans ce livre, méticuleusement, il s’attache à retrouver les traces encore visibles des bastides du département de Lot-et-Garonne qui montrent le riche passé médiéval d’une région que se disputaient les maisons féodales et royales. Une nouvelle collection pour découvrir, département par département, les bastides de tout le Grand Sud-Ouest.

Sujets

Informations

Publié par
Nombre de lectures 12
EAN13 9782824052649
Langue Français
Poids de l'ouvrage 317 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0097€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

978-2-8240-0578-2 9HSMIME*aafhic+
SERGE PACAUD
SERGEAUDLes E NBastidesN dudépartementde O R ALot-et-Garonne G -& -T O L U D S E D I T S A B S E LES BASTIDES DU LOT-&-GARONNE RA152-B
Même auteur, même éditeur : - Il y a cent ans, naissait la côte d’Argent - Il y a cent ans, Biscarrosse et Sanguinet - Il y a cent ans, les Gens de Guyenne - Il y a cent ans, les Gens de Gascogne - Il y a cent ans, les Gens de Béarn - Il y a cent ans, les Gens du Pays Basque - Il y a cent ans, les Gens de Bretagne - Les industries de la Paille et du Liège dans les Landes - Mont-de-Marsan médiéval - Les bastides du département du Gers - Les bastides du département des Landes - Les bastides des départements de la Dordogne et de la Gironde - Labastide-d’Armagnac - Il y a cent ans, les Gens de Lorraine - La commanderie de Bessaut - Les bastides des départements de l’Ariège, de l’Aude et des Pyrénées-Orientales
- Les bastides du département du Lot-et-Garonne - Les calvaires de Bretagne - Les bastides du département de la Haute-Garonne - Les bastides des départements du Tarn et du Tarn-et-Garonne - Les bastides des départements du Lot et de l’Aveyron
À paraître : - Bordeaux de naguère à aujourd’hui (en collaboration avec Éric Chaplain) - Le monastère d’Arthous et la bastide d’Hastingues - Aspremont et les châteaux forts landais - Divielle et les abbayes landaises - Saint-Sever - Les églises de la haute Lande - Les églises de la Chalosse et du Tursan - Sorde-l’Abbaye
Tous droits de traduction de reproduction et d’adaptation réservés pour tous les pays. Conception, mise en page et maquette :©Éric Chaplain Pour la présente édition :©EDR/ÉDITIONS DES RÉGIONALISMES ™— 2015 Éditions des Régionalismes : 48B, rue de Gâte–Grenier — 17160CRESSÉ ISBN 978.2.8240.0578.2 Malgré le soin apporté à la correction de nos ouvrages, il peut arriver que nous laissions passer coquilles ou fautes — l’infor-matique, outil merveilleux, a parfois des ruses diaboliques... N’hésitez pas à nous en faire part : cela nous permettra d’améliorer les textes publiés lors de prochaines rééditions.
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SERGE PACAUD
LESBASTIDES DU DÉPARTEMENT DE LOT-ET-GARONNE
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BRÈVE INTRODUCTIONÀ L’HISTOIRE DU LOT-ET-GARONNE ’Agenais servit grosso modo de base de travail aux législateurs pour définir le département du Lot-et-Garonne en 1790 lorsque les Conventionnels contLrée agricole connut une histoire remarquable depuis les temps immémoriaux ; changèrent les structures étatiques de la monarchie. Cette riche et opulente celle des bastides ne manqua pas d’apporter une pierre magistrale à l’ensemble de l’édifice dans lequel se réunirent les péripéties conjoncturelles de cette région magni-fiée par des dieux naturalistes. Sur les bords des rivières du bassin de la Garonne lors du néolithique, de nombreux peuplements cohabitaient dans les grottes du pays, ils s’y croisaient les influences conti-nentales et atlantiques où s’échangeaient les cultures et les techniques. Les Celtes, les tribus des Nitiobroges ou Nitiobriges (étymologiquementnatifs,autochtones) édifièrent les premières agglomérations puis, après avoir été vaincus par Crassus le lieutenant de César en 56 avant J.-C., pactisèrent avec les Romains qui apportaient la prospérité et une paix salutaire. Les premiers évêques évangélisèrent la région, Caprais, Firmin, Martial ou Vincent, leur martyre contribua à l’emprise de la chrétienté sur le monde en déliquescence, sainte Foy participa aussi aux épreuves, juste après que survinrent e les hordes de barbares du III siècle, des Vandales et autres Alains ou Suèves qui dévastèrent tout sur leurs passages. Les Wisigoths s’établirent un temps, puis Clovis se pointa sur les bords de la Garonne afin d’inclure cette partie du territoire des Gaules dans ses domaines, après avoir tué à Vouillé le roi Alaric de ses propres mains. Les territoires impliqués dans l’Agenais allaient fluctuer entre les pattes des Mérovingiens et des Carolingiens, ballottés au gré de leurs partages patrimoniaux et successoraux, sans oublier le traumatisme généré par les invasions sarrasines qui ne purent être contenues puis refoulées qu’après la victoire de Poitiers par Charles Martel en 732. Un descendant de ce dernier, Charlemagne, créait le royaume aquitain après l’affaire de Roncevaux, avant que l’Agenais ne fût partagé entre les comtes de Toulouse, de Périgord ou d’Angoulême, précédant les incursions normandes. Casseuil en Agenais, Villa Cassinogilum, obtenait pour un temps la prééminence régionale avec la naissance de Louis le Débonnaire. Peu après, les Vikings pillaient, ravageaient, incendiaient le pays jusqu’à Agen, n’épargnant ni les abbayes, ni les châteaux, ni les cités, ni les fermes. Vers 1050, le comte de l’Agenais partageait le pouvoir judiciaire de haute et basse justice avec l’évêque d’Agen, jusqu’à ce que celui-ci, dans les décennies futures, n’en obtînt la prééminence. En dépit des troubles et de l’anarchie ambiante, les édifications se multiplièrent, soit le fait de seigneuries laïques, soit à cause des monastères, des prieurés et aussi des églises alors construites en grand nombre afin de rendre grâce au Seigneur. L’art roman intéressant les nombreuses érections, comme celle de la cathédrale d’Agen. Dans ces époques relativement obscures où la féodalité se mettait en place, intervint
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l’intrigue étrange de la fondation du monastère de Paradis près de Feugarolles. En 1130, le prieur de Bergerac expédiait pour l’abbaye bénédictine de Fontevrault vingt religieuses que l’abbesse Pétronille lui demanda avec empressement. Alors que ces Vierges dévolues au Seigneur voyageaient sur la Garonne à la hauteur de Port-Sainte-Marie, deux seigneurs de la rive opposée, Forcius de Vic et Amalvin de Paradis, de concert avec Raymond-Bernard du Fossat évêque d’Agen, se saisirent de la sainte barque et s’emparèrent du troupeau féminin sacré. On les séquestra dans l’église de Paradis afin de former une communauté religieuse du même nom. Un chroniqueur e local du milieu du XIX siècle commenta savoureusement l’incident : «On s’étonnera peut-être que des dames, envoyées dans l’Anjou par le prieur de Bergerac, se trouvassent sur la Garonne, en dehors de cette ligne droite que nous prisons si fort dans notre siècle de hâte et de précipitation. Mais nous ferons observer qu’en 1130 les chemins ne sont pas comme ceux d’aujourd’hui, que ces religieuses n’auraient pas forcément rencontré le respect dû à leur caractère virginal, et cela malgré la Trêve de Dieu qui les protégeait. Pour éviter ces véritables repaires de brigands, il leur fallut sans doute opérer plus d’un détour et plus d’une retraite… Il paraît que l’évêque d’Agen, lui-même, ne se dissimula pas le faux jour sous lequel la malignité pouvait présenter ce coup de main commis sur des personnes consacrées à Dieu, car dans une lettre qu’il écrivit à l’abbesse de Fontevrault, il la priait de ne pas médire de ce qu’il a fait, ce qui nous autorise à penser qu’au su de ce bon prélat, les nonnes du Moyen Âge n’étaient pas à l’épreuve de ce péché...» Les seigneurs du Paradis - le bien nommé - regrettèrent les biens dont ils avaient doté le monastère, quelques décennies plus tard Guillaume de Paravis, le patronyme désormais corrompu, envahit la communauté fondée par ses pères à la tête de ses gens, et la pilla après avoir tué les hommes qui la défendaient. On ne sait pas ce qu’il advint des religieuses et quel sort leur fut réservé, un voile pudique couvre ces évènements. Nonobstant le dramatique incident, l’histoire du couvent se poursuivit jusqu’à la Révolution.
Les ducs de Gascogne cédèrent le pas à la dynastie de celle d’Aquitaine établie à Poitiers, Aliénor épousait en 1137 le roi de France Louis VII qui enrichissait sa cou-ronne d’un quart des territoires de l’ancienne Gaule. Las, l’union ne dura pas, le couple divorçait quinze années après, la duchesse se remariait avec Henri Plantagenêt qui devenait en 1154 roi d’Angleterre. L’Aquitaine, pour trois siècles, intégra le royaume insulaire et mutait, par le fait, en objet de revendications dynastiques incessantes. À partir de ce moment-là, l’Agenais, institué en comté dirigé par l’évêque d’Agen, allait être tiraillé entre plusieurs maîtres à cause de ses avantages économiques, mais aussi en raison de sa position frontière entre les puissants suzerains et vassaux, entre Guyenne, Gascogne et Languedoc, entre le Bazadais et le Bordelais à l’ouest, le Périgord au nord, l’Armagnac au sud et le Quercy à l’est. Les domaines situés sur la rive droite de la Garonne restèrent pratiquement unis au cours du Moyen Âge, tandis que ceux de la rive gauche furent en partie rattachés à l’évêché de Condom, à la vicomté de Brulhois ou au duché d’Albret. Agen, l’ancienne cité gauloise qui devint la capitale de la petite province, après avoir été entièrement détruite par les Normands vers le milieu e du IX siècle, prit rapidement de l’importance, à la mesure de l’intérêt économique croissant de ses territoires.
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L’Aquitaine sous gestion anglaise, les rois insulaires se devaient de s’exprimer dans la langue du pays et de consommer abondamment le vin produit par cette région fertile lors de leurs libations au cours de leurs incessantes festivités. Le roi de France Philippe-Auguste chipotait à son vassal ces contrées, en 1189 il accentua son emprise et de multiples petits conflits embrasèrent la région. Cependant, les ducs ne restèrent maîtres de l’Agenais que jusqu’en 1196, date où on octroyait cette province aux comtes de Toulouse après le mariage de la sœur de Richard Cœur de Lion qui l’apportait en dot à Raymond VI, son nouvel époux. Ce dernier s’unissait pour la quatrième fois, ce n’était pas la dernière puisque Jeanne d’Angleterre mourra trois ans après son union et laissait à son fils (futur Raymond VII) l’Agenais par héritage. Ces évènements n’allaient e pas sans malversations, à la fin du XII siècle, les Anglais avaient ruiné entièrement les défenses de la ville d’Agen, après s’être abattus sur le pays pour s’en venger à la suite de quelques récriminations de la part des jurats qui ne voulaient pas honorer les taxes levées par les représentants de Richard (alors captif du duc d’Autriche Léo-pold, puis de l’empereur de l’Empire Germanique Henri VI). L’Entre-deux-Mers avait été dépouillé pour cette même raison. Désormais, après les épousailles évoquées ci-dessus, l’Agenais dans son entier devait appartenir aux comtes de Toulouse et à leurs ayant-droits, et se soumettre à leurs autorités, malgré les visées récurrentes les Plantagenêts qui eurent beau jeu de faire prévaloir leurs dépendances imbriquées sur ces terres hautement convoitées et l’antériorité de l’assujettissement de cette province à leur suzeraineté. Pendant les presque trois siècles qui suivirent, l’Agenais constitua une zone charnière entre l’Aquitaine et le Languedoc, entre l’influence de Bordeaux et de Toulouse, sans basculer définitivement dans l’une ou l’autre province. Les Anglais s’entêtaient à le joindre à leurs possessions de Guyenne, les souverains français le plaçaient sous la gestion des comtes de Toulouse dont les territoires étaient sous leur prépondérance, ou indirecte, ou franche. Déjà, dans le haut Moyen Âge, il s’agissait d’une « marche » entre les rois carolingiens et les remuants et belliqueux gascons, la frontière politique passant tantôt en aval, tantôt en amont d’Agen ; Clovis avait stoppé sa progression sur les rives de la Garonne. En 1217, le comte de Toulouse Raymond VII reprenait à son compte les prérogatives judiciaires dévolues aux évêques d’Agen, un sénéchal chargé de faire respecter les décisions et les droits du comté.
En 1229, le traité de Meaux qui achevait la deuxième croisade contre les Albigeois, restituait l’Agenais à Raymond VII, comte de Toulouse, alors saisi par le roi de France durant la durée du conflit religieux et l’expédition militaire. La province avait subi les ravages dus aux bandes armées à la solde de l’un ou l’autre des adversaires et s’en relevait difficilement, le sang avait coulé à Marmande, à Penne d’Agenais, ailleurs aussi. Lors, Agen devenait une cité axée sur la défense, on démolit les anciennes murailles afin d’inclure les faubourgs à la ville, on reconstruisit l’enceinte, des remparts flanqués de douze tours et ouverts de cinq portes. Malheureusement, l’édification rencontra de nombreux problèmes, en 1250, elle était à peine ébauchée, un siècle après, lors du début de la Guerre de Cent Ans, il manquait un périmètre considérable pour que la bourgade fût parfaitement à l’abri. En 1249, Alphonse de Poitiers, frère de Louis IX, devenait officiellement comte de
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Toulouse et, ainsi, souverain de l’Agenais. Il en obtenait le titre d’après les accords du traité de Meaux et son mariage avec la sœur du précédent souverain toulousain. Comme il était alors parti en croisade en Orient, ce fut son chapelain Philippe qui vint, en son nom, prendre possession du domaine. Le représentant fit part de la difficulté qu’il y avait de régner sur les territoires d’Agen en raison des franchises édictées de toute antiquité. En effet, il était obligatoire que le suzerain en personne vînt jurer devant les jurats, les barons et les chevaliers avant que ceux-ci n’obtempérassent, et il n’était pas question de déroger à cette règle. Les historiens ont listé les hommages et les redevances que les seigneurs devaient au comte de Toulouse, et furent surpris que ces obligations pécuniaires soient si modestes, si peu onéreuses. Souvent de peu de sous à quelques animaux, d’une pièce vestimentaire à des accessoires ou des ustensiles ménagers. Ce qui remit en cause les origines de la noblesse en Agenais, issue pour la grande majorité des gens d’armes qui accompagnaient leurs suzerains au cours de l’Ost, dotés d’une monture, les chevaliers… On cancana jusqu’à certifier e même que « durant la première moitié du XIII siècle, les conditions voulues pour être chevalier ne paraissaient pas avoir été aussi rigoureusement fixées qu’elles le furent plus tard. Bien des gens d’une noblesse douteuse recherchaient les honneurs de la chevalerie et suppléaient par le paiement d’une somme d’argent ce qui pouvait leur manquer du côté de la race… » En Agenais, il fut patent que tout bourgeois en acceptant le service militaire et montant à cheval, se plaçait dans les rangs des barons et des chevaliers… d’où un fractionnement féodal supplémentaire. e Vers le milieu du XIII siècle, on constatait le début de l’érection des premières bastides, tant du côté français qu’anglais, fondations impulsées par les comtes de Toulouse, essentiellement Alphonse de Poitiers, reprises par ses successeurs ou leurs adversaires. Le traité de Paris (parfois nommé d’Abbeville) de 1259 signé entre Louis IX et Henri III, rétrocédait à ce dernier l’Agenais avec de nombreuses autres provinces jadis lui appartenant, à condition de rendre hommage au roi de France. Quelque temps plus tard, le successeur de Saint-Louis remettait la main sur l’Agenais, prétextant de quelque nullité juridique car le comte de Toulouse en demeurait l’usufruitier. Vers 1270, on créait dans l’Agenais un tribunal criminel où siégèrent les édiles du chef-lieu. En 1271, le traité de succession d’Alphonse de Poitiers décédé apportait dans l’escarcelle du roi de France, avec le territoire du comté toulousain, l’Agenais et ses dépendances. Cela ne dura pas, par le traité d’Amiens signé en 1279 de la main de Philippe III le Hardi, à nouveau ce dernier territoire revenait directement dans la gestion des Plantagenêts. Pourtant l’Agenais connaissait un nouveau soulèvement et rallumait la querelle entre les deux pays. Philippe IV le Bel, après une expédition militaire en 1292 puis après avoir un temps confisqué la Guyenne, confirmait les droits du roi d’Angleterre sur l’Agenais et la province entière en 1303, traité qui entérinait la conclusion de la guerre de Gascogne initialisée quelques années auparavant. e Le XIII siècle si instable, enregistrait pourtant l’érection de nombreuses bâtisses édifiées dans le style gothique, comme l’église de Notre-Dame des Jacobins à Agen. L’architecture militaire ne fut pas en reste, ainsi qu’ailleurs la province se dota de places fortes redoutables afin de protéger les terres sous leur obédience ou, hélas, pour servir de repaires inexpugnables à des hobereaux sans foi ni loi. Le bordelais
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Clément V avait été élevé par les Grandmontains dans le monastère de Deffends, situé près d’Agen, à la tête de la papauté installée sur les bords du Rhône.
L’Agenais allait subir des contraintes territoriales importantes, un pays aussi riche-ment servi par la nature, aussi opulent d’agriculture, de cueillettes et de récoltes, suscitait bien des convoitises. D’abord en 1290, par la vicomté de Brulhois qui se développa et à laquelle on rattacha de nombreuses terres. Des fiefs furent distraits de la province agricole et opulente, situés au sud de la Garonne. Cette seigneurie du sud de l’Agenais appartenait à la Gascogne sous influence toulousaine mais aussi sous celle des puissants comtes d’Armagnac. En 1317, le pape Jean XXII créait l’évêché de Condom, et ces dispositions enle-vèrent les terrains associés au diocèse d’Agen, la plus grande partie des territoires de l’Agenais sur la rive gauche de la Garonne. La chrétienté établit quatre archiprê-trés. Cependant, les juridictions administratives et judiciaires se superposaient, se chevauchaient parfois, dans une confusion des plus absconses, propre aux époques médiévales. L’utilisation de la Garonne facilita un peu les choses, le fleuve, ligne de partage géographique, permettait une partition structurante, obstacle à la circulation terrestre mais aussi limite naturelle indispensable. Les droits du Brulhois, gérés jadis par la vicomté de Béarn, passèrent de l’évêque d’Agen à celui de Condom, mais le suzerain supérieur demeurait le comte de Toulouse jusqu’à ce que les aléas de l’his-toire ne fissent diverger ces dispositions déjà compliquées. L’Albret devait aussi prélever quelques sols en Agenais. Les seigneurs de cette modeste châtellenie située au cœur des landes désolées, sur la paroisse de Labrit, ces étendues désertiques qui chagrinaient les rares visiteurs, connurent un destin étonnant qui les menèrent en quelques siècles d’un petit fief à la couronne de France. Race dure et belliqueuse, âpre aux gains, les représentants justifiaient le proverbe qui indiquait le Gascon « convoiteux », un pays qui fournissaient d’excellents soldats « légers de tête mais bonnes gens d’armes ». Un ambassadeur en fit un portrait édifiant : «Les villages n’apparaissent que là où un bouquet d’arbres ou une source leur a donné naissance ; partout ailleurs le terrain n’offre ni agrément ni utilité. Le parcours en est fort difficile ; on s’enfonce dans le sable, où l’on s’embourbe dans les eaux qui le détrempent et en font une boue tenace dont on ne voit pas la fin… Ce qui augmente encore la fatigue du voyage, c’est qu’il faut chercher la route, obstruée et cachée par d’interminables champs de tamarins et de fougères…» L’immense plaine landaise appartenait presque tout entière aux sires d’Albret, un bien maigre patrimoine qui avait l’avantage de décourager tout éventuel assaillant, obstacle insurmontable aux invasions. Pourtant ce désert possédait une importance militaire exceptionnelle et défendait Bordeaux et la Garonne mieux que n’eût fait la plus formidable des armées. e e Du X au XIII siècle, les représentants de la famille prirent part aux principaux évè-nements de l’histoire médiévale du midi de la France, leur bonne fortune s’intensifia au fur et à mesure que le conflit entre les grands suzerains se développa et atteignit sa phase critique. Après avoir servi, non sans gloire ni sans profit la cause anglaise, ils se rangèrent définitivement du côté français pendant la guerre de Cent Ans, comblés par les faveurs royales. Les riches mariages, les arrangements patrimoniaux et succes-soraux judicieux parachevèrent leur ascension jusqu’au plus haut sommet de l’État.
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e Ce fut vers le milieu du XIII siècle que les sires d’Albret récupéraient quelques fiefs impactant l’Agenais, du côté de Casteljaloux, tendant à s’accroître vers la Garonne. Sous Charles V, ils s’établissaient en seigneurs péagers sur les deux rives du fleuve, accentuant leur développement vers le nord de leurs domaines qui s’étendaient alors aux confins du Bordelais jusqu’à l’océan Atlantique, aidés en cela, disait-on, par une e armée de hors-la-loi rustiques et insatiables. Depuis le début du XIV siècle, la cité de Nérac - obtenue après un accord avec l’abbaye de Condom -, après celle de Cas-teljaloux, était devenue leur résidence habituelle, autre terre du sud de la Garonne distraite de l’Agenais et soumise à leur emprise. Cela, comme nous le savons, n’allait point suffire à leurs ambitions…
L’Agenais se constituait de grandes seigneuries, outre celle du Brulhois déjà évo-quée mais détachée de la province sous l’influence des évêques d’Agen, il existait des familles illustres qui possédaient des domaines imposants. Les seigneuries de Caumont, de Duras, de Fumel, de Lauzun, de Montpezat, et d’autres encore. Tous ces feudataires se chipotaient continuellement afin d’agrandir leurs fiefs, et si les arran-gements maritaux ne suffisaient pas, les batailles leur permettaient de retirer pour leur profit personnel des terres, des châteaux, des redevances, les fruits des rançons et des pillages, des charges gratifiantes et des honneurs. Les échanges, les achats, les donations, les conquêtes, les usurpations imposées par la violence, les alliances et les héritages complétaient la panoplie de ces grands seigneurs toujours avides au profit, et donc à la puissance. Il en résulte qu’à cause de ces bouleversements continuels, il est presque impossible de dresser la carte des limites des juridictions de l’Agenais au e XIII siècle. La multiplicité des petits fiefs du fait de la promotion de bourgeois ayant participé aux combats en tant que chevaliers, ajoutait à la difficulté de l’entreprise. En 1259, les vassaux agenais du comte de Toulouse qui consentirent aux hommages dus à leur suzerain étaient au nombre respectable de 150 individus. Ils pouvaient être parfois chevalier sans terre, et l’on tenta d’établir une liste qui séparait la noblesse d’origine chevaleresque avec celle de naissance féodale. Un autre problème intervint dans le processus des devoirs seigneuriaux en Agenais. Les barons désiraient jouir des mêmes privilèges que ceux accordés à la cité d’Agen, et tentaient d’échapper aux obligations du service militaire que leurs ancêtres avaient négociées. Ils pouvaient construire des châteaux forts sans en demander l’autorisation à quiconque. Ainsi, à cette époque, on recensa plus d’une soixantaine de forteresses, bientôt complétées d’une quarantaine d’unités. En Agenais, outre le Condomois et le Brulhois, il existait plus de deux cents juridictions seigneuriales, sans oublier les possessions des grands feudataires, celles particulières des évêques d’Agen, des Templiers et des Hospitaliers nullement mentionnés dans les hommages aux comtes de Toulouse.
L’incident de Saint-Sardos, bastide de l’Agenais, mit à nouveau le feu aux poudres, après d’autres péripéties similaires, entre les deux grands suzerains qui se disputaient l’Aquitaine. Le roi de France permettait l’édification d’une nouvelle ville neuve en ce lieu, les terres revendiquées par le souverain anglais, mais sous gestion effective du monastère de Sarlat, lui-même relevant du monarque français. Le 16 octobre 1323, le seigneur de Montpezat détruisait entièrement le chantier et faisait pendre le
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