Le moment 1940

Pierre Allorant, Noëlline Castagnez, Antoine Prost

Description

Cet ouvrage s'intéresse aux moments indécis de 1940. Son ambition est donc de saisir ce "moment" à la fois par en haut, avec l'effondrement de la IIIe République et l'instauration du régime de Vichy, et par en bas, par le prisme des réalités départementales et locales : l'articulation des niveaux est particulièrement illustrée par le procès de Jean Zay et par l'action technocratique du préfet Morane.

Sujets

• Histoire
• Seconde Guerre mondiale

Informations

• Publié par: L'Harmattan
• Date de parution: 01 mai 2012
• Nombre de lectures: 15
• EAN13: 9782296489523
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 3 Mo

Extrait

Le moment 1940

Collection Cliopolis

Sous la direction de
Pierre Allorant, Noëlline Castagnezet Antoine Prost

Le moment 1940
Effondrement national et réalités locales

Actes du colloque international d’Orléans,
les18 et19 novembre2010

© L'HARMATTAN, 2012
5-7, rue de l'École-Polytechnique, 75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com
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ISBN : 978-2-296-96634-5
EAN : 9782296966345

Sommaire

Introduction,Pierre Allorant, Noëlline CastagnezetAntoine Prost

I - L’étrange défaite
1.L’Étrange défaitede Marc Blochrevisitée,
Jean-LouisCrémieux-Brilhac
2. La Campagne de France, FrançoisCochet
3. Lesétrangersdansl’armée, Marie-Claude Blanc-Chaléard
4. Lespopulationsciviles: le casde la Somme en 1940,
Philippe Nivet
5. Lesortdescollectionsdesmuséesnationauxen 1940,
Philippe Tanchoux

II - La mort de la République
1. Le gouvernementPétain du16juin au10juillet1940,
Serge Berstein
2. La controverse juridique : 16juin ou10juillet?, Antoine Prost
3. Le gouvernementde Vichy sousleregard desétrangers,
RobertFrank
4. Le procèsde Jean Zay. Faire justice de Vichyannée 1940,
OlivierLoubes

III - Vichy et l’Anti-France
1. L’évolution du régime du10juilletau 24 décembre 1940,
Jean-Pierre Azéma
2. Reconstruction nationale et urbanismetechnocratique :l’action
pionnière dupréfetMorane, Pierre Allorant
3. Le parti communiste françaisen 1940, Annette Wieviorka
4. Larésistance annéezéro, Alya Aglan

IV - Un département à l’heure allemande
1. LesAllemandsdansle Loireten 1940, Gaël Eismann
2. L’arrivée dupréfetMorane à Orléans, BenoîtVerny
3. Entreprisesetpopulationsface aux restrictionsdansle Loiret,
Jean-Marie Flonneau
4. Saisonsportive et tempsde guerre. Un autrerécitorléanaispour
l’année 1940, Patrick Clastres
5. Vie et survie du théâtre municipal d’Orléansen 1940, Éric Cénat
6. Beaugencyen 1940, JacquesAsklund

Conclusions,Julian Jackson
Repères chronologiques sur le moment 1940
Index des noms propres
Index des noms de lieux
Index thématique

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Introduction

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Pierre Allorant, Noëlline Castagnez et Antoine Prost

Le terme de «moment »n’est pas ici coquetterie de langage: c’est le mot
propre.Il convientmieuxquetoutautre pourcaractérisercettesingulière année
1940, quivda de la «rôle de guerre »à «l’étrange défaite ».Ilvienten effetdu
latin «momentum», qui désigne le poids,si minimesoit-il, qui faitpencherd’un
côtéune balance en équilibre. Le « moment» estcetinstantdu tempsoùl’avenir
semble hésiteretoù, finalement, l’histoire basculevers un futurque leschoixdu
présentengagent sansen mesurer touslesdéveloppements.
Or, précisément, notre premier souci étaitderendre à l’année 1940 toute
son incertitude. Leshistoriensont surlescontemporains un immense avantage :
ils viennentaprès. Mais tropsouvent, ilsécriventl’histoire à la lumière de ce qui
estadvenuensuite. Jean-Pierre Azéma en faisaitdéjà laremarque ens’efforçant
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d’écrire l’histoire de la campagne de 1940 sans se laisserinfluencerpar son issue.
Il est trèsfacile d’expliquerque ce qui estarrivé devait se produire, maisces
narrations téléologiques rendentimpossible la compréhension des
contemporains. Notre ouvrage a pourorigine lesdébatsd’acteursculturels
locaux, etnotammentduCercil (Centre d’étudesetderecherches surlescamps
d’internementduLoiret), quisouhaitaientanimer uneréflexionsurla façon dont
lesOrléanaisavaient vécul’année 1940. Or, dèslespremierséchanges,un fait
s’imposa avecune évidence incontournable : lesOrléanaisde 1940, commetous
lesFrançais, nesavaientpasce qui allaitadvenir. La mémoire des terribles
combatslocauxde 1870etde l’occupation quisuivitalorsla défaite avait
disparu. Ilsn’avaientenvisagé ni la débâcle, ni l’exode, ni la défaite. Ilsn’avaient
pasimaginé que leur villeseraitbombardée, occupée parlesAllemands. Etla
catastrophe nationale lesa laissésabasourdis. Audébutde juillet1940, personne
nesaitde quoi l’avenir sera fait. Pour reprendre lesconceptsde Reinhart
Koselleck, le champ d’expérience desFrançais, construità partirdes réalitésde
1914-1918 etdespratiquesde la démocratie parlementaire, avecseslibertés
statutaires,s’estdésagrégé. Il n’a plusaucune pertinence pourcomprendre le
présent. Quantà l’horizon d’attente, il estdésespérémentobscur: nul nesait
commentlasituation peutévolueretlesespoirsoulescraintes tiennentlieude
prévisions.
Nousnous sommesdonc intéressésprioritairementauxmomentsindécis,
etd’abord auxdeuxgrandsbasculements, auxdeuxgrandseffondrementsde

1
Pierre Allorant, maître de conférences-HDR en histoire duDroità l’université d’Orléans
LCT;Noëlline Castagnez, maître de conférencesen histoire contemporaine àl’université
d’OrléansSavours ;Antoine Prost, Professeurémérite d’histoire contemporaine à
l’université de ParisI Panthéon-Sobonne.
2e
Jean-Pierre Azéma etMichel Winock,République : 1870-1940,La IIIParis, Calmann-Lévy,
1969, coll. « Naissance etmort».

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Le moment 1940

l’année 1940, militaire puis politique. Dans quelle mesure étaient-ils prévisibles ?
Obéissent-ilsà des tendanceslourdesetdurables, à descontraintesqui les
déterminent, ou résultent-ilsd’accidentsde l’histoire, de choixde certainsacteurs
à certainsmoments? Laréponse, ons’en doute, n’estpas simple, etl’ons’est
efforcé ici de peserauplusjuste lerôle descausesprofondesetcelui des
événements.
Lerésultatne manque pasd’intérêt. La défaite a été présentée parle
gouvernementde Vichycomme la conséquence malheureusementinévitable
d’unesérie de fautescommisesparlasociété française etparla République,
singulièrementcelle duFrontpopulaire :trop peud’hommes,trop peud’armes,
trop peude patriotisme et trop de politique politicienne. D’une certaine manière,
cette interprétation a été communémentacceptilée :ya là commeunevictoire
idéologique de Vichy, ainsi que RobertPaxton lesoutenaitdans un article
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récent. Depuis une quinzaine d’années, leshistoriensallemands, britanniqueset
françaisontassezprofondément révisé cette présentationsimpliste etmontré
que la défaite militaire n’étaitenrien fatale. Elles’estjouée dans unesérie de
décisions, politiquesetmilitaires, aussi bien allemandesque françaises. De
même, levote du10juilletn’étaitpasla conséquence inéluctable du traumatisme
politique de l’armistice :d’autreséventualitéspouvaientêtre envisagées, qui
restaientdansle cadre de la légalitérépublicaine. Certainsparlementairesne
pensaientpasassassinerla République en donnantlespleinspouvoirsau
Maréchal Pétain. Comprendre commentlerégime a étérenversé exige
d’examinerde prèslesjournéesquivontdu16juin au10juillet. L’histoire
événementielle atteste ici desa modernité.
Pluslargement, lesdifférentschapitresde cevolume mettentenrelief le
contraste entre ce qui étaitprévu, etce quis’estpassé. Parfois, le prévu seréalise,
grâce au travail d’une administrationstable etprofessionnelle, comme le montre
la mise ensécurité descollectionsdesmuséesnationaux. Mais surdespoints
plusdécisifs,rien nese passe comme prévu. C’estle caspourlescombatsde
mai-juin. L’improvisation prévaut. L’évacuation despopulationscivilesau sud de
la Loire en est un exemplesaisissant. L’autorité militaire – donton oublietrop
souventque l’étatd’urgence envigueurlui donnaitd’immensespouvoirscivils–
larefuse aupréfetquand il estencoretemps, pourl’ordonneraudernier
moment, provoquantainsi l’encombrementdes routes, et surtoutdesponts,
nécessairesau r