Les Immortels et la Révolution
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Les Immortels et la Révolution , livre ebook

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Description

La Révolution a marqué la vie de l’Académie française de manière impitoyable. Bailly, Condorcet, Malesherbes et certains membres de l’Académie furent engagés dans des situations aussi improbables que dramatiques. Yves Pouliquen décrit avec son talent littéraire unique les comportements de ces personnages. Il en dresse des portraits vivants et saisissants. Ce livre raconte l’engagement des académiciens à une époque où la défense des idées n’a jamais eu autant de conséquences sur la vie et le destin des hommes. Yves Pouliquen restitue toute l’effervescence, la complexité et le tragique de cette période. Un ouvrage passionnant sur les rapports entre l’Académie française et le pouvoir politique en place, de la Révolution au retour de la monarchie au XIXe siècle. Le professeur Yves Pouliquen est chirurgien, spécialiste internationalement reconnu de la chirurgie oculaire. Il a dirigé le service d’ophtalmologie de l’Hôtel-Dieu de Paris. Il est membre de l’Académie française et de l’Académie de médecine. Il a notamment publié Le Geste et l’Esprit, Lunettes ou laser ? (avec Jean-Jacques Saragoussi), La Transparence de l’œil (prix mondial Cino Del Duca), Un oculiste au siècle des Lumières, Jacques Daviel et Les Yeux de l’autre, qui ont eu beaucoup de succès.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 30 octobre 2019
Nombre de lectures 0
EAN13 9782738149688
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0900€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

© O DILE J ACOB , NOVEMBRE  2019 15, RUE S OUFFLOT , 75005 P ARIS
www.odilejacob.fr
ISBN : 978-2-7381-4968-8
Le code de la propriété intellectuelle n'autorisant, aux termes de l'article L. 122-5 et 3 a, d'une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l'usage du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute représentation ou réproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (art. L. 122-4). Cette représentation ou reproduction donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo .
« Il y avait un bon nombre parmi nous qui était résolument révolutionnaire dans toute la force du mot : La Harpe, Target, Ducis, Sedaine, Lemierre, Chamfort, Condorcet, Chabanon, Beauzée, Bailly, etc. Du bord opposé Marmontel, Gaillard, le maréchal de Beauvau, Bréquigny, Barthélemy, Rulhière, Suard, Saint-Lambert, Delille, Vicq d’Azyr et moi… »
Abbé M ORELLET , Mémoires inédits 1 .
Prologue

Nulle époque n’a marqué la vie de l’Académie française aussi implacablement que la Révolution et n’a engagé ses membres en d’aussi improbables et dramatiques situations. Il est vrai qu’elle était au regard des partisans d’une transformation radicale du gouvernement de la France l’une des institutions les plus symboliquement marquées du sceau royal et, à ce titre déjà, depuis longtemps l’objet de critiques, en fait plutôt destinées à ses élus qu’à sa propre existence. Une tendance qui va rapidement trouver en l’atmosphère de la jeune Assemblée nationale des arguments mettant en doute sa légitimité, ses règles, la manière d’élire ses membres et laissant poindre en ses débats, et, dès l’automne 1789, chez certains de ses membres, le désir d’en exiger la suppression. Pourtant la majorité des académiciens reconnaissent a priori en la décision qu’a prise le souverain de réunir les États généraux une initiative heureuse dont ils espèrent qu’elle mettra fin aux errements d’un pouvoir incapable de résoudre les difficultés auxquelles était confronté le royaume. Certains même et non des moindres y voient enfin les raisons de doter la France d’une Constitution assurant celle-ci d’un régime imposant au souverain le partage consensuel du pouvoir. Un pouvoir jusque-là sourd aux idéaux que les Lumières ont fait naître chez les élites aussi bien qu’au sein des clubs et sociétés populaires et que l’Académie a largement contribué à cultiver dans ses rangs, en dépit des plus conservateurs de ses membres. En témoigne le grand nombre de ceux-là à diriger la rédaction des cahiers de doléances, à préparer leur élection dans l’un ou l’autre des trois ordres, briguant le statut de député de l’Assemblée nationale. Avec les conséquences d’en vivre les particularités au sein même de l’Académie, en un espace clos, en lequel chacun de ses membres, muni ou non d’un mandat politique, allait trouver l’obligation avouée ou non d’un engagement placé sous le regard plus ou moins critique de ses confrères. Dans un milieu déjà fort singulier où, détenteur du privilège d’y avoir été admis, l’élu entretient des relations aussi bien avec ceux qui lui ont été favorables qu’avec les autres, ceux qui ne l’étaient guère et avec lesquels il a composé une sorte de gentleman agreement plus ou moins aisé. Résultat d’un jeu académique en lequel la nature humaine a trouvé l’une des plus stimulantes façons de se distinguer, et dont les ressorts appartiennent en propre à chacun de ceux qui s’y soumettent.
Aussi l’histoire de l’Académie fut-elle riche de soubresauts, de complicités ou d’inimitiés durables, dans une compagnie qui pendant presque deux siècles a su réunir ses membres trois fois par semaine. Hélène Carrère d’Encausse nous en a livré dans Des siècles d’immortalité 1 l’histoire exhaustive, celle des hommes, des faits, des débats, des élections et des tourments politiques qui ont marqué, jusqu’à nous, ses jours. Dans ce contexte fort singulier, disait-on, en lequel la fréquence avec laquelle ses membres se retrouvent reste comparable à celle qu’ils entretiennent avec leurs amis voire leur famille. Celle que marquent une solidarité d’intérêt qui va de soi mais aussi des relations plus ou moins étroites, voire hostiles au fil d’un si long temps partagé. Des rapports humains tels qu’aucune des guerres intestines qui s’y sont entretenues depuis 1635 n’ont mis cependant en danger l’Académie française.
Certes, des incidents notoires en ont troublé à plusieurs reprises les jours. Souvenons-nous qu’à peine née en 1637 elle avait dû affronter l’une des plus âpres polémiques littéraires du XVII e  siècle, lancée par deux de ses membres, Georges Scudéry et Jean Mairet contre Corneille, dont la pièce Le Cid avait trouvé auprès du public un très chaleureux accueil. Cette Querelle du Cid à laquelle Richelieu sera contraint de mettre autoritairement fin. Ce qui n’empêcha pas en 1647 Corneille d’y trouver un fauteuil.
Cinquante ans plus tard, en 1685, c’est l’affaire Furetière qui a troublé l’Académie. Se disant agacé par la lenteur avec laquelle s’élabore la rédaction du dictionnaire et, contrevenant à son formel engagement, il ose publier le sien tout en s’appropriant des définitions et des textes rédigés avec ses confrères. Ceux-ci lui en font immédiatement procès et votent à l’unanimité moins une voix son exclusion, la première de la compagnie ; une décision qui va laisser, selon la règle, son fauteuil vide jusqu’à sa mort. Tout aussi importante sera en 1718 l’affaire de l’abbé Saint-Pierre 2 qui va être à l’origine de l’une de ces péripéties que l’on dénomme la Querelle des Anciens et des Modernes . C’est la publication en 1718 de son ouvrage La Polysynodie ou la Pluralité des conseils en lequel il exalte la manière de gouverner du régent alors aux commandes de l’État qu’il oppose d’une manière péremptoire à ce que fut celle du défunt Louis XIV jugé par lui tel un despote. L’Académie s’en offusque et, sous le prétexte de venger l’injure faite aux cardinaux et maréchaux siégeant en son sein, demande sa radiation. Sanction votée à l’unanimité moins une voix. Radiation transformée en exclusion par le régent laissant ainsi son fauteuil vide jusqu’à sa mort en 1743. Ce sera en 1760 l’affaire Le Franc de Pompignan, dont l’agressive péroraison de son discours de réception stigmatisant outrancièrement les philosophes offre à Voltaire l’occasion de libelles et de pamphlets féroces à son égard et celle d’imposer définitivement au sein de la compagnie les atouts des Lumières.
Mais il est aussi, au sein de l’Académie, des joutes plus anodines, par exemple celle qui va opposer les admirateurs de Gluck et sa nouvelle manière d’écrire des opéras aux piccinistes, en référence à Nicolas Piccini défenseur ardent de l’opéra italien, celui que Gluck se permet de réécrire, en l’altérant dit-on.
Des soubresauts agitent ainsi les rangs de l’Académie lors des élections mais n’en dispersent ses membres que dans des oppositions à grands effets de manche et seulement orales. Mais au total des conflits, dont la Révolution consacre la bénignité relativement aux incomparables bouleversements qu’elle allait imposer aux académiciens, portant les uns et les autres à des engagements, des décisions qui surprendront et sépareront, au gré des événements, les partisans convaincus du bien-fondé des réformes que l’on impose, quels qu’en soient les moyens, de ceux que celles-ci vont figer dans une opposition farouche – sous le regard inquiet d’une majorité dont le seul souci allait être de survivre à des conditions qui les atteindraient tous, sans exception, dans leurs biens sinon dans leur vie. La part que prit l’Académie dans ces événements au travers de ses acteurs les plus engagés reste impressionnante. Même si apparemment la consultation des registres de l’Académie démontre qu’en ces instants historiques rien ne semble troubler la régularité, la tenue des séances ni même la présence de ses membres en ce palais du Louvre autour duquel pourtant vont se dérouler de terribles moments. Et jusqu’en 1793, il en sera de même sinon lors de la survenue d’un événement particulièrement important justifiant le relâchement de l’assiduité de quelques-uns d’entre eux, voire un éclaircissement notable de leurs rangs. Toutefois le climat des séances académiques traduira au fil du temps d’une façon insidieuse ou parfois brutale la tournure des événements. C’est ainsi que l’agitation qui accompagnera les premiers jours de la Révolution substituera à la courtoisie ordinaire de ses membres des échanges plutôt vifs. Si l’on en croit l’abbé Morellet  : « Les propos aimables d’autrefois [y] dégénéraient en querelles habituelles. Les moins mauvais se taisaient, d’autres ne craignaient pas de faire l’apologie des plus grandes cruautés 3 … », allusion aux violences qui marqueront les dernières sessions. Tous soucieux cependant de protéger une Académie soumise à l’opposition des assemblées et, malgré certaines trahisons, de la restaurer après sa suppression dès que se rétablira après Thermidor une apparente paix civile. Conscients néanmoins que les nouveaux maîtres des régimes qui vont se succéder n’auront guère l’intention de renouer avec les usages d’antan mais suffisamment habiles pour entretenir la nostalgique image de ces académies royales, désormais fondues dans le cadre de l’Institut nouvellement créé. Une intention qui servit toutefois davantage les scientifiques et les idéologues que les hommes de lettres. Les élus de feue l’Académie française en seront à l’exception de trois d’entre eux volontairement écartés. Brumaire enfin les sollicitera et ce sera sous l’impulsion de ces élus d’autrefois, de ces témoins des règles de l’Académie, que renaîtra une seconde classe à laquelle on n’osera pas restituer toutefois l’app

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