SEPHARADES DE TURQUIE EN ISRAEL
208 pages
Français

SEPHARADES DE TURQUIE EN ISRAEL , livre ebook

-

208 pages
Français

Description

Il y a un peu plus de cinq cents ans les Juifs étaient chassés d'Espagne sur l'ordre des Rois catholiques. C'est à ceux de leurs descendants qui, par des chemins mal connus, ont migré en Turquie et sont maintenant en Israël, mais ont conservé jusqu'à aujourd'hui la langue de leurs ancêtres - le djudezmo - que cette étude est consacrée.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 avril 1999
Nombre de lectures 116
EAN13 9782296386594
Langue Français
Poids de l'ouvrage 5 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0800€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

SÉPHARADES DE TURQUIE
EN ISRAËL
Éléments d'histoire et de
culture des Judéo-Espagnols~ L'Harmattan, 1999
ISBN: 2-7384-7790-9Emmanuelle Simon
SÉPHARADES DE TURQUIE
EN ISRAËL
Éléments d'histoire et de
culture des Judéo-Espagnols
Préface de Albert Bensoussan
L'Harmattan Inc.L'Harmattan
55, rue Saint-Jacques5-7, rue de l'École Polytechnique
Montréal (Qc)75005 Paris -FRANCE - CANADA H2Y IK9À ma grand-mère
Rachel SidèsPRÉFACE
"Vous appelez Ferdinand un monarque avisé, mais en chassant
les Juifs il a appauvri son empire et enrichi le mien". Cette phrase
désonnais emblématique - du sultan Bajazet II, qui
accueillità bras ouverts les Juifs chassés d'Espagne en 1492 par les Rois
Ferdinand d'Aragon et Isabelle de Castille -,Catholiques -
devrait être méditée par tous ceux qui, de nos jours, pensent
encore que c'est en excluant d'une communauté nationale les
que l'on pourracorps étrangers - ou perçus comme tels -
améliorer les crises économiques. Les individus et les peuples
constituent une richesse humaine inestimable, et nous pouvons
juger, à rebours, que l'exil forcé des Annéniens au début du siècle
fut dommageable d'abord à la Turquie et profitable à la France qui
sut les accueillir et leur pennettre d'occuper la place éminente
que l'on sait. Les Juifs furent assurément le peuple le plus ballotté
de l'histoire, mais qui niera que partout où ils trouvèrent refuge ils
surent survivre, et plus encore, rayonner d'un éclat particulier?
Emmanuelle Simon, aujourd'hui docteur d'université pour des
travaux convergents qui intéressent les minorités, nous donne ici
une étude éclairante et originale sur les "Sépharades de Turquie"
ces Juifs espagnols qui, réfugiés dans ce pays à la fin du
xvesiècle, ont su préserver, au fil des siècles, un héritage espagnol
précieux et métissé, fait de langue, de culture et de coutumes.
C'est à la langue d'abord que s'intéresse cette étude. Le
djudezIDo est l'état actuel de l'espagnol du XVe siècle parlé par
les Juifs de Turquie. Un espagnol archaïque, mâtiné de cette
lingua franca ou sabir alors en usage dans tout le bassin
méditerranéen, et bien entendu de mots turcs ainsi que de tennes
hébraïques. Ce judéo-espagnol, certes en perte de vitesse n'est pas
mort aujourd'hui et on continue à le parler, dans certaines
communautés, et à l'étudier. On a d'ailleurs publié récemment un6
dictionnaire et une grammaire du judéo-espagnol. Sans parler du
disque qui ne cesse de populariser ce folklore. C'est cette vie
linguistique qui intéresse Emmanuelle Simon lorsqu'elle se rend
en Israël, au Moshav de Burgata, pour y rencontrer sa famille, les
parents de sa mère, Ida-Inès Barouh, et qu'elle s'entretient là en
judéo-espagnol. On trouvera dans cette étude de longs et
savoureux dialogues dans cette langue, avec des proverbes
éclairants tels que "El padre grande di6 al tchico I Y el tchico di6
al sus ijicos" [Le grand-père donna à son fils et le fils donna à ses
enfants]. C'est, en effet, de transmission d'héritage qu'il s'agit ici,
d'héritage culturel. La famille Sidès, ou branche grand-maternelle,
est exaltée en majesté, dans son milieu "naturel" qui est moins la
terre israélienne que celle de sa culture. "Montée" - comme l'on
dit (c'est le sens du mot alya) - d'Édirné (autrefois Andrinople) à
Burgata en 1949. Il Y avait là vingt familles originaires d'''Iderné''
(comme ils disent) constituant un "moshav turco" devenu bientôt
creuset national, car, comme l'écrit E. Simon, "On est désormais
et avant tout Israélien, c'est-à-dire que l'on fait partie d'une nation
avec son territoire, sa langue, ses coutumes nées du mélange des
multiples éléments apportés par chacun". Mais sans abdication de
la culture de départ.
C'est justement cet apport original des Juifs de Turquie
qu'aborde en second lieu cette étude particulièrement riche et
fouillée dès lors qu'elle envisage les coutumes, en particulier
alimentaires. Comme l'a pertinemment montré Joëlle Bahloul
dans son Culte de la table dressée, c'est dans la cuisine que se
conserve une âme, et rien n'est plus révélateur de la cohésion du
groupe, de la personnalité de l'ethnie que la façon d'apprêter
courgettes (les calavasas) et aubergines (les merendjenas) ou de
farcir les feuilles de vigne (les yapiakes). Les solennités juives
sont évidemment le prétexte à des rites culinaires spécifiques
consciencieusement exposés ici : ainsi à Pesah, la Pâque juive,
les fameux burmuelos de espinaka qui sont des beignets d'épinard,
ou les panizicos tchikiticos (petits pains) avec lesquels sera rompu
le jeûne du Kippour. Cependant Emmanuelle Simon pose bien le
problème: l'identité des Sépharades de Turquie peut-elle se7
ramener seulement au djudezmo et aux borrecas (chaussons à la
viande, au fromage, aux légumes) ? Certes non, nous dit-elle, car
il resterait à étudier, plus noblement, la culture écrite: les livres,
cettel'art, la presse qui ont traduit - ou qui traduisent encore -
personnalité. C'est à cela que s'emploie aujourd'hui, par exemple,
l'Institut Sépharade Européen de Bruxelles (dirigé par Moïse
Rahmani) dont le site Internet est rédigé en espanyol (c'est-à-dire
en judéo-espagnol), c'est cette culture que diffuse en France une
revue telle que La Lettre Sépharade (dirigée par Jean Carasso).
Non, les Juifs qui sont gens mémorieux, ne laisseront pas perdre
cet héritage culturel. Pas plus que les Espagnols, qui revendiquent
aujourd'hui "ce capital" et tentent de rassembler les tribus
dispersées, n'entendent renoncer à cette part de leur passé. Et ce
petit livre d'Emmanuelle Simon, si bien documenté, si riche de
savoir et d'émotion, montre bien qu'elle aussi, précieux fruit du
métissage, a le culte de la mémoire.
Albert Bensoussan8
Les proscrits
"Quand, dans les galions lourds d'une triste charge,
Les éternels proscrits erraient de mers en mers
Et demandaient asile avec des cris amers,
Les peuples, les voyant passer, criaient: Au large!
Car, ces proscrits c'étaient les membres mutilés
D'un peuple que l'horreur en tous lieux accompagne;
C'étaient des Juifs; c'étaient les Juifs chassés d'Espagne...
Malheur! IEspagne avait chassé des exilés...
Oh ! ce qu'elle avait fait à ce peuple rebelle,
Aux enfants dispersés du grand peuple vaincu!
Opères! À Titus n'aviez-vous survécu
Que pour tomber aux mains des prêtres d'Isabelle?
Mais elle avait alors épuisé les tortures
Et les inquisiteurs s'y étaient trop complus.
Que vous dirais-je, enfin, les Juifs n'amusaient plus...
À quoi bon désormais ces tristes créatures?
Qu'en faire? Fallait-il les envoyer mourir
Alors que ce spectacle avait blasé ta foule?
Et les Torquemada pensaient sous leur cagoule:
Ils ont assez souffert, devons-nous les souffrir?
- Allez-vous-en ! Prenez vos sœurs! Prenez vos femmes!
Reprenez vos captifs: nos toros sont meilleurs.
Dehors! Allez vous faire écarteler ailleurs.
Vous nous avez blasés: vous êtes des infâmes...
Hors d'ici ceux que rien, rien ne fait plus gémir,
Ceux, qui sans hurlements endurent les supplices,
Ceux, dont l'auto-da-fé ne fait plus nos délices;
Hors d'ici ceux, dont l'œil serein nous fait frémir...9
Qu'ils s'en aillent! Allons, voici que le flot monte...
Ne comprenez-vous pas que nos lâches affronts
Des palmes des martyrs auréolent leurs fronts,
Et que nous pourrions, nous, en avoir de la honte ?...
Et les Juifs dirent: Soit! Brisons nos vils barreaux.
Partons, mais comme un jour d'Égypte nous parûmes:
La tête haute! Et nous les fatales victimes,
Calmes, faisons baisser les yeux à nos bourreaux...
Tempête! L'ouragan siffle dans la mâture;
Les pilotes, songeurs, ont froncé le sourcil ;
Et les sombres vaisseaux voguent à l'aventure,
Cherchant sans la trouver la route de l'exil.
Ils vont, mettant le cap sur des horizons vagues.
Qui leur dira "Salut !" puisqu'ils ont dit "Adieu" ?
Inconnus sur la terre et perdu

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents