La dépression, une épreuve moderne

Lucien Tenenbaum

Description

Voilà qu'une souffrance aussi ancienne que notre humanité, devient une épidémie nommée dépression et qu'elle doit se frayer un chemin difficile entre la maladie, à laquelle la médecine du XXIe siècle veut la réduire, et le silence honteux où elle a été confinée pendant des siècles. Epreuve pour chacun, jusque dans sa biologie, problème pour la société dont elle alourdit les statistiques, quel est son lien intime avec notre modernité ?

Sujets

• Psychiatrie
• Médecine
• Psychologie
• Santé
• Psychanalyse

Informations

• Publié par: L'Harmattan
• Date de parution: 01 mai 2009
• Nombre de lectures: 131
• EAN13: 9782336261270
• Langue: Français

Extrait

Psycho - logiques
Collection fondée par Philippe Brenot et dirigée par Alain Brun
Sans exclusives ni frontières, les logiques président au fonctionnement psychique comme à la vie relationnelle. Toutes les pratiques, toutes les écoles ont leur place dans Psycho - logiques.
Luc VANDEN DRIESSCHE, L’enfant parallèle, 2009.
Serge BAUMGARTEN, L’enfant porte-symptôme, 2008.
Pierre MANNONI, Psychopathologie de la vie collective, 2008. Alain BRUN, L’échelle d’intelligence de Wechsler. Interprétation clinique et psychopathologique, 2008.
François PEREA et Jean MORENON, Les jeux contradictoires de la parole et du corps, 2008.
Jacques MICHELET, Handicap mental et technique du psychodrame, 2008.
Alhoussein DIA, La psychiatrie au pays des marabouts (Mauritanie), 2008.
Bernadette MATTAEUR, Procréation, IVG et maltraitance, 2007.
Jean-Curt KELLER, La méthode thérapeutique de Palo Alto , 2007.
Colette LHOMME-RIGAUD, Exils et troubles de la pensée , 2007.
Giselle HIERSE, Le féminin et la langue étrangère , 2007.
Michel DÉGRANGE, Petit livre noir des psychothérapies américaines en France , 2007.
Béatrice BOURDIN, Mylène HUBIN-GAYTE, Barbara LE DRIANT et Luc VANDROMME, Les troubles du développement chez l’enfant. Prévention et prise en charge , 2007
Françoise GOSSELIN et Philippe VIARD, L’État et les psychothérapies , 2006
Michel LANDRY, Du déclin de la pensée critique au triomphe de la psychiatrie , 2006.
René SOULAYROL, La spiritualité de l’enfant , 2006.
Joseph C. ZINKER, Le thérapeute en tant qu’artiste , 2006.
Jean-Claude REINHARDT et Alain BRUN (collectif dirigé par), Vieillesse et création , 2005.
La dépression, une épreuve moderne

Lucien Tenenbaum
Du même auteur
La bascule des mal-aimés , Éditions du Souffle d’Or, 1994
La psychothérapie, un savoir étrange , Éditions du Souffle d’ Or, 1995
Écrire, parler, soigner en chinois , Éditions You-Feng,
Paris, 2001, rééd. 2008
© L’Harmattan, 2009
5-7, rue de l’Ecole polytechnique ; 75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com [e-mail] [e-mail]
9782296085770
EAN : 9782296085770
Sommaire
Psycho - logiques - Collection fondée par Philippe Brenot et dirigée par Alain Brun Page de titre Du même auteur Page de Copyright AVANT PROPOS CHAPITRE 1 - UNE NOUVELLE VENUE, LA DÉPRESSION… CHAPITRE 2 - LA DÉPRESSION EST ET N’EST PAS UNE MALADIE CHAPITRE 3 - LES SYMPTÔMES DE LA DÉPRESSION CHAPITRE 4 - OÙ L’ON TENTE DE DISTINGUER LA DÉPRESSION DE LA DÉPRIME CHAPITRE 5 - QUAND MON CORPS FAIT SA DÉPRESSION SANS MOI CHAPITRE 6 - CE QUI FAIT BASCULER DANS LA DÉPRESSION CHAPITRE 7 - LA PLACE DES MÉDICAMENTS DANS LA DÉPRESSION CHAPITRE 8 - LA DÉPRESSION ET LES GÈNES CHAPITRE 9 - SENTIMENT DE CULPABILITÉ ET MÉSESTIME DE SOI DANS LA DÉPRESSION CHAPITRE 10 - SAUVER QUELQU’UN D’UNE DÉPRESSION PROFONDE CHAPITRE 11 - EFFICACITÉ DE LA THÉRAPIE ET DÉPRESSIF INACCESSIBLE CHAPITRE 12 - LE SUICIDE, DANGER ET RESSOURCE CHAPITRE 13 - ENTRE DÉPRESSION ET SOLITUDE, UN LIEN COMPLEXE CHAPITRE 14 - LA DÉPRESSION, LE DEUIL, LA PEUR DE MOURIR CHAPITRE 15 - LE BESOIN DE DÉPRIMER CHAPITRE 16 - DE QUELQUES INCONVÉNIENTS À GUÉRIR TROP VITE ET TROP BIEN DE SA DÉPRESSION CHAPITRE 17 - TOUT LE MONDE N’A PAS LA CHANCE DE CONNAÎTRE LA DÉPRESSION CHAPITRE 18 - DÉPRESSION ET RELIGION, UNE VIEILLE HISTOIRE CHAPITRE 19 - UN POINT DE VUE NEUROBIOLOGIQUE : LE CERVEAU MALADE CHAPITRE 20 - UN POINT DE VUE PSYCHOTHÉRAPIQUE : PAROLE ET TOUCHER DANS LA DÉPRESSION PROFONDE CHAPITRE 21 - UN POINT DE VUE ANTHROPOLOGIQUE : LA DÉPRESSION FLÉAU DES TEMPS MODERNES AUTEURS ET ŒUVRES CITÉS DANS LE TEXTE
AVANT PROPOS
La dépression est une création du vivant, sa logique n’est pas celle de la raison. Elle prend corps dans l’intimité de nos cellules et se vit dans notre conscience douloureuse. Elle est création du vivant, que pourtant elle menace. Elle accompagne notre espèce, sans doute depuis son apparition. Pourtant, elle n’a jamais été aussi présente qu’aujourd’hui. Elle accompagne chacun de nous, sans doute depuis sa naissance. Pourtant, nous la craignons.
Comment l’approcher, sans s’effrayer du gouffre qu’elle ouvre à nos pieds ni s’en tenir trop loin ? Comment en parler, sans lui enlever ses ombres et ses épines ? Comment la soigner, si l’on n’en prend soin ?
J’ai choisi de faire confiance à l’ignorance, à la peur, à la curiosité, et aux questions qu’elles inspirent. Les questions sont venues, lors de séminaires que j’animais sur la dépression, de personnes qui se forment au métier de psychothérapeute 1 Regroupées pour certaines, reformulées pour d’autres, elles constituent les thèmes des 18 premiers chapitres du présent ouvrage. Les trois derniers apportent des éclairages plus spécialisés à travers la neurobiologie, la psychothérapie, l’histoire.
Le traitement des thèmes donne des chapitres de longueur très inégale. Certains en effet entraînent des questionnements en cascade qui mènent assez loin de l’interrogationinitiale. D’autres au contraireamorcent la réflexion, en laissant au lecteur le soin de la poursuivre… ou pas. Le choix d’une approche plus circulaire que linéaire entraîne nécessairement de nombreux renvois, et quelques répétitions, d’un chapitre à l’autre.
La matière clinique de cet ouvrage est tirée de mon expérience professionnelle : j’ai été psychiatre des hôpitaux pendant 22 ans avant d’exercer la psychothérapie en cabinet 2 Ma réflexion se nourrit aussi du travail réalisé au cours de nombreux séminaires et ateliers consacrés à la dépression et de ce que cinéastes et écrivains nous donnent à voir et à comprendre. Elle s’appuie également surce que j’en écris au long des années et sur le compagnonnage que nous entretenons, elle et moi, depuis longtemps.
CHAPITRE 1
UNE NOUVELLE VENUE, LA DÉPRESSION…

…Celle dont on parle depuis qu ’on peut s’avouer sa fatigue de vivre et s ’en ouvrir à autrui.
Nouvelle venue, oui, celle qui fait surgir des questions comme « depuis quand parle-t-on de dépression ? » ou « à partir de quand/depuis quand peut-on parler de sa dépression ? », ou encore, « à partir de quand peut-on dire de quelqu’un qu’il est dépressif ? ».
Durant ces cinquante dernières années, la dépression est devenue visible dans l’espace social, événement considérable. Son émergence peut se tracer sur deux scènes. Sur la scène microsociale où se dévoile l’intimité de chacun, une souffrance a enfin pu se dire, une souffrance qui a mis du temps à trouver ses mots. Elle a contribué à faire surgir un espace nouveau, celui de la rencontre psychothérapique. Sur la scène macrosociale, où les mots vivent leur carrière publique, la dépression est apparue sous ce nom, jalousement surveillé par la médecine, vulgarisé par les médias.
À partir de quand/depuis quand parle-t-on de sa dépression ? Depuis quand peut-on se dire déprimé ou dépressif, des mots qui, dans ces cas, ne sont pas des mots de spécialiste ou d’expert, car ils appartiennent à tout le monde ? Ce sont des mots du discours commun, prononcés pourtant dans une demi-confidence, où chacun entend de façon claire l’aveu d’une fatigue de vivre . La fatigue de vivre , tel est indiscutablement le cœur de signification de tous ces termes, dépression, déprime, déprimé, dépressif, accès ou état dépressif, dépression nerveuse, etc.
La dépression est devenue visible dans l’espace social. Non pas qu’elle n’ait pas existé auparavant. Les témoignages et les descriptions qui en ont été donnés à toutes les époques et de tout temps attestent de son ancienneté, mais il est devenu légitime et socialement acceptable d’en parler. Elle a acquis un statut différent et ce qu’elle manifeste peut faire l’objet d’une lecture différente. Des limites jusque-là respectées sont ainsi franchies, comme celle, vers le dehors, qu’on traverse en s’ouvrant à autrui d’une souffrance intime, ou celle, vers le dedans, qu’on franchit en s’entendant dire qu’on est malheureux, en s’avouant à soi-même qu’on est fatigué de vivre et qu’on songe même à la mort. Ces franchissements, que chacun ressent presque comme une victoire sur lui-même, traduisent des mutations profondes de notre société. A travers eux se profile un changement dans la hiérarchie des valeurs.
Qu’on puisse exprimer le besoin d’être accueilli et entendu dans sa souffrance personnelle, témoigne que la vie intérieure et le bien-être psychologique de chaque personne deviennent des valeurs socialement reconnues. Il est licite de se préoccuper de son mal-être, de s’en ouvrir à autrui et de rechercher des moyens d’y r