Essai sur les Figures de l'Esprit

Louis-José Lestocart

Description

Essai sur les figures de l'Esprit situe l'invention au centre de la réflexion et du discours, et vise à instaurer une vision "dynamique", "constructiviste" de la pensée. Cette culture non linéaire, qui s'ancre dans l'invention, l'imagination et la métaphore, recouvre sciences de la cognition, questionnement philosophique, biologie, art, science des systèmes, apprentissage des enfants. Ce livre rend aussi compte de la redécouverte de la phénoménologie allemande et française, où l'entendement humain provient du corps s'adaptant à l'environnement.

Sujets

• Philosophie
• Philosophie et théologie

Informations

• Publié par: L'Harmattan
• Date de parution: 01 novembre 2010
• Nombre de lectures: 120
• EAN13: 9782296711570
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 19 Mo

Extrait

Essai sur les Figures de l’Esprit





Poïesis
Collection dirigée par Louis-José Lestocart

Le but de « Poïesis » est de questionner le rapport
Art/Science via la Complexité et d’ancrer que la Connaissance
participe d’une vision et d’une approche transdisciplinaires, et
forcément réflexives – poïesis désignant l'action de créer, de
fabriquer, en train de se faire. Dans cette optique, les œuvres,
« objets complexes », qu’elles soient artistiques (y compris
films, films expérimentaux, animations, etc.) ou littéraires, sont
considérées à l’aune des neurosciences, de la philosophie et de
l’épistémologie. « Poïesis » prolonge ce décloisonnement des
savoirs, en accueillant des essais de sciences humaines et
sociales et des écrits littéraires.

Louis-José Lestocart





Essai sur les Figures de l’Esprit

Culture non linéaire
et naissance des formes







































© L’Harmattan, 2010
5-7, rue de l’Ecole polytechnique ; 75005 Paris

http://www.librairieharmattan.com
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ISBN : 978-2-296-13336-5
EAN : 9782296133365
Littérature(s)



« Là où il y a une pierre, il y a une image. »
Friedrich Nietzsche


1
Théorie (thêoria ) de l’image


JOSE LEZAMA LIMA (1910-1976)
Je dois présenter Lima, car il est fort peu connu en
France, à part de quelques aficionados. Il s’agit pourtant d’un
des plus grands écrivains du XX° siècle. 9 août 1976. José
Maria Andrés Fernando Lezama Lima (né en 1910), doté d’une
silhouette opulente, obèse même, et asthmatique — ce qui crée,
comme chez Proust, une vision singulière du monde, une vision
sans coupure alternant expériences de perceptions esthétiques
ou philosophiques particulièrement intenses et appréhension de
la réalité, via étouffements et perte de souffle, meurt de
pneumonie dans un hôpital de La Havane (Cuba), à
soixantecinq ans passés. Meurt alors, outre un ex-avocat, journaliste et,
un temps, haut fonctionnaire de l’Etat cubain, un vertigineux
poète de la métaphore, de l'image, de la vision
infinitésimale ; en tout un brillant écrivain, d'un talent unique,
voulant lier en une seule voix philosophie et littérature. Tout
autant essayiste, nouvelliste que romancier, ses écrits, trempés
au meilleur de la culture universelle, restent d’une densité et
d’une envergure exceptionnelles.

Licencié en Droit Civil à l'Université de La Havane en
1938, Lima passe un diplôme d’avocat et travaille quelque
temps dans un cabinet qu'il quitte en 1940 pour se consacrer
pleinement à la littérature. Moment où il édite la revue littéraire
2Espuela de Plata (1939-1941) . À partir de 1945 jusqu’en 1959,
5 il devient fonctionnaire à la Dirección de Cultura del Ministerio
de Educación. En 1959, après le triomphe de la Révolution
cubaine castriste (1958-1959), Lezama, qui a 49 ans, est appelé
à occuper d'importantes fonctions publiques. Il prend la
direction du Departamento de Literatura y Publicaciones del
Consejo Nacional de Cultura (Service de la Littérature et de
Publication du Conseil national de la Culture), poste de
conseiller littéraire qu’il partage avec d’autres écrivains tels
Carlos Franqui, Guillermo Cabrera Infante, Herminio
Almendros et Alejo Carpentier (propagandiste officiel du
régime castriste) — , et qu’il refuse de politiser, ce qui
3entraînera bientôt sa marginalisation .

Sa vocation littéraire, Lima l’a en fait découverte lors de
la fermeture de l'université en raison de problèmes de politique
intérieure, entre 1930 et 1933, avant la chute du gouvernement
autoritaire du général Gerardo Machado y Morales
(19251933). C’est durant cette période qu’il devient vrai « mangeur
de livres ». En même temps son passage par l'Université de La
Havane lui a permis de rencontrer d'autres jeunes gens,
principalement en droit, ayant les mêmes préoccupations
littéraires que les siennes. La Asociación Nacional de
Estudiantes de Derecho (L'Association nationale des étudiants
en droit) est ainsi à l'origine de la création de la revue Verbum
(1937).
Cette revue littéraire qui compte des textes sur le droit
romain et est financée par le doyen de la Faculté de droit,
Roberto Agramonte, est fondée avec un groupe de jeunes
4écrivains dont Ángel Gaztelu , Eliseo Diego, Guy Francois
Pérez-Cisneros Bonnel, Cintio Vitier, Gastón Baquero, Manuel
Lozano et les peintres Mariano Rodríguez, René Portocarrero.
Le directeur de la revue est René Villarnovo, ami de Lezama
qui, lui, en est à la fois le secrétaire et le véritable moteur. Cette
5 première publication qui compte seulement trois numéros sera
6suivie de la revue Espuela de Plata (1939-1941) — elle,
contrairement à Verbum, étant entièrement consacrée à la
littérature — et d'un magazine publié avec Angel Gaztelu,
7Nadie parecía (1942-1944) .
6 Précoce, dès l'âge de 10 ans, Lezama Lima a déjà
entrepris nombre de lectures. Dont celle de El Ingenioso
Hidalgo Don Quijote de la Mancha (L’Ingénieux Hidalgo Don
8Quichotte de la Manche, 1605-1615) de Cervantes en 1925 . Se
plongeant dans les figures classiques de la littérature mondiale,
il découvre bientôt le poète du Siècle d’or espagnol Luis de
Argote y Góngora (1561-1627) qui constitue une des références
9fondamentales de la littérature baroque contemporaine . Quant
aux contemporains, ce sont surtout Stéphane Mallarmé, Paul
Valéry, Arthur Rimbaud, Isidore Ducasse, comte de
Lautremont, Marcel Proust qui le retiennent. Auteurs sur
lesquels il écrit de nombreux essais, dont Poesía pura sur
Valéry. Comme il le fera également sur Joyce (Muerte de
Joyce), le poète, dramaturge, et critique littéraire américain
Thomas Stearns (T. S.) Eliot, l'écrivain mexicain Octavio Paz
ou encore Rimbaud.
Si l'on excepte deux brèves excursions — une au
Mexique en 1949 et une autre à la Jamaïque en 1950 — , Lima
demeure un voyageur excessivement immobile, « cousu » à son
fauteuil (parfois par les crises d’asthme), au nº 162 de la rue
10Trocadéro (où il vit avec sa mère depuis 1929 ), maison
familiale située dans une partie ancienne de La Havane.
Fauteuil qu’il ne quitte guère. Tout entier dévolu à la
Célébration de son art ainsi qu’à l’« exploration raisonnée » des
diverses cultures du monde.
Figure tutélaire d’une créativité inépuisable, d’un savoir
prodigieux et d’une érudition implacable, hors du commun en
tout cas, Lezama aime jouer avec toutes les connaissances
essentielles propres à diverses civilisations. Ainsi tour à tour
platonisme, orphisme, pythagorisme, philosophie taoïste,
culture grecque classique et philosophies antique, égyptienne et
chinoise — sans compter les mythologies anciennes,
chrétiennes et païennes, les Pères de l’Eglise, des mystiques,
des Gnostiques, les Arcanes du tarot, de vieux traités
d´alchimie, des « grandes littératures » et des fantasmagoriques
littératures orales — , se mêlent et se superposent dans ses
écrits, jusqu’à instiller une véritable saturation hypnotique. En
établissant entre ses divers savoirs d’étranges et de fructueuses
7 connexions, il bâtit son œuvre. Une des plus complexes et des
plus inspirées pour déterminer un nouveau champ de bataille, et
construire une vraie « machine de guerre » ; en une quête du
Livre des livres — le Quant au livre de Mallarmé.

Lima a en effet la même vocation « universaliste » qu’un
autre grand nom de la littérature hispano-américaine, l'Argentin,