L Horloge
81 pages
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L'Horloge , livre ebook

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Description

Sur sa bicyclette, Isaac se lance dans un voyage inattendu afin de retrouver son terrain de jeu passé. Il le savait pourtant défendu : la faute aux bombardements ennemis, mais aussi à celle de son père, qui vient de perdre la vie.


Ce voyage, véritable quête existentielle, s’accompagne d’une plongée au sein de l’univers intérieur si particulier d’Isaac, lui qui navigue sans cesse entre deux mondes ; l’un convenu et imposé, et l’autre plus subtil et rempli de promesses.


Au gré de ses rencontres, aussi inspirantes qu’absurdes, Isaac se laisse guider par le tic-tac de son esprit, jusqu’à perdre l’équilibre. Un équilibre si instable qui finira par remettre en question ses certitudes.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 13 avril 2021
Nombre de lectures 0
EAN13 9782381535470
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0052€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

L’Horloge

La SAS 2C4L — NOMBRE7,ainsi que tous les prestataires de production participant à laréalisation de cet ouvrage ne sauraient être tenus pourresponsables de quelque manière que ce soit, du contenu engénéral, de la portée du contenu du texte, ni dela teneur de certains propos en particulier, contenus dans cetouvrage ni dans quelque ouvrage qu’ils produisent à lademande et pour le compte d’un auteur ou d’un éditeurtiers, qui en endosse la pleine et entière responsabilité
NicolasWeisz
L’Horloge Roman
À Adeline
À mes parents
À mes frères et ma sœur
1
La portière del’automobile se referme. Le moteur gronde.
En cette matinée deprintemps, Josef s’en va retrouver sa table, sa chaise et soncafé. C’est vers sept heures chaque jour qu’il apris l’habitude de descendre dans la grande ville pour yaccomplir son rituel, véritable lueur dans son quotidienquelconque de retraité.
Josef appuie sur la pédalede l’accélérateur afin de quitter la modestemaison familiale, perchée sur une ronde colline aride que separtagent quelques rares oliviers et cyprès. C’est peuavant la fin de la guerre qu’il avait étécontraint de fuir la ville pour se rendre ici, avec sa femme et sestrois enfants.
Après avoir quittéla maison, Josef s’engouffre sur le versant de la colline, pourune trentaine de minutes de trajet.
La journée est douce en cematin de mars. Il s’agit d’une période spécialede l’année, celle au cours de laquelle l’hiver etle printemps se chevauchent. Durant quelques jours seulement, cesdeux saisons se tiennent la main pour donner naissance à desphénomènes uniques, que Josef affectionne par-dessustout.
C’est ainsi qu’aubout de quelques minutes seulement, il décide de prendre partau spectacle et de s’arrêter sur le bas-côtéde cette route sinistrée qu’il connaît par cœur.
Une fois arrêté, ils’extrait de son siège, difficilement, et fait quelquespas en direction du bord de la route qui tombe abruptement, àune cinquantaine de mètres au-dessus de la mer.
En signe de la sinuositédes lieux, un piquet blanc, dont l’extrémité estpeinte en rouge, est planté dans la terre dure recouverte dequelques graviers.
Josef se penche trèslégèrement pour se situer. Il découvre l’eauturquoise en bas de la falaise, dont la roche est si irrégulièrequ’il eut été dangereux de s’y aventurer.
En s’avançantdavantage de quelques centimètres, Josef découvre unpetit renfoncement dans la falaise. Il fait ensuite un pas enarrière, se redresse tant bien que mal, et laisse tomber sesbras le long de son corps. Ses yeux se ferment. Il respireprofondément l’air de la mer et, tel un tournesol, lèvelégèrement le menton pour capter les doux rayons dusoleil.
Il se sent bien. Divinement bien.Plus rien n’a d’importance. L’euphorie le gagne. Ils’imagine sauter dans le vide. Pour s’envoler d’ici.Et se laisser aller. Enfin. Lui qui n’a jamais cessé dese battre depuis qu’il a quitté à tout juste cinqans sa Hongrie natale, à la recherche d’une terred’accueil. Non sans réussite. Josef avait rapidement sus’extraire des rues sales de la grande ville, celles qui ontpour habitude de donner naissance à des caïds plutôtqu’à des polytechniciens. Il était devenu àl’âge de vingt-cinq ans le chef des ventes d’unemarque de pastis, bien implantée dans la région, quiavait su tirer profit de l’essor grandissant de cet alcoolanisé, autrefois médical, devenu récréatif.Sur les recommandations de son frère Laszlo, Josef avait poursecrète ambition de fournir clandestinement la côte estdes États-Unis alors en pleine période de prohibition.Il se concentrera finalement sur le territoire national, avec uncertain succès, puisqu’à peine ses trente anspassés, il avait sous sa coupe pas moins de huit personnes,dont certaines avaient le double de son âge. Les chosess’effondrèrent lorsqu’il fut reléguéà un simple rôle de vendeur ambulant au début dela guerre, à refaire du porte-à-porte comme àses débuts. Son patron n’avait pas eu le couraged’outrepasser le statut donné aux juifs, et de lemaintenir dans ses responsabilités.
La Libération n’ychangera rien, et Josef perdra son ambition en plus de perdre sa foien Dieu. Il passera ensuite ses journées à arpenter lesrues de la ville et ses alentours à bord de sa petite autocouleur anis.
Aprèsquelques minutes d’évasion, Josef reprend ses esprits,et s’excusant presque, se résout à tourner le dosà ce merveilleux spectacle pour reprendre son chemin. Mais sonautomobile l’a abandonné. Il s’aperçoitd’un simple regard que celle-ci dévale à faibleallure la route dont la planitude apparente n’est qu’unleurre. Heureusement pour lui, l’engin n’a parcouruqu’une dizaine de mètres.
Il se lance en trottinant àsa rencontre et, même si ses vieilles hanches le font souffrir,se rapproche rapidement d’elle. Tel un cascadeur chevronné,il n’a plus qu’à ouvrir la portière pour sejeter sur le frein à main et mettre un terme à cettepetite séance d’exercice matinal. Une fois immobile,Josef se laisse tomber lourdement dans le siège. Avecsoulagement. Il ne lui faut que quelques secondes pour que son cœurbousculé retrouve peu à peu son rythme normal.
Il n’est pas question pourlui de s’appesantir pour autant, l’auto empiétantsur les deux voies que compte la chaussée.
Il redémarre vite lemoteur afin de regagner son couloir et sortir de ce lieu aveugle.
Mais il n’a pas le temps dedonner un premier coup de volant qu’une automobile jaillit dece virage pour le percuter de plein fouet. Face à la violencedu choc, Josef est projeté sur l’arrière de sonsiège, puis rebondit en direction du pare-brise, qui cèdeimmédiatement sous l’impact de ce projectile humain.
L’autre automobiliste, quia résisté au choc, sort de son automobile luxueuse deconstruction anglaise, et se précipite sur la dépouilledéjà maculée de sang. Un sang d’un rougeéclatant.
Le temps est suspendu sur ce corpsencore chaud.
Étendu sur le capot fumantde l’auto, libéré de sa cage en métal,Josef semble se consumer. Les innombrables bouts de verre fraichementformés scintillent, le soleil semblant vouloir donner de ladouceur à ce drame.
C’est uneheure plus tard que l’ambulance est arrivée, emmenantJosef dans le grand hôpital de la ville.
J’étaisle premier sur place.
2
C’est en fin d’après-midi que le Professeur nousapprit la mort de mon père Josef :
Vousm’en voyez désolé, mais il n’a passurvécu. Il n’a pas souffert, son cœur a lâchédès l’impact. Je vous laisse vous rapprocher de Solangeà l’entrée du bâtiment pour lesformalités.
La première pensée quej’ai eue ne fut pas pour mon père, mais pour cet homme,dont la prétention et la fausse compassion m’irritèrent.Il était évident qu’il n’en avaitabsolument rien à faire de mon père, de nous, et detous ces morts qu’il devait côtoyer chaque jour. Iljouait son rôle certes, mais sans véritable talent.
Après cediscours rodé, je me suis retourné en direction de mamère, en pleurs. J’avais envie de la prendre dans mesbras, mais une violente angoisse me rongea à cette idée.Je m’en voulais terriblement, je n’y arrivais pas.
Je tournai ainsi les talons afin degagner la chambre de mon père.
Aussi étrange que cela puisseparaitre, papa avait été placé dans une chambreappartenant au service psychiatrique, qui occupait l’aile estde l’hôpital, composé de vingt-cinq chambresréparties sur deux étages.
Cet ancien couvent,devenu hôpital au sortir de la guerre, se composait de quatrebâtiments, dont l’un d’entre eux, celui dans lequelse trouvait mon père, était autonome. Il avait étéplacé ici, car il n’y avait plus de place parmi lesautres services.
Plus que frustré,j’étais vexé de cette décision. Avant toutparce que ce service vieillissant traitait les maladies psychiquessévères. De nombreux traitements soi-disant novateursétaient testés sur les patients, tous aussi peuconcluants les uns que les autres, de sorte que les fous ledevenaient davantage. Malgré les rapports vantant les progrèsdes méthodes expérimentées ici, cela étaitpour moi une évidence. Tout comme le fait que personne ne s’ensouciait réellement. Néanmoins, ce servicepsychiatrique avait cela d’unique de posséder une joliecour arborée. Elle était relativement grande, trèssimplement dessinée, et devait autrefois être un lieuprisé des moines, tant elle était paisible. Unediscrète fontaine se tenait au milieu de la cour, protégéepar plusieurs bancs en marbre. Autour desquels reposaient de l’herbe,quelques arbres et des fleurs. Ce jardin n’avait rien de royal,mais avait un indéniable charme, qui adoucissait le désespoirambiant.
Pour me rendre dansla chambre de mon père, il me fallut longer cette cour,séparée de l’intérieur par d’immensesportes vitrées. J’aperçus derrièrecelles-ci un homme seul assis sur l’un des bancs.
L’une desportes était entrouverte, ce qui me permit d’entendrecet homme débattre ardemment dans le vide. Lisant àhaute voix le journal qu’il tenait entre les mains, afind’appuyer ses propos, il fit mine de s’adresser àla personne imaginaire qui se tenait à ses côtéssur le banc :
Alors, tu vois ! c’estmarqué ici  ! Là  !
Puis il jeta son journal de dépit,qu’il tenait jusqu’alors dans le mauvais sens :
De toute façon, je nepeux pas discuter avec un ignare comme toi. Tu me fais perdre montemps. Adieu l’ami  !
Puis il se leva et fit le tour de lafontaine, mains dans le dos et regard vers le sol, grommelant desinjures, pour enfin revenir à son point de départ.
Il reprit alors unton normal et se présenta à un nouvel interlocuteur,mimant une franche poignée de main :
Lucien, pour vous servir. Voilàun moment que je ne vous avais pas vu trainer par ici, mon cher.
Je les laissai discuter pour aller àla rencontre de mon père, devenu imaginaire lui aussi.
Je m’étaispréparé à sa disparition depuis l’appel demon frère Richard en fin de matinée. À l’écoutedes quelques détails qu’il me donnait alors, j’avaisimmédiatement deviné l’issue. Le simple« accident d’auto » m’avaitsuffi. Depuis qu’il ne conduisait plus son petit engin peint enjaune, dont chacune des portières était ta

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