La Culture
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La Culture , livre ebook

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Description

Toute l’œuvre de France Quéré aura été un hymne à la culture, à l’affinement de la conscience. « Toutes les cultures du monde sont l’effort pour arracher l’humanité à ce grand fonds barbare dont aucun peuple n’est encore entièrement et durablement dégagé », écrit-elle ainsi. Ou encore : « Si la musique ne montait d’un acte originaire, que le moi affirme et qui affirme le moi, jamais homme n’aurait chanté. » À l’occasion du dixième anniversaire de son décès s’est tenu un colloque consacré à la culture prise en ce sens. De la multiplicité des approches ressort une étonnante unité de perspective. Ce livre regroupe les interventions et réflexions de Jean-Pierre Chauveau, François Cheng, Béatrice Descamps-Latscha, Albert Jacquard, Philippe Joutard, Axel Kahn, Marguerite Léna, Pierre Léna, Michel Leplay, Gustave Martelet, Alain Mérot, Yves Quéré, Nicole Questiaux, Paul Ricœur, ainsi que quelques textes emblématiques de France Quéré elle-même. « La culture ?N’est-elle pas le chant mêlé de nos pensées, de nos émotions et de nos interrogations, l’intensité de notre regard et de notre écoute, une errance émerveillée au travers des arcanes du monde et, peut-être, cette question même sur elle-même ? »

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 13 avril 2006
Nombre de lectures 7
EAN13 9782738184658
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0950€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

© O DILE J ACOB , avril 2006
15, RUE S OUFFLOT , 75005 P ARIS
www.odilejacob.fr
N° EAN : 978-2-7381-8465-8
Le code de la propriété intellectuelle n'autorisant, aux termes de l'article L. 122-5 et 3 a, d'une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l'usage du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute représentation ou réproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (art. L. 122-4). Cette représentation ou reproduction donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo
Prologue

À l’occasion du dixième anniversaire de sa disparition, les proches de France – plutôt que d’évoquer un passé encore si présent, plutôt que de composer quelque panégyrique dont elle eût récusé l’idée, plutôt que d’évoquer la moraliste, l’écrivain, la théologienne, la musicienne ou l’oratrice qu’elle fut – avaient souhaité rouvrir, comme inlassablement il convient de le faire, la question de la culture : d’elle nous nous gargarisons ; derrière son emblème nous avançons en admirable et consensuelle procession ; à son intention nous créons des ministères, établissons des budgets et construisons des maisons ; pour elle nous sommes prêts à nous battre (ou, plus confortablement, à signer pétitions et déclarations) ; au fond de soi on sent qu’elle reste là « quand on a tout oublié » ; prise au singulier on la tient pour universelle, tandis qu’au pluriel elle se fragmente en la multiplicité des traditions et coutumes locales et flirte avec les folklores ; pour elle, en même temps que pour l’éducation et pour la science, on crée de grandes institutions internationales ; parfois même on organise en son nom d’étranges révolutions qui entraînent des centaines de millions d’hommes et de femmes dans un chaos et des souffrances où l’on voit mal ce qu’elle vient faire et dans quel rôle on l’embrigade… Bref, elle est partout, on la révère, on la célèbre, mais sait-on bien de quoi l’on parle ?
Une réponse – souvent non explicite – l’associe à la connaissance, au point que les deux s’y confondent d’indiscernable façon : on tiendra telle ou tel pour un être de culture s’il sait, dans l’instant, déclamer les stances de Rodrigue, citer Buñuel à bon escient, ou plus rarement (tant il est vrai que l’on tient généralement la science hors de cette sphère) distinguer, la nuit venue, Vénus de Jupiter.
Ce tour de passe-passe qui nous fait confondre culture et connaissance est flatteur pour celle-ci, mais il l’est moins pour celle-là. Il oublie en effet, ou efface, toute la charge de devenir que comporte ce beau suffixe de ur , celui-là même que nous retrouvons dans nature , ce qui est appelé à naître, et bien sûr dans futur , ce qui est appelé à être. La culture nous parle moins de ce qui existe que de ce qui est à venir, si nous savons le faire advenir ; moins de ce que nous possédons que de ce que nous acquérons, si nous faisons en sorte d’en être dignes ; moins du sentier où nous cheminons que de ceux inexplorés qui, en une arborescence sans fin, s’ouvrent à notre démarche ; moins de notre savoir actuel – et moins encore de notre érudition – que de celui, jusque-là inouï, que nous mettrons demain au jour, à condition d’y employer notre double capacité à découvrir ce qui est et que nous ignorons, et à inventer ce qui n’a jamais été et à quoi l’art nous donne accès. Prise ainsi, la culture s’apparente non à un état, ni à une possession, mais plutôt à une tension et à un dénuement : tension de qui veut connaître plus, tente de comprendre mieux, et œuvre là pour ; dénuement de qui se sait pauvre de tout le non-savoir de l’humanité, devine que celui-ci dépasse d’immense façon le petit tas infime de ses connaissances émiettées, et s’ingénie à sortir de son illettrisme, c’est-à-dire à déchiffrer les hiéroglyphes, ceux de son monde intérieur et ceux du monde qui l’entoure. Elle s’apparente non au pouvoir que raffole d’exercer celui qui a le savoir sur celui qui ne l’a pas, mais plutôt à l’intime besoin de le partager avec lui, et de faire ainsi accéder celui-ci au seul mieux-être qui vaille, une fois assurés les besoins vitaux, l’écoute du chant immémorial du ressac qui nous appelle vers l’océan et la soif d’en vouloir dépasser l’horizon afin d’en connaître l’au-delà. Cet au-delà qui ressemble fort au «  more things in heaven and on earth  » que Hamlet fait entrevoir à Horatio, cet au-delà qui est sans doute le «  mehr Licht  » à quoi aspirait Goethe au moment de partir vers l’autre rive.
Quelle part de nous devons-nous à la culture ? À quelles obligations nous invite-t-elle ? Vers quels lieux nous entraîne-t-elle ? Quels liens nous attachent-ils à elle et de quelle manière nous aident-ils à vivre ? Les pages qui suivent ne répondront pas miraculeusement à ces questions, du moins d’univoque façon ; mais, dans le souvenir de France, elles les éclaireront de la lumière qui fut la sienne, infiniment diverse : parfois celle, tremblante et incertaine, d’une bougie par quoi le Livre 1  – autrement dit la Connaissance – nous prend discrètement par la main et nous indique un sens ; parfois celle, intense et drue, où conviction et raisonnement valent explication ; et toujours celle, universelle, dont la culture est un sous-jacent implicite. Pour France en effet, l’interrogation qui sous-tend ce livre n’en fut sans doute jamais une, tant pour elle allait de soi que la culture n’est rien de moins que l’élément fondateur de notre dignité d’êtres humains, élément nécessaire sinon malheureusement suffisant. « Qu’est-ce que la culture ? » : pourquoi donc cette question, aurait-elle peut-être demandé avec étonnement, alors qu’on ne s’interroge pas sur ce qu’est la respiration tant va de soi la réponse : « Ce qui nous permet de vivre ? »
Quelques textes d’elle, en fin d’ouvrage, illustrent cette façon qu’elle aurait sans doute eue de l’accompagner, cette question, sans avoir besoin de l’aborder de front puisqu’elle est omniprésente dans son œuvre. Tout nous y parle en effet de culture, mais allusivement, comme en paraboles. Piètre et inutile redondance que de discourir sur la sculpture au moment même où l’on pétrit l’argile !
Auparavant figurent les textes prononcés lors d’un colloque, tenu à Paris au palais du Luxembourg le 15 avril 2005. Placé sous la double présidence de Nicole Questiaux et de Michel Leplay qui posaient là les regards de la juriste et du bibliste, il nous permit d’entendre l’écrivain (François Cheng), l’historien (Philippe Joutard), le généticien (Axel Kahn), la philosophe (Marguerite Léna), l’astronome (Pierre Léna) et le théologien (Gustave Martelet), à qui se sont joints l’universitaire (Jean-Pierre Chauveau), l’anthropologue (Albert Jacquard), l’historien d’art (Alain Mérot) et la biologiste (Béatrice Descamps-Latscha). Paul Ricœur, qui avait immédiatement adhéré à l’idée de ce colloque et décidé d’y participer, n’a pu s’y joindre, atteint entre-temps par le mal qui devait quelques semaines plus tard l’emporter. Un texte de lui nous permet au moins d’associer ici sa mémoire à une manifestation où il était, dans son absence, si intensément présent.
Un récital allait, sur place, prolonger ces instants de mémoire et de réflexion partagées et faire en sorte qu’y revive cette part essentielle de la vie de France que fut la musique, celle notamment – qu’elle a tant pratiquée ! – où se mêlent la voix et le piano. La soprano Vanda Tabery et la pianiste Anne Quéré nous donnèrent ainsi le bonheur d’entendre Schumann, Dvorak, Brahms et Fauré, et la chance de percevoir là, comme en écho du colloque, une évocation qui semblait le continuer : celle du contrepoint subtil et impérieux entre une pensée et un rêve, entre la phrase qui énonce et celle qui suggère, entre le transparent du verbe et l’indicible de l’émotion ; celle d’un dialogue entre des voix qui se joignent et s’enchevêtrent pour dire infiniment plus, à deux, que n’auraient dit les deux discours isolés ; celle aussi d’un commun périple où, solidairement riches de tout leur acquis de l’en-deçà, des explorateurs traceraient une voie, construiraient un savoir, discerneraient un sens et déjà, dans le lointain, percevraient la forme encore indécise d’un au-delà.
Qu’est-ce que la culture ? Qu’est-elle sinon cette polyphonie de nos pensées, de nos émotions et de nos interrogations ; sinon ce cheminement émerveillé au travers des arcanes du monde ; et sinon, peut-être, à la racine, cette question même sur elle-même ?
Yves Quéré

Les droits d’auteur relatifs à ce livre seront intégralement versés à l’association Votre école chez vous (VECV) qui scolarise chez eux des enfants atteints d’un handicap grave et dont France avait présidé le conseil d’administration 2 . Que les auteurs en soient vivement remerciés.

1 - Infra , p. 184.

2 - VECV, 29, rue Merlin, 75011 Paris.
En mémoire de France Quéré, une personne, une œuvre, une pensée
Nicole Questiaux

Une personne très aimée de ceux qui sont aujourd’hui réunis.
Une œuvre considérable, foisonnante, qui embrasse – de l’histoire à la linguistique, de la littérature à la théologie – vingt-cinq ouvrages, de très nombreux articles qui longtemps après leur parution font réfléchir.
Une pensée lucide comme une lame, qui séduit par une expression chatoyante.
 
Si j’ai aujourd’hui l’honneur d’ouvrir ce colloque organisé en souvenir de France Quéré, c’est par le hasard d’une rencontre. Nous faisions partie toutes les deux de la trentaine de personnes qui, sous la présidence du professeur Jean Bernard, ont été appelées à siéger au premier Comité national d’éthique des sciences de la vie créé en 1983. C’était, c’est encore, un organisme destiné à faire réfléchir sur les conséquences pour la société des progrès scientifiques. Et,

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