Platon penseur du visuel
300 pages
Français

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Platon penseur du visuel , livre ebook

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Description

L'oeuvre de Platon fait non seulement un vaste usage philosophique du vocabulaire optique, mais aussi opère la première thématisation du visuel. La tradition a prêté beaucoup plus d'attention à l'utilisation qu'à la thématisation: elle a fait de Platon le fondateur de la mésalliance entre philosophie et optique, en sous-estimant l'appareil analytique et critique déployé dans son oeuvre afin de maîtriser philosophiquement les rapports entre ces deux partenaires-rivales. S'il est vrai que Platon est un philosophe visuel, il est surtout un grand penseur du visuel.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 mai 2005
Nombre de lectures 249
EAN13 9782336266930
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,1050€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Commentaires philosophiques
Collection dirigée par Angèle Kremer-Marietti et Fouad Nohra

Permettre au lecteur de redécouvrir des auteurs connus, appartenant à ladite “histoire de la philosophie”, à travers leur lecture méthodique, telle est la finalité des ouvrages de la présente collection.
Cette dernière demeure ouverte dans le temps et l’espace, et intègre aussi bien les nouvelles lectures des “classiques” par trop connus que la présentation de nouveaux venus dans le répertoire des philosophes à reconnaître.
Les ouvrages seront à la disposition d’étudiants, d’enseignants et de lecteurs de tout genre intéressés par les grands thèmes de la philosophie.
Déjà parus
Rafika BEN MRAD, La Mimésis créatrice dans la Poétique et la Rhétorique d’Aristote, 2004.
Gisèle SOUCHON, Nietzsche : généalogie de l’individu , 2003.
Gunilla HAAC (dir.), Hommage à Oscar Haac, mélanges historiques, philosophiques et littéraires, 2003.
Angèle KREMER MARIETTI, Carnets philosophiques, 2002.
Angèle KREMER MARIETTI, Karl Jaspers, 2002.
Jean-Marie VERNIER (introduction, traduction et notes par), Saint Thomas d’Aquin , questions disputées de l’âme, 2001.
Auguste COMTE, Plan des travaux scientifiques nécessaires pour réorganiser la société, 2001.
Michel BOURDEAU, Locus Logicus. L’ontologie catégoriale dans la philosophie contemporaine, 2000.
Guy-François DELAPORTE, Lecture du commentaire de Thomas d’Aquin sur le Traité de l’âme d’Aristote , 1999.
John Stuart MILL, Auguste Comte et le positivisme, 1999.
Platon penseur du visuel

Michail Maiatsky
© L’Harmattan, 2005
9782747584043
EAN : 9782747584043
Sommaire
Commentaires philosophiques Page de titre Page de Copyright Epigraphe Remerciements INTRODUCTION Première partie - LE REGARD DU CITOYEN
1. THÉÂTRE DE LA CITÉ 2. TÉMOIGNER LE COURAGE ( LACHÈS ) 3. GLOIRE, APPARENCE, REGARD COMPÉTENT
Deuxième partie - VOIR, CONNAÎTRE
4. PSYCHÉROTOPTIQUES CÉLESTE ET TERRESTRE 5. DOXA, SKÊPSIS, EPISTÊMÊ 6. L’ÂME DE L’ŒIL (THÉÉTÈTE)
Troisième partie - ÊTRE VU ET L’ÊTRE
7. Être, démiurge et invisibilité (Timée) 8. Rendre visible 9. Voir et « voir »
CONCLUSION BIBLIOGRAPHIE
Nous irons par l’autre bout des choses explorer la face claire de la nuit —
Lorand Gaspard
On ne cesse pas de voir, lorsqu’on se met à regarder le monde avec les yeux de Platon ; au contraire, on commence vraiment à voir quand on aperçoit l’objet dans son idéalité.
Kuno Fischer
Remerciements
Ce travail n’aurait pu aboutir sans l’intérêt et le soutien professionnel et humain de nombreux collègues, amis et proches qu’il serait impossible de nommer toutes et tous ici.

J’ai bénéficié, au cours des années, de la sollicitude pleine de tact de M. le Professeur Dominic O’Meara. Les encouragements de Mme le Professeur Monique Dixsaut, dans les premiers pas de ma recherche, ainsi que ses critiques à sa phase finale, m’ont été très utiles. Merci, pour leurs lectures exigeantes, à Catherine Collobert, Valérie Pozner, François Albera, Serge Margel et Nicolas Stevan.
INTRODUCTION
All the numerous works on Plato are not but a series of footnotes to one Whitehead’s remark.
Lapsus linguae

Platon et l’opsodicée
Dans le vaste éventail des études platoniciennes, il est un domaine marqué d’ambiguïté. Les années 1970-80 ont connu, dans la veine de Heidegger ou celle de Foucault, une sensibilisation générale au caractère visuel de la métaphysique occidentale. L’essentiel de son langage, non seulement les notions puisées dans la langue ordinaire, mais aussi les termes techniques, se sont révélés façonnés selon le modèle de la vision. Réflexion, théorie, évidence, spéculation, contemplation, scepticisme, idée, histoire, phénomène, ‘Einsicht’ et ‘Anschauung’, aucune philosophie ne pourrait se passer de ces notions. En sortait-elle indemne ? Les pères fondateurs de la philosophie, Platon le premier, ont été accusés de concevoir la connaissance sous les auspices de la vue, déterminant ainsi le sens et la nature de toute l’épistémologie postérieure. Il semble généralement accepté, voire trivial que, dans la philosophie platonicienne, la vue, la vision, la visualité jouent un rôle prépondérant. Force est pourtant de constater la pénurie flagrante de recherches consacrées à ce sujet, apparemment si important, d’autant plus que la prolifique production d’études concernant Platon ne semble guère se tarir et que le rôle du visuel dans la philosophie médiévale et moderne est devenu le thème d’innombrables publications 1 . Or, la problématique visuelle bénéficie, dans les études sur Platon, d’un accueil très particulier. Dans le milieu philosophique comme dans celui des antiquisants, elle est vouée au contraste : la thèse du ‘Platon penseur visuel’ (ou comme on dit parfois, ‘ocularocentriste’ 2 ), ou même du ‘premier penseur visuel’ jouit auprès des uns d’une totale approbation 3 ou, plus rarement et moins explicitement, fait l’objet de désapprobation 4 , et d’une toute aussi parfaite ignorance auprès des autres 5 . Elle est considérée tantôt comme un truisme, tantôt comme nulle, dénuée d’intérêt, comme un propos surgi quelque part en marge des études sérieuses, entre la vulgarisation et le journalisme.
Nous avons été intrigués par cette béance entre lieu commun et non-lieu, entre vérité qui va de soi et moins-que-mensonge, où se placent la thèse d’un Platon-(premier)-ocularocentriste et la problématique qui lui sert d’horizon : le caractère optique de la métaphysique, la prédominance des métaphores visuelles, etc. Toutes les tentatives de construire une métaphysique alternative, auditive (une ‘raison acoustique’) 6 , olfactive 7 ou tactile 8 , n’ont pas réussi à entamer la dominance de celle, seule et commune, qui est basée sur le modèle visuel :

“Réfléchissons tout d’abord sur l’ idée de l’être . Nous l’opposerons au concept qui, dans le cas, s’avère inapplicable. Que signifie donc l’idée ? Ses origines visuelles sont assez manifestes. Idée, Eidos . Le primat de la forme est aussi le primat du visuel. Il est remarquable que les métaphores tirées des autres sens ont eu moins de succès, soit que l’espace tactile fût par trop limitant, soit, à l’inverse, que le monde des parfums fût par trop imprécis. On ne voit pas bien ce que serait, en dehors d’expériences privilégiées, un goût, un parfum ou un son de l’être ! La forme visuelle a le double avantage de clore sur elle-même une portion d’espace, et de suggérer l’immensité d’au-delà, où ses limites s’inscrivent et se déploient, dans un acte instantané de jaillissement.” 9
Toute étude qui dresse un bilan historique du souci ‘opsoclaste’ moderne 10 passe par une référence obligatoire à Platon. La situation est donc assez paradoxale : si, dans les études platoniciennes, à quelques notables exceptions près (on y reviendra), cette dimension fait défaut, Platon n’est par contre que trop souvent évoqué, hors du champ des ‘spécialistes’, par quiconque veut penser la ‘domination du visuel’. Il y est toujours présenté et de façon insistante comme une figure de proue, une figure inaugurale, presque un totem de la sempiternelle tradition du joug (ou du péché originel) visuel. Il est l’accusé numéro un dans tout procès fait à la tradition ocularocentriste, dans toute, pour ainsi dire, ‘opsodicée’, – que ce soit personnellement, ou en tant que penseur grec par excellence.
Dans son ouvrage Philosophy and the Mirror of Nature, R. Rorty interprète notre époque comme dominée par des métaphores oculaires, grecques et platoniciennes, et la condamne à une inévitable obsolescence : “Je suppose que l’époque historique dominée par les métaphores oculaires grecques est en train de céder la place à une autre où le vocabulaire philosophique qui fait siennes ces métaphores paraîtra aussi saugrenu que le vocabulaire animiste des temps préclassiques” 11 . Aucune nécessité ne nous force à considérer ce vocabulaire comme éternel ou, encore moins, ‘naturel’ :

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