Dieu veut des dieux
99 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Dieu veut des dieux , livre ebook

-

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
99 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Dans ce texte enthousiasmant et libérateur, à la lisière de la philosophie et de la haute spiritualité, Bertrand Vergely nous invite à prendre pleinement conscience de notre vocation à ce que la tradition orthodoxe appelle la theosis, la déification. La vie divine n’est pas une abstraction lointaine mais la substance même de notre vie véritable, celle que nous sommes appelés à expérimenter ici et maintenant – la vie en plénitude qu’avaient pressentie tous les grands esprits et que tous, qui que nous soyons, nous aspirons à vivre. De sa redécouverte dépendent tant la clef du mystère de notre identité que la solution aux crises de la culture et de l’humanisme.


Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 28 octobre 2021
Nombre de lectures 2
EAN13 9782728932078
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0500€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Dieu veut des dieux.
Novalis.
Prologue Quelle vie ?
Quand on aborde la question de savoir quelle vie il convient de mener, la tendance générale est à la modestie. Si on peut vivre une vie décente en ayant un emploi, si on peut mener une vie humaine dans un monde humain, on aura donné un sens à son existence. Ces propos semblent pleins de bon sens. Le sont-ils vraiment ?
Il y a se nourrir et manger. Si on mange seul et sans joie une nourriture qui a été octroyée, on ne mange pas. Pour manger, il ne faut pas simplement manger. Il faut avoir l’impression de manger. On a cette impression quand la nourriture est bonne, qu’elle a été offerte et partagée.
Ayons un travail sans le plaisir de travailler : ce travail devient une servitude, voire un calvaire. Beaucoup de personnes sont pauvres. Vivant de peu mais vivant dignement, elles ont beau être pauvres, elles ne sont pas misérables. Ce qui n’est pas le cas de celles qui, n’étant pas pauvres, ont perdu leur dignité. On croit bien faire et être humain en expliquant que la vie a du sens quand on vit sans violence, sans inhumanité et sans souffrances. Les choses ne sont pas si simples.
La paix n’est pas l’absence de guerre, rappelle Spinoza, ni le bonheur l’absence de malheur 1 . On peut ne pas être en guerre et pourtant vivre dans la violence. Un pays comme la France n’est pas en guerre. Alors que les conditions de vie se sont considérablement améliorées ces dernières décennies, on pourrait penser que les Français sont plus confiants à l’égard de l’avenir. Il n’en est rien. Ayant peur de perdre ce qu’ils ont acquis, ils sont l’un des peuples les plus pessimistes qui soient. La France a beau connaître la paix des corps, il lui manque la paix des âmes.
Woody Allen s’est un jour demandé s’il y avait une vie après le bonheur. Il importe de s’interroger. Y a-t-il une vie après le confort ?
La vie a besoin de grandeur, d’idéal, d’intensité, et pas simplement de sécurité et de confort. Faisons du confort et de la sécurité les buts uniques de l’existence. Refoulant la grandeur, l’idéal et l’intensité, on atrophie l’existence. Pour vivre, il faut un minimum, dit-on. Pour vivre, il faut un maximum. Visons le maximum : on est sûr d’avoir le minimum. Contentons-nous du minimum : on est sûr de ne même pas avoir le minimum.
La vie a besoin de poésie. Quand elle en est dépourvue, comme le souligne Antonin Artaud, la poésie que l’on n’a pas mises dans la vie nous revient par le mauvais côté des choses 2 . Quand la vie ne symbolise rien, elle finit par symboliser le rien en s’attaquant à la vie elle-même.
Le sens de la vie est une affaire personnelle, entend-on. On ne va tout de même pas l’imposer. Non à la dictature idéologique et religieuse ! C’est à chacun de construire le sens de sa vie. Ce discours, qui est l’essence de la morale de Sartre et de l’existentialisme contemporain, est juste 3 . Du moins en partie. Il ne fait que la moitié du chemin menant à une vie vraiment sensée. Au cours de la modernité, sous prétexte de responsabilisation, le sens de la vie a été privatisé. Privatisé, il a été purement et simplement annihilé.
Lorsque Sartre fait du sens une affaire de responsabilité personnelle, la responsabilité n’est pas une affaire privée. Elle se déploie sur le fond d’un sens du devoir et du respect. Sartre croit à la morale. Nous sommes comme lui. En théorie du moins. En pratique, il en va autrement. Si nous voulons bien l’homme comme liberté individuelle, aller dans les profondeurs de l’homme intéresse peu de monde. D’où la crise que connaît l’humanisme postmoderne. Étant très individualiste et sans profondeur, il lui manque beaucoup d’épaisseur humaine pour être un vrai humanisme.
On peut sortir de la crise que traverse l’humanisme postmoderne. Pour cela, il faut donner le maximum à l’homme et pas le minimum.
Dans ses Essais de psychanalyse appliquée , Freud a écrit un article dans lequel, fustigeant le narcissisme délirant qui veut faire de l’homme le centre de l’univers, il tresse des couronnes aux trois grands génies qui l’ont libéré de cette prétention. Copernic a ouvert la voie en démontrant, sur un plan astronomique, que la terre n’est pas le centre l’univers. Darwin a poursuivi cette décentration en montrant que l’homme n’est nullement un être à part dans la nature. Enfin, Freud lui-même a porté l’estocade finale en avançant que la conscience humaine n’est rien par rapport à l’inconscient 4 .
Ce texte de Freud est étonnant. Dans le même temps où il fustige le narcissisme de ceux qui prétendent faire de l’homme le centre de tout, il n’hésite pas à faire de la psychanalyse et de lui, Freud, le centre de la pensée.
Il y a par ailleurs une erreur théorique et scientifique. Freud croit que c’est en annihilant l’homme qu’on supprime son orgueil. Au contraire. C’est en lui donnant une place éminente.
Dans La Critique de la raison pure , Kant loue ­Copernic pour avoir non pas décentré l’homme par rapport à l’univers, mais reformulé sa position centrale de façon pertinente. Sur le plan spatial, l’homme n’est pas le centre de l’univers. Sur le plan mental, il en va autrement. Si Copernic n’avait pas fait tourner l’univers autour de l’intelligence humaine, jamais il n’aurait pu se rendre compte que l’homme n’est pas spatialement le centre de tout. Pour qu’il accepte de ne pas être grand-chose sur un plan extérieur, faut-il que l’homme soit intérieurement grand ! Kant l’a compris. Freud ne l’a pas compris. Il a pensé avoir pensé l’homme. Il n’a pas su voir où se trouve sa vraie grandeur.
Cette erreur théorique va de pair avec une erreur morale. Freud a pensé que pour que l’homme devienne humble, rien ne vaut le fait de ramener son origine à une source purement animale. Au lieu d’en faire un dieu ou un roi, enlevons-lui sa dignité royale. Ne se sentant plus tenu par le devoir d’agir et de vivre en roi, il ne va nullement devenir humble. Il va au contraire être prétentieux. Quand on est un animal, on se comporte en animal en traitant les autres comme des animaux. On ne voit plus l’intérêt d’avoir de la tenue ni de traiter les hommes autrement que comme un troupeau. Disons à l’inverse à l’homme qu’il a une origine royale. Il se sent obligé d’avoir de la tenue et de traiter les autres noblement. D’où la sagesse de cette parole de saint Macaire : « Souviens-toi que tu es de lignée royale 5 . »
Pour vivre, il faut le maximum et non le minimum. Pour penser l’homme, il faut également le maximum et non le minimum. Nous croyons savoir qui est l’homme. Nous pensons le connaître. Avons-nous vraiment conscience de ce qu’il est et de ce que nous sommes ? « Qui est donc l’homme pour que tu t’en souviennes ? », interrogent les Psaumes 6 . L’homme a beau être peu de chose dans l’univers matériel, il a conscience de l’univers. Cela change tout. Grâce à lui, l’univers est un univers conscient. D’où la justesse de cette parole chantée par le chœur dans Antigone de Sophocle : « Parmi toutes les merveilles, l’homme est la plus grande merveille 7 . » Comme le dit Pascal, l’homme possède une dignité infinie du fait qu’il pense 8 .
Il faut que l’homme en prenne conscience. Il y a quelque chose non seulement de royal mais de divin en lui. La pensée grecque en a eu conscience en honorant ceux qui, comme les sages et les héros, étaient capables de devenir les égaux des dieux. Dans les Évangiles, c’est ce ­qu’enseigne le Christ quand il lance à ceux qui veulent le lapider parce qu’il se dit fils de Dieu : « Vous êtes des dieux 9 . » Parole qu’il convient de bien comprendre. Tous ceux à qui la Parole de Dieu est destinée sont des dieux. Ce sont les Psaumes qui le disent 10 . Souvenons-nous qu’en hébreu, l’un des noms de Dieu est « Elohim », à savoir les dieux au pluriel, et derrière eux les énergies divines inconscientes qui portent en elles tout le devenir de la création. Lorsque la Parole divine est adressée aux hommes, elle crée chez eux un potentiel divin.
Il n’est pas délirant de dire que les hommes ont un potentiel divin tel et qu’à ce titre ils sont des dieux. Ceux qui veulent lapider le Christ son des dieux quand ils vont au Temple pour écouter la parole divine. Comme tout homme qui entend cette parole, ils sont dans leur potentiel divin. Le Christ dit être le fils de Dieu. Il n’est pas blasphématoire de le soutenir, être fils de Dieu voulant dire être dans une intimité absolue avec Dieu 11 . Ce qui ne revient nullement à se prendre pour Dieu. Au contraire. S’il est ainsi intime avec Dieu, ce n’est pas pour lui, mais pour que les hommes puissent à leur tour connaître cette intimité, l’intimité absolue entre le Père et le Fils rendant possible l’intimité universelle.
Dieu est vivant. Étant vivant, il veut que le divin vive. Voulant que le divin vive, il le fait vivre en le semant dans la profondeur des choses, des êtres, du monde, de la vie, des hommes et de l’histoire. Dans la Genèse, ce divin en expansion s’appelle arbre de vie 12 . Dans l’évangile de Jean, il s’appelle le Verbe 13 . Il y a du divin en l’homme. Il faut le dire. C’est en ayant conscience de sa valeur divine qu’il cesse de délirer et de faire n’importe quoi. C’est en entreprenant de vivre divinement qu’il se met à vivre et à faire vivre la vie la plus humaine qui soit.
Première partie Le principe divin
1
Celui qui est
Dieu. La vie divine. Dieu n’est pas forcément synonyme de vie divine ni la vie divine synonyme de Dieu.
Voltaire a cru dans l’existence d’un Dieu horloger 14 . Ce Dieu ressemble au Grand Architecte de l’univers des francs-maçons. Un tel Dieu n’implique nullement un Dieu divin ni une vie divine. Au contraire. Il est taillé sur mesure pour la pensée qui ne veut entendre parler ni d’un Dieu divin ni d’une vie divine.
Quand Voltaire adhère à l’idée d’un Dieu horloger, il voit l’univers comme un univers rationnel gouverné par une intelligence rationnelle. Il adhère à un tel Dieu pour éviter deux écueils : l’irrationnel d’un côté, la religion d’un autre. Voltaire n’est pas athée. Supposant qu’il n’y

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents