La pensée arabe actuelle
250 pages
Français

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La pensée arabe actuelle , livre ebook

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Description

L'auteur analyse les contributions de quatre penseurs arabes ayant travaillé sur le rapport au Turâth (tradition) et à la modernité : Abdallah Laroui, Mohamed Abed Al Jabri, Georges Tarabishi et Taha Abderrahmane. L'analyse tente de montrer que les apports divergents de ces quatre penseurs, quant à la manière d'assimiler le Turâth et la modernité occidentale afin d'échapper à leur emprise dans le but de façonner sa propre modernité, pourraient constituer le point de départ pour un nouveau rapport à la tradition et à la modernité.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 octobre 2016
Nombre de lectures 47
EAN13 9782140018947
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
4e de couverture
Titre

Mohamed O URYA






La pensée arabe actuelle

Entre tradition et modernité
Copyright

Du même auteur

Religieux dans les citadelles du Politique. Le cas Qaradawi, théologien et prédicateur , L’Harmattan, 2014.















© L’Harmattan, 2016
5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris

http://www.harmattan.fr
diffusion.harmattan@wanadoo.fr

EAN Epub : 978-2-336-77130-4
Introduction
Plusieurs ouvrages parus ces dernières décennies s’intéressent plus à la variante radicale et militante du discours islamiste politico-religieux (notamment depuis le 11 septembre 2001), vu l’émergence de la doxa salafiste 1 dans l’espace occidental même. Toutefois, se développe une pensée originale qui recherche une légitimation des idéaux de la modernité dans la culture islamique. C’est pourquoi une étude de cette pensée s’avère appropriée et même nécessaire, notamment pour le bénéfice de la science d’une part et pour déconstruire la pensée traditionnelle véhiculée par le courant salafiste d’autre part, en s’appropriant ses mécanismes et analysant autrement le Turâth (Tradition), dont elle se veut le défenseur du temple, pour une éventuelle rupture.
Ce courant salafiste est un courant traditionnaliste perpétuant la Tradition musulmane, qui voit dans la génération des salaf as-saleh (ancêtres bons ou vertueux) l’âge d’or des musulmans qu’il faut faire revivre à l’époque actuelle et au-delà. Toutefois, cette définition engendre une difficulté épistémologique qui réside dans la détermination et surtout la délimitation du salafisme. Au niveau du discours, celui-ci englobe depuis quelques décennies des courants et des tendances regroupés sous le vocable de l’islam politique ou ce que l’on appelle communément as-sahwa al-islamyia (l’éveil islamique) qui est perçu comme la réémergence de l’identité musulmane tant aux niveaux religieux, spirituel, idéologique que politique.
Cela dit, même si le terme « salafisme » n’est utilisé ouvertement que pour désigner certains mouvements sunnites radicaux aux versants religieux rigoristes et affichant clairement leur affiliation intellectuelle au contenu essentiel de la notion du salafisme, celui-ci consiste dans les faits en un certain retour à la Tradition des Anciens, prise comme la référence et la base de toute pensée actuelle. Dans cette perspective, on peut dire que toute pensée qui propose des solutions encadrées par les contours de la religion musulmane est une pensée salafiste. Toujours est-il que ces propos posent le problème de la définition de la religion musulmane elle-même. C’est pourquoi on trouve utile de partir de la définition donnée par le philosophe syrien Sadeq Jalal Al ‘Adhm. Il définit ainsi la religion dans l’espace arabo-musulman comme « une force massive qui intervient au cœur de nos vies, influence notre structure mentale et psychique, détermine notre manière de pensée et nos réactions sur le monde où nous vivons et constitue une partie intégrante de nos comportements et nos habitudes. 2 » Suivant cette vision, la religion est perçue comme un ensemble de croyances, de lois, de rites et d’institutions 3 . Rappelons également que le salafisme et ses partisans se donnent la mission et le projet de protéger, sinon de consolider cette force structurante qu’est la religion. D’où leur forte opposition à toute tentative de déconstruction du Turâth perçu comme l’enveloppe protectrice de la religion.
Cela dit, les courants de pensée salafiste peuvent différer et être classés selon leur degré de capacité à puiser dans le Turâth religieux. C’est ainsi qu’il existe un courant modéré, un autre plus modéré, un troisième plus radical ou fondamentaliste, etc. Toutefois, leur manière de penser reste néanmoins la même car la religion musulmane a vu le jour et a été organisée à un certain moment dans le passé. C’est pourquoi la recherche de solutions à la condition humaine, sociale ou politique des défis du présent ne pourrait se faire qu’à travers le retour à ce passé et principalement à ses anges gardiens dits as-salaf .
Il appert donc que le principe fondamental de tout salafisme semble se résumer dans la boutade suivante : al-ittiba’ la al-ibtida’ (suivre et non innover). Cette règle salafiste est notamment exprimée par un hadith du prophète de l’islam considéré comme authentique 4 : « Quiconque innove ou héberge un innovateur à Médine, a sur lui la malédiction de Dieu, des anges et de toute l’humanité » , ainsi que selon l’adage de l’un de ses plus proches compagnons, Abdullah Ibn Mas’ud qui aurait dit « S uivez et n’innovez pas, car on vous a donné ce qui est suffisant [ et toute innovation est un égarement ] ». Elle est de plus appuyée par plusieurs Ulémas du salaf . Par exemple, Al-Hassan Al-Basrî (642-629 5 ) : « Ne vous asseyez pas avec les gens de l’innovation et des passions, ni ne débattez avec eux, ni ne les écoutez » , ou Ibrahim Ibn Maysara (mort en 750) : « Quiconque honore un innovateur a participé à la destruction de l’islam » ou encore le hanbalite Ibn Qudâma Al-Maqdisî (1160-1223)
« Les Salafs ont interdit le fait de s’asseoir avec les gens de l’innovation, de lire leurs livres et d’écouter leurs paroles. 6 »
La justification religieuse de cette vision provient du hadith attribué à Muhammad : « Le meilleur des siècles est le mien puis celui qui le suit puis celui qui le suit… » Quant à l’événement historique qui détermine le statut ontologique du salafisme, il est caractérisé par la présence du corpus textuel (Coran et Sunna 7 ) entre les mains du premier groupe des musulmans juste après la mort du prophète en 622. La parole divine (qu’elle soit Coran ou parole/acte du prophète) est restée la vérité essentielle du groupe. La continuation de celui-ci en tant que groupe appartenant à la nouvelle religion dépend de ce Texte. C’est là la seule justification qui donne à son existence une légitimité transcendante. Le conflit des idées politiques et religieuses survenu juste après la mort du prophète consistait à s’approprier la réinterprétation du texte coranique à propos des situations nouvelles qui se présentaient. Ce conflit est resté présent jusqu’à aujourd’hui au sein même de l’expérience salafiste devant l’impossibilité d’institutionnaliser l’interprétation du corpus textuel. Ce qui a donné naissance à plusieurs courants et écoles en islam 8 et ce, dès la mort du prophète en 632.
Cela dit, comme l’interprétation du texte n’a pas d’institution formelle reconnue dans l’imaginaire musulman, surtout sunnite, le salaf peut être défini alors comme une institution alternative. D’ailleurs, cette institution, dont relève tous les salafismes historiques et actuels, est devenue la source absolue de la croyance et de la compréhension de la religion et des comportements religieux et éthico-sociaux. C’est ainsi que dans le Turâth musulman, l’expression de salaf as-saleh, dans son sens le plus large, englobe les sahaba (compagnons) de Muhammad, les Ulémas qui ont fondé les écoles fiqhistes et ceux qui les ont suivi jusqu’au 9 e siècle.
Cela étant, le courant salafiste, en dépit de son utopisme, qui consiste à faire revivre une époque de l’histoire perçue comme la meilleure se présente comme assez solide et cohérent pour ceux qui y croient, à savoir ceux qui véhiculent le discours et ceux qui l’acceptent. L’argument présenté est que cette utopie a été expérimentée avec succès dans le passé. Ce succès est certes relatif, imaginé et démesuré même, mais il revêt un caractère de vérité absolue chez ceux qui y s’attachent. C’est ainsi que la pensée salafiste règle sa contradiction principale qui réside dans son anhistoricisme en recourant spécialement au dogmatisme et aux opinions absolues et rigides.
L’anhistoricisme du salafisme réside donc dans sa tentative incessante d’appliquer un modèle issu d’une autre époque et d’un autre espace. Pour ce faire, la pensée salafiste procède à un ajustement du présent pour le rendre plus proche du Turâth ainsi qu’à une certaine lecture du passé en le rendant acc

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