À chacun son cerveau : Plasticité neuronale et inconscient
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Description

Et si, selon le vœu même de Freud, la psychanalyse pouvait trouver un appui dans les neurosciences ? Et si, réciproquement, celles-ci gagnaient à intégrer leurs découvertes au modèle psychanalytique ? François Ansermet et Pierre Magistretti nous proposent ici une articulation originale entre deux disciplines souvent présentées comme antagonistes. Le point de rencontre : les mécanismes de plasticité neuronale grâce auxquels le cerveau reste ouvert au changement et modulable par l’expérience. En tout cas, le moment semble enfin venu d’explorer les bases biologiques de l’inconscient à travers un nouveau paradigme. Psychanalyste, François Ansermet est professeur de pédopsychiatrie à la faculté de biologie et de médecine de l’Université de Lausanne et médecin-chef au service universitaire de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent. Professeur de neurosciences à l’École polytechnique fédérale et à l’Université de Lausanne, Pierre Magistretti est directeur du centre de neurosciences psychiatriques du Centre hospitalier universitaire vaudois. Il a été président de la Fédération européenne des sociétés de neurosciences.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 octobre 2004
Nombre de lectures 1
EAN13 9782738181992
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0500€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

DES MÊMES AUTEURS   CHEZ ODILE JACOB
Neurosciences et psychanalyse (Travaux du Collège de France), 2010.
Les Énigmes du plaisir, 2010.
©  O DILE J ACOB, 2004 , AVRIL  2011
15 , RUE S OUFFLOT, 75005 P ARIS
www.odilejacob.fr
EAN : 978-2-7381-8199-2
Le code de la propriété intellectuelle n'autorisant, aux termes de l'article L. 122-5 et 3 a, d'une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l'usage du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute représentation ou réproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (art. L. 122-4). Cette représentation ou reproduction donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo
« En effet, quand on dit de chaque être vivant qu’il vit et qu’il reste le même – par exemple, on dit qu’il reste le même de l’enfance à la vieillesse –, cet être en vérité n’a jamais en lui les mêmes choses. Même si on dit qu’il reste le même, il ne cesse pourtant, tout en subissant certaines pertes, de devenir nouveau, par ses cheveux, par sa chair, par ses os, par son sang, c’est-à-dire par tout son corps.
Et cela est vrai non seulement de son corps, mais aussi de son âme. Dispositions, caractères, opinions, désirs, plaisirs, chagrins, craintes, aucune de ces choses n’est jamais identique en chacun de nous. »
P LATON , Le Banquet , 207d-208a.
Avant-propos

Ce livre est né d’une rencontre. Rencontre entre deux domaines, psychanalyse et neurosciences. Rencontre entre deux personnes aussi : un neurobiologiste ayant une expérience psychanalytique personnelle et un psychanalyste ouvert à ce que d’autres champs peuvent enseigner à la psychanalyse. Rencontre enfin autour d’une constatation commune : l’expérience laisse une trace. Cette constatation a trouvé une confirmation expérimentale au travers des acquisitions récentes de la neurobiologie, qui démontrent une plasticité du réseau neuronal permettant l’inscription de l’expérience 1 . Cette plasticité qui est considérée aujourd’hui comme étant à la base des mécanismes de la mémoire et de l’apprentissage 2 est fondamentale pour la neurobiologie. Elle a permis de sortir d’une vision figée du système nerveux. Il est désormais acquis que les éléments les plus fins du processus de transfert de l’information entre les neurones, c’est-à-dire les synapses, sont remodelés en permanence en fonction de l’expérience vécue. Les mécanismes de plasticité opèrent tout au long de la vie de l’individu et déterminent de manière significative son devenir.
Si les résultats expérimentaux qui démontrent l’existence de cette plasticité sont récents, l’hypothèse, elle, est ancienne. Santiago Ramon y Cajal l’avait déjà formulée, il y a plus d’un siècle : « Les connexions nerveuses ne sont donc pas définitives et immuables, puisqu’il se crée pour ainsi dire des associations d’essai destinées à subsister ou à se détruire suivant des circonstances indéterminées, fait qui démontre, entre parenthèses, la grande mobilité initiale des expansions du neurone 3 . » Freud lui-même en avait saisi le rôle dans les mécanismes de l’apprentissage et de la mémoire 4 . Cette hypothèse a été revisitée à plusieurs reprises, notamment par Donald Hebb dans les années 1940 5 . En d’autres termes, le terrain conceptuel était prêt à recevoir les données expérimentales. Le prix Nobel de médecine 2000 décerné à Eric Kandel a été un moment marquant où a été reconnue l’importance des mécanismes de plasticité dans la neurobiologie moderne 6 .
L’idée que l’expérience laisse une trace est aussi centrale pour la psychanalyse, à travers le concept de trace mnésique laissée par la perception et ses différents niveaux d’inscription, qu’ils soient conscients ou inconscients. L’originalité de l’hypothèse de Freud a été de supposer qu’il n’y avait pas une seule inscription de l’expérience, mais que celle-ci était transcrite dans différents systèmes, aboutissant finalement à la constitution d’une vie psychique inconsciente. À l’époque, il ne pouvait s’agir pour Freud que d’intuitions que la biologie n’était pas en mesure de valider : « Les insuffisances de notre description s’effaceraient sans doute si nous pouvions déjà mettre en œuvre, à la place des termes psychologiques, les termes physiologiques ou chimiques […]. La biologie est vraiment un domaine aux possibilités illimitées : nous devons nous attendre à recevoir d’elle les lumières les plus surprenantes et nous ne pouvons pas deviner quelles réponses elle donnerait dans quelques décennies aux questions que nous lui posons 7 . »
Serions-nous aujourd’hui, en ce début de XXI e  siècle, à une étape de la connaissance biologique qui permette d’objectiver ce qu’est une trace produite par l’expérience, en esquissant un pont entre la trace psychique et la trace synaptique qui s’établit dans le réseau neuronal ?
La trace, en termes neurobiologiques, est dynamique. Elle est sujette à des modifications. Les mécanismes de son inscription confèrent au réseau neuronal une grande plasticité au sens originel du terme. Se constitue ainsi, sur la base de l’expérience, une réalité interne, qui peut, bien sûr, être consciente, à la base de nos souvenirs rappelables à la conscience, mais également d’inscriptions inévocables, du domaine de l’inconscient. Un des thèmes majeurs de ce livre est justement d’explorer les mécanismes qui permettent d’établir cette réalité interne inconsciente et surtout d’en définir l’incidence dans le destin du sujet. On pourrait, dans une approche heuristique, se risquer à dire que nous avons essayé de définir à grands traits un modèle, qui demeure à discuter, mais qui serve à appréhender la biologie de l’inconscient.
Des traces s’inscrivent, s’associent, disparaissent, se modifient, tout au long de la vie par le biais des mécanismes de la plasticité neuronale. Ces traces inscrites dans le réseau synaptique vont aussi déterminer la relation du sujet avec le monde extérieur. Elles ont donc un effet sur son destin. C’est là un point important à relever, car on pourrait déduire que du fait de la plasticité le sujet est en permanence modifié, repartant chaque jour à partir d’une tabula rasa sur laquelle viennent s’inscrire de nouvelles traces. Se poserait alors la question de la conservation de l’identité du sujet tout au long de son histoire. Après tout, les mécanismes de la plasticité tels qu’ils sont décrits par la neurobiologie impliquent la constitution d’une trace durable sinon permanente. Plasticité n’est pas synonyme de flexibilité 8 ou d’adaptabilité permanente laissant le sujet dépourvu d’un certain déterminisme et d’un certain destin qui lui est propre.
La plasticité participe à l’émergence de l’individualité du sujet. Chacune de nos expériences est unique et a un impact unique. Certes, la plasticité exprime en soi une forme de déterminisme, mais en même temps qu’elle opère cette sorte de détermination du sujet, elle l’affranchit du déterminisme génétique. En effet, si l’on met en jeu l’expérience comme déterminante dans le devenir du sujet, on s’éloigne d’un déterminisme génétique exclusif déterminant d’emblée le destin du sujet. La plasticité serait donc, ni plus ni moins, le mécanisme par lequel chaque sujet est singulier et chaque cerveau est unique. D’où le titre de ce livre À chacun son cerveau  !
Nous aurions pu aussi l’intituler : « Les sculptures de l’inconscient », en référence à une sculpture réalisée en 1930 par Alberto Giacometti L’Heure des traces , qui illustre de manière saisissante ce que nous venons de dire. En 1930, Giacometti déclare qu’il a réalisé ce type de sculpture sans se demander ce qu’elle pouvait signifier, mais, précise-t-il, « l’objet une fois construit, j’ai tendance à y retrouver transformés et déplacés des images, des impressions, des faits qui m’ont profondément ému (souvent à mon insu), des formes que je sens m’être très proches, bien que je sois souvent incapable de les identifier, ce qui me les rend toujours plus troublantes 9  ». Giacometti semble avoir créé cette sculpture de manière quasi automatique, à partir d’éléments de son inconscient. Son installation peut effectivement être vue comme une métaphore de la réalité interne inconsciente qui se constitue de trace en trace, de façon presque bricolée, où des éléments imprévisibles se combinent au gré des expériences du sujet et de ses propres réponses issues de la singularité de sa vie psychique.
Le second argument fort que nous élaborons dans ce livre est que la constitution de cette réalité interne inconsciente fondée sur les mécanismes de la plasticité, n’est pas exclusivement un phénomène d’ordre psychique, mais met en jeu également le corps. En effet, nous discuterons le fait que les traces laissées par l’expérience sont associées à des états somatiques. L’argument est qu’aux perceptions qui laissent une trace dans le réseau synaptique s’associe un état somatique. Cette affirmation repose sur toute une série de données récentes de la littérature neurobiologique dont Antonio Damasio 10 formule une synthèse récente dans la théorie des marqueurs somatiques ; elle ramène aussi aux premières hypothèses de l’origine des émotions proposées par William James à la fin du XIX e siècle 11 . Selon cette théorie, la perception est associée à un état somatique ; le rappel de l’état somatique associé à une perception contribue à produire l’émotion. La perception seule serait neutre du point de vue émotionnel. La lecture ou le rappel par des systèmes neuronaux particuliers de l’état somatique associé à la perception ou aux traces qu’elle a laissées dans le réseau synaptique serait un élément déterminant dans l’expérience émotionnelle subjective. Nous revisiterons à la lumière de la théorie des marqueurs somatiques le con

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