À l’aube spirituelle de l’humanité : Une nouvelle approche de la préhistoire
80 pages
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À l’aube spirituelle de l’humanité : Une nouvelle approche de la préhistoire , livre ebook

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Description

Pour saisir les origines de l’homme, il ne s’agit pas seulement de rechercher comment son corps s’est transformé ou quelles ont été ses migrations ; c’est la naissance de la pensée, de la culture, de l’art, de la religion même, qu’il faut tenter de cerner pour mieux comprendre comment il est devenu l’homme. Et c’est ce que propose Marcel Otte dans ce livre, récit de notre préhistoire qui, sans sacrifier la précision archéologique ou physique, se concentre sur l’aventure spirituelle qu’a d’abord été l’hominisation. On suivra ainsi pas à pas le cheminement de nos ancêtres jusqu’aux sociétés avancées, avec toujours cette question : qu’est-ce qui les animait ? Une « autre » vision de la préhistoire qui s’appuie sur ce que nous savons de l’évolution des corps et des techniques pour retrouver celle de la pensée. Historien de l’art et archéologue, Marcel Otte est professeur de préhistoire à l’Université de Liège. Auteur de nombreux ouvrages de référence, il est notamment spécialiste des échanges culturels durant le Paléolithique et dirige de nombreuses fouilles en Europe. 

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 06 septembre 2012
Nombre de lectures 2
EAN13 9782738178749
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0900€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

© O DILE J ACOB , SEPTEMBRE 2012
15, RUE S OUFFLOT , 75005 P ARIS
www.odilejacob.fr
ISBN 978-2-7381-7874-9
Le code de la propriété intellectuelle n'autorisant, aux termes de l'article L. 122-5 et 3 a, d'une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l'usage du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute représentation ou réproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (art. L. 122-4). Cette représentation ou reproduction donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo
Ce livre est dédié à la seule spécificité humaine, celle en quête d’harmonie et de signification, celle animée par l’audace du savoir, par la volonté inlassable de rassembler les valeurs dispersées, de dresser des cathédrales, d’étendre la fulgurance des sonates et des fugues à l’espace, de se doter d’un destin mûrement planifié, de défier les dieux ou toutes autres forces que la nature lui aurait opposées. Cette humanité-là possède une durée immense et sa dignité doit être reconnue avant autant qu’ailleurs, car elle a été le moteur de ses perpétuelles transformations dont la suite nous incombe.
« Nous résignerons-nous à voir dans l’homme l’animal qui ne peut pas ne pas vouloir penser un monde qui échappe par nature à son esprit ? Ou nous souviendrons-nous que les événements spirituels capitaux ont récusé toute prévision ? »
André M ALRAUX

« La curiosité du premier homme nous a été fatale. »
E. M. C IORAN

 
Excuses à Darwin

Dans ces pages, nous voulons montrer que notre espèce (mais elle n’est pas la seule) s’est progressivement dégagée des lois, bien pesantes et bien ternes, de la reproduction du plus apte en donnant au contraire toute liberté à son imagination, à ses rêves, à sa pensée, loin de ses capacités anatomiques. Excusez-nous, Charles Darwin, car votre théorie si courageuse va ici être mise à mal : nous avons choisi d’écarter les ossements pour nous intéresser à leur fonction et, au-delà, aux treillis de pensée qui les a fait naître, aimer, ouvrir des voies, tester, oser, rêver. Ce ne fut peut-être pas facile, mais durant notre dur siècle de décolonisation (le XX e , qui suivit le vôtre, victorien), il nous a fallu assimiler des systèmes de valeurs totalement différents des nôtres et, sans les exterminer, beaucoup apprendre des populations qui les portaient, telle en particulier la futilité des traditions, la perversion des oppressions, la richesse des goûts, la qualité des émotions, les choix des autres. Surtout les choix peu susceptibles de se laisser contraindre par la sélection naturelle. Ils deviennent chanteurs, poètes (parfois savants libres), épicuriens, ou de bons copains tout simplement. L’argument tiré de la chair et des ossements ne touche pas l’essentiel : il ne dit rien de qui je suis, il n’explique pas pourquoi j’écoute Bach ou Bruce ni pourquoi la Joconde me sourit. Au-dessus des os et des chairs, l’homme (et l’animal) se bâtit par un voile de comportements abstraits, de valeurs d’une extrême complexité, sensible à la fugue comme à l’amour : il se trace au gré de ses options, toujours folles et libres. Ce voile rapproche les individus dans le temps et l’espace ; personne ne peut le toucher ; et pourtant, il nous touche. Seul son nom nous est connu : c’est l’aventure humaine.

Planche 1. Le développement du crâne, le recul de la face, la préhension des mains se fondent sur la réaction mécanique de la bipédie.
En haut (a). La couverture forestière garantit l’apport régulier alimentaire et la protection spontanée. La vision des primates combine le champ de chaque regard afin de créer la perspective. Les modes de déplacement y sont nombreux, de la terre à la cime, vol plané compris. Devant une telle diversité, l’attrait à la surface délaissée fut constant mais fatal : tous les carnivores y rôdent et le primate y est sans défense. La combinaison de concepts et de prévisions des moyens pour y remédier a précédé cette sortie des aires forestières : l’évolution, la culture spirituelle est infiniment plus rapide que l’adaptation biologique. Ces primates bipèdes ont conçu ces astuces avant de les mettre en pratique. La plupart ont échoué durant des millions d’années. Il faut imaginer une combinaison de facteurs culturels adaptés pour que cette transgression définitive ait réussi, peut-être d’ailleurs pas seulement chez l’homme car toute la famille des australopithèques en témoigne également, mais elle finira par s’éteindre sous la pression démographique des hominidés. Un basculement fondamental a changé le milieu et la biologie : dans les steppes ouvertes, les calories végétales sont beaucoup trop rares. Il a fallu se déplacer, et tuer et manger afin de fournir les calories compensatrices aux ressources forestières. Le premier sacrifice fut donc consenti par l’homme, car il était intimement solidaire de cette nature animale, chaude, vivante comme lui. Notre agressivité y tient peut-être ses plus anciens fondements (dessin d’après H. Ulrich, remanié).
Au centre, à gauche (b). La libération locomotrice des membres supérieurs (doigts, bras, mains) acquise par la bipédie, établit un rapport étroit entre la forme du crâne et celle des bras et des pieds. Les fonctions se sont spécialisées et la récolte, l’appréhension et la préparation de la nourriture atrophiaient la mâchoire et aplatissaient la face. C’est un phénomène ostéo-musculaire très simple, logique et universel. Il ne requiert pas de sauts génétiques (remanié d’après Leroi-Gourhan, 1964-1965).
Au centre, à droite (c). Les modifications des structures osseuses restent identiques et fonctionnent toujours : la face recule par atrophie due à l’emploi des mains et le trou occipital s’oriente vers le bas afin de maintenir l’équilibre d’un être debout.
En bas, à gauche (d). Si on observe simultanément les courbes dessinées par les colonnes vertébrales au cours de l’évolution humaine, on y retrouve une rétroaction identique dans la morphologie de la boîte crânienne (Tobias). Mais ceci ne concerne ni les aptitudes conceptuelles ni leurs faiblesses : il ne s’agit que d’enveloppes osseuses en rééquilibre avec la position verticale.
En bas, à droite (e, f). Cette convergence est illustrée par les tendances évolutives, indépendantes et pourtant parallèles sur la terre entière, de l’Afrique à la Chine, sans échange apparent : ce sont des conséquences mécaniques, dont nous ne nous sommes pas défaits (d’après Otte, 2010).
1
La constitution de l’esprit

Comment notre esprit s’est-il constitué au fil du temps ? Et de quoi est-il fait actuellement ? Notre hypothèse est qu’en enquêtant sur son émergence, nous avons une chance de mieux le cerner. Un problème majeur se pose toutefois d’emblée. Comment l’esprit humain peut-il s’étudier lui-même ? Puisqu’il fonctionne en quelque sorte comme une boucle en tentant de s’autodécrire, toute mise à distance prétendant être objective peut sembler vaniteuse. L’observateur se confondant avec l’observé, cette démarche entre en contradiction avec les règles de base qu’a tenté d’établir la recherche dite scientifique pour obtenir des résultats un tant soit peu crédibles.
D’autre part, toute analyse utilise des outils intellectuels conscients ou inconscients qui ont été élaborés au sein d’une certaine culture. Dès lors, vouloir parler des structures spirituelles de l’humanité, en partant d’une seule culture particulière au sein d’une multitude est suspect. Même si c’est au cœur de la culture européenne que se sont forgées les armes puissantes de réflexion de l’homme sur lui-même, comme nous le verrons ultérieurement, n’oublions pas que les analyses et la vision qui en découlent sont obligatoirement partiales et réductrices. Forcément imbibées de préjugés et d’automatismes, elles ne s’intéressent qu’à des aspects particuliers de ce que nous sommes ou pouvons être.
Voilà pourquoi il est si important pour le propos qui nous occupe de commencer par un rappel des idées en la matière telles qu’elles se sont déployées dans le temps, afin de nous doter d’un tableau parfois poétique, d’autres fois tragique de ce dont nous sommes pétris.
La question des origines de l’espèce humaine et de ses particularités est très ancienne, mais très récente dans la forme sous laquelle elle est aujourd’hui posée et par l’éventail des hypothèses envisagées. Partout sur la planète, les cultures se définissent par l’histoire de leur origine particulière, au sein d’un monde ayant lui-même une histoire originelle, et ce récit raconte invariablement l’apparition brutale de l’être humain par création de fait d’une entité supérieure. Les religions « révélées » ne font que fixer ces mythes originels, où les éléments de l’Univers apparaissent les uns après les autres, se multiplient en se produisant rapidement, mais d’emblée sous la forme où nous les connaissons aujourd’hui. Leurs péripéties peuvent certes en modifier l’ordre, la valeur et le nombre, mais le Soleil, les plantes, les animaux ou les hommes apparaissent toujours dotés de leurs caractéristiques actuelles.
Par opposition, le concept d’Univers se transformant en permanence est fort récent, du moins dans la période historique de l’humanité. Des individus isolés ont certes été de longue date des précurseurs en ce domaine. Empédocle, il y a vingt-six siècles, tentait d’expliquer l’adaptation des organismes à leur milieu par la disparition et l’évolution des espèces, préfigurant la théorie de Darwin par la sélection naturelle. Un siècle plus tard, Démocrite pensait que l’Univers s’était formé à partir d’une matière diffuse, qu’un grand nombre de mondes apparaissaient, évoluaient, portaient éventuellement des formes vivantes, entraient en collision ou se désagrégeaient. O

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