Darwin dans la bataille des idées
184 pages
Français

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Darwin dans la bataille des idées , livre ebook

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Description

Ce recueil revient sur les combats que Darwin a dû assumer et que les évolutionnistes continuent de mener aujourd'hui. Les chercheurs qui collaborent à cet ouvrage se penchent sur les rapports entre le darwinisme et le féminisme, le darwinisme et le mouvement conservateur américain, ou encore sur l'héritage du grand-père Erasmus Darwin ou la question du matérialisme, de la morale et du périmètre de la science.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 juillet 2012
Nombre de lectures 21
EAN13 9782296499652
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Darwin
dans la bataille des idées
Collection Racisme et eugénisme
Dirigée par Michel Prum

La collection "Racisme et eugénisme" se propose d’éditer des textes étudiant les discours et les pratiques d’exclusion, de ségrégation et de domination dont le corps humain est le point d’ancrage. Cette problématique du corps fédère les travaux sur le racisme et l’eugénisme mais aussi sur les enjeux bioéthiques de la génétique. Elle s’intéresse à toutes les tentatives qui visent à biologiser les rapports humains à des fins de hiérarchisation et d’oppression. La collection entend aussi comparer ces phénomènes et ces rhétoriques biologisantes dans diverses aires culturelles, en particulier l’aire anglophone et l’aire francophone. Tout en mettant l’accent sur le contemporain, elle n’exclut pas de remonter aux sources de la pensée raciste ou de l’eugénisme.

Déjà parus :

Sous la direction de Claude Carpentier, La rencontre des cultures : un défi pour l’école, 2012.
Michel PRUM, Sexe, race et mixité dans l’aire anglophone , 2011.
Marius TURDA, Modernisme et eugénisme, 2011.
Michel PRUM, Métissages, 2011.
Amélie ROBITAILLE-FROIDURE, La liberté d’expression face au racisme. Etude de droit comparé franco-américain , 2011.
John WARD, Le mouvement américain pour l’hygiène mentale (1900-1930) ou Comment améliorer la race humaine , 2010.
Catherine UKELO, Les prémices du génocide rwandais. Crise sociétale et baisse de la cohésion sociale , 2010.
Claude CARPENTIER et Emile-Henri RIARD, Vivre ensemble et éducation dans les sociétés multiculturelles , 2010.
Dominique CADINOT, Michel PRUM et Gilles TEULIE (dir.), Guerre et race dans l’aire anglophone , 2009.
Michel PRUM (dir.), Ethnicité et Eugénisme , 2009.
Michel PRUM (dir.), La Fabrique de la « race ». Regards sur l’ethnicité dans l’aire anglophone , 2007.
Sous la direction de
Sophie Geoffroy et Michel Prum


Darwin
dans la bataille des idées


Ouvrage publié avec le concours du laboratoire
Identités, Cultures, Territoires (EA 337) de l’université
Paris Diderot, Sorbonne Paris Cité


Préface de Patrick Tort
© L’Harmattan, 2012
5-7, rue de l’École-Polytechnique ; 75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr
ISBN : 978-2-296-99333-4
EAN : 9782296993334

Fabrication numérique : Actissia Services, 2012
Un très chaleureux remerciement à Dorian Tort pour sa fort précieuse aide technique
Ce qui a changé (dans) les études darwiniennes Patrick Tort
Si importante qu’ait été, et soit encore, la lutte pour l’existence, cependant, en ce qui concerne la partie la plus élevée de la nature de l’homme, il y a d’autres facteurs plus importants. Car les qualités morales progressent, directement ou indirectement, beaucoup plus grâce aux effets de l’habitude, aux capacités de raisonnement, à l’instruction, à la religion, etc., que grâce à la sélection naturelle ; et ce bien que l’on puisse attribuer en toute assurance à ce dernier facteur les instincts sociaux, qui ont fourni la base du développement du sens moral.
Charles Darwin,
La Filiation de l’Homme et la Sélection liée au sexe [1871], chap. XXI, « Résumé général et conclusion ».

À mesure que l’homme avance en civilisation, et que les petites tribus se réunissent en communautés plus larges, la plus simple raison devrait aviser chaque individu qu’il doit étendre ses instincts sociaux et ses sympathies à tous les membres d’une même nation, même s’ils lui sont personnellement inconnus. Une fois ce point atteint, il n’y a plus qu’une barrière artificielle pour empêcher ses sympathies de s’étendre aux hommes de toutes les nations et de toutes les races. Il est vrai que si ces hommes sont séparés de lui par de grandes différences d’apparence extérieure ou d’habitudes, l’expérience malheureusement nous montre combien le temps est long avant que nous les regardions comme nos semblables. La sympathie portée au-delà de la sphère de l’homme, c’est-à-dire le sentiment d’humanité envers les animaux inférieurs, semble être l’une des acquisitions morales les plus récentes. […] Cette vertu, l’une des plus nobles dont l’homme soit doué, semble provenir incidemment de ce que nos sympathies deviennent plus délicates et se diffusent plus largement, jusqu’à ce qu’elles soient étendues à tous les êtres sensibles. Sitôt que cette vertu est honorée et pratiquée par un petit nombre d’hommes, elle se répand à travers l’instruction et l’exemple donnés aux jeunes, et finit par être incorporée à l’opinion publique.
Charles Darwin,
Ibid ., chap. IV, « Comparaison des capacités mentales de l’homme et des animaux inférieurs – suite ».

On relira d’abord ces deux extraits et l’on s’étonnera qu’ils aient été, de même que l’irréfutable logique qu’ils construisent et l’ouvrage qui les contient, si longtemps et si parfaitement ignorés.
Puis on essaiera de comprendre les raisons, non encore totalement explicitées mais nécessaires, d’une telle ignorance.
Ce qu’à l’enseigne de la « refondation des études darwiniennes » je me suis efforcé d’expliquer pendant trente ans – assumant l’indispensable répétition qu’un tel effort impose – tient dans ces deux passages qui dessinent en quelques phrases l’articulation de l’anthropologie de Darwin à sa réflexion naturaliste et orientent, après elle , d’après elle , en elle et autrement , sa théorie de la civilisation.
Un tel geste théorique devait être singulièrement difficile à comprendre, puisque, aujourd’hui encore et malgré la conversion de nombreux spécialistes à la reconnaissance de ce que j’ai nommé chez Darwin l’ effet réversif de l’évolution (la sélection naturelle, par la voie des instincts sociaux, sélectionnant la civilisation, qui s’oppose à elle en éliminant tendanciellement les conduites éliminatoires), les interprétations sociobiologisantes de Darwin, dominantes dans le monde anglo-saxon, et celles qui ailleurs s’en inspirent, s’obstinent à vouloir réduire son œuvre à un seul livre – L’Origine des espèces –, et à tirer de cette réduction préalable à la seule biologie de l’évolution une application extensive à une anthropologie qui se condamne ainsi à se déployer dans la méconnaissance continuée de l’extension par Darwin lui-même , dans un autre livre, de sa propre théorie à la question de l’Homme et des sociétés humaines.
J’ai montré ailleurs, plus longuement que je ne puis le faire ici, que le geste de réduire pour appliquer (ou pour étendre ) était l’une des opérations fondamentales de l’idéologie par rapport à la science {1} . À cet égard, la réduction du « darwinisme » au champ strictement biologique couvert par L’Origine et son extension consécutive au domaine anthropo-sociologique sont littéralement contemporaines de la première irruption de la théorie sélective, puisque Herbert Spencer – le père de l’improprement nommé « darwinisme social » – a daté lui-même de l’été 1858 (première présentation des thèses de Darwin-Wallace devant la Linnean Society of London ) sa décision d’appliquer le principe sélectif à l’évolution de l’« organisme social ». Lorsque, en 1871, paraîtra La Filiation de l’Homme , Spencer ne s’y intéressera, dans sa correspondance privée, que pour signaler qu’il n’y est pas cité. Symétriquement, Marx et Engels, pressés par les urgences de la lutte idéologique contre certains « darwinistes » d’Allemagne ou de Suisse, et bien que séduits par le matérialisme naturaliste de Darwin, le réduiront à partir de 1862 à une simple application de Malthus, et n’apercevront pas, dix ans plus tard, ce qui dément formellement cette interprétation dans La Filiation de l’Homme , qu’ils n’ont probablement pas lue.
Si l’on se donne la peine, toujours risquée, de résumer une situation que l’on doit bien entendu considérer comme infiniment plus complexe, on peut raisonnablement émettre le proposition suivante : lorsque, en 1858-1859, Darwin commence à rendre publique l’application de sa théorie aux plantes et aux animaux, il plaît aux libéraux (qui anticipent immédiatement, avec Spencer, le parti qu’ils peuvent tirer de l’ancrage naturaliste de la concurrence vitale et de la survivance des plus aptes), déplaît aux chrétiens (qui y voient la destitution de l’autorité mythique de la Création et de la Providence) et séduit les marxistes (qui anticipent immédiatement, avec Marx, le parti qu’ils peuvent tirer de l’ancrage naturaliste de la lutte , et du matérialis

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