La Guerre des sexes chez les animaux

Thierry Lodé

Description

Même chez les animaux, les sexes ne sont pas d’accord. Entre la sexualité perdue des lézards et l’amour débridé des bonobos s’insinuent un combat des femelles, une bataille entre les mâles et même une lutte sans merci entre les mâles et les femelles. Comment expliquer tant d’affrontements ? Peut-on se contenter de voir dans ces conflits un paramètre parmi d’autres de la sélection ? Et si les embarras de Darwin ne faisaient que commencer ? Et s’il y avait désaccord radical ? L’histoire naturelle de la sexualité ne serait-elle pas l’histoire de toutes les tentatives de trêve, plus ou moins bancales, et de toutes les reprises, instinctives, d’hostilité entre deux sexes que tout sépare foncièrement et que tout conduit pourtant à se réconcilier ?La biodiversité amoureuse : un des principes fondamentaux de l’aventure du vivant !Une description savoureuse des stratégies féroces et des bizarreries amoureuses telles qu’on les observe dans le monde animal. Biologiste, professeur d’écologie évolutive à l’université d’Angers, directeur de recherches sur la vie sociale des animaux à l’université de Rennes-I, Thierry Lodé est actuellement l’un des meilleurs spécialistes de la sexualité animale.

Sujets

• Zoologie
• Science
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• Sciences et techniques
• Life Sciences
• Sexualité
• sexualité
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Informations

• Publié par: Odile Jacob
• Date de parution: 22 mars 2007
• Nombre de lectures: 0
• EAN13: 9782738191694
• Langue: Français

Extrait

Thierry LODÉ
LA GUERRE DES SEXES CHEZ LES ANIMAUX
Une histoire naturelle de la sexualité
 
© Odile Jacob, 2006 15, rue Soufflot, 75005 Paris
ISBN : 978-2-7381-9169-4
www.odilejacob.fr
Table

Préface. de Patricia Gowaty
Avant-propos. Une chronique des habitants de la Lune…
Chapitre 1. La naissance de la tragédie
Chapitre 2. De l’origine du monde
Chapitre 3. « Au commencement était le sexe »
Chapitre 4. Les faveurs de Pimprenelle
Chapitre 5. Le Kama-Sutra des grenouilles
Chapitre 6. La bataille du sperme
Chapitre 7. L’art délicat de la séduction
Chapitre 8. L’isolement amoureux
Chapitre 9. Jeux interdits
Chapitre 10. Les débuts de l’amour courtois
Chapitre 11. « Des sexes, je n’en connais que deux : l’un qui se dit raisonnable, l’autre qui nous prouve que cela n’est pas vrai »
Chapitre 12. Le handicap des Martiens
Chapitre 13. La leçon des perroquets
Chapitre 14. Vénus et ses brouillards : on ne badine pas avec l’amour !
Chapitre 15. Les désordres de l’amour
Chapitre 16. Comment se doit de gouverner le prince
Chapitre 17. Le dernier harem
Chapitre 18. Le domaine du cœur
Chapitre 19. Le charme discret de la monogamie
Chapitre 20. Les liaisons dangereuses
Chapitre 21. Pour quelques mâles de plus
Chapitre 22. « Qu’on ne peut donner si peu de puissance à l’amour qu’il n’en abuse »
Chapitre 23. Le voyage à Lesbos
Chapitre 24. Le temps du couple à la française
Conclusion. Une lettre aux Sélénites
Remerciements
Illustrations. (dessins originaux de Dominique Le Jacques)
Références bibliographiques
Index des matières
« Réintégrer l’homme dans la nature, triompher des nombreuses interprétations vaines et fumeuses qui ont été barbouillées ou griffonnées sur le texte primitif… [que l’homme] soit sourd aux appeaux des vieux oiseleurs métaphysiques qui trop longtemps lui ont seriné : tu es mieux que cela, tu es plus grand, tu as une autre origine – c’est une tâche qui peut sembler étrange et folle, mais c’est une tâche… »

  F. Nietzsche, Par-delà Bien et Mal , § 230.
 
Préface
de Patricia Gowaty
Le conflit entre les femelles et les mâles sur le contrôle de la reproduction n’est pas seulement un slogan féministe ; c’est aussi un problème crucial de l’évolution, du comportement social et de la sélection sexuelle.
Au cours des trente dernières années, l’étude des conflits sexuels d’intérêt a considérablement changé l’idée que les biologistes se faisaient du rôle des femelles dans l’évolution, mais aussi la manière dont ils voyaient le devenir de la compétition, le théâtre écologique du jeu évolutif et la vitesse de l’évolution. Ces remises en cause, passionnantes, ont conduit les chercheurs empiristes à ouvrir le débat sur la dynamique du succès ( fitness ) des systèmes sociaux et abouti à des conclusions inimaginables il y a encore dix ans. Le livre de Thierry Lodé nous fait entrer dans ce domaine, fascinant, de la biologie évolutive.
Quelques chercheurs continuent à arguer que, en raison de la plus faible variance du succès des femelles – au contraire du mâle, la femelle ne peut accroître son nombre de descendants en multipliant les copulations –, le changement évolutif serait plus faible chez les femelles que chez les mâles. Cet argument a justifié ce que j’appelle le cookie cutter model selon lequel la variation évolutive serait trop faible chez les femelles pour mériter de leur porter attention. En réalité, aujourd’hui, nous mesurons combien les femelles jouent un rôle actif dans le conflit sexuel. Leur aptitude différente à gagner, éviter ou surmonter les effets de la bataille est une clé essentielle pour comprendre la dynamique du conflit. La conception selon laquelle les femelles participent passivement à l’évolution n’est pas seulement incorrecte, elle est désormais révolue. Le formidable résultat en est que nous en savons plus sur les femelles… et sur les mâles.
L’idée au cœur des théories du conflit sexuel est que les interactions physiologiques et comportementales des mâles et des femelles déterminent quel sexe pourra contrôler la reproduction. S’il est vrai que les gagnants et les perdants de ces interactions dans le temps écologique sont à la fois des mâles et des femelles, la valeur adaptative interdit, toutefois, de penser que la question se situe parmi les mâles ou parmi les femelles. Comme le choix des partenaires sexuels, le comportement ou la physiologie d’un sexe affecte la variance du succès reproducteur de l’autre sexe (la variance du succès reproducteur est la monnaie d’échange de la sélection), de telle manière que les gagnants et les perdants se trouvent au sein des deux sexes (la variance au sein de chaque sexe est la monnaie d’échange de la sélection sexuelle). Quand les mâles tentent de manipuler les décisions reproductives des femelles, le succès reproducteur des femelles manipulées décroît par rapport au succès que connaissent les femelles qui échappent à une telle manipulation : les gagnants et les perdants sont des femelles. Quand quelques mâles ont plus de succès que d’autres en manipulant les femelles, les gagnants et les perdants sont des mâles. Dans le conflit sexuel, un type simple d’interactions entre mâle et femelle entraîne aussi bien les mâles que les femelles à devenir des gagnants ou des perdants. Ainsi, le conflit intersexuel influence-t-il la sélection sexuelle des deux sexes à la fois. C’est d’ailleurs le sens de la conclusion finale de Thierry Lodé.
Même la coopération entre les sexes pourrait bien trouver son origine dans le conflit ! Les mâles peuvent manipuler les décisions reproductives des femelles, ce qui modifie, là encore, notre perception du contexte écologique des théories évolutives. Que des mouches du vinaigre ajoutent dans leur éjaculation des peptides toxiques qui altèrent l’aptitude des femelles à s’accoupler de nouveau l’illustre parfaitement ! De plus, le choix des femelles est souvent perçu comme un processus pré- copulatoire, mais il existe aussi un choix cryptique, dissimulé , qui se déroule directement après la copulation, dans le tractus génital de la femelle. Ce peut aussi être une manipulation ou une résistance dissimulée ayant lieu à l’intérieur des femelles. Ainsi, le théâtre écologique du conflit sexuel est aussi le corps des femelles elles-mêmes. Sont-ce ces armes physiologiques des mâles qui ont entraîné la prétendue coquetterie des femelles – dont l’autre face est la débauche des mâles ? Si une telle manipulation par les mâles est courante chez les espèces vivantes, les idées théoriques sur l’origine de la différence des sexes ne peuvent alors plus tout à fait être valides… Décidément, l’étude du conflit sexuel ouvre un champ intellectuel fécond et passionnant. Thierry Lodé nous en offre ici la démonstration éclatante.

  Patricia Adair Gowaty
Professeur d’écologie évolutive
Institut décologie de l’Université de Georgie
Athens, Georgie, États-Unis.
Avant-propos
Une chronique des habitants de la Lune…

«  The sexual struggle is of two kinds : in the one it is between the individuals of the same sex, generally the males, in order to drive away or kill their rivals, the females remaining passive ; while in the other, the struggle is likewise between the individuals of the same sex, in order to excite or charm those of the opposite sex, generally the females, which no longer remain passive, but select the more agreeable partners.  »

  Darwin (1871),
The Descent of Man and Selection in Relation to Sex .
L’orchidée faisait de la peine à Darwin. Tout juste avait été rédigée L’Origine des espèces que Darwin s’intéresse et écrit sans sectarisme sur la reconnaissance de l’orchidée et du bourdon. L’orchidée Ophrys est une fleur sournoise. Son aspect contrefait la femelle d’un bourdon Osmia avec tant de perfection, avec tant d’ingéniosité que le bourdon connaît un irrépressible désir de déflorer la fleur. L’orchidée use d’un curieux stratagème pour se reproduire : la perfide invite les bourdons au sexe par ses couleurs et ses formes, et complète même sa supercherie en émettant les parfums de l’amour des bourdons. La co-évolution de la fleur et de l’insecte relève de l’influence contradictoire du sexe et des contraintes naturelles, et complique singulièrement la compréhension de la mécanique évolutive. En outre, chez les bourdons, les mâles ne sont pas vraiment des mâles. Et quand bien même, comme chez les phasmes, les femelles peuvent s’en passer. L’un ou l’autre sexe n’y trouve guère son compte, et la sexualité de la fleur s’immisce dans la crise sexuelle des bourdons, dans la bataille entre les bourdons mâles et femelles.
Quoi ? Le sexe ne composerait pas un événement harmonieux ?
L’épisode de la sexualité constitue l’un des principaux fondements de l’évolution biologique, probablement l’un des plus fascinants aussi. En introduisant une différence initiale entre deux sexes, l’aventure de la sexualité a profondément modifié le monde, et engagé une guerre : la guerre des sexes. Loin du charme et de l’excitation, la sexualité prend parfois la forme du conflit, du combat, ce que Darwin n’avait pas pleinement envisagé. Et les embarras de Darwin ne font que commencer. Bien d’autres anomalies persistent et obligent à questionner radicalement la théorie moderne. Des fantaisies sexuelles viennent perturber la logique évolutive, voire, selon le mot de Popper, falsifier la conception dite néodarwinienne de l’évolution.
Face à l’émergence des exceptions, il faut décentrer le débat, prendre du recul au loin comme pour regarder la planète et sa richesse avec les yeux naïfs d’un résident lunaire. Nous allons timidement débattre de la question évolutive. Le dogmatisme ne peut pas exister en science. Rien n’est vraiment définitivement établi, il faut d’abord examiner les incroyables désordres de la planète sexuelle. Tout ce qui est précieux lui appartient.
Chapitre 1
La naissance de la tragédie

1. La sexualité dans l’évolution

  2. La sélection : une reproduction différentiell