Enjeux patrimoniaux en contexte postcolonial
236 pages
Français

Enjeux patrimoniaux en contexte postcolonial , livre ebook

-

236 pages
Français

Description

Comment penser le concept de patrimoine en contexte postcolonial ? D'un côté, un patrimoine traditionnel, largement immatériel, qu'il s'agit de reconnaître dans ses valeurs propres mais aussi dans ses capacités à offrir des ressources pour penser de nouveaux modes de développement et de vivre-ensemble. De l'autre, un patrimoine colonial, largement matériel, déployant une ingéniosité constructive pour répondre à faible coût énergétique aux enjeux climatiques, mais frappé du sceau de la domination coloniale. Comment penser ensemble ces deux patrimoines dans la perspective d'une réappropriation pour le développement de l'Afrique ?

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 mai 2017
Nombre de lectures 13
EAN13 9782140036828
Langue Français
Poids de l'ouvrage 16 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Enjeux patrimoniaux en contexte postcolonial
Sous la direction de
Patrimoine et développement
Jean-Louis Genard et Judith le Maireen République démocratique du Congo
Comment penser le concept de patrimoine en contexte postcolonial ?
D’un côté, un patrimoine traditionnel, largement immatériel, que la
colonisation a peu investigué, qu’il s’agit maintenant, bien au-delà d’un
simple intérêt ethnologique, de reconnaître dans ses valeurs propres Enjeux patrimoniaux
mais aussi dans ses capacités à ofrir des ressources pour penser de
nouveaux modes de développement et de vivre-ensemble. De l’autre,
un patrimoine colonial, largement matériel, de grande valeur architecturale, en contexte postcolonial témoin d’un modernisme tropical tout à fait original, déployant une
ingéniosité constructive pour répondre à faible coût énergétique aux
enjeux climatiques, mais bien sûr frappé du sceau de la domination
coloniale. Comment penser ensemble ces deux patrimoines, non pas dans Patrimoine et développement
la perspective sclérosée de l’archivage, mais au contraire dans celle d’une
réappropriation pour le développement de l’Afrique ? Telle est la question en République démocratique du Congo
centrale qu’a posée le colloque international organisé en juin 2015 à
l’Université Kongo à Mbanza Ngungu, réunissant penseurs africains et
européens, dont cet ouvrage constitue un des aboutissements.
Jean-Louis Genard est philosophe et docteur en sociologie. Il enseigne à la faculté
d’architecture La Cambre-Horta de l’Université libre de Bruxelles et est rédacteur en
chef de la revue SociologieS. Auteur de nombreux ouvrages et articles, ses travaux
portent notamment sur les politiques publiques, en particulier les politiques urbaines,
culturelles, sociales ainsi que sur les questions éthiques et de responsabilité.
Judith le Maire est architecte, docteure en histoire de l’architecture contemporaine.
Elle enseigne à la faculté d’architecture La Cambre-Horta de l’Université libre de
Bruxelles dont elle est vice-doyenne et en charge de la recherche. Elle a consacré sa
thèse à l’histoire de la participation. Elle est également consultante sur les questions
d’urbanisme soutenable, d’aide à la maîtrise d’ouvrage publique, d’espace public, de
culture architecturale.
Avec les contributions de Pascal Kamufuenkete Luvumbu, Géry Leloutre, Trésor
Lumfuankenda Bungiena, Guylain Lema Makiese, Gérard Matondo Luminuku,
Daniel Mukoko Samba, Michel Provost, Yves Robert, Martin Tshisuaka Ngalula
Kanyinda, Pathy Samba Tumuenimo et Jules Wemby Lofudu.
Illustration de couverture : Ancien hôtel ABC (actuel parquet de
MbanzaNgungu) construit à partir d’une structure métallique préfabriquée
développée par les anciennes «Grandes Chaudronneries de l’Escaut» à
Hoboken (Belgique), vers 1904-1908. Photographie Yves Robert (2015).
ISBN : 978-2-343-11502-3
25 e
Sous la direction de
Enjeux patrimoniaux en contexte postcolonial
Jean-Louis Genard et Judith le Maire
Patrimoine et développement en République démocratique du Congo
Enjeux patrimoniaux
en contexte postcolonial


Sous la direction de
Jean-Louis Genard et Judith le Maire
Enjeux patrimoniaux
en contexte postcolonial
Patrimoine et développement
en République démocratique du Congo
© L’Harmattan, 2017
5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris
http://www.harmattan.fr
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr
ISBN : 978-2-343-11502-3
EAN : 9782343115023Remerciements
Nous tenons particulièrement à remercier le Recteur de l’Université
Kongo, Jean Nsonsa, dont l’institution a accueilli le colloque à l’origine de
cet ouvrage, mais également Samuel Kidiba le Directeur de l’Ecole du
Patrimoine Africain à Porto-Novo qui nous a amené l’expérience de cette
remarquable institution pour introduire nos travaux.
Nous remercions nos partenaires privilégiés, la Société des Architectes du
Congo dont son président Claudien Mulimilwa, l’Institut Supérieur
d’Architecture et d’Urbanisme de Kinshasa et son Directeur René M’Puru,
ainsi que l’ARES qui finance ce projet de formation doctorale.
Pour la coordination éditoriale, notre gratitude va à Sylvie Mbelu Kayembe
et Raphaël Washe Tshilumba (Enseignant- chercheur de l’ISAU). 1
Introduction
Quel patrimoine pour l’Afrique contemporaine ?


Jean-Louis Genard et Judith le Maire


1.1 Une obligation de prudence

Parce que le concept-même est intrinsèquement lié à la culture
occidentale, parler de patrimoine dans le contexte de la République
Démocratique du Congo invite, voire même oblige au décentrement ou plus
encore à l’auto-réflexion. Quel sens peut avoir l’idée de patrimoine dans le
contexte d’anciens territoires coloniaux ? Qu’est-ce qui, dans ces contextes,
est susceptible d’être « labellisé » comme patrimoine ? Qu’est-ce que,
politiquement, la patrimonialisation peut « produire » (Cantelli, Genard,
Jacob, de Visscher, 2007), peut apporter ? Y a-t-il un sens et lequel à
« patrimonialiser » des éléments culturels liés aux cultures non
occidentales ? Y a-t-il un sens éthique à patrimonialiser des traces de la
domination coloniale ? Les productions post-coloniales et contemporaines
sont-elles suffisamment identifiées et reconnues comme congolaises ?...

Ces questions sont essentielles. Nous ne pouvons manifestement pas
simplement penser le concept de patrimoine et les pratiques qui
l’accompagnent dans une logique d’importation. Il est donc essentiel de les
réfléchir sous un horizon décentré, en y intégrant notamment l’héritage de la
critique du colonialisme ; colonialisme qui d’une certaine façon est aussi
notre patrimoine, cette fois commun, pour le meilleur, et souvent pour le
pire.

Bien qu’on puisse évidemment trouver au mot « patrimoine » une
étymologie plus ancienne, notamment dans le droit romain, chacun
s’accorde pour reconnaître que l’idée de patrimoine, non plus seulement au
sens d’une identification juridique de propriété, mais au sens d’une
valorisation historique justifiant protection, est intrinsèquement liée à la
modernité occidentale et aux constructions de la temporalité qui lui sont
liées.

91Les travaux de P. Ricoeur (1983-1985), parmi d’autres d’ailleurs, ont
mis en évidence la spécificité du rapport au temps qui non seulement a
accompagné, mais qui est constitutif de cette modernité occidentale. Une
temporalité dont la remarquable spécificité est d’être résolument prospective
alors que les cultures, et en particulier bien sûr les cultures ancrées dans la
tradition, privilégiaient quant à elles une temporalité rétrospective. C’est
donc lorsque le rapport dominant au temps en vient à privilégier résolument
le futur, que le passé devient réellement un « problème », que se pose alors
la question de sa valeur, des raisons d’un conserver les traces, de le
protéger... Ricoeur introduit également un élément important pour la
mémoire orale qui, peut-être pour le patrimoine, est une source majoritaire
en Afrique. En effet, il insiste sur la narration qui réorganise les objets dans
le temps historique, une façon de donner valeur à l’un ou l’autre bâtiment, à
un paysage, un objet bâti ou naturel qu’une vision occidentale du patrimoine
n’aurait pas ramenés dans le champ de l’architecture. Une valeur culturelle
construite tant par la tradition des bâtisseurs locaux et la culture
immatérielle, sans doute plus intriquées, et qui ne soit pas uniquement
fondée sur des éléments descriptifs ou typologiques de l’architecture.
Sans doute est-ce parce qu’il se pose d’abord comme un problème au
sens d’un obstacle qu’il faut dépasser, d’une entrave à la marche vers le futur
- « du passé faisons table rase » dit ainsi l’internationale - que certains
éléments hérités du passé, des réalisations architecturales, des
manifestations, des pratiques… se posent en candidats à la
« patrimonialisation », que le

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents