L Ethnicite et ses frontieres
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L'Ethnicite et ses frontieres , livre ebook

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Description

Bien des choses ont changé depuis la publication de L’ethnicité et ses frontières en 1999. Le marxisme a perdu de son lustre, le tournant constructiviste s’est imposé, les recherches et revues scientifiques se sont multipliées. Mais l’ethnicité demeure un objet polémique qui attire et inquiète à la fois. Dans le domaine de la recherche, on s’interroge sur sa pertinence : penser l’ethnicité reviendrait à plaquer sur le réel des catégories fictives qui, tel un mauvais génie, sèmeraient la pagaille en ce bas monde. Dans le champ politique, l’option pluraliste bat de l’aile un peu partout en Occident. Pourtant l’ethnicité est plus que jamais au coeur des dynamiques sociétales dans un contexte caractérisé par la redéfinition des frontières et la réapparition du marqueur religieux. Danielle Juteau le montre de façon magistrale dans cet ouvrage entièrement mis à jour, en proposant une analyse constructiviste, relationnelle, matérialiste et transversale d’un phénomène historiquement construit, tout à la fois concret et idéel. Dans cette perspective, les revendications ethniques n’apparaissent plus comme les survivances d’un autre âge, mais bien plutôt comme les indices des rapports de domination qui se sont instaurés avec la modernité.
Danielle Juteau est professeure émérite au Département de sociologie de l’Université de Montréal. Pionnière des études ethniques et féministes au Canada et à l’étranger, elle a occupé la Chaire en relations ethniques de l’Université de Montréal et la Chaire d’études canadiennes à la Sorbonne Nouvelle-Paris 3.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 30 septembre 2015
Nombre de lectures 0
EAN13 9782760635319
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0750€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Danielle Juteau
L’ETHNICITÉ ET SES FRONTIÈRES
Deuxième édition revue et mise à jour
Les Presses de l’Université de Montréal
Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada Juteau, Danielle, 1942 L’ethnicité et ses frontières 2 e édition revue et mise à jour. Comprend des références bibliographiques. ISBN 978-2-7606-3529-6 1. Ethnicité. 2. Relations interethniques. 3. Groupes ethniques. 4. Minorités. 5. Frontières ethniques. 6. Canadiens français – Identité ethnique. I. Titre. II. Collection. GN495.6.J87 2015 305.8 C2015-941588-8 Dépôt légal: 3 e trimestre 2015 Bibliothèque et Archives nationales du Québec © Les Presses de l’Université de Montréal, 2015 www.pum.umontreal.ca ISBN (papier) 978-2-7606-3529-6 ISBN (PDF) 978-2-7606-3530-2 ISBN (ePub) 978-2-7606-3531-9 Les Presses de l’Université de Montréal remercient de leur soutien financier le Conseil des arts du Canada et la Société de développement des entreprises culturelles du Québec (SODEC).
Avant-propos
Quinze ans après la première édition de ce livre, l’ethnicité demeure un objet polémique, qui attire et qui repousse, qui fascine et qui inquiète. Dans le champ scientifique d’abord, l’on interroge sa pertinence, même aux États-Unis, qui représentent pourtant le berceau de la sociologie des relations ethniques. Penser l’ethnicité serait, dans le meilleur des cas, quasi indissociable du substantialisme ou de l’essentialisme; dans le pire, cela reviendrait à créer un objet inexistant, à plaquer sur le réel des catégories fictives qui sèmeraient la pagaille en ce bas monde.
Dans le champ politique, l’idéologie pluraliste bat de l’aile un peu partout en Occident. Les attaques contre le World Trade Center à New York en 2001 et plus récemment sur la colline parlementaire à Ottawa en octobre 2014, ou contre Charlie Hebdo en janvier 2015, nourrissent une opposition qui se conjugue à celle des détracteurs qui défendaient, au nom de l’égalité, de l’universalisme et du républicanisme, un modèle de type assimilationniste. Ainsi, l’idéologie pluraliste, qui était liée à une vision nouvelle de la coexistence ethnique, se voit assaillie tant sur sa gauche que sur sa droite.
Et pourtant… l’ethnicité se retrouve au cœur des dynamiques sociétales et transnationales, dans un contexte caractérisé par la redéfinition des frontières ethniques et la réapparition du marqueur religieux. Partout, elle imprègne les débats, sur la migration, l’intégration, les capacités d’absorption des sociétés dites d’accueil, les bienfaits ou les méfaits du multiculturalisme. Les frontières opposent désormais un Eux à un Nous se sentant de plus en plus menacé par l’Autre qui est souvent musulman.
C’est pourquoi j’ai préparé une deuxième édition de l’ouvrage paru aux Presses de l’Université de Montréal en 1999, qui a rejoint un large public, suscité de fructueux échanges et continue à orienter les travaux et enseignements de chercheurs au sein de l’univers scientifique francophone.
Pour appréhender les formes nouvelles, multiples et changeantes de l’ethnicité, je suis partie, comme par le passé, à la recherche des relations et rapports sociaux qui en orientent le mouvement. Je persiste à faire de l’ethnicité un objet d’analyse, une question sociologique centrale qu’il faut cerner et approfondir, une préoccupation partagée par les nombreux chercheurs que nous aborderons dans ce livre. J’y poursuis le même projet intellectuel, qui récuse l’essentialisme et le réductionnisme, privilégie les processus constitutifs des frontières, des identités et des collectivités ethniques. Le groupe ethnique y apparaît comme un fait social qu’il faut expliquer, en fonction notamment des relations de communalisation et des rapports à l’intérieur desquels elles se cristallisent.
Si cet ouvrage reprend dans ses grandes lignes l’approche relationnelle, constructiviste, matérialiste et transversale échafaudée auparavant, je cherche à l’actualiser et, au besoin, à l’infléchir, à l’approfondir et à l’élargir. Pour l’actualiser , j’examine les principales thèses explorées dans les travaux contemporains: le nouvel essentialisme (Modood), le substantialisme (Brubaker), l’occultation des rapports de pouvoir et de domination (Stone), l’absence d’agentivité (Bastenier), le fondationnalisme (Back et Spivak), les niveaux d’étanchéité des frontières (Alba), le paradigme de la construction des frontières boundary making paradigm (Wimmer), l’intersectionnalité (Bilge, Collins, Falquet) et les critical race theories sur l’articulation de la pensée décoloniale et antiraciste.
Pour l’infléchir , je fais un retour sur les concepts fondamentaux de l’approche constructiviste matérialiste, sur l’analyse transversale des rapports sociaux ethniques et sur la primauté accordée aux frontières collectives de préférence à leur traversée individuelle.
En troisième lieu, j’approfondis le lien entre le processus de communalisation et la construction (Weber) de la face externe des frontières ethniques, de même qu’entre la formation historique de la nation (Bauer) et sa face interne; je cherche aussi à creuser l’imbrication des dimensions concrètes et symboliques de l’ethnicité. Je précise ma démarche méthodologique, de type diachronique plutôt que synchronique, la théorisation renvoyant ici à un objet empirique qui se transforme et se déplace dans le temps.
Et, enfin, j’élargis ma recherche par l’ajout d’articles qui rejoignent des préoccupations contemporaines: les formes nouvelles d’imbrication des rapports sociaux, les débats concernant l’homogénéité des catégories sociales, l’incessante redéfinition des frontières nationales et la transformation des frontières de la citoyenneté.
Au terme de cet exercice, ce livre diffère sensiblement de L’ethnicité et ses frontières de 1999. Des chapitres ont été supprimés, d’autres modifiés et d’autres encore ajoutés. Ils sont regroupés en sous-sections et leur ordre de présentation suit un ordre thématique plutôt que temporel, faisant ainsi ressortir la logique de l’argumentation.
Dans une nouvelle introduction, j’évoque mes questions de départ et signale mon insatisfaction face aux réponses alors offertes par la sociologie, je présente les objectifs poursuivis, retrace l’essentiel de mon cheminement intellectuel, y précise mon approche et l’évalue à l’aune des travaux contemporains.
Mais avant de passer à cette étape, je tiens à remercier ceux qui ont rendu ce livre possible, en premier lieu l’équipe des Presses de l’Université de Montréal, dont Sylvie Brousseau pour un travail d’une rare qualité, et son directeur Antoine Del Busso, pour la confiance qu’il m’a toujours témoignée et l’aide d’exception qu’il m’a apportée. Je remercie tout autant ceux et celles avec qui j’ai poursuivi mes discussions sur l’ethnicité et ses frontières, ou qui encore l’ont utilisé dans leurs travaux et disséminé auprès des étudiant.es. Enfin, plus près de moi, mes filles Alexandra et Natasha, et Boris, qui m’ont accompagnée et soutenue pendant toutes ces années.
Introduction à la nouvelle édition
Bien des choses ont changé depuis la publication de L’ethnicité et ses frontières en 1999. Le marxisme n’a plus la cote, ou si peu, le tournant constructiviste s’est imposé, les recherches et revues scientifiques se sont multipliées. Mais il y a aussi des constantes, dont le malaise que provoque souvent l’ethnicité, sur le plan concret et sur le plan discursif. En France, où le champ a du mal à s’imposer, on le récuse pour des raisons politiques et idéologiques. Alors que Schnapper le rejette en vertu de l’idéal républicain 1 , Bourdieu et Wacquant (1998) y voient un instrument de l’impérialisme culturel américain qui impose à l’échelle internationale ses propres objets et cadres d’analyse. Pour d’autres encore, toute référence à l’ethnicité renverrait à une analyse fallacieuse qui remplace le social par du non-social. Comme si l’appréhension des rapports ethniques en écartait les dimensions économiques, politiques, culturelles et idéologiques.
Plus près de nous, il y a ceux qui préfèrent enclaver l’ethnicité dans un concept plus large, tel celui de la diversité. Dans les débats autour du port du voile ayant cours depuis plus de vingt ans, au Québec et en France notamment, on oppose souvent le pluralisme religieux à l’égalité des sexes, faisant rarement appel à la sociologie des frontières ethniques. Mais ce qui étonne davantage les réticences dans l’univers francophone n’étant pas récentes 2 ce sont les offensives en provenance des États-Unis, berceau de cette sociologie. Au-delà des critiques plus anciennes d’Omi et Winant (1986) qui voyaient dans le paradigme de l’ethnicité une analyse édulcorée des relations raciales, Brubaker (2002) s’en prend aux théories contemporaines de l’ethnicité qui, malgré leur profession de foi constructiviste, sombreraient dans le substantialisme. Non seulement remet-il en question la notion de groupe ethnique, il en vient à s’interroger sur la pertinence du cham p.
La volonté d’appréhender et de définir un objet aussi fuyant que l’ethnicité semble relever du défi, voire de la provocation. Pourtant…
De la décolonisation aux luttes pour l’indépendance, du combat en faveur des droits civiques aux États-Unis à Mai 68 en France, d’une configuration hiérarchisée des groupes ethniques au Canada (Porter, 1965) à l’affirmation d’une société multiethnique égalitaire, les minoritaires revendiquent l’abolition de la domination économique, politique et culturelle. Un peu partout, l’assimilationnisme 3 apparaît comme une idéologie imposée par les dominants au nom de l’universalisme ou du républicanisme, une idéologie qui promeut en fait davantage l’inégalité que l’égalité 4 . À cette première condition structurelle, propice à une réflexion sur les relations ethniques s’en ajoute une deuxième, plus subjective. Évoluer dans un environnement où le «Nous les Canadiens français» se muait en «Nous les Québécois», où on laissait tomber avec frac

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