La méthodologie et les méthodes en sciences humaines et sociales
232 pages
Français

La méthodologie et les méthodes en sciences humaines et sociales , livre ebook

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Description

Quelle est la nature de l'évolution de la méthodologie en sciences humaines et sociales à la lumière de la résurgence de la problématique du désordre et du chaos ? Cette résurgence opérait une sorte de rupture qualitative par rapport aux situations antérieures. Le retour du désordre débouche sur une recrudescence et un déplacement du conflit des méthodes. L'intérêt didactique de cet ouvrage est de mettre fin à la rupture entre les quantitativistes statisticiens et les qualitativistes, rupture qui n'est légitime qu'au regard d'intérêts purement professionnels.

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Informations

Publié par
Date de parution 01 décembre 2009
Nombre de lectures 101
EAN13 9782296243576
Langue Français
Poids de l'ouvrage 6 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0950€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

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Illustration de couverture : les Puits du désert de Mohamed Rachdi & Co (Détail - le Puits de MarylineBeauplet-Dornic) –2006.
© L’Harmattan, 2009 5-7, rue de l’Ecole polytechnique ; 75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan1@wanadoo.fr
ISBN: 978-2-296-10607-9 EAN: 9782296106079
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Les sciences humaines et sociales ne se portent pas bien. Certains vont même jusqu'à considérer qu’elles sont moribondes.En tout cas, elles traversent une crise très grave.La disparition de la génération des géants commeFoucault,Lévi-Strauss ouBourdieu aurait sonné la fin de l’influence que les écrits sociologiques, psychologiques ou anthropologiques ont eue sur les visions des sociétés contemporaines, ainsi que sur le sens de leur fonctionnement et de leur évolution.Le décret de la fin des idéologies pour crime de non-utilité voire même de perversité, n’a rien arrangé à l’affaire. L’ère de la pensée a cédé progressivement la place à l’ère de la spécialisation et de l’expertise dont les représentants prétendent connaître tout sur leur propre domaine et rien sur ce qui le dépasse.Gardiens fidèles et jaloux de leur pré carré, ils le défendentbecs et ongles systématiquement contre toute intrusionextérieure disqualifiée pour cause d’ignorance.Du coup, les rapports entre le sens et lesavoir sont devenus quasi magiques.Ils relèvent désormais non de l’éthique de l’argumentation et de la persuasion mais de la confiance et de la croyance.Le sens et la vérité ont abdiqué devant les terribles sentences de l’autorité. Ce constat quelque peu pessimiste est partagé par de nombreux observateurs attentifs de l’évolution que les sciences humaines et sociales ont connue durant ces dernières décennies notamment parG.Balandier.Dans le Grand système(2001, p.124), il écrit, en effet, que "les sciences sociales aujourd’hui sont à la foisbanalisées, utilisées, professionnalisées en des emplois et des mises à contribution, ce qui rend plus confuse leur identification" et n’hésite pas à affirmer plus loin que "ces sciences ont leurs intercesseurs attitrés auprès des médias, petit groupe attaché à son privilège de la parole et de la visibilité, réserve des commentateurs disponibles afin d’être, à tout moment, deséclaireursde l’actuel, de l’événement avec l’autorité d’une compétenceextensible"(2001, p.125).Des trois figures fondamentales de la modernité, l’intellectuel, lesavant etl’expert, la première a cédé la place, devenant une figure de plus en plus brouillée, de plus en plus en confuse et de retrait en retrait, elle a fini par disparaître.Il faut dire que les domaines dans lesquels elle s’est illustrée n’ont plus beaucoup de sens aujourd’hui.La lutte contre les totalitarismes nes’exerce plus contre les "monstres puissants et froids" tels que le fascisme, le nazisme ou le communisme. Le tiers-mondisme qui attirait de nombreuses voies, n’est plus qu’un vague souvenir dans la mesure où ces voies se sont
reconverties parfois, sinon souvent, en brûlant ce qu’elles avaient adoré auparavant.Lesdeux autres figures, celles dusavant et del’expert se portent mieux, mais c’est la dernière qui tend à prendre toute la place. La sur-modernité, pour reprendre un terme queG.Balandier affectionne, qui consiste à tenter desuivre le mouvement, mais sans pouvoir domestiquer l’incertitude, favorise plutôt le savoir del’expert que celui dusavant ou de l’intellectuel pour une raison toute simple :l’expert est celui qui suppose, par définition, pour reprendre les termes deFeyerabend, que les gens à qui il adresse ses propositions, ne sont pas qualifiés pour les juger alors que pour Feyerabend, en rupture de ban avec l’école poperienne "toute proposition doit d’abord être contrôlée par les gens à qui elle s’adresse". Autant dire que les sciences humaines et sociales ne sont plus en odeur de sainteté chez les princes de tout genre, si jamais elles l’ont été d’ailleurs! Peut-être moins aujourd’hui que naguère.Les causes n’incombent pas seulement et uniquementaux princes, elles sont pour le moins partagées par la communauté des penseurs et des chercheurs eux-mêmes.Ces derniers ont abdiqué, en effet, devant la profusion des puissances del’expertise, lorsqu’ils ne sont pas transformés eux-mêmes en experts d’une parole parfois sonnante ettrébuchante !Certes, l’ère des globalisations et des conceptions générales est terminée, paradoxalement au moment où la globalisation triomphe et avec elle finit l’ère des grands, ceux qui en faisant œuvre ont tenté de donner du sens à leur propre entreprise d’abord et à leurs contemporains ensuite quitte à ce que les générations futures jugent et apprécient la pertinence de l’œuvre.Une seconde raison étroitement liée à la première, semble résider dans l’inutilité dont la méthode a été frappée.Celle-ci, contrairement à ce qui était le cas auparavant est rarement mise en avant de telle sorte que non seulement les étudiants mais les chercheurseux-mêmes considèrentsouvent que les débats méthodologiques sont des débats oiseux et finalement stériles.Or, pour nous, ces débats sont fondamentaux et ce d’autant plus que les sciences humaines et sociales sont aujourd’hui devant un tournant du point de vue méthodologique aussi bien au sein qu’en des enceintes académiques. L’intérêt de cet ouvrage consiste justement à revisiter le domaine relativement délaissé de la méthode à la lumière des problématiques récentes de l’ordre, du désordre et du chaos.La perspective adoptée ici saisit ces problématiques à la racine à travers une réflexion sur les formes élémentaires des rapports entre l’ordre et le désordre.Ces formes sont nécessaires à la fois pour mettre enévidence les normes cognitives sous-jacentes et pour disposer d’une grille de lecture permettant d’interroger certaines méthodologies (le chaos, les théories systémiques traditionnelles et nouvelles, les outils statistiques… etc.) non seulement à propos de leur pertinence mais aussi au sujet de leurs critères de vérité.Cela permet de couvrir à travers des
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exemples significatifs un spectrerelativement large de champs disciplinaires allant de l’économie à la sociologie en passant par l’anthropologie et la psychologie.On parvient ainsi à administrer la preuve que pour redonner du sens à l’usage et à l’enseignement des outils méthodologiques, il faut aller au-delà des aspects purement techniques et qu’en tout cas la transdisciplinarité est plus que jamais de mise. Dans le domaine de la méthodologie, les sciences humaines et sociales en général, et la sociologie en particulier, connaissent, en effet, aujourd’hui des mutations très 1 profondes . Ces mutations sont le résultat de deux types de réflexions menées d’une façon parallèle.D’un côté, les réflexions entreprises au sein des sciences exactes àtravers ce qu’on peut appeler aujourd’hui le paradigme du désordre ou ce que certains considèrent, d’ailleurs imparfaitement et d’une façon très restrictive, comme la “révolution 23 chaologique” et dont les origines remontent à, dela fin du 19e siècle l’autre, des interrogations de nature fondamentalement anthropologique ayant pour objet les modalités différenciées du contrôle des phénomènes du 4 désordre dans les sociétés "modernes" et les sociétés dites de "tradition" . Cesréflexionsconvergent, même si leur objet n’est pas identique, dans des
1 Nous ne préjugeons absolument pas de la nature de ces mutations en considérant qu’il s’agit d’une “révolution” qui renvoie à l’idée de rupture ou en revanche d’une simple évolution dans un mouvement continu sans grandes coupures.Pour une idée plus claire à propos des discussions concernant les mutations ou les révolutions scientifiques nous renvoyons à Th.Khun [1970],La structure des révolutions scientifiques,Flammarion,Paris, d’un côté, à P.Feyarabend [1975],Against method,NeuwLeftBooks,London et àI.Lakatos et alii [1970],of knowledgeCriticism and the growth . 2 O: le numéro spécial de la revuen peut citer ici un ensemble de travaux récents La Recherche, “La science du désordre, n° 232, 1991, consacré entièrement à la question du chaos y compris en sociologie, en économie et en psychologie.Le numéro spécial de larevue Sciences humainesconsacré au même sujet sous l'angle exclusivement des sciences humaines, n° 31, 1993.Le numéro spécial de la revueEconomiePolitique,Sirey, 1993 ; également les publications (devenues, aujourd'hui, des références) comme l'ouvrage deJ.Gleick [1979],Le chaos,Flammarion, dans lequel on trouve une excellente "vulgarisation" de la problématique du chaos mise en perspective avec le développement historique des réflexions dans ce domaine.J.P.Dupuy [1992] a consacré aussi plusieurs de ses ouvrages au désordre :Ordre et désordre : enquête sur un nouveau paradigme,Seuil.J.Lesourne [1991],L'économie de l'ordre et du désordre,Economica,.En sociologie on peut renvoyer fondamentalement aux ouvrages deE.Morin sur la complexité.Mais également aux travaux deR.Boudon [1984]La problématique du désordre,PUF,Paris et deM.Forsé [1989]L'ordre improbable : entropie et processus sociaux,P.U.F. 3 En fait, il s’agit de ce queI.Prigogine etI.Strengers appellent à la suite deJ.Monod “la nouvelle alliance ” dans la mesure où pour ce dernier “ l’ancienne alliance est rompue ; l’homme sait en fin de compte qu’il est seul dans l’immensité indifférente de l’univers d’où il a émergé au hasard ” 4 Cf. les chapitres 2 et 3 consacrés parG.Balandier à ce sujetinLe désordre : éloge du mouvement, 1988,Paris,Fayard.
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5 œuvres récentes comme chezG.Balandier etJ.P.Dupuy parexemple.On est par conséquentbien obligé de constater que se profilent à l’horizon des esquisses d’un nouveau programme de recherche très fécond dont les fondements reposent sur le questionnement du désordre, comme facteur crucial dans la transformation de la nature des phénomènes sociaux.Les implications méthodologiques de ce programme de recherche, nettement plusdéveloppé en sciencesexactes qu’en sciences sociales (à l’exception de quelques rares tentatives disparates) sont très profondes.Elles sont susceptibles de modifier la perspective dans le cadre de laquelle on inscrit la méthodologie quelle que soit sa nature (qualitative ou quantitative).C’est essentiellementaux interrogations sur ces implications que cetravail sera consacré. Pour répondre d’une façon satisfaisante à ces interrogations, il nous a semblé nécessaire de plaider, dans le premier chapitre, pour l’adoption d’une démarche fondée sur un double détour : historique et analytique.Historique dans la mesure où les méthodes et les dispositifs méthodologiques ne peuvent être appréhendés, comme c’est le cas encore trop souvent, d’une manière a-historique.Contrairement à l’idée très répandue selon laquelle l’universalité d’une méthode réside dans sa validité en tous lieux et en tout temps et pour toutobjet ayant des similitudes avec son objet initial transcendant ainsi les époques et les espaces, pour nous, cette universalité est en rapport étroit avec le fait que toute théorie nous dit quelque chose de signifiant à la fois sur l’époque où elle a été forgée et sur ses rapports avec le présent. Il ne s’agit pas pour autant d’épouser une démarche de nature évolutionniste jugeant de la pertinence des méthodes en fonction de l’opposition binaire entre le vrai et le faux. Le faire, reviendrait à considérer que les méthodes les plus pertinentes sont par nature des méthodes qui ont survécu.Le second terme du double détour porte justement sur les dimensions analytiques.Les méthodes sont en effet étroitement liéesaux visions de l’ordre, du désordre et du chaos.Elles ne peuvent, par conséquent, être pleinement comprises pleinement que si l’on parvient à mettre en évidence le système de normes cognitives qui leur est sous-jacent et sans lequel elles demeurent purement formelles.C’est ce quiexplique la distinction entre deux systèmes de normes : le premier fondé sur le sacré, le second sur la rationalité. Cependant, la mise enœuvre de ce double détour historico-analytique suppose préalablement, c’est l’objet dudeuxième chapitre, la clarification
5 Ibidem.La lecture de l'ouvrage deG.Balandier laisse entrevoir la possibilité de renverser le sens de la dépendance méthodologique des sciences humaines vis-à-vis des sciencesexactes en faveur des premières rompant ainsi avec la "tradition consacrée" depuis les origines. Nous reviendrons plus loin sur cette possibilité.
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des rapports complexes entre l’ordre et le désordre (ce que E.Morin appelle "la dialogie de l’ordre et de désordre"). Cette clarification s’effectue à travers l’identification de ce que nous avons nommé des formes élémentaires de l’ordre et de désordre (F1,F2 etF3), en allant de la forme la plus simple (F1) à la plus complexe (F3). La combinaison/articulation de ces formes permet ainsi de disposer d’une grille de lecture pertinente pour penser les moments caractéristiques du détour historico-analytique, à la condition de les compléter par des réflexions concernant les dimensions spatiales (la théorie de catastrophe) et temporelle (la sociologie de la forme). La pertinence de cette grille de lecture est mise àl’épreuve à travers les enseignements établis sur la base de l’analyse de certaines situations relevant du champ de la mythologie et de l’anthropologie, ces enseignements confirment la distinction nécessaire entre les normes cognitives relevant respectivement de la logique du sacré et de la logique de la rationalité. L’évolution des normes cognitives de la rationalité est envisagée en trois moments clés.Le premier moment, auquel sera consacré le troisième chapitre porte sur le déterminisme sous sa forme classique indissociable de l’époque de la fondation et de l’invention des sciences humaines et sociales. Le deuxième moment, qui faitl’objet du chapitre quarte est celui au cours duquel on assisteaux premières remises en cause du déterminisme classique sur labase des outils offerts par la thermodynamique (deuxième principe) et la théorie de l’information, l’ordre social totalement déterminédevient improbable.Le chapitre cinq porte sur le troisième moment celui de la remise en cause radicale de la rationalité à travers le retour des problématiques du désordre et du chaos. L’ensemble du propos reçoit deux types d’illustration deniveau sensiblement inégal, la première, réside dans l’évolution actuelle de la systémique dont les caractéristiques essentielles sont mises en évidence dans le chapitresix. Si l’ancienne systémique était paradoxalement à la fois déterministe et non déterministe témoignant ainsi de la complexité de la transition entre le premier et deuxième moment, lanouvelle systémique a pour prétention affichée de prendre acte de la nécessité de penser l’ordre à partir du désordre à travers l’étude des systèmes dit autopoeïtiques fondés sur l’analogie avec les systèmes biologiques.Le dernier chapitre, qui appelle des développements ultérieurs procède à une illustration différente à travers l’examen d’un certain nombre de dispositifs méthodologiques (sociométrie, analyse multidimensionnelle).Cetexamen confirme la complexité de la prise en compte des rapports entre ordre et désordre (à l’image des différents types des systèmes de projections interactives, planes, linéaires, non linéaires, …).
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Travaillées par le retour du désordre et du chaos, les sociétés de la modernité queG.Balandier définissait à juste titre par l’immanence, l’incertitude et le mouvement, vivent aujourd’hui à l’heure des catastrophes. Le défi crucial que lesréflexions sur la méthode en sciences humaines et socialesdoivent relever est celui d’en prendre pleinement la mesure.
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