Les Processus d américanisation
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Les Processus d'américanisation , livre ebook

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Description

La collection Fabrica Mundi explore les processus d'américanisation à l'oeuvre dans le Nouveau Monde depuis le XVIe siècle jusqu'à nos jours. Sans définir ce terme, comme les effets de la culture des États-Unis sur le monde, mais bien comme la métamorphose sur le sol de ce continent, de toutes sortes d'éléments issus des autres parties du globe, tels la religion catholique ou l'histoire coloniale d'un pays, il s'agit d'explorer la manière dont la projection outre-Atlantique des sociétés européennes entraîne non seulement des formes d'occidentalisation et des métissages multiples, mais également des phénomènes moins étudiés de reconfiguration et de diffusion continentale de traits, ainsi adaptés, modifiés et territorialisés. En ce sens, Mexico, Lima, Salvador de Bahia, Québec ou New York ne seraient pas que de simples récepteurs d'occidentalisation, mais aussi des caisses de résonance continentales. Ce premier volume cherche à poser les bases de la réflexion, à partir de contributions d'historiens et d'anthropologues, soumises à la critique d'experts brésilien et nord-européen.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 02 février 2021
Nombre de lectures 0
EAN13 9782304239614
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0500€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Sous la direction de Louise Bénat-Tachot, Serge Gruzinski et Boris Jeanne
Les processus d’américanisation
Tome I Ouvertures théoriques
Collection Fabrica Mundi
Éditions Le Manuscrit Paris


© Éditions Le Manuscrit, 2012
EAN : 9782304039603 (livre imprimé)
EAN : 9782304239614 (epub)


Prologue
La collection Fabrica Mundi allie histoire et anthropologie et se propose d’explorer les processus d’américanisation à l’œuvre dans le Nouveau Monde depuis le XVI e siècle jusqu’à nos jours. On prendra le terme américanisation dans un sens large, sans le restreindre aux effets de la culture des États-Unis sur le reste du monde, mais bien en le définissant comme la métamorphose sur le sol de ce continent de toutes sortes d’éléments issus des autres parties du monde. Il s’agit d’explorer la manière dont la projection outre-Atlantique des sociétés européennes, et donc d’une partie de l’Europe moderne, entraîne non seulement des processus d’occidentalisation, des réactions d’adaptation et d’appropriation in situ , et des métissages multiples, mais également des phénomènes moins étudiés de reconfiguration et de diffusion continentale des traits ainsi adaptés, modifiés et territorialisés.
En ce sens, Mexico, Lima, Salvador de Bahia, Québec ou New York ne seraient pas que de simples récepteurs d’occidentalisation et des foyers locaux de métissages, mais aussi des caisses de résonance continentales, des diffuseurs de formes et de pratiques nouvelles susceptibles de structurer les espaces que ces villes dominent. Autrement dit, la phase de réception ne serait que le prélude à un long travail de recomposition et d’amplification susceptible de couvrir de vastes régions et de s’étendre sur plusieurs siècles. On suppose que les éléments européens, africains, asiatiques importés du XVI e au XIX e siècle acquièrent sur le sol américain des capacités de diffusion et d’amplification que sont loin de posséder les matériaux originels. Dès lors les zones « coloniales » cessent d’apparaître comme des impasses essentiellement réceptrices pour devenir des aires actives au sein desquelles des traits originellement européens, africains et amérindiens se transforment et acquièrent des « qualités » et une dynamique qui les rendent « mondialisables ».
Ainsi, les musiques populaires et le culte du sport du XXI e siècle doivent beaucoup à ce processus d’importation, de transformation locale – d’ anthropophagie pour reprendre l’expression des modernistes brésiliens – puis de rediffusion à grande échelle. Même chose pour les musiques d’origine noire de l’Amérique du Nord. Quant aux domaines de l’image (Globo, Televisa, Hollywood), ils se prêtent également à ce type d’exploration si l’on songe que la redistribution mondiale des modes de vie liés à la modernité occidentale passe depuis près de cinquante ans par les studios californiens, mexicains et brésiliens. On a montré ailleurs 1 que le poids de l’image en Amérique latine au XX e siècle est indissociable de sa préhistoire coloniale et indigène. On aurait pu rappeler comment dès le XVI e siècle les lois de Castille se transformèrent en « lois des Indes », donc à vocation continentale et océanique (Manille). On verra qu’en matière de différence des politiques d’origine coloniale refont surface aujourd’hui et se présentent en modèles ou en normes pour le reste du monde.
Les périphéries « coloniales » reçoivent du coup un statut distinct de celui qui leur est d’ordinaire assigné. Elles cessent d’être des terminaux ou des scènes porteuses d’une histoire subie qui s’achève avec les indépendances des XVIII e et XIX e siècles, pour s’inscrire résolument dans une histoire des mondialisations qui se poursuit jusqu’à nos jours. Au temps « colonial » succède un temps plus long encore et toujours ouvert, celui des mondialisations. Cette très longue durée nous confronte à une série de processus d’américanisation qui ont jeté les bases de la mondialisation actuelle des sociétés sur la planète. Le clivage colonial/postcolonial peut alors se lire autrement, puisque la dynamique des phénomènes observés déborde le temps et l’espace de la colonisation ibérique et ne saurait se réduire à ses effets directs.
Cette problématique remet en cause autant la perspective eurocentrique de l’expansion européenne et de l’histoire du Nouveau Monde, que la séparation systématique de l’Espagne, du Portugal, et donc de leurs empires. On ne peut pas davantage disjoindre les entreprises ibériques des autres entreprises européennes, française et anglaise. La collection Fabrica Mundi prétend dépasser les clivages habituels qui ont fragmenté la réflexion sur l’histoire et l’anthropologie des mondes américains, et empêché d’en saisir la portée continentale, le potentiel planétaire et la signification pour l’histoire de l’Europe moderne.
L’ambition de cette collection est aussi d’informer les questions qui se posent dans le Vieux Monde de façon aiguë, puisque la France et l’Europe se trouvent, elles aussi, confrontées à la question de la diversité culturelle, de la recomposition du paysage mémoriel, du passé colonial et du rôle de l’État dans l’administration de la différence.
La spécificité du creuset américain
Le continent américain, toutes Amériques confondues, est depuis le XVI e siècle le théâtre de processus économiques, sociaux, politiques, religieux et culturels qui impliquent des groupes et des individus originaires d’Europe, d’Afrique, d’Asie et du propre sol américain. À ce titre, celui d’un brassage sans précédent des êtres, des cultures et des sociétés, ce continent apparaît comme l’antichambre du monde contemporain.
Nulle part, en effet, sur la planète ont été réunis depuis autant de siècles des éléments fondateurs de notre modernité : l’essor de la première mondialisation européenne, l’éclosion des métissages planétaires, les entreprises de christianisation et plus généralement d’occidentalisation du globe, l’enrichissement des savoirs scientifiques, les expériences coloniales dans toute leur diversité temporelle, les esclavages, la naissance et la généralisation de l’État-nation au XIX e siècle, le développement des systèmes démocratiques et dictatoriaux des XIX e et XX e siècles, la gestation de cultures populaires mondiales. C’est que l’Amérique abrite des sociétés passées par toutes les phases de la modernité au sein desquelles se pose et s’est posée dès l’origine la question de la différence, de sa production comme de son traitement.
Ce creuset est unique . Il semble bien que ni l’Afrique ni l’Asie ne peuvent revendiquer un rôle de cette ampleur et de cette diversité. Ces expériences singulières correspondent à la greffe sur le sol américain d’éléments issus des autres continents et à leur transformation profonde au contact des mondes autochtones, et c’est ce que nous entendons par processus d’américanisation .
Une collection au carrefour de l’histoire et de l’anthropologie
Le premier volume de Fabrica Mundi se propose de définir les concepts et les outils qu’un tel projet impose de mettre en œuvre. Au carrefour de l’histoire, de l’anthropologie, de la linguistique et de la sémiologie, nécessairement diachronique, la réflexion épistémologique qui est engagée et exposée dans ces premières pages, est née de débats contradictoires entre tenants de ces différentes disciplines, venant de différents continents : la démarche s’apparente à celle de workshops dont les différents volumes de la collection rendront compte.
Dans le premier texte (« “Cette pépinière chaotique”. Américanisation et histoire globale »), Serge Gruzinski présente en quoi cette entreprise se distingue radicalement des Postcolonial Studies et de la Global History , « approches réductrices qui ont souvent laissé sans voix les américanistes européens, incapables de leur opposer une alternative épistémologique ». Dans ces courants historiographiques, l’Amérique est réduite à la portion congrue, comme simple exutoire du pire de la colonisation (les esclavages), ou comme étape transitionnelle du dialogue hégémonique Europe-Asie (les mines du Potosi) – une périphérie du Vieux Monde, un pourvoyeur de marchandises et d’espaces. La réévaluation des rapports entre l’Asie et l’Amérique, dès les premiers temps de la conquête ibérique, et la mise en valeur de la spécificité de ce qu’a apporté l’Amérique à l’Europe, sont les pistes fécondes d’une juste World History telle que l’avait déjà initiée Pierre Chaunu 2 , et qui sont poursuivies actuellement par l’auteur au moyen d’une analyse comparée d

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