Nouvelles dynamiques de l'immigration au Québec

Mireille Paquet

Description

Si le cas du Québec n’est pas unique, il sert souvent d’exemple pour comprendre les processus migratoires. Prenant le pouls des dynamiques à l’oeuvre dans le Québec actuel, cet ouvrage propose une refonte de la manière dont on doit envisager et étudier l’immigration au Québec. Il considère celle-ci comme un phénomène global et analyse l’interaction entre les acteurs, les sites et les politiques qui façonnent les mouvements de population et l’expérience des personnes migrantes. Il intéressera notamment les chercheurs et les étudiants du domaine en raison des nouvelles avenues de recherche qu’il explore.
Les experts réunis dans ce livre rendent ainsi compte des réalités matérielles, politiques, institutionnelles, sociales et même personnelles de l’immigration au Québec, tout en n’oubliant pas de scruter les angles morts des débats engagés dans la société, notamment dans l’arène médiatique. Ce faisant, ils contribuent à combattre la désinformation sur ces questions.

Sujets

• Social Science
• Sociologie, société et politique
• Emigration
• Immigration

Informations

• Publié par: Les Presses de l'Université de Montréal
• Date de parution: 09 septembre 2022
• Nombre de lectures: 0
• EAN13: 9782760646056
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 1 Mo

Extrait

Sous la direction de Mireille Paquet
NOUVELLES DYNAMIQUES DE L’IMMIGRATION AU QUÉBEC
Les Presses de l’Université de Montréal



Cet ouvrage a été réalisé dans le cadre des travaux de l’Équipe de recherche sur l’immigration au Québec et ailleurs (ÉRIQA). La préparation de cet ouvrage a été rendue possible par le soutien financier du Programme de Soutien aux équipes de recherche (SE) du Fonds de recherche du Québec, société et culture, du Centre de recherche interdisciplinaire sur la diversité et la démocratie (CRIDAQ) et de la Chaire de recherche sur la politique de l’immigration de l’Université. Les membres de l’ÉRIQA remercient expressément Claudia Serrano et Wanda Minnig pour leur assistance. Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada Titre: Nouvelles dynamiques de l’immigration au Québec / sous la direction de Mireille Paquet. Noms: Paquet, Mireille, 1981- éditeur intellectuel. Collections: PUM. Description: Mention de collection: PUM | Comprend des références bibliographiques. Identifiants: Canadiana (livre imprimé) 20210072121 | Canadiana (livre numérique) 2021007213X | ISBN 9782760646032 | ISBN 9782760646049 (PDF) | ISBN 9782760646056 (EPUB) Vedettes-matière: RVM: Québec (Province)—Émigration et immigration. Classification: LCC JV7290.Q8 I46 2022 | CDD 305.9/0691209714—dc23 Mise en pages: Folio infographie Dépôt légal: 3 e trimestre 2022 Bibliothèque et Archives nationales du Québec © Les Presses de l’Université de Montréal, 2022 www.pum.umontreal.ca Les Presses de l’Université de Montréal remercient la Société de développement des entreprises culturelles du Québec (SODEC) de son soutien financier.




Introduction L’immigration dans le Québec actuel
Mireille Paquet, Karine Côté-Boucher, Annick Germain, Adèle Garnier, Chedly Belkhodja, Marina M. Doucerain, Sule Tomkinson, Paul Eid, Kamel Béji et Catherine Xhardez
En 2019, 40 567 immigrants permanents se sont installés au Québec et 158 955 titulaires de permis temporaires résidaient dans la province, selon les chiffres de 2020 d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada et de l’Institut de la statistique du Québec. Le fait migratoire, qui a une longue histoire au Québec, est maintenant une réalité ancrée dans l’organisation linguistique, économique et politique de la province. La population du Québec est aujourd’hui façonnée, quantitativement et qualitativement, par les arrivées successives et durables de personnes nées à l’étranger. Celles-ci représentent près de 15% de la population du Québec, et ce nombre est appelé à continuer d’augmenter. Depuis la fin des années 1990, ces arrivées sont la principale force de renouvellement de la démographie de la province.
Les nouveaux arrivants qui s’établissent au Québec – qu’ils soient immigrants permanents, demandeurs d’asile ou immigrants temporaires – et, plus largement, leurs enfants et leurs descendants, contribuent plus que jamais à la vie sociale, économique, politique et culturelle du Québec. Au même moment, les questions migratoires se profilent de plus en plus comme une source de clivages sociaux et politiques qui influencent les comportements et les opinions de la population. Grâce aux pouvoirs et aux ressources dévolus à la province dans le cadre de l’Accord Canada-Québec relatif à l’immigration et à l’admission temporaire des aubains 1991, le Québec décide en grande partie qui est en mesure de s’établir sur son territoire et est entièrement autonome quant à l’intégration de ses immigrants. Ces réalités font de l’étude de l’immigration un sujet crucial pour comprendre la société québécoise contemporaine.
L’objectif du présent ouvrage est de prendre le pouls d’une partie des dynamiques associées à l’immigration dans le Québec actuel selon une nouvelle perspective: celle des études migratoires. Étudier l’immigration et les dynamiques sociales qui lui sont associées n’est pas nouveau au Québec (Meintel et al ., 2018). En plus d’historiographies de l’immigration au Québec (Pâquet, 2005) et d’études sur les trajectoires de groupes issus de l’immigration (Asal, 2016; Manaï, 2018 ), trois thématiques ont particulièrement attiré l’attention des chercheurs québécois au cours des dernières années: les processus d’intégration des immigrants dans différents contextes (Fourot, 2013; Kanouté et Lafortune, 2014), l’interculturalisme et les relations interethniques (Bouchard, 2012; Emongo et White, 2014; Juteau, 2018) ainsi que les liens entre l’immigration, l’identité et le pluralisme au Québec (Gagnon et Iacovino, 2007; Mathieu, 2017). Le présent ouvrage s’est bâti sur ces travaux, mais propose un changement de perspective important: il traite les migrations en tant qu’objet d’étude propre et concentre ses efforts sur l’étude des processus migratoires et de leurs conséquences sociales et politiques.
En examinant les réalités changeantes de l’immigration au Québec, les analyses présentées ici contribuent au domaine de recherche que sont les études migratoires 1 . Celles-ci s’intéressent à l’immigration comme un phénomène global et examinent l’interaction des acteurs, des sites et des politiques qui affectent les mouvements de population, les processus migratoires et l’expérience des migrants. Longtemps considérée comme l’apanage des sociologues et des démographes, l’immigration est maintenant acceptée comme un objet de recherche de premier plan dans la majorité des sciences sociales (Brettell et Hollifield, 2015). Cette reconnaissance procède d’un constat quant au caractère hautement multidimensionnel des phénomènes migratoires et de l’importance d’une approche multidisciplinaire appuyée par la combinaison de multiples méthodologies (FitzGerald, 2012).
Issus de disciplines telles que la psychologie, la science politique, la sociologie, les relations industrielles, les études françaises et le travail social, les contributeurs au présent ouvrage présentent une posture analytique qui déplace le regard vers les réalités matérielles, politiques, institutionnelles et sociales de l’immigration au Québec. L’objectif n’est plus d’examiner l’immigration avec, comme prisme dominant, les dynamiques qu’elle engendre pour le groupe majoritaire dans la province. Le point de départ n’est plus l’expérience vécue par la société québécoise, mais plutôt l’immigration vers et dans cette société. Ce faisant, les contributeurs soulignent l’importance de l’immigration comme processus social institué et comme variable significative pour l’analyse.
D’entrée de jeu, cette approche a comme conséquence d’éclairer des angles morts des analyses traditionnelles sur l’immigration au Québec. Dans les débats politiques, dans les médias et dans certains travaux en sciences sociales, les phénomènes migratoires sont invariablement teintés des préoccupations au sujet de la différence ethnoculturelle, de la diversité ou du pluralisme. Alors qu’on assiste à une politisation importante des questions liées à la diversité au Québec depuis les années 2000 (Nadeau et Helly, 2016; Gagnon, 2020), ces tendances limitent l’attention portée aux réalités tangibles et matérielles des processus migratoires, traitant plutôt ces questions sous l’angle de la culture ou encore de la diversité religieuse. En plus de soutenir une altérisation des populations issues de l’immigration, l’amalgame immigration-diversité a comme conséquence de rendre moins visibles des réalités comme la perte de statut ou les expériences psychologiques difficiles associées au processus d’intégration. Cette vision dominante entretient, en outre, une méconnaissance des institutions et des politiques qui contribuent aux expériences ainsi qu’aux conditions auxquelles font face les personnes immigrantes.
Les perspectives dominantes sur l’immigration au Québec se fondent aussi sur un présupposé fort, mais empiriquement limité, selon lequel la différence et les pluralismes en sol québécois sont avant tout le résultat de l’immigration et la présence des immigrants. Pourtant, le Québec contemporain se diversifie et se transforme rapidement sous l’égide de plusieurs forces qui vont bien au-delà de ce seul phénomène et parmi lesquelles on compte les mouvements sociaux autochtones, le vieillissement de la population, l’émergence des demandes des communautés LGBTQ2+, les mouvements pour la reconnaissance des droits des communautés afrodescendantes ou de groupes religieux (qui ne sont pas nécessairement des groupes issus de l’immigration).
En replaçant la question migratoire au centre de l’analyse, le présent ouvrage propose des outils pour dépasser ces écueils. Il fait d’abord un retour sur les concepts clés pour comprendre l’immigration en tant que phénomène social, puis dresse un portrait des flux migratoires contemporains au Québec. Il décrit enfin les pouvoirs particuliers de la province dans ce domaine avant de dévoiler quatre façons dont on peut déployer les outils et les perspectives des études migratoires pour comprendre, avec un regard neuf, l’immigration dans le Québec actuel.
La première partie de l’ouvrage décrit comment les actions et les politiques de l’État québécois modèlent les possibilités de mobilité des personnes et leurs conditions de vie une fois qu’elles sont arrivées dans leur nouveau lieu de résidence, que celui-ci soit temporaire ou permanent. On y explore le fonctionnement des programmes des travailleurs étrangers temporaires, les politiques publiques liées aux arrivées irrégulières à la frontière avec les États-Unis ainsi que la manière dont les politiques d’immigration peuvent mener à des pertes de statut d’immigration ou encore à des situations de grande précarité dans la province. Il n’y a donc pas que les forces sociales, politiques et économiques qui affectent les flux migratoires, mais également des actions gouvernementales. Cet ouvrage bouscule ainsi les discours dom