Journal de la vie absente
108 pages
Français

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Journal de la vie absente , livre ebook

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Description

"Ivan le magnifique, créateur et dispensateur d'émotion, de poésie, d'amitié joyeuse, démesurément généreux, conteur lyrique et peintre fou de couleurs.".
Dans ce journal-portrait, qu'elle a tenu de 2001 à 2007 après la mort d'Ivan, Denise Kawun, en s'adressant à lui, fait revivre le peintre d'origine slave, Saint-Germain-des-Prés dans le Paris disparu des années 50, puis l'atelier et la bergerie dans la ferme du Cantal, les rencontres et les amitiés autour d'un être hors du commun, et surtout le lien amoureux près de cinquante années durant.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 décembre 2010
Nombre de lectures 256
EAN13 9782296706507
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0500€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

JOURNAL DE LA VIE ABSENTE
© L’Harmattan, 2010
5-7, rue de l’École-polytechnique ; 75005 Paris

http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-12771-5
EAN : 9782296127715

Fabrication numérique : Socprest, 2012
Ouvrage numérisé avec le soutien du Centre National du Livre
Denise Kawun


JOURNAL DE LA VIE ABSENTE
Rue des Écoles

Cette collection accueille des essais, d’un intérêt éditorial certain mais ne pouvant supporter de gros tirages et une diffusion large.
La collection Rue des Écoles a pour principe l’édition de tous travaux personnels, venus de tous horizons : historique, philosophique, politique, etc.

Déjà parus

Sakina GAMAZ HACHEMI, Chemins croisés. De Sétif à Sétif en passant par Lyon, 2010.
Daniel Verstraatt, Carnets de jeunesse d’un dinosaure. 1941-1943, 2010.
Ange Miguel do SACRAMENTO, Ni noir, ni blanc. Une vie atypique, 2010.
Véran CAMBON DE LAVALETTE, De la Petite-Bastide à la Résistance et au camp de Dachau, 2010.
Patrick GERARD, Je n’ai jamais été vieille, 2010.
Sonia KORN-GRIMANI, Un chant d’espoir. Souvenirs autobiographiques d’une survivante de la Shoah , 2010.
Marie-Gabrielle Copin-Barrier, Robert-Espagne, une tragédie oubliée. Une femme de gendarme raconte, 2009.
Nazly SADEGHI, Salut le Paradis. Une jeune Iranienne dans les labyrinthes de l’Occident, 2009.
Gérard GATINEAU, 30 ans de bitume ou les tribulations d’un flic du XXe siècle dans un univers hostile, 2009.
Denis PAGOT, Souvenirs d’un marin de la V e République, 2009.
Jean-Louis ORAIN, Des champs de blé noir à l’action humanitaire internationale (1936-1986), 2009.
Jo ANGER-WELLER, Les Retrouvés. Récit , 2009.
Jean-Claude TRABUC, Comme un jeune arbre qu’on déracine , 2009.
Fernand WEBER , Malbrough s’en va-t-en guerre, 2009.
A mon mari Ivan Kawun
A la peinture
Aux truites
… que je vive sans vie
Comme les images, par cuer…

Rondeau « Mort, j’appelle de ta rigueur »
François VILLON, Le Testament.
à Jeanne Maisonobe
Préface
Lettre de Marcel Moreau à Denise Kawun

Chère Denise,

Ne me dis plus, après ça, que ta vie n’a pas de sens ; quand on parle de Kawun disparu avec de tels mots qui sont d’amour échevelé autant que d’admiration inconditionnelle, on n’a pas à craindre de manquer un seul de ses rendez-vous avec le Destin. Ta passion est invieillissable comme l’est l’œuvre d’Ivan en prolongement de son propre corps, du temps où ce dernier couchait à ses pieds toute l’exubérance abyssale des matins du monde.
Tu as partagé l’existence d’un Dionysos mâtiné d’âme slave. Tu fus la première à comprendre que s’il dansait si bien ses désirs les plus intranquilles dans la vie et dans l’art, c’était sous l’effet d’une ivresse de générosité. Cette ivresse se passe de bacchantes. Son vin coule au rythme des épanchements du cœur. Il lui suffit parfois d’une femme à qui prendre le bras au moment où le sol se dérobe pour donner des ailes à la titubation. Je crois, je sais que tu fus plus souvent qu’à ton tour cette femme-là, même s’il était difficile à sa fierté d’en convenir et à ta modestie de l’espérer.
Ma chère Denise, tu as écrit un livre vraiment poignant. A sa lecture s’est aggravé le regret que j’ai de n’avoir pas toujours été aussi proche d’Ivan que j’en éprouvais l’envie. Pourtant, j’avais un bon instinct propitiatoire, qui m’en martelait l’urgence à défaut d’en précipiter le mouvement. Ce regret porte désormais un nom : TAPS, et ce n’est pas un hasard si son monosyllabe a la résonance d’une frustration de musique à commencer par ses basses continues.
Mais voilà, j’étais, je suis je reste possédé de mots et ce explique sans doute, sans l’excuser, que je n’aie pas toujours réussi à les détourner de la poudrière leur collant aux semelles, afin qu’ils se répandent en preuves de connivence et d’amitié auprès des êtres dont pourtant l’importance qu’ils avaient à mes yeux ne s’était jamais démentie, direction Montchanson – par exemple.
Je t’embrasse très cordialement, Denise et pardonne-moi mes ratures. C’est l’émotion.

Marcel


Reproduit avec l’aimable autorisation de Marcel Moreau.

J’aimerais savoir écrire pour te raconter, montrer l’homme magnifique que tu étais, enthousiaste et généreux et plein de doutes aussi.
Tu te cherchais dans et par la peinture. Secret, tu disais plus à tes toiles qu’à moi.
J’ai eu cette chance inouïe d’avoir cet homme pour moi, un grand cosaque sauvage et tendre. Tu étais français mais ton âme était slave
Samedi 16 novembre 2001

Neuf érables en trois bouquets de trois ont été plantés dans cette Goutelle que tu aimais, sur tes cendres. J’ai déposé l’urne vide mais remplie de messages amis au pied du plus bel arbre au milieu du groupe.
Partout à l’aise et sans complexe, il avait des reparties impitoyables et des formules qui désarmaient, et toujours cet appétit boulimique de vivre.
Son vocabulaire truculent cachait une grande pudeur.
Il allait à l’essentiel.
La peinture comme questionnement, la musique dans laquelle il baignait.
Je voudrais me souvenir de tous les mots et les gestes, sa main lourde de tendresse sur ma tête, au milieu d’une foule.
L’abandon de sa tête sur mes genoux et là nous avons su que nous avions besoin l’un de l’autre.


4 mois
Le 16 novembre 2001

Mon Taps, quel type merveilleux tu étais, bon, sensible et talentueux !
Comme j’ai aimé tes tours de mime, tes facéties (te gratter l’oreille avec la patte d’un coq juché sur ton épaule).
Tes retours vers l’enfance. Comme tu applaudissais à ce qui te plaisait, t’amusait ! Ta spontanéité d’un enfant au cirque ; les comptines qui te revenaient en mémoire, cocasses et poétiques : « petit oiseau, où t’en vas-tu ? petit oiseau quand reviens-tu ? », je voudrais les retrouver, m’en souvenir. Ces proverbes français que tu accommodais : « la peau de l’ours vaut mieux que deux tu l’auras », « tant va la cruche à l’eau qu’elle n’amasse pas mousse », « un tien vaut mieux que pierre qui roule » etc…
Comme tu renchérissais sur tout dans une générosité des mots et des actes et moi qui freinais des quatre fers, qui te tirais en arrière, mon tout petit, si grand, si fort, mon amour. Non ! Je ne t’ai pas assez dit à quel point je t’aime et je t’ai aimé.
Et puis ton courage toujours, le froid de ton absence…
Chaque fois tu voulais atteindre à l’excellence.
A l’automne, avec le motoculteur tu traçais des sillons rectilignes, luisants, parallèles, qui à la fin faisaient ressembler le champ à une grande pièce de velours brun côtelé.
Et aussi quand tu lançais ton fil à la pêche à la mouche, il fallait que tu arrives à une trajectoire parfaite, la mouche allant se poser où tu voulais qu’elle se pose après avoir filé droit au bout de son fil.
Mais tu détestais réparer les barrières et faire des clôtures. Là, le problème se réglait à grand renfort de clous et à grands coups de masse. « Toutounette, tiens-moi le piquet… ». Le coup passe si près, je lâche le piquet et me retrouve le cul par terre. Taps me relève, confus, m’embrasse, me cajole, mais ne m’a plus jamais demandé de recommencer…
Je me suis laissé avoir une autre fois où tu m’as dit : « Tiens-moi le timon du char ! ». Je l’ai heureusement aussitôt lâché avant d’être projetée dans les airs.
La première chose que tu aies faite en arrivant ici a été de semer des graines de tournesol dans le jardin pour rappeler l’Ukraine.
Ta première récolte de blé : les épis lourds se couchaient, les paysans n’en revenaient pas ! Tu as été le premier à planter du maïs, les épis dépassaient ta tête. Tu étais doué en tout et tu ne le savais pas.


25 novembre 2001

Ton anniversaire, avec Nono et Christiane ; on a parlé de toi et bu aux futures expos.
Les petits bronzes, à partir des cires, sont commandés au fondeur (le Tribun, le Danseur, le Semeur). Delanne {1} était passé les prendre vers le 15 novembre. Tu le souhaitais et tu serais si heureux que cela se fasse.


30 novembre 2001

Taps, hier 29 novembre, les Nonos {2} sont venus m’aider à mettre les bonsaïs à l’abri sous le chèvrefeuille et on a planté un seringa dans l’angle de l’atelier.
Ce matin, 30 novembre, j’ai entrepris de compléter le classeur photos que Jean Mazel {3} a commencé avec les descriptions des tableaux. Que de choses j’ai négligé de te demander sur l’origine

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