LA RACISATION DES RELATIONS INTERGROUPES OU LA PROBLÉMATIQUE
524 pages
Français

LA RACISATION DES RELATIONS INTERGROUPES OU LA PROBLÉMATIQUE , livre ebook

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524 pages
Français

Description

Cette réflexion critique tente de déconstruire " la problématique de la couleur " qui domine la modalité d'écriture des relations " interraciales " privilégié par les sciences humaines et sociales. Les relations interraciales entre Blancs descendants des colons et Noirs descendants d'esclaves, des anciennes colonies françaises et Martinique en particulier, ont été appréhendées comme illustrant au mieux les dérives de la problématique de la couleur en tant qu'elle camoufle les vrais rapports d'inégalité économique et sociale qui sont entretenus entre ces groupes.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 juillet 2002
Nombre de lectures 113
EAN13 9782296293564
Langue Français
Poids de l'ouvrage 16 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

LA RACISATION DES RELATIONS INTERGROUPES
OU
LA PROBLEMATIQUE DE LA COULEUR
Le cas de la MartiniqueDu même auteur:
La question de l'immigration indienne dans son
environnement socio-économique martiniquais, 1848-1900,
L'Harmattan, 1996.Juliette SMERALDA-AMON
LA RACISATION DES RELATIONS INTERGROUPES
OU
LA PROBLEMATIQUE DE LA COULEUR
Le cas de la Martinique
L'Harmattan L'Harmattan Hongrie L'Harmattan Italia
5-7, rue de l'École-Polytechnique Hargita u. 3 Via Bava, 37
75005 Paris 1026 Budapest 10214 Torino
FRANCE HONGRIE ITALIE@L'Hannatlan,2002
ISBN: 2-7475-2746-8PROLEGOMENES
ESSAI D'APPROCHE CRITIQUE DE L'ECRITURE DES
RELATIONS «RACIALES» INTERGROUPES DANS LES
SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES1
1 Par sciences humaines ou sciences sociales, il faut entendre « l'ensemble des
sciences étudiant 1'homme en société. » Une distinction est cependant faite entre
ces terminologies: les sciences humaines se plaçeraient « en dehors de chaque
société particulière» à l'instar des sciences naturelles qui aspirent à l'universalité
par la généralisation, tandis que les sociales poursuivraient « un objectif
de changement », en envisageant « l'aspect concret des activités humaines ». Dans
cette perspective, elles ne relèveraient « pas de la science, mais seulement de ses
applications.» D'après Madeleine Grawitz, in Lexique des sciences sociales,
p.34 7-348.La sociologie des relations interethniques al' ambition
d'appréhender les effets autant que les limites de la citoyenneté
telle que la conçoivent les Etats (démocratiques) modernes. Il
s'agit de considérer sous un angle critique le principe de l'égalité
juridique et politique que revendiquent ces Etats, à partir des
inégalités que sécrète l'ordre culturel (politique, économique et
social) qui constitue leur fondement. Car on ne peut parler de
« relations interethniques» sans tenir compte simultanément de la
situation politique de chacun des groupes en présence. L'approche
critique que veut être cette étude tente de faire apparaître les
contradictions et les tensions qui accompagnent nécessairement
ces relations - expression de conflits entre valeurs idéales et
pratiques sociales observables qui, « inspirées par les ~assions des
hommes », s'éloignent fortement des idéaux proclamés.
Les sociétés nées de l'esclavage fournissent un bel exemple de ce
paradoxe. En l'occurrence, leurs membres ont appris à respecter
certains grands principes et à louer certaines valeurs dont la réalité
révèle le caractère absurde. Ceux-ci se sont habitués à se soumettre
à des discours coulés dans un moule conçu pour ieur seule réalité
d'insulaires, «francophones» par exemple. Elaborés depuis
1'Hexagone, ils leur sont devenus si familiers qu'ils constituent la
cage (dorée?) dans laquelle ils tentent d'évoluer malaisément.
Quoi de plus folklorique en effet que d'avoir à se mouvoir dans
cette cage étroite aux barreaux illusoirement extensibles que sont
les multiples dénominations qui tentent sans succès de leur
20. Schnapper, 1998, p. 14.10
conférer une identité à partir de concepts fabriqués ad hoc:
insulaires, ultramarins, ex-colonisés, Français tout court, Français
de couleur ou francophones? Une boulimie de titres qui ne
parviennent que difficilement à camoufler le mal qu'ont ces
« ultramarins» à se définir et à donner du sens à leur existence
administrativement circonscrite - comme si l'identité ne relevait
que d'un jeu de paperasserie.
Le «décentrement fondamental qui prend place d'emblée à la
source de leur destin »3, dont souffrent ces sociétés à cause de la
situation de dépendance qu'elles entretiennent avec la métropole,
les oblige, en effet - pour se définir et trouver leur fondement -, à
«faire référence à des centres de pouvoir lointains» qui les
dépassent largement et les rendent incapables de concevoir une
explication auto-centrée de leur existence. » Le malaise naquit de
ce que « l'habitude fut prise d'en référer au pouvoir central à tout
propos» et de ce que « la politique d'assimilation initiée dès le 1ge
siècle déboucha sur la citoyenneté française sans mettre fin à la
considération de ces sociétés comme espace colonial. »4 Comment
alors parler de «démocratie» dans ces sociétés non encore
stabilisées, au sein desquelles la légitimité de certains groupes
reste posée et où l'exercice du pouvoir demeure le privilège d'un
groupe au détriment des autres?
La sociologie des relations interethniques - dont il ne sera pas
directement question ici - se concevra comme le prolongement de
la réflexion qui sera entamée dans cet ouvrage. Il s'agira de tenter
une approche rationnelle de l'ordre social «racisé» qui prévaut
dans les types de sociétés héritées de l'esclavage, afin d'améliorer
la compréhension que l'on en a et d'éviter ainsi le piège des
« descriptions non systématiques », des dénonciations et
considérations morales et politiques, des jugements normatifs. Le
projet est celui d'une «autocompréhension de notre propre
destin »5 et du caractère singulier de notre société.
3 Jean Benoist, cité par Bonniol, 1981, p. 155.
4
Bonniol, 1981 : 156
5
Expression empruntée à Schnapper (1998 :18).l l
Présentement, nous tendrons à pointer et à interroger
quelquesunes des attitudes qui sont inductrices de dysfonctionnements
quant à la «manière antillaise» d'observer et d'interpréter sa
propre réalité sociale, notre conviction étant que les solutions
envisagées aux problèmes qui constituent des blocages à l'avancée
sociale entretiennent un lien étroit avec les attitudes dont il sera
question dans la réflexion proposée.
A la nécessité de se conformer à une approche rationnelle des
relations sociales, et donc nécessairement raciales, répond le souci
de tenter de situer les phénomènes observés dans un cadre
théorique plus vaste que celui rendu possible par l'étude
microsociologique, assez systématiquement privilégiée par les
chercheurs de tous horizons. C'est en effet la société dans son
ensemble qu'il faudrait pouvoir interroger - sous l'angle de la
macrosociologie donc - afin de dégager des systèmes d'explication
qui parviennent à rendre compte de la nature autant que de la
spécificité - s'il en est - de nos types de sociétés nées de
l'esclavage et de la miscégénation bio-culturelle.
Deux approches (micro- et macrosociologique) qui ne s'excluent
cependant pas puisque dans un cadre, les problèmes restent
identifiables tandis que dans l'autre, ils sont restitués à des cadres
théoriques et à des problématiques plus vastes. La nécessité de
l'approche macrosociologique résultant de ce qu'elle permet une
distanciation du sujet et de l'objet, ainsi qu'une plus grande
efficacité quant à circonscrire le spécifique et le général, quant à
identifier et à utiliser les grilles de lecture qui se prêtent le plus
favorablement aux efforts d'analyses envisagés, quant au possible
solutionnement des problèmes recensés.
Face à notre objet d'étude - et sans doute à cause des rapports
d'exclusion/inclusion que nous entretenons avec celui-ci - notre
attitude nous fera peut-être apparaître parfois comme oscillant,
pour paraphraser Schnapper6, entre l'effort de connaissance et la
6
Op. cit., p. 1912
tentation de devenir acteur social, c'est-à-dire militante par
l'intermédiaire de notre activité scientifique. L'enjeu d'une telle
approche devra toutefois demeurer celui d'en arriver à une
connaissance objective de l'implication sociopolitique des
relations interraciales à la Martinique, étant entendu que « (ce) qui
nous décide habituellement à étudier une certaine catégorie de
phénomènes c'est, même au niveau inconscient, le sentiment qu'ils
importent à la satisfaction de l'homme, et que nous pourrons les
contrôler après les avoir compris, pour accroître cette
satisfaction. »7
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