La Tour de la mort
217 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

217 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Description

1964 - En vacances sur la côte Adriatique, Marc fait la connaissance d'un médecin tchèque. Deux mondes se confrontent : celui de la liberté où vit Marc, en France, et celui d'Hugo qui, en Tchécoslovaquie, subit les rigueurs du régime communiste, la prison, puis le goulag des mines d'uranium.
Marc organise la fuite de son nouvel ami, de sa femme et de sa fille.
Le récit commence en Normandie, en 1940, et se poursuit dans les Pays de l'Est, en France, aux Etats-Unis, jusqu'en Afghanistan, puis à Prague où Hugo retrouve ses racines. En décembre 2006, il revient à Jachymov, sur le site des mines d'uranium dominé par la tour de la mort.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 15 juin 2007
Nombre de lectures 245
EAN13 9782336271293
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0800€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

La Tour de la mort

Marc Anger
© L’HARMATTAN, 2007
5-7, rue de l’École-Polytechnique ; 75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan1@wanadoo.fr
9782296033412
EAN : 97822960334) 12
Sommaire
Page de titre Page de Copyright I — A L’ECOLE DE LA GUERRE II - L’ENTREE DANS LA VIE ACTIVE III — VACANCES EN YOUGOSLAVIE IV - HUGO IV — LA DECISION VI — LE RETOUR VII - PREMIERS PAS DANS LE MONDE LIBRE VIII — DANS LA TOURMENTE IX — LE CHEMIN DE LA REUSSITE X — QUARANTE ANS PLUS TARD XI — JÁCHYMOV Coïncidence ou communion de pensée...? EPILOGUE LES 45 CAMPS DE TRAVAUX FORCES EN TCHECOSLOVAQUIE SOUS LE REGIME COMMUNISTE LA TOUR DE LA MORT
I — A L’ECOLE DE LA GUERRE
Nous étions cinq garçons.
Quand je suis arrivé, le dernier, mon père avait pu parfaire son rôle de chef de famille avec mes quatre frères aînés mais non sans difficultés.
Son système éducatif avait subi quelques échecs scolaires. Au lycée Hoche à Versailles notre réputation était solidement ancrée. Quand j’y suis entré, dans les petites classes, on m’avait déjà à l’œil et j’ai été rapidement orienté vers un cours privé; mon père les connaissait tous.
Nous habitions un appartement situé juste en face de la chapelle du château. Par la fenêtre, ma mère me surveillait quand je traversais la place Gambetta...et hop, ... j’étais dans mon jardin. Je connaissais tous les recoins du parc, les souterrains, les bosquets, les allées que je parcourais à vélo, ce qui était rigoureusement interdit. Je faisais naviguer mon voilier dans les bassins.
Officier de marine, mon père avait parcouru le monde dès 1900, à bord de l’Iphigénie, croiseur-école, ancêtre de la Jeanne d’Arc. Le monde lui était familier... des Antilles à la Chine en passant par les Indes, Madagascar et l’Afrique du Sud où les Boers se battaient contre les Anglais pour leur indépendance.
Fréquemment, il nous faisait part de sa vue globale du monde, en commençant par le péril jaune et la nécessité de construire une Europe capable de s’imposer dans le nouvel échiquier mondial.
Il avait mis en pratique ses théories en envoyant, en 1938, mon frère aîné Edouard dans une famille anglaise et François, le second, dans une famille allemande, sur le principe d’échanges. Si bien que le jeune Allemand Guna et l’Anglais Edgar sont venus passer leurs vacances avec nous en 1939; ils sont arrivés à la maison début août. Tout se passait parfaitement bien. Presque tous les jours, mes frères emmenaient leurs amis visiter Paris.
Puis nous sommes partis pour Arromanches, petite station balnéaire sur la côte normande. Notre grand-mère avait loué une grande villa. Venant de Rouen, nos cousines Nicole et Jeannine nous ont rejoints.
Bains de mer, pêche, tennis pour les grands. Vacances de rêve quand, le 24 août, mon père a débarqué. Nous devions rentrer d’urgence à Versailles et au plus vite renvoyer nos jeunes amis dans leurs foyers.
Mon oncle Jean est arrivé de Rouen pour ramener les cousines.
Mon père qui suivait de très près les événements politiques sentait la guerre approcher, alerté dès le 23 août par la signature du pacte germano-soviétique. Il nous expliquait :
- Hitler et Staline viennent de se mettre d’accord, ils prendront la Pologne en tenaille, l’Allemagne l’envahira à l’est, la Russie à l’ouest. La Russie occupera la Finlande et annexera les pays Baltes et la Roumanie. En même temps Staline admettra l’annexion de la Tchécoslovaquie par Hitler qui a déjà absorbé l’Autriche... Quel programme !
- Vous comprenez, mes enfants : la guerre n’est pas loin.
Tout ceci me passait au-dessus de la tête. Mon père expliquait que la Lituanie, l’Estonie, et la Lettonie formaient les pays Baltes. Pour moi c’était bien confus, j’avais douze ans !... mais je sentais bien qu’il se passait quelque chose de grave.
Et le 3 septembre la guerre était déclarée.
La guerre, j’avais du mal à imaginer ce que c’était.
J’avais hérité de mes frères des livres illustrés, les bandes dessinées d’aujourd’hui. Ces livres, destinés aux petits, montraient les Prussiens aux mines patibulaires, coiffés de casques à pointe, confrontés aux gentils Français, l’air bon enfant dans leur tenue bleu-horizon. On les appelait “pioupious”. Une autre image de la guerre de 14-18 m’était donnée chaque année le 25 septembre. Mon père revêtait sa tenue d’apparat bleu marine, chamarrée d’or. Il était impressionnant. Il partait pour Verdun retrouver les officiers de marine qui, avec lui, avaient combattu dans les fusiliers marins. Ils allaient au moulin de Laffaux, au chemin des Dames se recueillir sur la tombe de ceux qui étaient morts au combat en septembre 1918, les trois quarts des officiers, et plus de la moitié des effectifs du bataillon. Jamais il n’aurait manqué ce devoir de mémoire.
Une nouvelle guerre allait donc commencer.
Mon père disait que la France et la Grande-Bretagne avaient enfin compris qu’à Munich, en 1938, Hitler nous avait bel et bien bernés en faisant admettre à nos gouvernants les annexions de la Tchécoslovaquie et de l’Autriche. Que la France et la Grande-Bretagne avaient été pleutres et naïves !
Septembre 39 passe, puis octobre... rien... toujours rien... si ce n’est des affiches. L’une d’entre elles m’avait particulièrement frappé :

“NOUS VAINCRONS PARCE QUE NOUS SOMMES LES PLUS FORTS.”
Alors, pourquoi s’en faire ? Si bien que l’on a appelé cette période “La drôle de guerre”.
Du haut de mes douze ans, je ne la trouvais pas du tout drôle, cette guerre, car mon père, sentant je ne sais quelle catastrophe arriver, décida de m’envoyer en province chez une tante, avec mon frère Daniel.
Et nous voilà à Flers-de-l’Orne, à environ deux cents kilomètres à l’ouest de Paris, en pleine Normandie, berceau de la famille. La maison de la tante Thérèse était particulièrement spacieuse. Nous passions beaucoup de temps à jouer dans le jardin avec le chien Jado. La tante dirigeait une petite entreprise de tricotage. C’était une femme d’affaires.
Quel déracinement ! Changement de collège, j’étais en 5 ème . Changement de mode de vie. Habituée à diriger son personnel, la tante Thérèse était très autoritaire, contrairement à nos parents qui heureusement venaient régulièrement nous voir à Flers. Ils nous remontaient le moral.
Pour une drôle de guerre, c’était tout, sauf drôle !


Un soir, nous étions le 8 juin 1940, Daniel et moi nous trouvions postés dans l’embrasure de la porte du salon. Claude, qui lui avait seize ans, y était admis avec les grandes personnes. Tous étaient rivés à la T.S.F., l’oreille sur le haut-parleur, ils écoutaient un discours, et ils pleuraient !
Nous étions sidérés... A notre âge, nous pensions que les larmes étaient réservées aux enfants.
Nous sommes entrés dans le salon sur la pointe des pieds. Le discours se terminait, la tante a coupé Radio-Paris, puis dans un silence de mort, Bernadette, notre mère, nous a pris dans ses bras :
- “Ma tante, pourriez-vous leur expliquer ce qui se passe ? Vous saurez mieux le faire que moi. ”
La tante a pris la parole :
- “Nous avons écouté le discours du chef du gouvernement, Paul Reynaud, il a dit que les troupes allemandes avaient enfoncé nos lignes de défense, qu’elles avançaient vers Paris, que le gouvernement quittait Paris pour Tours, puis Bordeaux, s’il le fallait. Il a ajouté que les Français devaient surtout rester chez eux, sans s’affoler... et attendre.”
Tante Thérèse a poursuivi...
- “Nous, nous allons faire comme le gouvernement : on s’en va dès demain matin. Nous devons réfléchir aux préparatifs.
Bernadette, veux-tu aller coucher tes enfants. Venez dire bonsoir, les enfants. A demain, on se lèvera très tôt.”
En nous embrassant, maman nous a expliqué pourquoi ils pleuraient. La guerre était perdue, les chefs quittaient Paris, la France était foutue, on allait sûrement être occupé par les Allemands, et il fallait fuir.
Notre père, lui, était resté à Versailles.
- “Quand le navire risque de couler, disait-il, le commandant ne quitte jamais le bord. Toute la population ne peut s’échapper, les plus anciens doivent rester pour administrer la cité. Donc, je reste.”
A Flers, réveil en fanfare à cinq heures du matin; on espérait partir vers sept heures. Dans sa 11 CV Citroën, l’oncle Jacques emmènerait son épouse, la tante et notre mère en direction de Biarritz - des cousins les hébergeraient dans leur grande villa d’Anglet. Deux difficultés à surmonter : l’approvisionnement en essence et le passage de la Loire. Y aurait-il encore des ponts ?... La s

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents