Logiques du dénuement
218 pages
Français

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Description

Voici des situations concrètes où se trouve menacée la cohérence du « monde de vie » des pauvres. Ceux qui doivent assumer leur vie quotidienne en l'absence de pare-chocs sociaux tels que l'argent, les relations ou le statut social sont directement exposés à des aléas fragilisant ou détruisant les « renvois » qui lient ordinairement personnes et choses en des totalités relativement cohérentes et solides. Le dénuement nous enseigne en négatif tout ce que nous devons aux protections sociales.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 septembre 2011
Nombre de lectures 50
EAN13 9782296467248
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0900€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

LOGIQUES DU DÉNUEMENT
Réflexions sociologiques
sur la pauvreté et le temps
Logiques Sociales
Collection dirigée par Bruno Péquignot

En réunissant des chercheurs, des praticiens et des essayistes, même si la dominante reste universitaire, la collection Logiques Sociales entend favoriser les liens entre la recherche non finalisée et l’action sociale.
En laissant toute liberté théorique aux auteurs, elle cherche à promouvoir les recherches qui partent d’un terrain, d’une enquête ou d’une expérience qui augmentent la connaissance empirique des phénomènes sociaux ou qui proposent une innovation méthodologique ou théorique, voire une réévaluation de méthodes ou de systèmes conceptuels classiques.

Dernières parutions
Jérôme DUBOIS (sous la dir. de), Les usages sociaux du théâtre en dehors du théâtre , 2011.
Isabelle PAPIEAU, La culture excentrique, de Michael Jackson à Tim Burton , 2011.
Aziz JELLAB, Les étudiants en quête d’université. Une expérience scolaire sous tensions, 2011.
Odile MERCKLING, Femmes de l’immigration dans le travail précaire , 2011.
Vanessa BOLEGUIN, La Réunion : une jeunesse tiraillée entre tradition et modernité. Les 16-30 ans au chômage , 2011.
Maurice MAUVIEL, L’histoire du concept de culture, 2011.
Emmanuel AMOUGOU, Sciences sociales et patrimoines , 2011.
Gérard REGNAULT, Les mondes sociaux des petites et très petites entreprises , 2011.
Brigitte LESTRADE, Travail et précarité. Les « Working poor » en Europe , 2011.
Christos CLAIRIS, Denis COSTAOUEC, Jean-Baptiste COYOS, Béatrice JEANNOT-FOURCAUD (Éditeurs), Langues et cultures régionales de France. Dix ans après. Cadre légal, politiques, médias , 2011.
Mathieu MARQUET, Trajectoires sociales ascendantes de deux jeunes issus de milieu populaire. Récits de vie , 2011.
Jean-Claude NDUNGUTSE, Rwanda. Les spectres du Malthus : mythe ou réalité ?, 2011.
Lina BERNABOTTO, Ces choses non dites et qui font leur chemin, 2011.
Bénédicte BERTHE, Le sentiment de culpabilité et les sciences économiques : les promesses d’une nouvelle relation, Tome 2 , 2011.
Bénédicte BERTHE, Le sentiment de culpabilité et les sciences humaines : la richesse d’une ancienne relation, Tome 1 , 2011.
Anne COVA, Féminismes et néo-malthusianismes sous la III e République : "La liberté de la maternité", 2011.
H. LETHIERRY, Sauve qui peut la ville. Études lefebvriennes , 2011.
Christian Guinchard


LOGIQUES DU DÉNUEMENT
Réflexions sociologiques
sur la pauvreté et le temps
Les illustrations intérieures sont reproduites
avec l’aimable autorisation de leur auteur :
Vincent Schérer


© L’Harmattan, 2011
5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris

http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-55489-4
EAN : 9782296554894

Fabrication numérique : Actissia Services, 2012
Introduction
On n’organise rationnellement que ce que l’on réorganise {1}


Avant que ce livre ne se trouve entre vos mains et ne devienne, momentanément, l’objet de votre sagacité critique, j’ai dû me résoudre à cesser de « remettre sur l’ouvrage » un texte que je ne suis jamais parvenu à trouver satisfaisant. Pour « en arriver là », il m’a fallu surmonter une frustration récurrente qui semblait toujours repousser le moment fatidique où il convient d’arrêter toute investigation complémentaire et m’interdire toute nouvelle tentative de réécriture… En effet, chaque fois que j’ai voulu achever ce travail, de nouvelles pistes, toutes aussi prometteuses les unes que les autres, se dessinaient à l’horizon de mon exploration ; mille choses paraissant essentielles pour une meilleure compréhension du dénuement – tout ce que d’autres chercheurs avaient seulement évoqué, tout ce qu’on aurait tort de sous-estimer… – m’invitaient à relancer le recueil d’informations supplémentaires, à élaborer de plus fines interprétations des données que j’avais déjà réunies ou à intégrer une critique des derniers ouvrages parus sur le sujet. J’ai dû accepter, pour finir, l’idée que, quoi que je fasse, il y aurait toujours un horizon !

Faut-il incriminer mon incurable lenteur et, surtout, ma rédhibitoire tendance à la dispersion ? Sans doute ces irréductibles défauts jouent-ils un rôle indéniable dans les ajournements innombrables que je me suis imposés. Cependant, on pourrait également penser que c’est d’abord dans le choix de l’objet de ce travail que gît la raison principale de son report indéfini. En effet, il me serait possible d’invoquer à bon droit le caractère sociologiquement insaisissable de la pauvreté et l’évanescence du temps pour finir par avouer que, tentant de faciliter l’approche de la pauvreté en l’abordant par le temps, je suis tombé de Charybde en Scylla. Cependant, la profonde raison de tous ces délais et détours est probablement moins spectaculaire que la rencontre avec des objets d’une « aporicité » insurmontable. Il me semble désormais qu’elle réside aussi dans le fait que je ne fonde pas mes propos sur une seule enquête, élaborée comme une totalité indivise, liant fermement une problématique et sa méthodologie, mais que je « reviens » sur les résultats marginaux de plusieurs recherches et études auxquelles j’ai participé {2} .

C’est le sens de ce retour qu’il convient sans doute d’éclairer en guise d’introduction à ces réflexions. En effet, il ne s’agit pas de présenter ici, sous forme de synthèse, les résultats d’une plus ou moins patiente accumulation d’informations sur la « disqualification sociale » ou la « désaffiliation ». Si, à bien des égards, reprenant une expression chère à MONTAIGNE, le lecteur peut avoir le sentiment que ces réflexions forment une sorte de « marqueterie disjointe », j’ose penser que, derrière le sentiment d’une certaine dispersion de mes propos, s’affirmera pour lui la permanence d’une posture fondant l’unité de ce livre.

La nécessité de préciser ce que j’entends par réflexion s’impose en premier lieu. Sans aucun doute, les références aux notions de « réflexivité », « rupture épistémologique », « objectivation du sujet objectivant »… – que le lecteur est en droit d’attendre dans ce type d’ouvrage – doivent renvoyer aux efforts d’un véritable travail d’explicitation et de prise en compte des conditions sociales influant la production de résultats scientifiques par les chercheurs {3} . Cependant, il faut bien reconnaître également que les impératifs de vigilance épistémologique peuvent dégénérer en simples routines méthodologiques ou se dégrader en mots de passe assurant rituellement l’intégration à un groupe social particulier.

Peut-être faut-il commencer par avouer que, d’une façon générale, la réflexion ne va pas de soi dans la mesure où notre environnement quotidien est composé de moyens et de fins socialement pré/constitués qui s’imposent à nous dès notre naissance à travers nos relations aux personnes et aux choses. S’il fallait parler de socialité dans un sens différent de ce que nous entendons habituellement par sociabilité, c’est sans doute à la description des fondements du sentiment de familiarité que nous éprouvons pour ces cadres qu’il faudrait réserver ce terme. Par les sollicitations qu’elle transmet implicitement à travers les innombrables thèmes de préoccupations qui structurent notre vie quotidienne, la socialité nous désigne des visées légitimes et des finalités d’action inévitables. Ainsi, à travers leurs formes, leurs matières, leurs fonctions,... les choses recèlent des buts indiscutables et généralement indiscutés qui se déclinent sous forme de modes d’emplois socialement validés ou d’actions à entreprendre. Pour vivre conformément à « l’ordre des choses » socialement institué, nous n’avons pas besoin de réflexion, mais nous devons faire preuve d’une circonspection dans laquelle il suffit que le fonctionnement de notre conscience reste « pré/réflexif » {4} .

Loin d’être jetés dans l’absurdité d’un monde contingent où

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