Mon chemin de guérison
138 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

138 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Description

Ce livre est un témoignage bouleversant du mal que peuvent engendrer un père violeur et une mère complice par un silence dévastateur.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 15 septembre 2015
Nombre de lectures 108
EAN13 9782336390574
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0600€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
4e de couverture
Titre
Mathilde Désanges








Mon chemin de guérison


Du viol au pardon
© L’H ARMATTAN , 2015
5-7, rue de l’École-Polytechnique, 75005 Paris
http://www.harmattan.fr
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr
EAN Epub : 978-2-336-74068-3
Dédicace


À Nico, mon mari amoureux qui m’a soutenue dans tous mes tourments.
À Amalia, à Laurine mes filles chéries que j’adore.
Avertissement au lecteur

Avertissement au lecteur
Certains prénoms et noms qui apparaissent dans ce témoignage ont été modifiés afin de préserver l’anonymat des protagonistes.
Chapitre 1
Je viens de vomir pour la troisième fois de la matinée. L’horrible goût de mes sucs gastriques envahit ma bouche comme les relents de mes remords. Le contenu du paquet de bonbons que j’avais avalé en entier, sans pouvoir m’arrêter, gît maintenant dans la cuvette des WC, témoin insupportable de mes tourments. Je n’arrive plus à me contrôler. Je me jette sur la nourriture, telle une naufragée sur une bouée, pour la rejeter l’instant suivant. Je me sens alors coupable jusqu’au fond de mes entrailles et décide de jeûner pendant plusieurs jours.
Je suis assise à la table familiale ; c’est l’anniversaire de mon neveu. J’essaie maladroitement de faire bonne figure, mais le repas qui se profile m’angoisse. Je me prépare mentalement avec application. À l’apéritif, je commence par boire un grand verre de coca, puis goûte à toutes les mises en bouche, en faisant en sorte de noyer cette nourriture dans mon estomac. Une pause cigarette s’organise. De nombreux invités sortent et je voudrais en profiter pour aller aux toilettes. Malheureusement, ce n’est pas possible. Certains restent à table mais le faible bruit ambiant m’empêche de réaliser ce que j’ai à faire sans alerter tout le monde. J’attends. Les convives reviennent, heureux d’un petit moment de détente. Il y a maintenant beaucoup plus de brouhaha. Les enfants s’ébattent dans la salle de jeu. Chacun poursuit sa discussion. Je donne le change, une fois de plus. Personne ne remarque mon mal-être. L’esprit ailleurs, je reste concentrée sur mon stratagème : comment éjecter toute cette nourriture le plus discrètement possible ? Je demeure une bonne comédienne. Au lycée, personne ne se doutait un seul instant des atrocités que je vivais chez moi. J’étais la bonne copine. Celle qui aimait vivre, rigoler et s’amuser. Une jeune fille pétillante, bâtie comme un garçon, à l’allure plus garde du corps que belle midinette. L’important était de ne pas penser à la maison, et surtout, que personne ne se doute de quoi que ce soit.
Je continue à boire très régulièrement. L’entrée arrive : un feuilleté au fromage sur un lit de salade. Je regarde mon assiette avec à la fois envie et dégoût. Je vais, comme d’habitude, faire semblant de savourer ce mets en prenant soin d’ingurgiter plusieurs verres d’eau à chaque fourchetée, afin de l’immerger complètement dans mon estomac. J’imagine cette nourriture flotter pour atterrir finalement au fond de cette cuvette. J’ai l’impression que tous les regards convergent vers moi. Mais en fait, je m’aperçois que personne ne remarque mon manège. Je peux donc poursuivre. Tout le monde est occupé à se délecter du repas. Les assiettes se vident rapidement. Le couscous arrive de la cuisine. Je suis déjà gavée. Je sens qu’il faut que je me débarrasse de ce poids, alors que le fromage apparaît. Je m’éclipse enfin. Les enfants continuent à jouer dans la salle à côté. La télévision éructe, les rires s’entremêlent aux discussions ; c’est le bon moment. Le plus important : rapidité et discrétion. Je m’emploie méticuleusement à ce qu’aucun bruit ne sorte des WC. Je tire la chasse d’eau une première fois. Je m’applique à tout nettoyer : surtout ne laisser aucune trace de mon désarroi. Je nettoie le battant, puis la cuvette des toilettes, prenant des lingettes pour désinfecter. Un peu de désodorisant, et le tour est joué. Ce rituel me permet d’atténuer mes maux. Maintenant, il faut sortir de ce lieu. Je sais que j’ai les yeux rouges et les joues en feu. Je baisse la tête, vais me laver les mains et, discrètement, me passe de l’eau sur les lèvres. J’ai l’impression que mon état saute aux yeux de tous, mais aucune remarque ne surgit lorsque je me remets à table. Je reprends le cours de mon repas, l’esprit et l’estomac plus légers. Voilà, je vais pouvoir manger sereinement mon fromage et, surtout, déguster le dessert.
Arrivée à la maison, je suis dépitée, découragée, l’âme dans les chaussettes. Les premiers sanglots viennent mouiller mes joues. Je cours vers ma chambre, me jette sur mon lit et pleure toutes les larmes de mon cœur. Je ne suis plus qu’un zombi incapable d’exécuter autre chose que de rester là, sur ma couche, à contempler le plafond où quelques taches noires viennent me rappeler que je n’ai pas fait le ménage depuis des lustres.
La boulimie forcée est devenue mon quotidien depuis plusieurs mois ; depuis que quelque chose s’est cassé dans mon intimité. Je n’en connais pas encore complètement l’origine, même si quelques soupçons me viennent à l’esprit, notamment à la suite de cauchemars récurrents. Le ressort qui me permettait de vivre jusqu’à aujourd’hui, d’assumer mon rôle d’épouse attendrie et de mère attentive, s’est brisé d’un seul coup. Un soir, en rentrant du travail, je suis restée prostrée sur la chaise de la cuisine, « la tête dans le sac », ne pensant à rien. Mes enfants m’ont trouvée là, puis mon mari. Ils m’ont suggéré d’aller me reposer, que je devais être très fatiguée, que tout ceci allait passer. Tout ceci n’est pas passé, tout s’est aggravé : le manque d’appétit, d’élan vers mes filles et mes amis. Je n’ai plus envie de faire l’amour ; l’acte me dégoûte, même quand je me force à donner le change à mon mari. J’en suis arrivée à vomir en cachette tout de suite après la jouissance de mon homme. J’arrive encore à faire bonne figure au travail, à oublier mes angoisses, mais pour combien de temps ?
J’ai rendez-vous aujourd’hui au Centre Médical Psychologique. Ma nutritionniste m’a beaucoup aidée pour obtenir cet examen chez un spécialiste. Mon cas doit être grave. Elle a compris depuis longtemps que ma gloutonnerie n’était pas seulement passagère ; que les racines du mal étaient enfouies au plus profond de mon passé. Comme toutes les boulimiques, d’ailleurs. Surtout à trente-deux ans. J’attends beaucoup de cette rencontre, même si, au fond de moi, j’ai peur de tout ce qu’elle va faire remonter. Je l’appréhende d’autant plus que, quelques années auparavant, j’avais rencontré un professionnel au sein d’un centre spécialisé pour ces maux. Il n’avait pas pris en compte mon mal être. Je contrôlais déjà cette maladie afin de ne pas déraper dangereusement et pour mieux maîtriser ma vie. Ma mère était là, « bienveillante ». Le médecin n’avait pas posé beaucoup de questions. Maman avait répondu avant que je ne puisse dire quoi que ce soit, comme si elle avait souhaité cacher quelque chose. Jamais elle n’avait alerté le médecin sur mon enfance et/ou mon adolescence. Elle avait su encore une fois mettre en avant ses qualités maternelles pour noyer le poisson. Et comme d’habitude, ce spécialiste était tombé dans le panneau. Elle était là pour contrôler mes propos ; pour que je ne lâche « l’inentendable ». Encore un qui m’avait lâchement abandonnée ! Il avait sûrement cru que c’était un mal être d’ado et que cela passerait avec un bon entourage et un peu de temps. Toutefois, avais-je cet entourage ? Mais ma survie est à ce prix. De toute façon, c’est ça ou le suicide. Je me surprends à marcher plus vite, moi qui, jusque-là, me traînais lamentablement. Je n’ai rien avalé depuis mon dernier vomissement, mais ne ressens aucun désir de manger. La plaque dorée du praticien m’accueille comme le phare de mes nuits sans sommeil. J’appuie sur la sonnette, la porte s’ouvre dans un glissement feutré, j’entre dans la salle d’attente et m’assois. Je prends soudain conscience que mon destin est là, derrière cette porte.
Chapitre 2
C’est l’hiver, les

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents