Rue des colons
137 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

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Description

Ces histoires, racontées par un homme ordinaire qui ne se prend pas pour un héros, sont des récits de moments vécus pendant la guerre d'Algérie. Puissent ces histoires vraies faire sourire assez pour aider un peu les uns et les autres à faire le deuil de ce conflit absurde et leur permettre de bâtir un avenir commun fertile et heureux !

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 octobre 2010
Nombre de lectures 243
EAN13 9782296936188
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

RUE DES COLONS

Algérie : histoires vraies
d’une guerre peu ordinaire
Graveurs de mémoire


Dernières parutions

Jean-Pierre MILAN, Pilote dans l'aviation civile. Vol à voile et carrière, 2010.
Emile JALLEY, Un franc-comtois à Paris, Un berger du Jura devenu universitaire , 2010.
André HENNAERT, D'un combat à l'autre , 2010.
Pierre VINCHE, À la gauche du père , 2010,
Alain PIERRET, De la case africaine à la villa romaine. Un demi-siècle au service de l'État, 2010.
Vincent LESTREHAN, Un Breton dans la coloniale, les pleurs des filaos , 2010.
Hélène LEBOSSE-BOURREAU, Une femme et son défi , 2010.
Jacques DURIN, Nice la juive. Une ville française sous l'Occupation (1940-1942), 2010.
Charles CRETTIEN, Les voies de la diplomatie, 2010.
Mona LEVINSON-LEV AV ASSEUR, L'humanitaire en partage. Témoignages , 2010,
Daniel BARON, La vie douce-amère d’un enfant juif 2010.
M. A. Varténie BEDANIAN, Le chant des rencontres. Diasporama , 2010.
Anne-Cécile MAKOSSO-AKENDENGUE, Ceci n'est pas l'Afrique. Récit d'une Française au Gabon , 2010.
Micheline FALIGUERHO, Jean de Bedous. Un héros ordinaire , 2010.
Pierre LONGIN, Mon chemin de Compostelle. Entre réflexion, don et action , 2010.
Claude GAMBLIN, Un gamin ordinaire en Normandie (19401945), 2010.
Jean-Pierre COSTAGLIOLA, Le Souffle de l'Exil. Récit des années France, 2010.
Jacques FRANCK, Le sérieux et le futile après la guerre , 2009.
Henri-Paul ZICOLA, Les dix commandements d’un patron , 2010.
Albert DUCROCQ, Des Alpes à l’Uruguay. Un pont entre deux rives , 2010.
Claude ANTON


RUE DES COLONS

Algérie : histoires vraies
d’une guerre peu ordinaire


L’Harmattan
© L’Harmattan, 2010
5-7, rue de l’Ecole polytechnique; 75005 Paris

http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-12642-8
EAN : 9782296126428

Fabrication numérique : Socprest, 2012
Ouvrage numérisé avec le soutien du Centre National du Livre
INTRODUCTION



Mostaganem dans les années 1950


Je suis né au début des années mille neuf cent trente, à l’ouest de l’Algérie dans le département d’Oran, à Mostaganem. Cette ville côtière, paraît-il, tire son nom de son ancienne vocation : c’était le principal point d’exportation vers l’Hexagone des moutons des Hauts-Plateaux algériens. Car Mostaganem voudrait dire en arabe, à quelques déformations près, « Le Port des Moutons ». C’est un port en effet, mais un port original sur la côte algérienne, car il désigne du long bras de sa maigre jetée La Salamandre, village de pêcheurs et d’estivants, bâti à l’extrémité d’un petit cap, à l’ouest de la ville. A l’ouest : de sorte que le Port des Moutons ouvre sa passe aux vents dominants et aux tempêtes qui peuvent là-bas, je vous l’assure, être très violentes. Quand les marins pensaient que le temps allait tourner, ils hissaient leurs barques sur les cales sèches, et mettaient à l’abri autant qu’ils le pouvaient les chalutiers, mais lorsque le mauvais temps les surprenait, c’était la catastrophe : les vagues courtes mais rapides s’engouffraient avec toute leur énergie au fond de l’abri trompeur, bousculant les embarcations et les projetant les unes contre les autres jusqu’à ce qu’un certain nombre d’entre elles s’ouvrent comme des fruits mûrs et coulent, ruinant leurs propriétaires. C’est donc de ce port que s’embarquaient autrefois vers la métropole, pour se faire engraisser un peu avant d’être abattus, les moutons qui avaient survécu à la famine des Hauts-Plateaux et au long voyage pédestre qui les avait conduits jusqu’à ma ville natale. Je me souviens qu’étant enfant j’ai vu, sur les quais, des passerelles bordées de balustrades de planches sans claire-voie qui permettaient de faire passer les animaux de la terre ferme sur le cargo, sans qu’ils puissent se rendre compte qu’ils avançaient au dessus de l’eau.
Mais, direz-vous, qu’est-ce que ça peut faire que je sois né ici ou là ?
Eh bien, c’est que les histoires que je me propose de vous raconter se sont presque toutes passées en cet endroit. Et de plus, bien que j’aie un peu modifié les noms des personnages, toutes ces histoires sont vraies ! Enfin, disons pour être tout à fait honnête que, telles qu’elles apparaissent dans ma mémoire, je les tiens pour vraies. Je vais donc les écrire, car de plus je les trouve assez drôles, bien qu’elles appartiennent à un passé plutôt dramatique. Que ceux qui ont souffert à cette époque me pardonnent ! Après tout, un demi-siècle est passé depuis ce temps-là, n’est-ce pas !
1 - LE COMMENCEMENT
Revenons à nos moutons. Eh bien eux, au moins, ils voyageaient ! Tandis que moi, jusqu’à l’âge de dix-sept ans, j’ai vécu dans cette petite ville, n’effectuant d’autre odyssée que, de temps à autre, un petit voyage de quelques dizaines de kilomètres.
Et puis, deux ans après la fin de la deuxième guerre mondiale, je suis parti vivre avec mes parents à mille kilomètres de là, à Casablanca.
Alors qu’en France, et même dans les départements d’Algérie, nous étions encore en période de vaches maigres, dans la capitale économique du Maroc, ville moderne sillonnée de magnifiques voitures américaines, on pouvait trouver tous les produits alimentaires et manufacturés que l’on voulait. Cela d’ailleurs avait été le cas pendant toutes les années de la guerre, et je ne me suis jamais expliqué l’opulence de ce pays placé sous le protectorat d’une France battue, asservie et ruinée. Mais cela n’est jamais que l’un des nombreux paradoxes qui parsèment ces histoires que j’ai vécues.
J’ai terminé mes études secondaires au lycée Lyautey et, après avoir tenté sans succès un cursus d’études supérieures, j’ai réduit mes ambitions et suivi, pendant l’année scolaire 1952-1953, une formation d’instituteurs à l’école normale d’Aïn-Sebaa, Casablanca. C’était la première promotion de l’établissement et je fus étonné de constater qu’elle était à quatre-vingt-dix pour cent composée de métropolitains qui avaient été recrutés pour enseigner à des jeunes marocains. Vis-à-vis de mes obligations militaires, j’étais en sursis, un sursis que j’ai laissé se prolonger aussi longtemps que j’ai pu, jusqu’à l’âge de vingt-cinq ans.
Au Maroc, les « événements » avaient débuté en 1952. Je veux parler de ces événements que tout le monde au début s’accorde à appeler « terrorisme », mais qu’on finit toujours par nommer quelque temps plus tard « guerre de libération ». Ainsi, en 1954, pour faire quelques courses alimentaires, ma femme et moi sommes passés devant une boucherie près de laquelle une heure plus tard explosait un engin tuant, je crois, dix-sept personnes. Ainsi, à la rentrée scolaire suivante, comme j’exprimais mon étonnement de ne pas voir deux sœurs à qui j’avais fait la classe un an plus tôt, un collègue m’apprit qu’elles avaient été égorgées avec leur mère pendant l’été à Oued-Zem.
Je me reprocherai toujours d’avoir ressenti à ces occasions beaucoup moins de chagrin, de peur rétrospective, ou même de colère, qu’une condamnable exaltation. Car c’est ce sentiment qui nous embrase quand nous sommes plongés dans ces péripéties peu ordinaires qui nous donnent l’impression de vivre enfin des aventures exceptionnelles. Je crois que l’une des causes de l’efficacité du terrorisme, au moins à ses débuts, est bien cette agréable disposition d’esprit qui s’empare des populations concernées et rend d’une certaine manière les auteurs de ces actes abjectes assez sympathiques.
A cette époque, l’histoire de l’Indochine française se terminait dans la honte, l’affaire tunisienne s’orientait vers une solution tout de même un peu plus digne, et la guerre d’Algérie éclatait à l’est, dans la région de Sétif, là où neuf ans plus tôt, des assassinats avaient été réprimés par l’armée française d’une manière assez sanguinaire pour que le calme ait pu régner pendant presque une décennie.
A la fin de l’année scolaire 1955-1956, l’Algérie était plongée dans la guerre depuis près de deux ans, et le Maroc depuis quatre. J’étais alors instituteur à l’école Victor Hugo dans la ville d’Oujda. C’était une école européenne. Il faut savoir qu’au Maroc, l’enseignement primaire était divisé en enseignement européen, enseignement musulman et enseignement israélite. Et surtout n’allez pas imaginer que c’était de la ségrégation, de l’apartheid, du racisme ou de je ne sais quoi ! L

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