Trois passeports pour un seul homme
204 pages
Français

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Trois passeports pour un seul homme , livre ebook

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204 pages
Français

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Description

L'auteur est un descendant des Juifs expulsés d'Espagne réfugiés à Tétouan au Maroc. En 1862, l'ouverture d'une école par l'Alliance Israélite Universelle permit, notamment, aux jeunes d'émigrer. L'auteur est né à Casablanca et a fait ses études médicales en France. Avec son épouse, une Jurassienne laïque d'origine catholique, ils décidèrent de s'installer au Maroc, où il participa intensément à la vie médicale du pays. La guerre des six jours mit fin à cette phase fructueuse de son existence...

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 octobre 2011
Nombre de lectures 77
EAN13 9782296471283
Langue Français
Poids de l'ouvrage 16 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Trois passeports pour un seul homme
Graveurs de mémoire


Vincent JEANTET, Je suis mort un mardi , 2011.
Pierre PELOU, L’arbre et le paysage. L’itinéraire d’un postier rouergat (1907-1981) , 2011.
François DENIS et Michèle DENIS-DELCEY, Les Araignées Rouges, Un agronome en Ethiopie (1965-1975) , 2011.
Djalil et Marie HAKEM, Le Livre de Djalil , 2011.
Chantai MEYER, La Chrétienne en terre d’Islam , 2011.
Danielle BARCELO-GUEZ, Racines tunisiennes , 2011.
Paul SECHTER, En 1936 j’avais quinze ans , 2011.
Roland BAUCHOT, Mémoires d’un biologiste. De la rue des Ecoles à la rue d’Ulm , 2011.
Eric de ROSNY, L’Afrique, sur le vif. Récits et péripéties , 2011.
Eliane LIRAUD, L’aventure guinéenne , 2011.
Louis GIVELET, L’Écolo, le pollueur et le paysan , 2011.
Yves JEGOUZO, Madeleine dite Betty, déportée résistante à Auschwitz-Birkenau , 2011.
Lucien LEYSSIEUX, Parcours d’un Français libre ou le récit d’un sauvageon des montagnes du Dauphiné, combattant sur le front tunisien avec les Forces françaises libres en 1943 , 2011.
Sylvie TEPER, Un autre monde , 2011.
Nathalie MASSOU FONTENEL, Abdenour SI HADJ MOHAND, Tinfouchy (Algérie 1958-1960), Lucien Fontenel, un Français torturé par les Français , 2011.
André ROBINET, Larzac-Millau-Grands Causses, Elevage et partage des savoirs , 2011.
Dmoh BACHA, Palestro Lakhdaria, Réflexions sur des souvenirs d’enfance pendant la guerre d’Algérie , 2011.
Robert PINAUD, Dans la gueule du loup , 2011.
Lina BATAMI, Algérie, mon enfance v(i)olée , 2011.
Jean-Paul FOSSET, Histoire d’amour, histoire de guerres ordinaires. 1939 – 1945… Évian 1962 , 2011.
Oruno D. LARA, La magie du politique. Mes années de proscrit , 2011.
Jean Michel HALLEZ, 40 boulevard Haussmann , 2011.
Armand Benacerraf


Trois passeports pour un seul homme

Itinéraire d’un cardiologue


L’H ARMATTAN
© L’H ARMATTAN , 2011
5-7, rue de l’École-Polytechnique ; 75005 Paris

http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-56234-9
EAN : 9782296562349

Fabrication numérique : Actissia Services, 2012
À ma chère femme Annette… En cinquante ans de vie commune, elle a partagé les événements survenus après notre mariage ici relatés ; elle a suivi pas à pas leur narration et j’ai pu ainsi bénéficier de ses judicieux conseils.
À nos enfants Laurent, Marc et Sophie.
À nos petits-enfants Victor, Léa, Simon, Laetitia, Chloé, Clément, Nathan.
Chapitre I L ES RACINES
1932 fut l’année où le Portugal devint une dictature d’extrême droite, avec la nomination de Salazar au poste de Premier ministre, qu’Hermann Goering prit la tête du Parlement allemand et que Dollfuss fut nommé Chancelier d’Autriche ; la même année, sur le Nouveau Continent, Franklin Roosevelt était élu Président des États-Unis.
Plus modestement, ce fut en 1932 que ma mère me mit au monde, heureuse de donner, après trois filles, un héritier mâle à son époux.
Parmi la multiplicité d’événements que l’histoire nous propose, chacun, selon sa culture, son histoire personnelle, ses pôles d’intérêt, en privilégiera l’un ou l’autre ; ainsi à 1492, « l’Année admirable », selon le titre de l’ouvrage de B. Vincent {1} , les plus nombreux associeront probablement la découverte de l’Amérique et, s’ils sont imaginatifs, ils se représenteront la Pinta, la Nina et la Santa Maria quittant le port de Palos à la recherche de la route des Indes par l’Ouest.
Pour moi, 1492 évoque avant tout l’expulsion des Juifs d’Espagne, et ce que je vois, ce sont les longues processions de communautés entières qui, sous la direction de leurs Rabbins, portant les Tables de la Loi, se dirigent dans une atmosphère de grande ferveur religieuse vers le lieu de leur nouvel exil.
Je suis l’un des descendants des Juifs expulsés d’Espagne. Quand l’Édit infamant {2} de Don Ferdinand et Doña Isabelle ordonna « que tous les Juifs et Juives de nos royaumes les quittent et ne reviennent plus jamais dans aucun d’eux, ni dans aucune de nos terres », plusieurs milliers d’entre eux, sans que l’on puisse donner un chiffre précis, se réfugièrent, après de nombreuses pérégrinations contrastant avec la proximité des lieux, en Afrique du Nord et en particulier au Maroc. Ils s’éparpillèrent dans différentes villes du royaume où ils se joignirent à des coreligionnaires installés là depuis plus ou moins longtemps. Entre anciens résidents et nouveaux venus, la langue, la liturgie et même les lois juridiques différaient ; de nombreux conflits éclatèrent mais progressivement l’amalgame s’accomplit : l’arabe devint la langue vernaculaire de la communauté à coté de l’hébreu, langue liturgique. Par contre, la législation des expulsés s’imposa à l’ensemble.
Mes ancêtres s’installèrent dans le nord du Pays, à Tétouan. L’histoire de cette ville est singulière ; apparue en 710 près du site de l’ancienne ville romaine de Tamuda, la ville disparut entre le XIV e et le XV e siècle, détruite, a-t-on dit, par les Espagnols, en représailles après des actes de piratage. L’expulsion des Arabes de Grenade, épisode ultime de la Reconquista qui constitue le troisième évènement mémorable de 1492, va la faire renaitre. Elle sera repeuplée par une partie des populations musulmanes et juives rejetées de la péninsule. « Elle devra presque tout, en ses nouvelles origines et ses premières décennies au paradis andalou perdu. Elle sera la fille de Grenade, sa sœur nonchalante, et par ses héritages réels ou mythiques, la petite Jérusalem, la sœur de Fès, et désormais le cœur des forces et des nostalgies des Morisques, des Mudéjares, des Juifs sépharades, des Andalous-marocains. » {3}
Les Juifs qui s’installèrent n’eurent à composer avec aucune culture préexistante, ils transplantèrent leur vie d’antan, réussissant à maintenir leur spécificité judéo-hispanique. Fortement attachés à leurs us et coutumes, ils continuèrent à s’exprimer dans un castillan du XV e siècle mâtiné de nombreuses expressions empruntées à l’arabe et à l’hébreu ; ainsi naquit un judéo-espagnol vernaculaire dénommé Haketiya {4} , parfaitement compréhensible pour un hispanisant. La Haketiya a continué à être utilisée au 20 e siècle. Les Juifs tétouanais parlaient peu ou pas l’arabe, c’est exclusivement en judéo-espagnol que j’ai entendu s’exprimer mes quatre grands-parents ; ma mère l’employait quand elle parlait avec ses sœurs, et je n’hésite pas à utiliser certaines expressions affectueuses quand je veux être particulièrement tendre avec mes petits-enfants ou mes enfants. Remarquable pérennité d’une langue qui s’est maintenue vivace près de cinq siècles après l’expulsion. Me vient à l’esprit la réponse d’Hannah Arendt à la question sur ce qui reste de l’amour judéo-allemand : « qu’est ce qui reste ? » demande-t-elle, pour répondre aussitôt « reste la langue » {5} .
Au XVIII e siècle, les Juifs de Tétouan représentaient entre 10 et 15 % de la population qui était de 30 000 habitants. Ils étaient des citoyens de seconde zone, des dhimmis , terme réservé en terre d’Islam aux « gens du livre », Juifs et Chrétiens, qui y résidaient. Leur statut, qui trouvait sa source dans le Coran, précisait leur situation juridique. Ils encouraient la peine de mort s’ils raillaient le Prophète ou la religion musulmane, s’ils avaient des rapports sexuels avec une Musulmane. La loi les contraignait à porter des vêtements distinctifs ; ils n’avaient pas le droit d’édifier des bâtiments qui dépasseraient ceux des musulmans ou de monter à cheval. Confinés dans le mellah , ils pratiquaient pour la plupart des professions subalternes ou interdites aux musulmans {6} . Néanmoins, une minorité participait activement à la vie économique du pays, en particulier par le négoce international {7} . Les dhimmis étaient astreints à payer une capitation, la djizya , mais en contrepartie ils bénéficiaient de la protection du souverain et d’une totale autonomie religieuse et judiciaire dans les relations intra-communautaire, soumises aux seuls tribunaux rabbiniques.
À partir de 1770, le sultan décida d’expulser les consuls européens de Tétouan. Ceux-ci s’installèrent à Tanger et le déclin de Tétouan s’amorça {8} . L’insécurité s’accrut et, pour les Juifs, la terreur s’installa sous le court règne de Moulay Yazid, à l’origine du massacre de 1790 {9} .
Au XIX e siècle, la situation économique de la communauté se dégrada encore et de cette grande misère va naître un désir d’émigrat

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