Jean Racine, l enfant terrible de Port-Royal
224 pages
Français

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Jean Racine, l'enfant terrible de Port-Royal , livre ebook

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Description

Débiteur moral insolvable de l'abbaye de Port-Royal à qui il devait d'être resté en vie, l'"orphelin Racine" a trouvé dans un théâtre longtemps résolument frondeur chez lui, l'"issue corporelle pour son âme" qu'il cherchait avidement. En osant défier l'intransigeance castratrice d'une mère adoptive pervertie par la névrose janséniste, il a en tout cas réussi, au moins dans l'écriture, à sortir de l'infernal "pas de place pour deux" devant lequel, d'avoir dû "haïr avec fureur" pour ne pas avoir pu "aimer avec passion", bien des fils qu'il a imaginés ont fini par s'incliner. Sans aucun doute possible, le "Je meurs si je vous perds, mais je meurs si j'attends" du vers 972 d'"Andromaque", c'est d'abord à la vie elle-même que cet "orphelin" n'a cessé de l'adresser. "Le vêtement d'existence qui avait été préparé pour lui par Port-Royal était trop petit par rapport à sa vraie taille" : c'est en creusant les rapports ambigus de Racine avec l'institution de Port-Royal qui l'a formé et aurait voulu le convertir intégralement au jansénisme que Jean van der Hoeden tire cette étude soignée de l'écrivain – l'homme et l'œuvre inextricablement liés. Faisant la part belle à la psychologie, ce double portrait met en exergue les notions de liberté et de destin si décisives chez "l'enfant terrible", si chères au dramaturge qu'il devint.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 26 décembre 2013
Nombre de lectures 89
EAN13 9782342017441
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0079€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait












Jean Racine,
l’enfant terrible de Port-Royal


Du même auteur



Samuel Beckett et la question de Dieu,
Cerf, Paris, 1997
Jean Racine ou le doit de vivre,
Cerf, Paris, 2002
Le temps sans Clémence,
Éole, La Roche-en-Ardenne, 2005
Diable et diabolisation – Du Moyen Âge à nos jours,
Racine, Bruxelles, 2011
(en collaboration avec Christian Thys)
Que son sang soit sur nous et nos enfants
Publibook, 2013
(en collaboration avec Christian Thys)Jean van der Hoeden










Jean Racine,
l’enfant terrible de Port-Royal




















Publibook Retrouvez notre catalogue sur le site des Éditions Publibook :




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Ce texte publié par les Éditions Publibook est protégé par les
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IDDN.FR.010.0119153.000.R.P.2013.030.31500




Cet ouvrage a fait l’objet d’une première publication aux Éditions Publibook en 2013


Songez-vous que sans moi tout vous devient contraire,
Que c’est à moi surtout qu’il importe de plaire ?
Songez-vous que je tiens les portes du palais,
Que je puis vous l’ouvrir ou fermer pour jamais,
Que j’ai sur votre vie un empire suprême,
Que vous ne respirez qu’autant que je vous aime ?
Et sans ce même amour qu’offensent vos refus,
Songez-vous, en un mot, que vous ne seriez plus ?
Racine, Bajazet, v. 505-512.


Introduction



En se lançant dans la peinture des passions dont l’âme
humaine peut s’embraser jusqu’à s’en trouver anéantie,
Racine n’aurait-il vraiment rien fait d’autre que s’aligner
1sur une mode de son époque , cela bien entendu avec tout
le talent qui était le sien ? De toutes les images qu’il a
laissées de lui, ne faudrait-il privilégier que celle, sinon d’un
2« sombre refoulé », du moins d’un « pénitent contrit »,
puisque, au terme de sa vie, il n’aurait finalement «
demandé » pour son œuvre que « des prières, et non pas de
3vains éloges » ?

À lire les Mémoires sur la vie de Jean Racine, écrits
d’un fils s’y déclarant scrupuleusement fidèle à la
mémoire de son père, on pourrait être tenté de répondre par
l’affirmative aux deux questions posées ci-dessus. Selon
eux en tout cas, non seulement Racine n’aurait écrit que
pour se conformer au goût de son siècle, mais encore,
« regardant l’amour comme plus dangereux encore pour
4lui que pour un autre », il n’aurait « jamais connu par

1 « Un jeune auteur qui cherche à plaire à la cour d’un jeune roi où
l’on respire l’amour et la galanterie, fait respirer le même air à ses
héros et héroïnes » (Louis Racine, « Mémoires sur la vie de Jean
Racine », Racine – Œuvres complètes, Paris, Éd. du Seuil, 1962, p.
33).
2 C’est en effet en ces termes qu’on a parfois pu parler de Racine. Voir
ici Verdun L. Saulnier, La littérature du siècle classique, Paris,
Presses Universitaires de France, 1943, coll. « Que sais-je ? », n° 95,
p. 100.
3 Louis Racine, op. cit., p. 66.
4 Ibid., p. 33.
9 expérience les troubles et les transports qu’il a si bien
dé5peints ».

L’ennui avec les Mémoires évoqués, c’est que le
portrait de Racine qu’on y trouve escamote un élément
essentiel : parfois obsédante, la première énigme sur
laquelle s’interrogent la plupart des fils raciniens est celle
qui entoure la vie amoureuse de leur père, vie pour le
moins enveloppée d’un mystère qui les trouble. C’est cette
énigme qui inquiète l’Hippolyte de Phèdre déplorant de
« n’avoir pu ravir à la mémoire l’indigne moitié de (la vie
6de Thésée) », c’est elle entre autres aussi qui préoccupe
Louis Racine lorsque, dans le cours du récit de la vie de
son père, il confesse, sur le ton de la gêne : « […] Quoique
certain de leur fausseté, c’est à regret que je parle de
cho7ses dont je voudrais que la mémoire fût effacée . » Bien
mal inspiré eût été ici celui qui, croyant peut-être ne tenir
là que des propos tout au plus un peu légers, aurait suggéré
au second, comme le fait le personnage de Théramène
avec le premier, que l’« absence » d’un père pourrait
ca8cher… « de nouvelles amours » !

Plus que poser celle du nombre d’amours que Racine
aurait pu avoir dans sa vie et que le jansénisme n’aurait
pas manqué de sanctionner comme autant de péchés, poser
la question de la vie amoureuse de cet écrivain est d’abord
soulever celle, bien plus fondamentale, de l’amour qu’il
aurait pu avoir de la vie, une faute que le même
jansénisme aurait condamnée comme le péché par
excellence. Or c’est jusque sur cet amour-là que les études

5 Louis Racine, op. cit., p. 34.
6 Phèdre, v. 93-94. – On notera que « indigne moitié » peut être
remplacé par « partie honteuse », avec ce que, dans une certaine
tradition, « parties honteuses » a longtemps désigné du sexe de
l’homme.
7 Louis Racine, op. cit., p. 34.
8 Phèdre, v. 19-20.
10 bien-pensantes se sont employées à jeter un voile pudique
au nom du sacro-saint principe de bienséance. Difficile
dès lors avec elles d’imaginer que celui qui restera le plus
terrible des enfants de Port-Royal ait pu aimer la vie dans
l’exacte proportion où la vertu selon la doctrine de
Jansénius attendait de lui qu’il la déteste et la fuie, et que,
cela sur l’arrière-fond sans doute d’une grande fragilité
personnelle, il ait pu la vivre dans tout le bouillonnement
qu’elle doit aux forces antagonistes qui la tirent à hue et à
dia en s’y défiant et s’y entrechoquant.

À n’en pas douter, il y a eu dans la décision qu’a prise
Racine en 1677 de renoncer à poursuivre dans le genre de
théâtre qu’il pratiquait alors avec succès, l’équivalent du
retour d’un enfant prodigue, ce que tient d’ailleurs à
souligner le texte suivant :
« J’arrive enfin à l’heureux moment où les grands sentiments
de religion dont mon père avait été rempli dans son enfance, et
qui avaient été longtemps comme assoupis dans son cœur, sans
s’y éteindre, se réveillèrent tout à coup. Il avoua que les auteurs
des pièces de théâtre étaient des empoisonneurs publics ; et il
reconnut qu’il était peut-être le plus dangereux de ces
empoisonneurs. Il résolut non seulement de ne plus faire de
tragédies, et même de ne plus faire de vers ; il résolut encore de
9réparer ceux qu’il avait faits par une rigoureuse pénitence . »
Cependant, ce qui a été son désir fou de vivre invite au
moins à s’interroger pour savoir jusqu’où ce n’est pas
Port-Royal elle-même, dont il est manifeste qu’elle joua
10très tôt dans sa vie le rôle d’une mère adoptive , qui l’a
amené un jour à ne plus envisager ce qui avait été le
déroulement de son exis

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