Mort d un Nietzschéen
261 pages
Français

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Mort d'un Nietzschéen , livre ebook

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261 pages
Français

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Description

Peter Erikson, fonctionnaire fonctionnant, tient le journal de bord de ses pérégrinations philosophiques. Disciple de Nietzsche, il croit dans sa volonté de puissance...qui lui permettrait de naviguer impunèment entre le désir, la folie et le réel.
Le roman que voici tente de comprendre les étranges circonvolutions du cerveau humain, lorsque la quête du pouvoir l'obsède.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 02 avril 2010
Nombre de lectures 251
EAN13 9782296250833
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,1000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Mort d’un Nietzschéen
© L’Harmattan, 2010
5 - 7, rue de l’Ecole polytechnique, 75005 Paris

http:// www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-11348-0
EAN : 9782296113480

Fabrication numérique : Socprest, 2012
Ouvrage numérisé avec le soutien du Centre National du Livre
J acques S teiwer


Mort d’un Nietzschéen


roman


L’Harmattan
Ouvrages du même auteur :

Una Scuola per l’Europa, en collaboration avec Enrico Maria Tacchi, éd. Franco Angeli, 1998

De la Démocratie en Europe, L’Harmattan, 2008
Il serait beaucoup plus facile et délassant d’écrire, de continuer à écrire un roman, l’épisode suivant d’un roman, parce qu’on pourrait omettre ou rajouter sans problème, il dit ceci, elle fait cela, ils vont là, elle pense ceci, il répond cela, ils ne vont pas là, le ciel est gris ou pas gris, il fait vent ou soleil, à souhait, à volonté, tout compte et rien n’importe, l’aventure capote, la vie continue, la liaison se rompt ou se noue, le drame se calme ou éclate, la catastrophe reste en suspens, il dira ceci, elle dira cela, les nuages viennent, la nuit s’en va, et Cécile part en voyage quand je dis que Cécile part en voyage, pour six mois quand je dis pour six mois, aujourd’hui encore je n’ai pas écrit de roman.


18 02 90

Lambert Schlechter : Le Silence Inutile

Editions Phi 1991
V oici ce que Peter Erikson écrivait ce jour-là dans ce qu’il appelait, à travers son jargon franco-anglais, le « log book ». Certaines semaines, il rédigeait des notes quasi quotidiennes, puis il lui arrivait pendant des mois de ne plus rien produire. C’étaient les semaines où il lisait, affalé dans son lit, surtout en hiver, quand les journées étaient courtes et que la nuit tombait à quatre heures et demie…

Ou alors c’étaient les semaines où il s’activait en ville, traînant sa quête de quartier en quartier. En général, il élaborait peu sa pensée, il préférait la stabiliser à travers des expériences qu’il appelait « vitales », autant parce qu’elles tenaient du domaine de la vie que parce qu’elles lui permettaient de se tenir en vie.

Pour cerner le personnage, nous citerons quelques extraits de ses notes. Ce sont des méditations parfois décousues, parfois répétitives, mais nous vous les livrerons telles quelles, pour votre appréciation.

Vendredi (appelé) saint 2006 :

En finir avec les discours lénifiants : Tout est en lui. Toute philosophie, depuis la plus haute antiquité, tourne autour de lui… au sens passif et actif… autour du pouvoir, parce quelle lui est attachée, parce quelle en émane et se façonne sur lui, parce qu’elle veut le conquérir ou le flatter, l’analyser pour mieux le manier ou le transformer. Et le pouvoir tourne autour d’elle, parce qu’il en a besoin pour se justifier, parce qu’il veut la séduire et séduire grâce à elle, tenir les hommes en laisse, les hiérarchiser, construire ses structures de domination, graver ses lignes de force dans leur conscient et dans leur inconscient. Il est l’expression première et dernière de « la volonté de puissance », roc ultime sur lequel se construit toute action, toute soi-disant éthique. Le pouvoir suppose l’inégalité, la dialectique des dominateurs et des dominés, de ceux qui savent contre ceux qui ne savent pas, de ceux qui travaillent de leur tête contre ceux qui travaillent de leurs mains, des hommes et des femmes, de races contre d’autres races, d’ethnies contre d’autres ethnies.

Le vingtième siècle s’est révélé comme une terrible ironie de l’Histoire : traversé de part en part par un grand discours sur l’égalité, il n’a cessé de créer les plus grandes inégalités de tous les temps. Loin de rapprocher les hommes sur le plan planétaire, il a détruit les sociétés égalitaires traditionnelles – tristes tropiques – et il a, dans deux guerres mondiales, tué des centaines de millions d’êtres humains pour en arriver à une globalisation de la rivalité qui enrichit les plus riches et appauvrit les plus pauvres. Un faux discours sur le pouvoir purement racial s’est opposé à un faux discours sur l’égalité, et les deux n’ont engendré qu’hypocrisie et camps de concentration : Guantanamo relaie Vorkouta qui tend la main à Buchenwald.

Le « pouvoir », lui, s’en est plutôt bien tiré, indestructible, parce que lié à la nature même de la communication humaine.

« Hiérarchie » du grec « hieros », sacré : baissez le regard devant Zeus-Deus sanctifié au fond du temple, dans la pénombre inaccessible au non-initié, où le prêtre puise son autorité de vaticinateur. Depuis la nuit des temps, son discours fait partie intégrante des structures de domination. Il joue sur le registre de l’angoisse existentielle, d’un côté, sur celui de la peur réelle de l’inconnu et de l’incertitude devant l’avenir, de l’autre. Ce sont les sources sempiternelles du carburant de la foi : le messie, le rédempteur, la vie éternelle, le rééquilibrage des injustices après la mort, la consolation des affligés. Sur cette ligne, toutes les églises, toutes les mosquées, tous les temples ont toujours été corrects dans leur approche. Difficile de se tromper sur une structure aussi fondamentale. Mais sur une autre ils ne se sont pas non plus trompés : jamais aucune religion ne s’est laissé leurrer dans le discours de l’égalitarisme. Il fallait des « hierous archès », des pyramides de pouvoir.

Cela aurait-il à voir avec l’évolution de notre cerveau ? Du passé animal, il nous reste des pulsions. Peu importe leur nombre et leur classification : elles sont là, tapées au fond du bulbe rachidien, quelque part. Heureusement d’ailleurs, car sans elles nous n’aurions plus ni agressivité ni sexualité. L’espèce aurait disparu depuis longtemps. Mais nous n’avons plus d’instincts, ces schémas de comportement automatisés, qui fonctionnent si bien et si simplement chez l’animal. Le cerveau évolué a besoin de structures infiniment plus complexes.

Et pour qu’elles « deviennent » structures, fonctions intégrées, il faut un système de hiérarchisation. Mais comme celui-ci n’est jamais fermé, jamais achevé ni immuable, toujours en évolution et à réinventer, il garde son immense ouverture à l’angoisse. Ce n’est pas la mort qui provoque l’angoisse comme mélodie de fond de l’existence-, mais l’ouverture à la liberté.

Peter Erikson a achevé son doctorat en philosophie à l’Université d’Uppsala en 1986, année de Tchernobyl. Outre l’anglais, qui lui est familier depuis l’école primaire, il parle le français presque comme sa langue maternelle, avec la mélodie chantante des voyelles propre au suédois. Cela donne à son débit un charme exotique. Quand il posa sa candidature pour un poste d’administrateur au Parlement européen, après l’accession de son pays à l’Union, qu’il saluait et soutenait de toutes ses forces, il l’obtint à la première tentative.

Luxembourg ne lui parut pas au départ une bonne destination pour s’expatrier, lui qui avait vécu presque toute sa vie d’adulte à Stockholm, qu’il considérait comme une sorte de métropole de la liberté. C’est la ville où, soi-disant, les femmes ont pris le pouvoir, et le maintiennent avec dextérité. Tant mieux pour elles, disait-il, lui-même n’ayant aucune velléité politique. Aussi s’est-il toujours mû à l’écart des partis, bien que nombre de ses amis lui conseillassent de s’« engager » pour « faire carrière ». Il estime que son pouvoir à lui se distille dans la vaste sphère qui lie la politique au sexe, dans le macrocosme des rencontres contingentes. A travers l’histoire mondiale, il aime côtoyer quelques figures qu’il considère comme marquantes. On ne peut pas dire qu’il les admire, car il récuse ce mot qui implique, à son avis, déférence et adulation. Il les estime exemplaires, parce qu’ingénues dans leur quête sauvage du pouvoir : César, Attila, Borgia, Sade, Raspoutine, Mao parmi d’autres…

Du jour de Pâques date la note qui suit. Nous la citons dans son entièreté, malgré sa texture un peu filandreuse, pour mieux entrer dans les méandres du c

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