FIP et moi
106 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

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Description

Vous êtes dans votre voiture coincé dans un embouteillage lorsqu'une voix féminine surgie de l'autoradio vous murmure à l'oreille comment vous en sortir et ça marche. Vous voulez qu'elle vous parle encore, mais elle s'est éclipsée en vous laissant des musiques qui s'enchaînent. Vous êtes à la maison, vous écoutez des infos brèves, des chansons, des musiques de films, des musiques du monde et la voix féminine qui veille sur vous. Vous êtes accro à FIP. Une déclaration d'"humour" à lire avec les oreilles.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 janvier 2014
Nombre de lectures 5
EAN13 9782336334998
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0500€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
4e de couverture
Titre
Copyright























© L’HARMATTAN, 2014 5-7, rue de l’École-Polytechnique ; 75005 Paris
http://www.harmattan.fr diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan1@wanadoo.fr
EAN Epub : 978-2-336-68509-0
Dédicace


« À toutes les voix qui m’ont parlé sur FIP »
Jean Larriaga est un touche-à-tout revendiqué.
Né à Paris, il mène une carrière d’auteur et de réalisateur au cinéma et à la télévision.
Entre autres films : Le Rabat-Joie, La part des Lions , lui ont offert de diriger de prestigieux interprètes : Charles Aznavour, Robert Hossein, Charles Denner, Claude Piéplu, Jacques Villeret, Leslie Caron…
Au théâtre, il est l’auteur d’une douzaine de pièces parmi lesquelles : L’Extra, Voisinage, Amour et Gymnopédies…
Il a également écrit des romans : Le fils de la Maison…
Pour la Radio, il a écrit plus de soixante-dix pièces et fictions diffusées sur France Inter, France Culture, France Bleu…
Président du répertoire Radio à la SACD.
71
Mon Austin 1 000 m’attend Porte de Clichy. Une Austin crème avec le toit noir.
Lundi, je l’ai vue dans la cage de plexiglas en train d’être repeinte après avoir été recarrossée. Les effluves de minium empestaient et me prenaient la tête et la gorge mais c’était pour la toilette de ma première voiture alors j’ai dit : ça sent bon…
– Elle sera prête vendredi m’a annoncé Alain, l’aîné des frères Lebranchu, Carrosserie et Peinture. Ils ne sont pas concessionnaires Austin pourtant il y a régulièrement une Austin accidentée qui atterrit chez eux et en ressort comme neuve, proposée à la vente.
– « Il » aura qu’à passer après déjeuner.
– Oui. Bon. D’accord.
– Elle a pas roulé, elle a que 1 200 kilomètres le gars s’est planté avec au bout de huit jours, il veut plus en entendre parler, il vaut plus conduire… ( Un temps )… « Il » fait une affaire…
J’ai vérifié à l’Argus, une Austin 1 000 de 1970, c’est exact, à ce prix-là, une affaire, l’autre affaire est que je dispose de la somme, un beau chèque tombé à point nommé pour un scénario sur les manouches. « Invendable »…
Lundi encore : Il veut la radio ? Je peux lui installer un blopounk. Un quoi ? Un Blaupunkt allemand mais faut me le dire tout de suite. OK. Vas-y.
Alain et Claude me disent « il » et je leur dis « tu ». Exemple : – Alors ça y est, « il » la veut son Austin ? Une façon à eux ; ils ont des façons de parler attrapées autour de la Porte de Clichy à moins que ce ne soit chez eux au fond du garage. Fait main. Autre exemple : – T’inquiè-quiète donc pas dit Alain à certains dont je ne suis pas, qu’il tutoie. Mais il ne rit jamais. S’il est d’humeur rieuse, il vous dira très sérieusement : Alors ! Il est content ?
J’ai déjeuné en m’y voyant.
Je comptais m’y rendre en métro et de là à pied et puis Jacques un copain d’enfance qui en est à sa deuxième Austin chez les Lebranchu m’y emmène. Il se réjouit comme si c’était pour lui. « Je l’ai vue ce matin sur le pont ta Mini 1 000, Claude la graissait, elle est belle ». Lui il y va sans arrêt, pour un feu arrière, un poc invisible, rien, il y va… C’est Jacques qui nous a entremis parce qu’il aime les Austin autant que les Lebranchu, il boit des demis au zinc avec eux et lui il a droit à t’inquiè-quiète donc pas.
On roule. Il y va les yeux fermés, alors que passé le périphérique, ça devient tout de suite la banlieue insaisissable, amazonienne. Il prend ses raccourcis qui selon moi rallongent, évite un feu, vire et tourne, attrape la rue du Docteur je ne sais qui et comme un Mystère de Clichy, débouche à l’entrée de l’impasse Bonet qui forme un coude. Et là, après l’angle droit, tout au fond, je la vois qui n’attend que moi à la porte du garage.
Alain est fier de me la montrer, Claude est dans son dos et puis Jacques est dans leur dos encore plus fier… Moi pour l’extérieur je suis convaincu, j’ai hâte de monter dedans. J’adresse un compliment sur la peinture laquée du toit, un vrai miroir… « Il » est content ? Réagit Alain. On monte. Alain monte comme un garagiste – carrossier c'est-à-dire qu’il entre. Il désigne l’essentiel du tableau de bord sans me traiter comme un novice.
– C’est fou ce qu’on y voit, je lui dis, assis au volant, comme dans un mirador. – Oui, c’est chez Austin… ( Un temps …) – Pour les freins ils sont refaits, les plaquettes neuves, « il » appuiera pas beaucoup. « Il » sait où est la marche arrière ? Elle est là. Voilà les clefs. C’est fini. Alain n’est jamais bavard, il me donne envie de faire parler tous mes personnages comme lui. Au compte-goutte. Je réalise : Ah ben j’ai la radio ! Alain a le Blaupunkt juste au-dessus des genoux, là où son frère l’a fixé. – Il verra, il s’emmerdera moins, avec.
On passe dans son bureau pendant que Jacques reste dehors à comparer son Austin avec la mienne, à deux doigts de me l’échanger… Méticuleux, Alain encaisse mon chèque rallongé de la radio, me fournit la carte grise avec le certificat de non-gage et puis concernant l’assurance : « Il » sera prudent hein mon p’tit, l’Austin, ça bombe… ».
J’enfonce la clef de contact. Un moment dans une vie… Vroum. J’ai peur de caler devant eux… Ils me regardent partir les bras ballants, chose rare. Quant à Jacques il reste encore avec eux, les observer carrosser, défroisser, ou leur montrer un nouveau poc sur son aile, qui y était pas…
Ça roule mal. Je ne dépasse pas la seconde mais je suis heu-reux, épaté de ce festival de vitres en cinémascope. Passager, je ne m’en rendais pas compte, au volant, l’Austin offre une vue imprenable sur la circulation. On est assis très bas et on voit mieux qu’un camion. Avec des yeux partout. C’est pour ça, les chevaux demandent qu’à se lâcher, Alain le sait : « Il sera prudent »… Mais oui, Alain.
De toute façon, encore dans Clichy, j’ai la vue panoramique sur l’arrière d’un 1 200 kilos Citroën qui me la bouche… Ralentit… Jusqu’au pas… Au sur-place… Impossible de doubler. Ni de régler mon siège comme j’aurais dû le faire chez les Lebranchu, oui mais l’émotion… Je suis un automobiliste bloqué à guère plus de 1 200 kilomètres au compteur dans une adorable voiture en verre, un palais des glaces où je vis seul. ( Un temps )… On traîne… Nez au carreau je ne fais absolument pas exprès de noter un, puis deux, puis dix, vingt, toute une gamme de pare-chocs aux formes aussi diverses et fignolées que mille et un cendriers. Je ne vois plus rien à l’infini que des pare-chocs qui m’encerclent à hauteur d’homme assis dans une Austin autant dire à ras du sol. J’ai envie de descendre en marche pour admirer le mien de plus près, sa forme ouvragée et son pouvoir rutilant… Mais jusqu’où va se nicher la beauté quand des sculpteurs sur métaux, dessinent, modèlent, martèlent, forgent enfin cette pureté de lignes, obsédés dans le même geste par sa force nickelée et sa résistance aux coups des autres, inspirés en droite ligne par les auto-tamponneuses de Luna Park que Louis Renault et André Citroën étaient encore loin d’inventer…
Nos pare-chocs avancent au pas, ils paradent fièrement exhibant leurs biceps, tête haute, même cabossés, tous pratiques autant qu’artistiques, oh je voudrais tant voir surgir ceux d’une autre Austin dans mon champ de vision. Non ? Bon… Tans pis, j’inspecterai mes chromes quand je serai rendu à la vie piétonne. Patience. Profiter de la revue des pare-chocs qui en vaut bien d’autres et même du Lido… ( Un temps ) … Je profite, tout seul dans mon Austin. Personne ne m’attend. Si. Ma table de travail et les Manouches.
Porte de Clichy à droite vers Paris, mon 1 200 Kg préféré me quitte, il file sur Saint-Ouen, il va aux Puces, livrer des meubles ou des blousons ricains on se reverra sans doute bon vent à tes pare-chocs sois prudent !
J’ai mis mon clignotant. Il marche impeccable. Tout de suite après, les circonstances m’amènent à tester le point mort et l’embrayage. Magnifique. Elle s’arrête mieux que ses voisines. Je me trouve dans mon premier bouchon qui ne cesse de grossir, je détaille dans mon rétroviseur tous ceux qui nous rejoignent. Ça enfle de partout dans l’immobilité. Visages derrière les vitres, beaucoup font la gueule mais pas moi. Je n’ai pas terminé de visiter ma Mini, j’imagine le siège arrière garni d’amis, de confrères, de filles, de Manouches… J’imagine Jacques sur le siège passager pour changer. Jacques qui m’indique une manœuvre et un raccourci pour sortir de cet enfer. Lui ne savoure plus le temps perdu pare-chocs contre pare-chocs. Amis d’enfance, désormais complices d’Austin Mini 1 000, nous sommes si différents… C’est toute l

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