La mort
217 pages
Français
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Description

Et si la mort devenait un des sujets tabou du XXIe siècle ? Il suffit d'entendre les débats où d'éminents professeurs posent l'hypothèse d'une possible immortalité du corps et du cerveau pour comprendre que l'humain d'aujourd'hui ne veut plus entendre parler de mourir. Il n'est pas inutile alors de repenser cette notion en regardant comment est traitée la mort par d'autres civilisations dans les représentations artistiques, dans les rituels contemporains et par la médecine.

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Date de parution 01 juillet 2010
Nombre de lectures 91
EAN13 9782296259188
Langue Français
Poids de l'ouvrage 4 Mo

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Extrait

La mort
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Sous la direction de Gérard DABOUIS
La mort
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Séminaire Le Lien social
organisé par L’Équipe de recherche en sciences humaines et sociales appliquées à la cancérologie (ERSSCa) Nantes 19-20 mai 2008
Textes rassemblés et présentés par Fabienne Le Roy
L’HARMATTAN
© L'HARMATTAN, 2010 5-7, rue de l'École-Polytechnique ; 75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan1@wanadoo.fr
ISBN : 978-2-296-12160-7 EAN : 9782296121607
Présentation
C'est à une traversée que nous invitent les textes présentés ici. Un voyage dans ce qui caractérise le mieuxl'humanitas, c'est-à-dire dans les différentes manières dont l'être humain « acte » sa conscience de sa finitude. Car s'il est une chose dont l'homme n'aura jamais l'expérience directe, c'est bien celle de sa propre mort. La mort est donc à la fois réalité indiscutable et hypothèse virtuelle. Avec la mort, la philosophie, l'histoire, la littérature, toutes les sciences humaines se placent sur des territoires non balisés, des interstices, des lieux de passage, des zones tampons en quelque sorte, où se heurtent des contraires : passé/futur, temporel/intemporel, immanence/transcendance, oubli/mémoire, soi/autrui, individuel/collectif, extériorité/intériorité, visible/invisible. C'est pourquoi nous pouvons parler de traversée car, parler, écrire sur la mort, c'est avant tout parcourir ces espaces de turbulence, ambigus, incertains où l'on peut se perdre de mille façons. Les chercheurs de toutes disciplines qui se sont empa-rés de ce thème au cours du séminaire thématique de la Maison des sciences de l'hommeAnge-Guépinont entrouvert quelques portes et désigné quelques pistes.
Métamorphoses, aborde les processus de transformation et de muta-tion sous l'angle de l'intemporalité. Que reste-t-il du passé, quelles traces perdu-rent par-delà les transformations du mouvant : les civilisations (Fatima Ouachour), la pensée scientifique (Geoffroy Botoyiyê), les mutations de l'éco-nomie (Lætitia Pihel, Maryse Duboulois), l'évolution des conceptions de la mort (Julie Cheminaud). Il s'agit de mettre en lumière critique la question de l'intemporel. Qu'est-ce qui nous parvient, dans nos institutions, nos paysages ou notre imaginaire, des civilisations disparues ? D'où vient l'auto légitima-tion de l'universalité du discours scientifique ? Une restructuration entraîne-t-elle inévitablement la mort de la « culture d’entreprise » qui lui précédait ? Sur quelles constructions historiques, médicales, philosophiques évoluent les diffé-
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PRÉSENTATION
e rentes conceptions de la mort à partir duXIXsiècle et quelles en sont les consé-quences dans la création esthétique ? Questions de vie et de mortdessine une mort moins symbolique en abor-dant de façon très pragmatique son traitement social. On y rencontre ce que ladoxanomme aujourd'hui « la fin de vie », avec d'une part la difficile mise en place d'un nouveau secteur de la médecine « les soins palliatifs », la nécessité d'un nouveau rapport à l'autre (Gérard Dabouis, Bruno Gaurier), et d'autre part la violence incorporée, par les soignants comme par les patients, dans ce type de prise en charge de la mort (Angélique Bonnaud-Antignac) ; la mort selon les pouvoirs publics, à travers l'histoire de la reconnaissance, par les poli-tiques publiques de la mort civile, de plus en plus revendiquée par exemple par les associations de victimes d'accidents de la route, qui mettent en avant le refus de la fatalité et le droit au secours (Sylvie Morel), ou selon les stratégies des individus qui anticipent leur propre mort, par des comportements de patri-monialisation et d'épargne, la « pérennité de l'avoir » venant contrer la « fini-tude de l'être » (Luc Arrondel). Rituels:aborde quelques façons de traiter le corps du défunt. S'y retrouvent – Des pratiques profanes, avec les nouveaux processus de mémorialisation que sont les bouquets de fleurs sur les lieux d'accidents (Lætitia Nicolas). À qui s’adressent ces « bornes de mémoire » ? sont-elles privées ou publiques ? Qu’est-ce qui anime ceux qui les déposent ? Après un détour historique et géogra-phique, l’auteur analyse en anthropologue un terrain éminemment délicat. – Des rituels sacrés avec le traitement du cadavre du suicidé en Grèce classique (Kevin Peytral). Il semble bien que le corps du suicidé ait eu droit à des traitements qui l’excluaient de la cité, de la compagnie des hommes et de celle des Dieux. Beaucoup de textes décrivent ces rituels, précisent les condam-nations mais la communication pose également des questions de contexte auxquelles l’historiographie ne répond pas.
– Le travail des organisateurs de funérailles que nous suivons au cœur même de l'entreprise des Pompes funèbres (Julien Bernard). L’auteur a travaillé aux côtés de ces professionnels en tant que porteur de cercueil. Il livre une obser-vation minutieuse du travail funéraire, de la mise en scène des obsèques et de la gestion de l’émotion. C’est par sa confrontation directe au quotidien des endeuillés que le secteur funéraire est un terrain privilégié pour l’observation des évolutions du rapport social à la mort.
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PRÉSENTATION
L'artest peut-être le chapitre qui s'éloigne le plus du thème de la mort « réelle », socialisée, ritualisée, domestiquée par le politique et le social, mais qui navigue en fait au plus près de l'être puisqu'il pose les questions exis-tentielles. Ce chapitre aborde deux questions : celle de la représentation de la mort et celle de la transcendance, c’est-à-dire de son dépassement. C'est par la médiation de la peinture, de la littérature, du théâtre que l'homme tente de se représenter la mort, et en même temps d'y échapper symboliquement. L'artiste est celui qui brouille le mieux les pistes en s'essayant à l'alliance des contraires, mêlant intimement la mort à la vie pour n'en faire qu'une et indivisible réalité.
On lira ainsi deux textes sur la peinture. L'un (Bruno Trentini) analyse le reflet mortuaire chez Le Caravage, qui s'est représenté comme mort à deux reprises, sous les traits de Méduse et de Goliath. Utilisant le mythe de Narcisse, le texte mêle plusieurs niveaux de réalité et de représentation, le reflet, le miroir, le double, le modèle etc. Le second, (Izabella Lubiniecka) étudie l'œuvre peinte de Zdzislaw Beksinski, peintre, sculpteur, photographe et dessinateur polonais (1929-2005) dont les tableaux représentent des « corps qui ne sont ni morts ni vivants », des « êtres suspendus entre présent et futur ». Cette peinture qui « rend visible l'invisible » montre que « la mort n'est pas un événement qui nous arrive, mais une manière d'être qui nous accompagne dans le quotidien ».
Restent la littérature et le théâtre. Comment écrire la mort ? Avec la tragé-die grecque, « La mort sur scène » (Gunther Krause) donne naissance au héros qui prend ainsi « silencieusement » sa place auprès des Dieux. Le théâtre moderne convoque lui aussi ses morts, son « festival de cadavres ». La mort théâtrale antique, résistance aux dieux, devient sur la scène contemporaine, le signe de la résistance contre les tragédies de l'Histoire. Changeant de public et faisant le détour par les albums de jeunesse, Françoise Nicol montre comment la mort est racontée aux enfants. Souvent cachée, transposée, euphémisée, la mort dans cette littérature en dit long sur la place qu'occupe « le » mort dans notre société. Michel Magniez, par le truchement d'un texte de Stefan Zweig, peu connu en France car non traduit, montre comment Zweig, écrivant sur la mort de Cicéron, raconte en fait, dans une mise en abîme, la mort de la République romaine, la fin de l'ordre européen des années vingt, ainsi que son propre désespoir et sa tentation d'en finir avec la vie. Toutes ces morts se répon-dent et trouvent un écho ultime dans l'Allemagne nazie de la fin des années trente.
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PRÉSENTATION
Bien d'autres pistes seraient à explorer. L'interdisciplinarité ne prétend pas à l'exhaustivité. Mais un fil se tire à la lecture de ces communications, qui rejoint la thématique de la Maison des sciences de l'homme de Nantes, « Le lien social ». Il y est plus souvent question de l'évolution des rapports sociaux que de la mort. Beaucoup d'études soulignent la tentation, qui serait propre à nos socié-tés contemporaines, d’éloigner de plus en plus la mort des univers quotidiens, 1 familiaux, professionnels, sociaux. Mais comme l’écrit déjà Bossuet en 1666, dans sonSermon sur la mort, c’est moins de la mort que de la pensée de la mort dont nous voulons nous débarrasser : « C’est une étrange faiblesse de l’esprit humain, que jamais la mort ne lui soit présente, quoiqu’elle se mette en vue de tous côtés et en mille formes diverses… Les mortels n’ont pas moins de soin d’ensevelir les pensées de la mort que d’enterrer les morts mêmes ». Ce qui est nouveau est peut-être une forme de « désocialisation » que serait une mort non partagée, ni dans le réel, ni dans l'imaginaire. Reprenant à notre compte une remarque de Xavier Emmanuelli à propos de la médecine (cité par Sylvie Morel dans son article) : « tout se passe comme si notre siècle attendait de la société qu'elle guérisse de la mort ». Fabienne Le Roy Maison des sciences de l’hommeAnge-Guépin
1. « Sermon sur la mort », 1966,in Dictionnaire culturel en langue française, A. Rey (dir.), Le Robert, 2006.
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