L avenir nous appartient si...
111 pages
Français

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L'avenir nous appartient si... , livre ebook

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Description

Du Pakistan à l'Irak, le Proche-Orient échappe à l'empire américain. Le Liban a été, et est toujours, l'un des principaux théâtres de combat de ce conflit aux enjeux planétaires. Au sein de la communauté chrétienne libanaise, quelques partis, dont le Courant Patriotique Libre, osent refuser l'instrumentalisation de leur communauté par une administration américaine trop encline à les sacrifier ensuite. L'auteur raconte ici son expérience militante, les conditions du combat et les motivations qui animent sa génération.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 mars 2011
Nombre de lectures 31
EAN13 9782296802223
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

L’Avenir nous appartient si…
© L’Harmattan, 2011
5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris

http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-54288-4
EAN : 9782296542884

Fabrication numérique : Actissia Services, 2012
Nicolas Sehnaoui


L’Avenir nous appartient si…
À ma mère qui m’a transmis
son attachement à notre terre
Aux Libanais qui tiennent le rêve
entre leurs mains
« Où sont les "Justes" de l’heure présente ?
Dans les prisons et dans les camps pour la plupart.
Mais là se trouvent aussi les hommes libres.
Les vrais esclaves sont ailleurs,
dictant leurs ordres au monde.
Croyez-vous à la possibilité d’une trêve ?
De quelle sorte ?
Celle que nous obtiendrons au bout
d’une résistance sans trêve. »


Albert Camus
Actuelles III
Pourquoi je me suis engagé en politique
Tout a commencé dans ma plus jeune enfance lorsqu’un jour ma mère m’annonce que nous devons déménager pour une durée indéterminée pour « plus de sécurité ». On fait nos valises et me voilà à la montagne chez des amis de mes parents, jouant dans les jlèls et entre les rochers. Quelques mois plus tard, nouvelle alerte. C’est à côté d’un cadavre au sang noirci, adossé au mur du stade du Chayla que passe l’autocar qui nous emmène au lycée.
Je me souviens que par deux fois au moins, j’en ai voulu à mes parents de m’avoir envoyé à l’école alors que la veille les milices d’en face avaient menacé de bombarder les écoles chrétiennes. Il s’est avéré que dans l’un des cas, il s’agissait d’un bluff. Quant au second, la sirène d’alarme a sonné et l’administration nous a fait descendre dans les dépôts de l’école que nous découvrions pour la première fois.
Puis, c’est de plus en plus fréquemment que je dois changer d’école et de maison suite aux mesures de protection imposées par mes parents. J’irai même jusqu’à changer de pays puisque je passe les années 79 et 86 à Paris, avec ma mère, et fais plusieurs courts séjours à Chypre dans les années 80.
Toutes ces mesures ne réussiront pas à m’épargner les affres de la guerre puisque je vis les cent jours de résistance héroïque d’Achrafieh blotti dans un couloir, terrorisé par les orgues de Staline installés au sommet de la tour Murr et qui semblaient, à chaque salve, annoncer l’annihilation de la maison, du quartier et de tous ses habitants.
Quelques années plus tard, mon père, convaincu que des jours meilleurs s’annoncent sûrement, loue une maison en roof. Nous n’en profiterons que quelques mois puisque, de nouveau, les bombardements commencent et nous devons nous réfugier chez mon oncle. Ce qui fera dire à mon père que la guerre était menée par des miliciens bien en sécurité derrière leurs bunkers et leurs sacs de sable, aux dépens de civils exposés quant à eux aux retombées des premiers obus de la journée.
À cette époque, jeune adolescent découvrant, sans vraiment y goûter, les émois de cette phase merveilleuse où hommes et femmes s’épanouissent et prennent leur essor, c’est avec difficulté que je côtoie la proximité de la mort. Au moindre bruit, je me cache dans la pièce la plus sécurisée ou descends à l’abri retrouver les habitants du quartier qui y logent en permanence. L’avenir justifiera ma peur excessive puisqu’un obus percutera de plein fouet l’aile ouest de l’appartement de mon oncle.
Mais le plus grand traumatisme restera certainement le bombardement du pourtour de notre maison à Monte Verde par l’aviation israélienne. Ce jour-là, mon père recevait des gens à dîner et le jardin était illuminé. Vers minuit, les invités étant partis, je descends le rejoindre et remarque que les fusées éclairantes, contrairement aux autres soirs, étaient larguées au-dessus de notre colline. Ce largage précédait généralement les raids en piqué des avions sur les zones éclairées. La région étant sous contrôle des Forces libanaises il semblait absurde que les Israéliens la bombardent étant donné l’alliance quasi officielle qui prévalait entre eux. J’en fais la remarque à mon père et nous montons ensemble sur mon balcon avec des jumelles pour essayer de comprendre. À peine quelques secondes sont-elles passées qu’on entend le sifflement d’un obus suivi d’une explosion dont le souffle nous projette à plusieurs mètres, droit dans les étagères de ma chambre. Un cafouillage s’ensuit au cours duquel mon père et ma tante saisissent mon petit frère et ma petite sœur et nous descendent à l’abri enjambant les débris qui encombrent l’escalier. Pendant ce laps de temps, deux autres obus sont tombés autour de la maison. Mon père nous engouffre dans la voiture et démarre en trombe, chevauchant au passage un arbre abattu par le souffle de l’explosion. Il me faudra deux heures pour retrouver mon calme et mes esprits.
Cette nuit-là, je ne peux m’empêcher de penser à toutes les personnes qui se rassemblent la nuit à l’hôtel Printania pour observer le spectacle du bombardement de Beyrouth-Ouest. Il est vrai que chaque bombe de deux tonnes qui s’abattait sur les immeubles de la ville faisait, avant de le détruire, des bruits et des couleurs dignes des plus beaux feux d’artifice. N’ayant pas suffisamment médité l’histoire du peuple palestinien ou celle de la création – par un viol toujours en cours – de l’État d’Israël, de nombreux chrétiens n’avaient pas honte d’afficher leur admiration pour les Israéliens.

Ce sont ces même gens, qui pensaient à l’époque que vivre en paix aux côtés d’Israël était autre chose qu’un vœu pieux, qui condamnent aujourd’hui un homme et sa politique salvatrice parce qu’il lui arrive de s’emporter contre les journalistes. Tout le comportement orgueilleux, dominateur et raciste des Israéliens est ignoré pour ne retenir que les mœurs libérales et occidentalisées d’une partie de sa population. « Ils ont des discothèques. Ils combattent les musulmans. Ils ont donc raison. » Avec ce type de raisonnement, les chrétiens d’Orient passeront à la vitesse grand V de catégorie en voie d’extinction à celle d’espèce effectivement éteinte.
Quelques années plus tard, en 1989, à l’apogée de mon adolescence, je me sens le maître du monde. Le danger me semble ridicule. La mort ne peut pas me prendre puisque j’ai encore beaucoup de choses à faire et à vivre. Lors de la dernière soirée passée avec ma mère au Music Box, les obus pleuvent sur Achrafieh. Au retour, aux commandes de la voiture je slalome tranquillement entre les obus pour déposer notre ami Paul, sans ressentir la moindre inquiétude.
Enfants de la modernité des années 60 et 70 qui ont révolutionné les mœurs et surtout contribué à rompre les carcans intellectuels qui limitaient le progrès social, mes parents ont fortement influé sur mes convictions.
Je sentais chez mon père une frustration permanente de ne pouvoir s’engager puisqu’il ne partageait aucune des convictions des partis qui composaient alors la scène libanaise. Finalement embrigadé malgré lui dans le métier de banquier, il y brillera, faisant passer l’institution qu’il pilotait du vingt-cinquième au quatrième rang des banques libanaises en l’espace de dix ans. Il avait pourtant commencé sa vie professionnelle loin des affaires familiales en montant, dans la Bekaa, l’usine de conserves PRAL qui connaîtra un succès arrêté brutalement par les événements de 1975 qui l’obligeront à interrompre ses activités. Doté d’une forte personnalité et d’un charisme inné, mon père avait l’étoffe d’un homme politique de haut rang. Dommage pour le Liban que le tirage au sort génétique lui ait dévolu l’étiquette de grec catholique. Eut-il été maronite, il aurait certainement écrit une des pages de l’Histoire de notre pays. D’une intelligence exceptionnelle, laïc par conviction et meneur d’hommes, il aurait pu aider le Liban à mieux traverser les épreuves qu’il a connues. Il finit par entrer au gouvernement en 2004 pour quelques mois en tant que ministre de l’Energie dans le cabinet Karamé. Durant cette courte période il conçoit un plan de réhabilitation d

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