La congolité : une quête

Jean-Pierre Heyko Lekoba

Description

Le Congo, c'est ma conviction, est riche de l'intelligence de ses filles et fils. Rassemblés, ils sont capables de coordonner leurs volontés, d'affirmer leur fraternité, et, sans aucun doute, d'écrire une autre histoire de leur vie ensemble. Le Congo est une promesse, son futur ne peut advenir sans une claire clairvoyance du présent. Et, il ne s'agit pas que d'une simple reformulation des enjeux de pouvoir, mais profondément, d'un reconditionnement du fluide vital de notre existence commune.

Sujets

• Science politique
• Autobiographie
• Témoin
• Récit
• Éthique
• Institut d'Études Politiques de Paris
• Témoignage
• Socio
• Harmattan Littérature

Informations

• Publié par: L'Harmattan
• Date de parution: 15 janvier 2018
• Nombre de lectures: 8
• EAN13: 9782140057991
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 1 Mo

Extrait

JeanPierre H L

La congolité : une quête

La congolité : une quête

Jean-Pierre H EYKO L EKOBA

La congolité : une quête

Du même auteur chez le même éditeur Lepoids des souvenirs, la quête du présent, récit, préface de Charles Zacharie Bowawo, 2012. Les sentiers des origines, O’Tsina, préface d’Omer Massoumou, 2014. La problématique démocratique au Congo-Brazzaville, 2015. © L’Harmattan, 2018 5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris http://www.editions-harmattan.fr ISBN : 978-2-343-13396-6 EAN : 9782343133966

Remerciements Je dis merci à mes parents, pour l’homme que je suis devenu. Ma reconnaissance aux hommes et femmes, collègues de travail, paysans, ouvriers et autres Congolais, tous, rencontrés au hasard de mes déplacements professionnels et politiques, comme directeur des études et de la planification au ministère de l’Economie rurale, député élu dans une circonscription rurale, Etoumbi, et préfet, successivement des départements du Niari et de la Cuvette. A leurs côtés, je me suis enrichi et, surtout, j’ai beaucoup appris de nos échanges. Les conflits d’origine politique qui les divisent, les distinctions arbitraires des identités culturelles qui les singularisent et leur donnent le sentiment bizarre de ne pas vivre, tous, sur le même territoire..., sont autant de fragilités qui interrogent la société actuelle. Elles forment la trame de ce livre. Une réflexion partagée donc. Avec, également, mes amis de tous les jours, ceux avec lesquels je chemine et partage la même histoire de vie depuis notre enfance. Leurs contributions n’ont pas de prix. Avec, aussi, mes « compagnons de lutte », ces observateurs attentionnés de la vie publique et politique, qui parlent du Congo avec passion, vivent leur existence avec simplicité, ne rêvent que d’une chose : participer à la construction de leur pays, le servir avec loyauté, être utiles à la collectivité nationale. Nos discussions passionnées sont la preuve d’un engagement sincère, contrairement à cette thèse de la ressemblance qui, maintenant, mélange tout le monde. Ce livre leur rend hommage. Jean-Pierre Heyko Lekoba.

5

Avant-dire 1991-2016 : 25 ans de multipartisme. Déjà ! Pour quel bilan ? Les libertés démocratiques, plutôt qu’une mise en perspective de l’unité nationale, se sont avérées, au déroulement de l’expérience politique post-Conférence nationale souveraine, une occasion ratée. Que pouvait-on, en effet, attendre d’une aventure démocratique née dans le sillage d’une contestation syndicale qui, à l’évidence, n’aura servi que de passerelle à des opportunismes mis à profit pour donner libre cours à des ambitions politiques à peine contenues ? Posons la question autrement : Etait-il possible, en 25 ans de multipartisme, dans un pays qui en a connu 30 de monopartisme, de changer les mœurs politiques ? Bonne question, car, très vite, cette aventure démocratique ayant dévoilé sa vraie nature, l’ethnocentrisme a refait surface, gagné en étendue, jusqu’à briser le territoire national en autant de sous-ensembles politiques homogènes 1 représentant chaque « pays des... » , qu’il y a de communautés culturelles. Ainsi que nombreux le redoutaient, les ambitions politiques ont, tôt, épousé les contours ethnocentristes postindépendances des lignes politiques de partage du pouvoir et se sont enfermées dans le même ostracisme vilipendé par les fondateurs du parti unique pour justifier la naissance de la République populaire. Une fois de plus, les Congolais n’ont pas su gagner leur autonomie, encore moins, assumer la nouvelle histoire, les 1 Le générique « Pays des... » signifie l’addition des identités géo- tribales qui configurent le Congo.

7

libertés démocratiques obtenues à l’affrontement ont, contre toute attente, marqué le début d’un rétropédalage politique qui a renvoyé les individus à leurs déterminismes primaires, et, les partis et associations politiques aux seules possibilités ethno-politiques qui s’offraient. Avec frénésie, pour ceux qui s’en souviennent, les Congolais se sont engouffrés sans précaution dans le tunnel démocratique, sans s’imaginer, un seul instant, que l’étroitesse de ce passage vers une aventure politique négociée à la division les mènerait au drame. 25 ans plus tard, les libertés politiques réclamées, ainsi que l’unité politique hurlée par les ténors de ce forcing démocratique se sont égarées sur les chemins sinueux de la bousculade tribale pour la conquête du pouvoir. Le tunnel n’a pas résisté et, comme toute aventure impréparée, elle s’est mal terminée : des Congolais, nombreux, victimes innocentes, ont perdu la vie. Depuis lors, chaque « Pays des... », seul ou en alliance de proximité, s’est mis en ordre ethno- politique de bataille pour forcer le passage ; l’aventure démocratique, elle, s’est transformée en cauchemar, et maintenant, la désolation est partout, l’amertume habite les cœurs. Ne devrait-on pas, déjà, siffler la fin de cette aventure censée écrire la nouvelle histoire ? Question difficile ! Personne ne peut, aujourd’hui, honnêtement, présager de ce qu’il en sera demain, même si, clairement, les valeurs républicaines reculent, pendant ce temps, l’ethnocentrisme, elle, en expansion, tient désormais lieu de seul levier d’une vie politique émaillée de guerres civiles révélatrices du sentiment tribal. Et, ce n’est pas d’aujourd’hui ! D’un régime à un autre depuis l’indépendance, les mêmes avatars qui n’annoncent que les mêmes tourments et drames futurs éclatent le territoire national, l’ethnicité

8

reprend force et vigueur, les tribus se renforcent, le sentiment national se perd, la citoyenneté rejoint les placards de la République et, en attendant la prochaine déflagration politique, la Nation se fractionne. Jusqu’à quand ? Entretemps, les « parents » sont source de légitimité, le seul recours et le moyen le plus sûr pour monter à grandes enjambées les marches du pouvoir. Et, cela n’étonne plus personne ! Voici bientôt soixante ans, l’âge de notre liberté retrouvée, l’ethnicité, cette aberration culturelle qui se reflète désormais dans toutes les facettes de la société congolaise s’invite au cœur de la politique nationale. Le pays tourne en rond creux, vide. Pendant ce temps, les politiques de tous bords défrichent, encore et encore, les mêmes champs de la division. Dure réalité ! Le pouvoir, ce miroir aux alouettes, un piège ? C’est à croire que oui, d’un pouvoir à un autre, sur les lieux de la mise en scène de cette gloire éphémère, il se referme sur des cadres, souvent, de grande facture intellectuelle, qui, à leur tour, explosent dans la même arrogante ignorance des réalités. La gloire, dit une sagesse mbere:« ... est une ombre qui porte l’illusion.»Tout le monde le sait, pourtant, chaque fois, le même piège se referme sur les décideurs du moment, les enferme dans la toute-puissance de cette gloire sans mérite, et, c’est, justement, là où le bât blesse. Tous ces cadres, de formation supérieure, que la République élève, plutôt que d’en tirer avantage pour donner le meilleur d’eux même et, servir d’exemple à la future élite politique, ne pensent qu’à entretenir leurs égos. Les uns à la suite des autres, malgré les nombreuses dénonciations et autres rabattages contre les antivaleurs, ils utilisent le même fonds usé du commerce ethnique,

9