Qu est-ce que l Europe politique ?
167 pages
Français

Qu'est-ce que l'Europe politique ? , livre ebook

167 pages
Français

Description

Au sommaire de ce numéro : Qu'est-ce que l'Europe politique ? / EU authority, politicization and EU issue voting / Les partis et l'Europe / Policies with and without Politics / Politicizations by 'UK' European Commussioners During Exit Referenda: The Impact of Institutionalized Roles / Comparing two complementary accounts of the surging opposition to gender and equality in Europe

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 24 décembre 2019
Nombre de lectures 0
EAN13 9782140138867
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0800€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

N°64 | 2019
Qu’estce que l’Europe politique ? Un agenda de recherche sur la politisation de l’UE
Revue publiée avec le soutien du laboratoire Pacte Grenoble, de l’European School of Political and Social Sciences (ESPOL), de l’Institut des sciences humaines et sociales du CNRS, et de l’Institut d’études européennes (IEE) de l’Université Saint-Louis – Bruxelles
http://www.pacte-grenoble.fr/
www.espol-lille.eu
POEU_064.indb 2
Politique européenne Centre d’études européennes de Sciences Po 8, rue des Saints-Pères F - 75 007 Paris Tél. (+ 33 1) 45 49 83 5 Fax (+ 33 1) 45 49 83 60 <http://politique-europeenne.eu/>
© L’Harmattan, 019 <www.editions-harmattan.fr> ISBN : 978343191690 EAN : 978--343-19169-0
12/12/2019 15:28:18
Direction de la revue Oriane Calligaro, ESPOL, Université Catholique de Lille Clément Fontan, UCLouvain, Université Saint-Louis Bruxelles
Direction adjointe Céline Belot, Pacte, Sciences Po Grenoble Sophie Jacquot, Université Saint-Louis Bruxelles Antoine Mégie, Université de Rouen Frédéric Mérand, Université de Montréal Stéphanie Novak Université Ca’ Foscari, Venise
Comité de rédaction Laurie Beaudonnet Université de Montréal Hugo Canihac Université Saint Louis – Bruxelles Didier Chabanet IDRAC Lyon, Sciences Po, CEVIPOF, ENS de Lyon, Triangle Samuel B.H Faure Sciences Po, Saint-Germain-en-Laye François Forêt Université Libre de Bruxelles Bastien Irondelle† Cal Le Gall UCLouvain Guia Migani Université de Tours Emmanuel Mourlon-Druol Adam Smith Business School, University of Glasgow Angela Tacea Vrije Universiteit Brussel Virginie Van Ingelgom UCLouvain, ISPOLE Antoine Vauchez CNRS, University Paris 1, CRPS/CESSP
POEU_064.indb 3
Conseil scientifique Richard Balme, Sciences Po Stefano Bartolini, Centre Robert Schuman, Florence Simon Bulmer, University of Sheffield Renaud Dehousse, Institut universitaire de Florence Guillaume Devin, Sciences Po Patrick Hassenteufel, Université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines Reinhard Heinisch, University of Pittsburgh Bastien Irondelle , CERI, Sciences Po Markus Jachtenfuchs, Hertie School of Governance, Berlin Jean Leca, Sciences Po Patrick Le Galès, Centre d’études européennes, CNRS Christian Lequesne, CERI, Sciences Po Paul Magnette, Université libre de Bruxelles Anand Menon, University of Birmingham Pierre Muller, Centre d’études européennes, Sciences Po Claudio N. Radaelli, University of Exeter Sabine Saurugger, Sciences-Po Grenoble, Pacte Andy Smith, Centre Émile Durkheim, IEP de Bordeaux Yves Surel, Université Paris II
12/12/2019 15:28:18
4
SOMMAIRE
Laurie Beaudonnet, Frédéric Merand, Qu’est-ce que l’Europe politique ? Un agenda de recherche sur la politisation de l’UE................................. 6
DOSSIER
1 —Cal Le Gall, EU authority, politicization and EU issue voting....................................32
2 —Emiliano Grossman, Simon Persico, Isabelle Guinaudeau, Les partis et l’Europe Européanisation des programmes ou nationalisation des enjeux européens ?................................................65....................................
3 —Thomas Laloux, Damien Pennetreau, Policies with and without Politics Committees and the Differentiated Politicization of Legislative Debates in the European Parliament..............................86
4 —Andy Smith, Politicizations by ‘UK’ European Commissioners During Exit Referenda: The Impact of Institutionalized Roles...110...........................
LECTURE CROISÉE
Jane Jenson Comparing two complementary accounts of the surging opposition to gender and equality in Europe......................................................................... 138
LECTURES CRITIQUES
Cyril Benoît Hubert Heinelt & Sybille Münch,Handbook of European Policies. Interpretative Approaches to the EU, Cheltenham: Edward Elgar, 2018 .................................................................................................... 144
El Hadji Cheik Diop Amelia Hadfield, Ian Manners and Richard G. Whitman (eds), Foreign Policies of EU Member States, Londres: Routledge, 2017. ......... 148
POEU_064.indb 4
12/12/2019 15:28:18
Jérémy Elmerich Gérard Bouchard,L’Europe en quête d’Européens. Pour un nouveau rapport entre Bruxelles et les nations....... 158, Bruxelles : Peter Lang, 2017
POEU_064.indb 5
12/12/2019 15:28:18
6• Dossier
POLITIQUE EUROPÉENNE N° 64 | 2019 Laurie Beaudonnet et Frédéric Merand p. 6-30
Qu’est-ce que l’Europe politique ? Un agenda de recherche sur la politisation
Pendant longtemps, vouloir « plus d’Europe » signifiait y faire « plus de poli-tique ». Depuis quelques années, cette vision optimiste est contestée par les chercheurs qui voient dans l’Europe politique un risque autant qu’une chance. Cet article introductif au numéro thématique explore la politisation de l’UE d’un point de vue empirique. Dans un premier temps, nous revenons sur les définitions de la politisation : un enjeu est politisé lorsqu’il génère un clivage visible dans la communauté politique, amenant les acteurs, les citoyens et les citoyennes à clarifier leurs positions, voire à se polariser autour d’elles. Puis nous proposons un état de la littérature différenciant trois contextes de l’activité politique : l’opinion publique, les institutions majoritaires et les institutions non majoritaires. Nous concluons que, si la politisation varie selon les contextes, elle doit néanmoins être appréhendée dans son ensemble puisqu’elle fait intervenir les partis politiques, les électeurs et les institutions de manière concomitante.
What is political Europe ? A research agenda on the EU politisation ?
For a long time, European federalism implied doing "more politics" at the European level. Scholars have started to challenge this optimistic view, arguing that a “political Europe” carries risks as well as opportunities. This introductory article to the special issue explores the politicization of the EU from an empiri-cal perspective. First, we analyze various definitions of politicization: an issue is politicized when it generates a visible cleavage in the political community, bringing actors and citizens to clarify - or even polarize around - their positions. Then we review the literature by differentiating three contexts of political activ-ity: public opinion, majoritarian institutions and non-majoritarian institutions. We conclude that, while politicization varies according to the context, it must nevertheless be understood as a whole since it involves political parties, voters and institutions concomitantly.
POEU_064.indb 6
12/12/2019 15:28:18
INTRODUCTION
Qu’est-ce que l’Europe politique ?
Un agenda de recherche sur la politisation
Laurie Beaudonnet CERIUM, Université de Montréal
Frédéric Merand CERIUM, Université de Montréal
e 9 juin 011, alors que le Parlement se réunit à Athènes pour adopter le L paquet de mesures exigées par l’Union européenne (UE), plus de 00 000 Grecs prennent d’assaut la placeSyntagmaafin de protester contre la politique 1 d’austérité . Reliée aux Indignés espagnols par Skype, leur manifestation, qui s’étend à plusieurs villes du pays, sera brutalement réprimée. Pour les Athéniens et les Athéniennes, elle n’est qu’un épisode dans une longue série de résistances qui, de 010 à 01 surtout, ont emprunté un répertoire varié, allant de la grève générale à l’outrage au drapeau européen en passant par les caricatures associant la chancelière allemande Angela Merkel à Adolf Hitler (Karyotis et Rüdig, 015).
Au risque de passer pour des amateurs de paradoxes, nous dirons que les plus ardents fédéralistes ont vu leur souhait réalisé dans les rues d’Athènes : un peuple qui prend les symboles de l’Europe au sérieux, sensible aux politiques que projette Bruxelles et attribuant à la capitale européenne le pouvoir de changer sa vie. Depuis 1951, les bâtisseurs de l’Europe ont voulu lui donner les
1
POEU_064.indb 7
Cette contribution et le numéro thématique sont issus d’une collaboration au sein du Réseau transatlantique sur l’Europe politique (RESTEP). Ce réseau Jean Monnet, financé par le programme Erasmus + de l’Union euro-péenne, réunit l’Université catholique de Louvain, Sciences Po Bordeaux, Sciences Po Grenoble, l’Université de Warwick, l’Université de Liverpool, la Central European University, l’Université de Lisbonne, l’Université McGill et l’Université de Montréal. Outre les directeurs de la revue, nous remercions les participants et les participantes au Forum RESTEP sur la politisation dans l’Union européenne, organisé par Olivier Costa les 23 et 24 avril 2018 à Sciences Po Bordeaux, ainsi que les participants et les participantes au séminaire virtuel RESTEP dont les échanges ont nourri nos réflexions. Le soutien de la Commission européenne à la production de cette publication ne constitue pas une approbation du contenu, qui reflète uniquement le point de vue des auteurs, et la Commission ne peut pas être tenue responsable de toute utilisation qui pourrait être faite des informations qu’elle contient.
7
POLITIQUE EUROPÉENNE N° 64 | 2019
12/12/2019 15:28:18
8• LAURIEBEAUDONNETETFRÉDÉRICMERAND
attributs d’un État : une ambition fédérale dès le traité de Paris, un parlement (196), un drapeau (1986), une citoyenneté (199) et, il s’en fallut de peu en 005, une constitution (Foret, 008). Encore aujourd’hui, les partisans de l’Europe souhaitent lui confier des compétences budgétaires accrues, le pouvoir d’imposition et une armée européenne : tout ce qui donne à l’État son caractère « régalien », c’est-à-dire l’intégration des pouvoirs économique, juridique, militaire et symbolique qui forcent la loyauté des citoyens et des citoyennes (Bourdieu, 00 ; Genschel et Jachtenfuchs, 016).
Pendant longtemps, vouloir « plus d’Europe » signifiait y faire « plus de poli-tique ». Rendre l’Europe plus visible, plus réactive aux clivages sociaux et donc plus démocratique, c’était soutenir le projet fédéral. « Faire de la politique », c’était fonctionner « comme si » l’UE était un système politique doté d’une pleine légitimité. Même si les néofonctionnalistes comme Ernst Haas trouvent des vertus à la dépolitisation à l’amorçage, ils voient la « politisation » comme le résultat non seulement souhaitable, mais inévitable de l’intégration euro-péenne, qui, élargissant les conflits à un nombre toujours plus grand d’acteurs, crée d’elle-même les conditions de son approfondissement et du développement d’une loyauté des citoyens et des citoyennes à l’égard du système politique supranational (Schmitter, 1969, p. 166).
e Dès le tournant du 1 siècle, cette vision optimiste est contestée par les sceptiques qui voient dans la politisation un risque autant qu’une chance. La discussion entre Simon Hix et Stefano Bartolini publiée par lethink tankNotre Europe en 006 résume un débat dont les paramètres n’ont pas vraiment changé : alors que le Britannique souhaite que l’UE assume son caractère redistributif par la mise en place d’une politique majoritaire selon un axe gauche-droite, son collègue italien met en garde contre le risque de confondre l’opposition « alter-européenne » à des politiques spécifiques (« isomor-phiques ») avec l’opposition « anti-européenne » à la coopération en soi (c’est-à-dire aux « politiques constitutives »). Peter Mair (007, p. 7) fait écho à ce risque lorsqu’il écrit : «once we cannot organize opposition in the EU, we are then almost forced to organize opposition to the EU».
À bien des égards, ce débat recoupe l’opposition entre majoritarisme et conso-ciationalisme (Papadopoulos et Magnette, 010). Dominant dans les pays anglo-saxons mais aussi en France, le majoritarisme valorise la clarté du programme politique, la stabilité du gouvernement et la réactivité à l’opinion publique. À l’inverse, les régimes consociationnels sont fondés sur la conviction que, sur un territoire hétérogène comme la Suisse par exemple, faire de la politique
POEU_064.indb 8
12/12/2019 15:28:18
INTRODUCTION9
majoritaire, c’est jouer avec le feu. Il faut donc viser le consensus afin d’éviter la marginalisation permanente de certaines minorités. Or, la « démoï-cratie » européenne représente un cas extrême d’hétérogénéité culturelle, économique et institutionnelle (Nicolaïdis, 006).
Dans cet article, nous explorons la politisation de l’UE non pas d’un point de vue normatif, mais conceptuel et empirique. Nous restituons les principaux débats scientifiques qui animent les études européennes depuis une décennie, c’est-à-dire depuis l’échec du traité constitutionnel, prélude à une « longue crise européenne » qui, combinant crise économique et perte de légitimité croissante, aura assez profondément transformé les institutions de l’UE.
L’article est divisé en trois grandes sections. Dans un premier temps, nous revenons sur quelques définitions classiques et contemporaines de la poli-tisation, en général et dans le cas européen. Puis nous proposons un état de la littérature concernant trois sphères de l’activité politique: les institutions majoritaires, l’opinion publique et les institutions non majoritaires, princi-palement la Commission européenne. Pour finir, nous esquissons un agenda de recherche qui permet d’introduire les articles contenus dans ce numéro thématique.
Qu’est-ce que la politisation?
Le concept de politisation souligne que le politique n’est pas une essence, mais un processus observable empiriquement, celui de la production des enjeux politiques. Un enjeu est politisé lorsqu’il génère un clivage visible dans la communauté politique, amenant les acteurs, les citoyens et les citoyennes à clarifier leurs positions, voire à se polariser autour d’elles. S’il génère le consensus ou est confié à une instance suprême, que ce soient la religion, le marché ou les tribunaux, l’enjeu n’est pas considéré comme politique. Les pratiques deviennent politiques à partir du moment où elles entrent (Jacques Lagroye parle d’une « conversion » ou d’une « requalification ») dans un espace politique doté d’une certaine autonomie, produisant ses propres catégories de pensée et d’action. Pour Lagroye (003, p. ), « la politisation n’est rien d’autre que la production sociale de la politique, de ses enjeux, de ses règles et de ses représentations ».Processus parfois involontaire, la politisation peut aussi être l’objet de stratégies conscientes, certaines réussies, d’autres pas.
POEU_064.indb 9
POLITIQUE EUROPÉENNE N° 64 | 2019
12/12/2019 15:28:18
10• LAURIEBEAUDONNETETFRÉDÉRICMERAND
S’il y a des processus et des stratégies de politisation, il peut aussi y avoir des stratégies de dépolitisation. C’est le cas lorsqu’un enjeu n’est plus saillant ou lorsqu’on confie à un organe indépendant la gestion d’affaires qui étaient jusque-là politisées, par exemple l’organisation des élections, la nomination des hauts fonctionnaires ou le droit à l’avortement. Cette dépolitisation, évidemment, est plus ou moins consciente selon qu’elle cherche ou non à camoufler sous une « règle impartiale » des choix qui demeurent souvent politiques, par exemple lorsqu’une politique économique se place sous le sceau rassurant de l’expertise (Baisnée et Smith, 006). De nombreux travaux creusent cette notion de dépolitisation comme une technique d’institutionna-lisation du néolibéralisme, les acteurs politiques utilisant cette stratégie pour se mettre à l’abri des logiques d’imputabilité dans les systèmes démocratiques lorsqu’ils articulent l’indépendance de l’économie et du politique (Flinders et Buller, 006 ; Burnham, 014). Ces cadrages ont également été appliqués aux organisations internationales (Petiteville, 016 ; Maertens et Parizet, 017).
En résumé, la politisation est à la fois une catégorie d’analyse et une catégorie de pratiques. De par cette nature conceptuelle hétérogène, la politisation appelle une définition à géométrie variable ou à plusieurs échelles. Wood (016) la qualifie d’ailleurs de concept multiniveau (multiniveau au sens où le terme se décline au niveau théorique, conceptuel et empirique). Pour heuristique qu’elle soit, il nous apparaît néanmoins nécessaire de compléter cette définition afin d’y inclure toutes les dimensions du phénomène. En tant que catégorie d’analyse, il s’agit d’un processus par lequel un enjeu, initialement considéré comme non-politique, se transforme en source de conflit et de clivage dans un espace social donné. Empiriquement, on peut observer le processus de politisation lorsqu’un conflit est plus saillant au tempst+1qu’il ne l’était au tempstau sein d’un espace propre. Ce processus de mise en visibilité peut être causé par plusieurs facteurs, dont les stratégies de politisation – catégorie de pratiques – font partie. Il est donc utile d’étudier comment les acteurs tentent d’exploiter des clivages et de mettre en forme une dramaturgie collective afin de fonder leur action et leur légitimité. Que ces stratégies soient couronnées de succès ou non, elles alimentent le processus de politisation tout autant qu’elles s’en nourrissent.
POEU_064.indb 10
12/12/2019 15:28:18
  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents