Un "mensonge déconcertant" ?
262 pages
Français

Un "mensonge déconcertant" ? , livre ebook

262 pages
Français

Description

Circonscrire les caractéristiques du mensonge totalitaire, par opposition au mensonge "démocratique" ; interroger les langages de ce mensonge ; explorer les voies de l'émancipation ; montrer les difficultés qu'il y a à établir la vérité, si tant est que celle-ci existe ; sans oublier l'"envers du mensonge", ce regard déformé que pose l'Occident sur la Russie depuis la révolution et jusqu'à aujourd'hui ; tels sont les grands axes de ce recueil, dont l'orientation n'est pas tant politique, qu'historique, philosophique, littéraire et artistique.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 mars 2003
Nombre de lectures 59
EAN13 9782296311688
Langue Français
Poids de l'ouvrage 11 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0850€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

UN «MENSONGE DÉCONCERTANT»?
LA RUSSIE AU XXe SIÈCLEcgL'Harmattan, 2003
ISBN: 2-7475-3821-4Collection « Pays de l'Est»
Sous la direction de Jean-Philippe JACCARD
Avec la collaboration de Korine Amacher
Un « mensonge déconcertant» ?
La Russie au xxe siècle
L'Harmattan L'Harmattan Hongrie L'Harmattan Italia
Hargita u. 3 Via Bava, 375-7, rue de l'École-Polytechnique
75005 Paris 1026 Budapest 10214 TOl"ino
HONGRIE ITALIEFRANCECollection «Pays de l'Est»
dirigée par Bernard Chavance
Dernières parutions
Guy BENSIMON,Essai sur ['économie comnluniste, 1996.
Guillaume LACQUEMENT,La décollectivisation dans les nouveaux Lander
allemands, 1996.
Robert DELORME (ed.), A l'Est du nouveau. Changement institutionnel et
transformations économiques, 1996.
François BAFOIL, Règles et conflits sociaux en Allemagne et en Pologne
post-communistes, 1997.
Jacques SAPIR (ed.), Retour sur l'URSS. Economie, société, histoire, 1997.
François BAFOIL (ed.), Les stratégies allemandes en Europe centrale et
orientale. Une géopolitique des investisselnents directs, 1997.
Gilles LEPESANT, Géopolitique des frontières orientales de l '.4llenzagne,
1998.
Cuong LE VAN, Jacques MAZIER (eds.), L'économie vietnamienne en
transition. Les facteurs de la réussite, 1998.
Catherine LOCATELLI, Energie et transition en Russie. Les nouveaux
acteurs industriels, 1998.
Marie LAVIGNE, Économie du Vietnam. Réforme, ouverture et
développement, 1999.
Thomas SZENDE (ed.), La Hongrie au XXe siècle. Regards sur llne
civilisation, 2000.
Jean-Paul DEPRETIO, Pour une histoire sociale du régime soviétique
(1918-1936), 2001.
Julien VERCUEIL, Transition et ouverture de l'économie russe
(19922002),2002.
Sophie BRANA, Mathilde MESNARD et Yves ZLOTOWSKI (eds.), La
transition monétaire russe, 2002.La table de multiplication est plus sage, plus absolue que le
vieux bon Dieu,. jamais, vous entendez, jamais elle ne se
trompe. Il n'est rien de plus heureux que les chiffres qui
vivent sous les lois éternelles et ordonnées de la loi de
multiplication. Jamais d'hésitations ni d'erreurs. Cette
vérité est unique et le vrai chemin vers celle-ci est
également unique,. la vérité est "quatre", et le vrai chemin
est "deux fois deux". Ne serait-il pas absurde que ces deux
chiffres heureusement et idéalement multipliés l'un par
l'autre se missent à penser à je ne sais quelle liberté,
c'està-dire à la faute?
Evguéni Zamiatine, Nous autres
Je fus reçu par une espèce de jeune fille que I 'habitude de
mentir continuellement avait affligée d'un strabisme
convergeant.
Mikhail Boulgakov, Le Maître et MargueriteAVERTISSEMENT
Pour la commodité du lecteur français, nous avons adopté dans le
corps du texte la transcription française des noms propres russes et des
noms géographiques.
Cependant, pour les références bibliographiques en russe se trouvant
dans les notes infrapaginales, nous avons eu systématiquement recours à la
translittération internationale, telle qu'elle est adoptée dans la majorité des
revues spécialisées et des bibliothèques.
Les références bibliographiques en français peuvent présenter
plusieurs orthographes d'un même nom, selon les sources utilisées, car
nous avons respecté le choix des auteurs.
Les titres des périodiques russes cités dans le corps du texte ne sont
traduits que lors de leur première apparition.JEAN-PHILIPPE JACCARD
AVANT-PROPOS
Le titre de cet ouvrage peut paraître présomptueux. En effet, couvrir
tout un siècle, dans un espace géographique qui représente "le sixième des
terres émergées du globe" et en lien avec un thème aussi large et aussi
vague que le mensonge est assez périlleux. Et pourtant, il nous a semblé
intéressant d'aborder cette problématique, et ce aussi bien dans le but de
déterminer un certain nombre de caractéristiques propres au mensonge tel
qu'il s'est exprimé au xxe siècle en Russie que dans celui de comprendre
les convergences qui existent entre le "mensonge totalitaire" et le
"mensonge démocratique" et, le cas échéant, d'être en mesure de déjouer
ou, tout au moins, de décrypter ce phénomène auquel nous sommes
confrontés tous les jours.
Bien entendu, un autre pays aurait pu servir de terrain
d'investigation, mais plusieurs raisons expliquent le choix de celui-ci, la plus
immédiate et la plus simple étant que ce projet est né au Département de
langue, littérature et civilisation russes de l'Université de Genève, avec
pour but de réunir des chercheurs qui, en Suisse romande, travaillent sur ce
pays, et non pas dans une perspective sociale ou politique, mais culturelle
et historique.
Mais il y ad' autres raisons.
* * *
« On n'a jamais autant menti que de nos jours» affmnait dans ses
Réflexions sur le mensonge (1943), en pleine Seconde Guerre mondiale,
Alexandre Koyré. Et il ajoutait que si l'homme a toujours menti (ne
seraitce que pour «le plaisir d'exercer cette faculté étonnante de "dire ce qui12 Jean-Philippe Jaccard
n'est pas" et de créer, par sa parole, un monde dont il est seul
responsable»), «l'époque actuelle, ou plus exactement les régimes
totalitaires, ont puissamment innové »1. L'aspect le plus frappant de cette
innovation résiderait, toujours d'après Koyré, dans le fait que les régimes
totalitaires ont développé la pratique du «mensonge au deuxième degré »,
si bien décrite par Machiavel, qui consiste à dire la vérité sur son
programme politique (Hitler a tout dit dans Mein Kampf) uniquement parce
que l'on sait que ce ne sera pas cru par "les autres", c'est-à-dire les
noninitiés. Le monde totalitaire est donc construit à la manière d'une société
secrète, c'est-à-dire fennée sur elle-même, avec quelques initiés entourés
d'un troupeau plein de foi dans un programme aberrant, mais qui présente
toutefois cette différence avec la société secrète qu'il diffuse massivement
sa "vérité" à l'extérieur en sachant qu'on ne le croira pas. C'est ce que
Koyré appelle la conspiration en plein jour, laquelle présente cet avantage
certain pour tout pouvoir politique de ne même plus être tenu à la
vraisemblance.
Que le problème du "mensonge totalitaire" ne se résume pas à ces
quelques réflexions est une évidence, mais force est de constater que la
Russie du xxe siècle est un excellent laboratoire pour qui étudie ce
problème, dans la mesure où les ficelles qui actionnent le dispositif du
mensonge sont souvent si énormes qu'elle pennettent de mieux en voir le
fonctionnement. Et de poser les questions qu'appelle obligatoirement ne
serait-ce déjà que le titre de ce recueil: le mensonge en Russie présente-t-il
au XXe siècle des spécificités telles qu'elles puissent être isolées? Est-il
pertinent de parler du seul XXe siècle? Y a-t-il un "mensonge ancien" et
un "mensonge moderne"? Ou même, peut-être, "post-moderne"? Le totalitaire" est-il si différent du "mensonge démocratique"?
Peut-être pas, mais, dans ce cas, en quoi est-il si "déconcertant", pour
reprendre le mot de Ante Ciliga2? C'est à ces questions, entre autres, que
tentent de répondre les auteurs des articles généraux qui composent la
première partie (Jean-Philippe Jaccard, Michail Maiatsky, Georges Nivat).
Les autres parties suivent la chronologie du pays, c'est-à-dire la
Russie, et non pas l'Union soviétique, puisque le champ traité va au-delà
de la période soviétique et s'achève sur les derniers jours de 1999, pendant
le siège de Grozny, la capitale tchétchène. Pour la Russie, ce siècle
représente, très schématiquement: vingt-cinq ans de révolutions et de
troubles, trente ans de stalinisme, trente autres années de totalitarisme
"mou" ("mou" par rapport à la période précédente, bien sûr), et,
finalement, quinze ans de tentatives, plus ou moins convaincantes, pour
sortir du système. A chacune de ces périodes, le mensonge a pris des traits
spécifiques.
La période stalinienne, que recouvre la deuxième partie, représente
certainement le terrain d'investigation qui f

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