LES ÉCRITS MEXICAINS DE S.M
209 pages
Français

LES ÉCRITS MEXICAINS DE S.M , livre ebook

-

209 pages
Français

Description

Les textes mexicains d'Eisenstein, à présent réunis et révélés en français permettent d'ouvrir sur ce film inachevé de Que Viva Mexico ! un nouveau chapitre de la pensée critique. Ce film fut le centre de projections et d'erreurs d'analyse. Comment interroger cette fascination et cette attirance ? Comment envisager la pratique textuelle d'Eisenstein au Mexique ? Ce film inabouti palpite encore des trésors que furent ces images perdues, d'un eldorado étrange où la chasse au trésor a rendu inopérante toute approche réductionniste.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 octobre 2001
Nombre de lectures 315
EAN13 9782296265189
Langue Français
Poids de l'ouvrage 4 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0700€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

LES ÉCRITS MEXICAINS
DE S.M. EISENSTEINCollection Champs visuels
dirigée par Pierre-Jean Benghozi,
Jean-Pierre Esquenazi et Bruno Péquignot
Une collection d'ouvrages qui traitent de façon interdisciplinaire des
images, peinture, photographie, B.D., télévision, cinéma (acteurs, auteurs,
marché, metteurs en scène, thèmes, techniques, publics etc.). Cette
collection est ouverte à toutes les démarches théoriques et
méthodologiques appliquées aux questions spécifiques des usages
esthétiques et sociaux des techniques de l'image fixe ou animée, sans
craindre la confrontation des idées, mais aussi sans dogmatisme.
Dernières parutions
Jacky LAFORTUNE, Craie a(c)tion dans la ville, 2000.
Collectif, Cinéma et audio-visuel, 2000.
Isabelle JURA, Des images et des enfants, 2000.
Alain BOILLAT, Lafiction au cinéma, 2000.
Patrice VIVANCOS, Cinéma et Europe. Réflexions sur les politiques
européennes de soutien au cinéma, 2000.
Arnaud CHAPUY, Martine Carol filmée par Christian-Jaque. Un
phénomène du cinéma populaire, 2001.
José MOURE, Michelangelo Antonioni, 2001.
Jean-Pierre ESQUENAZI (dir.), Godard et le métier d'artiste, 2001.
René GARDlES et Marie-Claude TARANGER (dir.), Télévision:
questions deformes, 2001.
Vincent LOWY, L'histoire infilmable, 2001.
Soon-Mi PETEN, Frédéric SIJCHER, Yvon THIEC (coordonné par)
L'audiovisuel en Europe à l'épreuve de la convergence et de la
régulation, 2001.
Jacques WALTER (sous la direction de), Télévision et exclusion, 2001.
Jean-Paul AUBERT, Le cinéma de Vicente Aranda, 2001.
Ondine BRÉAUD, Le Réalisme dans l'image informatique, 2001.
Uwe BERNHARDT, Le regard imparfait: réalité et distance en
photographie, 2001.Textes réunis et présentés par
Steven BERNAS
LES ÉCRITS MEXICAINS
DE S.M. EISENSTEIN
L'Harmattan L'Harmattan Hongrie L'Harmattan Italia
Hargita u. 3 Via Bava, 375-7, rue de l'École-Polytechnique
1026 Budapest 10214 Torino75005 Paris
France HONGRIE ITALIE(Ç)L'Harmattan, 2001
ISBN: 2-7475-1279-7QUE VIVA MEXICO!
DE S. M. EISENSTEIN
I. Présentation de :
STEVEN BERNASIntroduction
Les recherches eisensteiniennes ne permettent pas que
l'aspect biographique domine la problématique de ce f11m
inachevé Que Viva Mexico! Ni les formules: « Eisenstein le
bandant », ni les réductions et les anathèmes sur «le montage
des attractions» (Eisenstein, 1922), ne peuvent réduire ni
interdire les relations entre l'histoire et l'histoire de la théorie du
cinéma. De même, le lien entre la biographie et le processus de
production esthétique d'une œuvre ne peut être aboli.
Le responsable des archives d'Eisenstein à Moscou,
Naoum I<leyman, prévoit 24 volumes et non 6 volumes publiés
actuellement, pour mettre au jour la totalité textuelle des écrits
d'Eisenstein. Il déclare:
" Paradoxally, our image of Eisenstein is also changing
all the time. The most positive aspect of this whole process is
that he has not yet been canonised. We can still argue about
him. Indeed he does not allow himself to be canonised."l
Ce discours sur le cinquantième anniversaire de la
mort du réalisateur insiste sur la diversité et la richesse des
travaux écrits d'Eisenstein. L'approche historique de la théorie
est bien plus féconde. Comprendre Eisenstein n'est pas réduire
1 I<J.eyman Naoum, Einsenstein's Rediscovered, Chapter 1, «Arguments and
ancestors », Edited by Ian Christie and Richard Taylor, Routledge éd.,
London and New York, 1993.
7son approche du montage à un jeu gratuit et stérile. Pour le
réalisateur, le jeu existe et est porteur de créativité: il permet
d'envisager comment créer, jouer et jouir de l'image; car la
morale du travail exclut, de fait, la vie et le jeu du savoir-faire
des ftlms. Aborder le théorique permet d'envisager la cruauté de
la théorie sur un sujet qu'elle ne maîtrise pas toujours: les
relations entre le pulsionnel, le désirant et le sadisme de la
caméra; Eisenstein exhibe ce processus depuis Que Viva
Mexico! jusqu'à Ivan le Terrible. Il interroge l'usage du sadisme
banal dans la société et dans les institutions du savoir. Le
sadisme ne veut pas comprendre, il veut dominer, même au
cinéma. Aborder ce réalisateur n'est pas innocent. Et jusqu'à
présent cela s'est fait au détriment de l'édifice commun de
l'histoire du savoir en général et du savoir sur Eisenstein et sur
Que Viva Mexico! en particulier. De nombreux critiques se sont
montrés cruels envers l'image d'Eisenstein et se sont mépris sur
l'étendue de son travail. Godard a emboîté le pas en misant sur
le « pur » Vertov contre « le collabo » Eisenstein.
Il faudrait peut-être accepter comme les Anglo-saxons
de redécouvrir Eisenstein. Car l'œuvre écrite d'Eisenstein est
prolixe: elle ouvre à l'interrogation de cet enjeu de l'acte créatif
que l'on voit à l'œuvre dans Que Viva Mexico!
81. La fracture de Que Viva Mexico!
La multiplicité des travaux sur le f11m inachevé
d'Eisenstein qui devait s'intituler Que Viva Mexico! interroge à
plus d'un titre. L'inachèvement rend difficile la cohésion des
approches. La problématique repose sur la détermination des
intervenants: critiques, écrivains, théoriciens divers, cinéphiles,
journalistes, qui n'ont rendu compte du [11m que de manière
fragmentaire et savante. Ce morcellement ne permet pas de
construction unitaire du savoir. D'autant que les approches sont
le plus souvent opposées, rarement complémentaires.
La problématique de l'inachèvement est enfouie,
taboue et sacrée, dans un rituel extatique des adorateurs, mais
aussi des découvreurs. Les œuvres issues de ce f11m inachevé
sont pratiquement parquées dans quelques cinémathèques,
comme dans une réserve, sous forme de versions tronquées.
Sacralité de l'objet perdu, mutilé dans le corps même du [11m :
lieu de perversité absolue, appropriation abusive du bien
d'autrui: toutes les pellicules f11mées n'ont pas été développées,
toutes ont été volées à leur auteur Sergueï Mikhaïlovitch
Eisenstein. C'est le vol qui préside au désir d'accaparement, tiré
à hue et à dia. Le f11m est enfoui sous un monceau de
projections et d'interprétations aussi diverses que possible. Se
manifestent la manipulation obscène et le fantasme de capture
9de la puissance d'un grand cinéaste. Tout vol d'œuvre n'est-il
pas comparable au fantasme du viol d'une sépulture? Pourtant
cet acte étrange et pervers continue d'exercer une fascination.
L'excitation a été à son comble lorsque certains critiques ont
mis en avant le fait qu'Eisenstein ait été homosexuel. Est-ce
une preuve suffisante et un argument fondamental pour
l'analyse de Que Viva Mexico?
Tout sur Eisenstein a été projeté: tout dans l'ordre
sexuel, homosexuel; tout a été dit sur la fonction du refoulé et
de la théorie comme enflure de l'instinct, de l'écrit eisensteinien
comme ratiocination inutile; tout a été écrit à propos du
montage du désir à la sublimation; tout a été imaginé sur les
croquis d'Eisenstein au Mexique comme fantasmes sexuels,
érotisation graphique gratuite; tout a été inventé sur le
théoricien inconséquent aux inconséquences pratiques; tout a
été écrit sur l'éloge et le blâme de son discours omniscient
d'intellectuel. On a même osé, à son propos, parler de
méconnaissance, d'utilisation simpliste des savoirs des linguistes
du cercle de Moscou.
Bien que Que Viva Mexico! appartienne à la catégorie
des œuvres inachevées, elle est considérée comme une œuvre
mythique et non tronquée, ce qui en falsifie l'analyse même. Il
n'y a qu'un pas, très vite franchi, pour interpréter hâtivement,
puisque les objets pratiques et conceptuels qui constituent ce
f11m n'ont pas été examinés: l'éparpillement des matériaux est
considérable. Seule la rumeur, et bien évidemment, les
projections de versions hétérogènes, font vivre ce f11m qui
n'existe pas. La signature d'Eisenstein ne peut être revendiquée
par aucun des monteurs, aucun des théoriciens, aucun des

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