Jazz et société sous l Occupation
312 pages
Français

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Jazz et société sous l'Occupation , livre ebook

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Description

Le jazz, considéré par les nazis comme une musique "négro-judéo-anglo-saxonne" a connu, paradoxalement, un grand succès sous l'Occupation. A partir d'une étude approfondie de l'histoire du jazz en Allemagne, l'auteur explique la présence de militaires allemands dans les salles de concerts, cabarets. Il présente la situation du jazz en Belgique, à Paris et dans les Hots Clubs de province.

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Informations

Publié par
Date de parution 01 novembre 2009
Nombre de lectures 372
EAN13 9782336253565
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,1200€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

DU MÊME AUTEUR
“Juzz au Havre and Caux”
depuis les années 20... et ça continue ...
Luneray, Éditions Bertout, 1997.
« Le marché du disque de jazz sous l’Occupation » in Culture, presse et entreprises sous l’Occupation vecteurs d’idées, médiateurs d’information ? Paris, CTHS Éditions, 2009.
Jazz et société sous l'Occupation

Gérard Regnier
© L’Harmattan, 2009
5-7, rue de l’Ecole polytechnique, 75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan1@wanadoo.fr
9782296101340
EAN : 9782296101340
Sommaire
DU MÊME AUTEUR Page de titre Page de Copyright Dedicace PRÉFACE AVANT-PROPOS INTRODUCTION Chapitre 1 - Une musique « négro-judéo-anglo-saxonne » dans l’Europe en guerre Chapitre 2 - Jazz et swing, la musique des jeunes Chapitre 3 - Jazz interdit : légende ou réalité ? Chapitre 4 - Les enjeux idéologiques CONCLUSION REPÈRES CHRONOLOGIQUES ÉLÉMENTS BIBLIOGRAPHIQUES TABLE DES ANNEXES ANNEXE I ANNEXE II ANNEXE III ANNEXE IV ANNEXE V ANNEXE VI ANNEXE VII ANNEXE VIII ANNEEXE IX ANNEXE X ANNEXE XI ANNEXE XII ANNEXE XIII INDEX DES NOMS CITÉS REMERCIEMENTS Musiques et Champ Social dirigée par Anne-Marie Green
À la tribu de la cabane, à mes petits-enfants : Carla, Emma, Pauline et Andreas
« Symbole de liberté, le jazz a toujours été le contrepoint du pas de l’oie »
Mike Zwerin,
« Une idée fausse est un fait vrai »
Jean-Noël Jeanneney
En couverture :
Couverture du catalogue de l’exposition Entartete Musik (“Musique dégénérée”), qui s’est tenue à Düsseldorf du 24 mai au 14 juin 1938. Illustration de Ludwig Tersch pour la couverture du pamphlet éponyme de Hans Severus Ziegler. Avec l’aimable autorisation de l’Universitäts-und Landesbibliothek de Düsseldorf. Arch. 19 K.W. 5918.
PRÉFACE
Gérard Régnier est un amateur de jazz et un professionnel de l’histoire. Le jazz, il l’aime depuis pas mal de décennies, c’est-à-dire qu’il le pratique, qu’il l’écoute et qu’il aime en parler. L’histoire, il la pratique aussi, et depuis fort longtemps, mais c’est une retraite bien remplie d’administrateur scolaire qui lui a permis de donner ici toute sa mesure — elle est grande — en commençant, à 65 ans, une thèse de doctorat, soutenue en 2006 et dont vous allez découvrir ici l’essentiel. Vous avez bien lu : thèse soutenue à 72 ans, livre publié à 75. Une belle carrière commence.
L’amateur de jazz avait entendu la leçon sans cesse répétée : cette musique n’avait rien pour plaire à Vichy et aux nazis puisqu’elle cumulait toutes les tares (noire, américaine et, pour certains de ces auteurs, juive et tsigane) ; elle avait donc été persécutée, voire interdite. L’historien professionnel répond, après une enquête minutieuse : c’est une légende. En France entre 1940 et 1944 le jazz a été joué dans des salles de concert et des cabarets, il a été enregistré par des maisons de référence, il a été commenté dans la presse des deux zones, il a été diffusé sur les ondes de la Radiodiffusion nationale, mais aussi de Radio-Paris, station sous contrôle allemand, qui n’a pas hésité à « réquisitionner » un grand orchestre swing. Etc. Toute l’époque est ainsi encadrée par, en amont, l’enregistrement de Nuages — son œuvre emblématique -, à la fin de l’année 1940, et, en aval, moins de trois mois avant le Débarquement, par une tournée à succès dans pas moins de vingt et une villes, et le point commun entre ces deux événements s’appelle Django Reinhardt, artiste manouche qu’aucun gestapiste en manteau de cuir ne vient pour autant arrêter à l’issue d’un concert.
Nous aurait-on menti ? Inutile de recourir à ces formules manichéennes et paranoïaques ; il suffit de se rappeler que le vécu historique est un temps et un espace où se croisent, se superposent et s’entremêlent les principes et les intérêts, les désirs et les calculs de tous les acteurs, individuels ou collectifs. Dès le printemps 1939, dans La Règle du jeu Jean Renoir, costumé en ours pataud, nous avait déjà craché le morceau : « Sur cette terre, il y a quelque chose d’effroyable, c’est que tout le monde a ses raisons ». En tant que régime établi Vichy n’a jamais eu que de l’antipathie pour cette musique de sauvages, en tant que régime établi le Troisième Reich a, de son côté, officiellement mis au pilori cet « art dégénéré ». Reste que, outre quelques comportements personnels atypiques (un Georges Hilaire à Vichy, un Dietrich Schulz-Köhn chez les occupants), d’autres déterminations ont pu entrer en ligne de compte, générant des réalités plus en demi-teinte.
La première détermination est d’ordre tactique. Le pouvoir nazi vouait la France au statut d’arrière-pays décadent de l’empire aryen, entre agriculture et lupanar : qu’on s’y vautrât dans un musique négroïde lui convenait fort bien. La seconde est d’ordre proprement culturel. De même que l’interdiction des bals publics n’aura pu empêcher la floraison discrète des bals clandestins ou, tout simplement, privés, de même les dirigeants politiques et les médiateurs culturels les plus sensibles à la « demande sociale » (Goebbels compris) ont-ils conscience qu’il faut lâcher du lest. Aveu et indice. L’aveu est dans la reconnaissance d’un profond désir de « swing », traduisons : de rythme, d’introversion, d’exotisme, en un mot : de liberté. Cette traduction reste opaque aux dictatures qui ne raisonnent qu’en termes de concession au « divertissement » ; elle est limpide à l’observateur d’aujourd’hui. Quant à l’indice, c’est celui d’une vraie révolution encore à ses débuts : l’émergence de ce que notre époque appellera une « culture jeune », caricaturée façon 1940 en uniforme de zazou comme elle le sera façon 1950 en uniforme de blouson noir mais qui, en nombre, se manifeste surtout ici dans la floraison des Hot-Clubs à travers tout le territoire — dimension que le Cauchois Gérard Régnier ne saurait oublier.
À partir de là, s’il est bien clair qu’il subsistera, entre traditionalistes et fascistes radicaux, de la Légion Française des (anciens) Combattants à la SS de Himmler, un fort parti hostile, il suffit aux autres de ruser pour préserver l’essentiel. Quelques idéologues, comme le musicologue André Coeuroy, s’en vont chercher au jazz des racines européennes mais le père de la jazzophilie mondiale, le maurrassien Hugues Panassié, demeure, lui, ferme sur ses principes, au cœur desquels gît l’essentialisation d’un jazz « pur » foncièrement associé à ce que l’on commence à baptiser ailleurs la négritude. Plus pragmatiques, les programmateurs, les éditeurs, les chefs d’orchestre se contentent de franciser les titres des standards US, d’annoncer Benny Goodman sous le nom de Robert Bonhomme et d’accorder dans les programmes une place flatteuse à un jazz français il est vrai déjà florissant à la veille de la guerre.
Au fond, le milieu étudié à la loupe par Gérard Régnier est à l’image de toute la France et son étude a les vertus d’une métonymie. Qu’est-ce que « collaborer » ? Ce n’est évidemment pas continuer à faire sous occupation allemande son métier (Django tout comme Charles Delaunay ont fait du jazz leur métier) car, à ce compte, un artisan juif continuant à travailler dans une entreprise aryanisée du Sentier serait un collaborateur. En revanche, collaborer c’est déjà accepter d’apporter la réalité et l’image d’une compétence à une entreprise partie prenante de la propagande « européenne » — Radio-Paris, un magazine de « variétés » bien orientées (et dirigé par un ancien chanteur estampillé à gauche), une tournée en Allemagne, etc.
Des recherches analogues, portant sur le théâtre et le cinéma, ont conduit aux mêmes conclusions. Tout l’intérêt de l’étude, à la fois compréhensive et lucide, de Gérard Régnier est de nous faire toucher du doigt que le jazz, art jeune, dans tous les sens du terme, n’a pas fait exception à la règle. Reste qu’on peut lui trouver une vertu : d’avoir réussi, moitié par ruse, moiti

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