Hybrides linguistiques
260 pages
Français

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Hybrides linguistiques , livre ebook

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Description

Cet ouvrage présente un ensemble géographiquement contrasté de parlures hybrides, du point de vue de leurs fonctionnements sociolinguistiques, aussi bien pour leurs usages que pour leurs représentations. Il s'agit d'hybrides nés dans la migration, comme le Spanglish, ou plus largement de variétés interlectales apparues au sein d'une configuration pluri ou diglossique, comme le camfranglais, le castrapo, le chiac, le francitan, l'Hiberno-English, ou encore le jopara. Ils se distinguent des créoles, aussi bien par leur genèse que par leur statut ou leurs fonctionnements. Ces parlures ont une visibilité ethnosocioculturelle importante : on en parle et on les met en scène.

Informations

Publié par
Date de parution 01 mars 2010
Nombre de lectures 74
EAN13 9782296932623
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,1000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Hybrides linguistiques
Sociolinguistique
Collection dirigée par Henri Boyer (Université de Montpellier 3)

Conseil scientifique :
G. Bergounioux (Univ. d’Orléans, France), A. Boudreau (Univ. de Moncton, Canada), E. Boix (Univ. de Barcelona, Espagne), J.-F. De Pietro (IRDP, Neuchâtel, Suisse), J. Guilhaumou (CNRS, France), G. Kremnitz (Univ. de Wien, Autriche), M. Matthey (Univ. de Grenoble 3, France), B. Maurer (Univ. de Montpellier 3, France), H. Monteagudo (Univ. de Santiago de Compostela, Espagne), H. Penner (Univ. Católica de Asunción, Paraguay), A. Kristol (Univ. de Neuchâtel, Suisse), Ch. Lagarde (Univ. de Perpignan Via Domitia, France), M. Tournier (CNRS, France)

La Collection Sociolinguistique se veut un lieu exigeant d’expression et de confrontation des diverses recherches en sciences du langage ou dans les champs disciplinaires connexes qui, en France et ailleurs, contribuent à l’intelligence de l’exercice des langues en société : qu’elles traitent de la variation ou de la pluralité linguistiques et donc des mécanismes de valorisation et de stigmatisation des formes linguistiques et des idiomes en présence (dans les faits comme dans les imaginaires collectifs), qu’elles analysent des interventions glottopolitiques ou encore qu’elles interrogent la dimension sociopragmatique de l’activité de langage, orale ou scripturale, ordinaire, médiatique ou même « littéraire » .
Donc une collection largement ouverte à la diversité des terrains, des objets, des méthodologies. Et, bien entendu, des sensibilités.

Dernières parutions
Patrick CHARAUDEAU (dir.), Identités sociales et discursives du sujet parlant , 2009.
Carmen ALÉN GARABATO, Langues minoritaires en quête de dignité. Le galicien en Espagne et l’occitan en France , 2009.
Dominique VERBEKEN (textes réunis par), Entre sens et signification. Constitution du sens : points de vue sur l’articulation sémantique-pragmatique , 2009.
François PIC, Patrick SAUZET, Politique linguistique et enseignement des Langues de France’ , 2009.
Jean Léo LÉONARD, Ksenija DJORDJEVIĆ, Construction nationale et intégration multilingue en Europe. Deux études de cas périphériques : Finlande et Serbie , 2008.
Carmen ALÉN GARABATO, Actes de résistance sociolinguistique. Les défis d’une production périodique militante en langue d’oc , 2008.
Sous la direction de
Henri Boyer


Hybrides linguistiques
Genèses, statuts, fonctionnements


L’Harmattan
© L’Harmattan, 2010
5-7, rue de l’Ecole polytechnique, 75005 Paris

http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-11196-7
EAN : 9782296111967

Fabrication numérique : Socprest, 2012
Henri BOYER


INTRODUCTION


« Bâtards linguistiques » ?

Les parlures hybrides

entre interlectes et interlangues


D’entrée se pose la question de la catégorisation, disons métalinguistique, de l’objet polymorphe auquel est consacré cet ouvrage. La littérature du champ disciplinaire concerné est à cet égard hésitante. Une fois écarté le terme de créole {1} qui désigne une langue au plein sens du terme ayant acquis une complète autonomie de fonctionnement, née cependant dans un certain contexte : sociolinguistique (le contact inégalitaire de plusieurs langues dont l’une est la seule dominante), historique (la colonisation esclavagiste), et géographique (l’insularité) (Chaudenson 1992, 1995), on peut s’interroger sur la pertinence désignative de termes comme interlecte , inter-langues (Gardy 1988) interlangue ou encore entrelangue {2} .
Pour ma part, même si j’ai pu employer exclusivement le terme interlecte (Boyer 1988), je considère qu’il est légitime d’accepter le terme d’ interlangue en lui adjoignant le qualificatif d’ historique pour pointer certes l’analogie avec le processus individuel (mais également groupal) de construction de systèmes intermédiaires et provisoires lors de l’apprentissage ou l’acquisition d’une langue non maternelle par les adultes (voir par ex. Porquier 1986), mais pour montrer également la nature communautaire et durable du cas qui nous occupe. Dans le cas de l’ interlangue historique , l’hybridation s’est fixée collectivement et présente une relative stabilité sur une plus ou moins longue durée, dans ses usages comme dans ses représentations. Ce qui n’exclut pas son déclin voire sa disparition, en particulier parce que son statut sociolinguistique reste problématique, lié organiquement à une configuration de type diglossique et donc pris dans une dynamique concurrentielle entre deux ou plusieurs langues en conflit. On peut ainsi utiliser la désignation métalinguistique d’ interlangue historique pour indiquer une installation sociolinguistique durable et conserver la désignation d’ interlecte (ou de parlure interlectale ) pour une version plus fraîchement apparue (et peut-être moins étendue), ou encore en voie d’extinction.
En général la parlure en question participe d’un complexus ( diglossique ) (Gardy 1985) {3} . Qu’elle soit fixée et transmise (Prudent 1981) depuis longtemps, qu’elle soit liée à un seul groupe linguistique (au sein d’une société plurilingue), qu’elle soit d’apparition récente au sein d’un réseau ou qu’elle participe au répertoire commun de l’ensemble des membres d’une communauté linguistique , elle présente un fonctionnement sociolinguistique pourvu d’une certaine autonomie communicationnelle, faible mais parfaitement repérée.
Il sera donc question ici d’interlectes et/ou d’interlangues historiques, de parlures que l’air du temps qualifierait de métissées et qui sont autant de manifestations d’une hétérogénéité intégrée à base de matériaux linguistiques bi ou plurilingues, d’ interférences , donc de marques transcodiques (calques, emprunts…) et de phénomènes de néocodage (Matthey et De Pietro 1997), constitutifs d’une réalité linguistique bricolée qui ne peut être considérée comme essentiellement d’ordre diatopique, pas plus du reste que d’ordre diastratique, mais bien fondamentalement comme d’ordre interlectal {4} . Il ne s’agit donc pas d’authentiques systèmes linguistiques, comme les créoles, mais d’ensembles dont les discours épilinguistiques (ordinaires et autres) qu’ils suscitent mettent en lumière la singularité, et qui font l’objet de mises en scène diverses et variées (artistiques, médiatiques…) {5} .
On n’a pas retenu ici d’interlangue de migrants, comme le « melandjao », par exemple, qu’a excellemment décrit Ch. Lagarde (Lagarde 1996). Car s’il est également question dans ce cas de figure d’une parlure interlectale, le plus souvent elle ne survit pas (massivement) à la première génération de la migration. Elle est bien plus proche de l’interlangue au sens didactologique du terme que des variétés qui sont traitées dans cet ouvrage. Cependant le spanglish (voir l’étude de Sophie Sarrazin) dont la genèse n’est pas fondamentalement étrangère à celle du « melandjao » (la proximité linguistique en moins, qui a son importance) témoigne du fait que ce type d’interlangue normalement transitoire peut s’installer au sein d’une communauté, en particulier lorsqu’elle est garante de la visibilité d’un groupe qui prétend à une identification communautaire à part entière {6} .
De même les argots, que Pierre Bourdieu considère comme des marchés francs (Bourdieu 1982,1983), en marge des diverses variétés linguistiques qui constituent le répertoire courant d’une communauté linguistique donnée, et qui s’opposent précisément aux usages et aux représentations dominants qui régissent ladite communauté, ne sont pas abordés ici, même s’ils peuvent participer d’un « bricolage ethnosociolinguistique » tel que le « français des jeunes » – ou mieux : « des jeunes des cités » (cf. par ex. Boyer dir. 1997), à propos duquel J-P. Goudaillier parle de « parler véhiculaire interethnique » (Goudaillier 1998 : 7). Concernant ce français l’hybridation est bien là, de même que des mises en scène de tous ordres (sketches, films, articles de presse…) mais doit-on considérer cela comme une seule et même parlure ou bien plutôt comme une mosaïque de parlures de réseaux , circonscrites à une cité, voire à un quartier, et même si les pratiques néologiques (qui rel&#

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