Éducation, capital humain et développement social par le créole en Haïti
217 pages
Français

Éducation, capital humain et développement social par le créole en Haïti , livre ebook

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217 pages
Français

Description

Cet ouvrage aborde l'éducation et la situation sociopolitique et économique d'Haïti de 1804 à nos jours. Après plus de 200 ans d'indépendance, cette île est aujourd'hui l'un des pays les plus pauvres du monde. Outre cette pauvreté matérielle massive, l'enseignement en français, langue que les enfants ne parlent pas, les empêche de contribuer efficacement au progrès de leur pays. L'auteur offre un outil de réflexion susceptible de favoriser le développement socioéconomique d'Haïti, par une éducation qui aide les élèves à développer leurs compétences, optimiser leur capital humain, en tenant compte de leur langue maternelle, le créole, dans leur apprentissage.

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Informations

Publié par
Date de parution 15 juin 2017
Nombre de lectures 18
EAN13 9782140040597
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0750€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

René SaurelÉdouard
Éducation, capital humain et développement social par le créole en Haïti
Préface de Daniel Derivois
Éducation, capital humain
et développement social
par le créole en Haïti
René Saurel ÉDOUARDÉducation, capital humain et développement social
par le créole en Haïti
Préface de Daniel Derivois
© L’Harmattan, 2017 5-7, rue de l’École-Polytechnique, 75005 Paris http://www.editions-harmattan.fr ISBN : 978-2-343-12458-2 EAN : 9782343124582
Préface Haïti face à la mondialité Il y a au moins trois portes d’entrée sur l’ouvrage que nous propose René Saurel Edouard. La première estHaïti.Et à travers cette porte, le lecteur découvre une fois de plus l’énigme de la « petite Espagne », de la « Perle des Antilles » mais aussi de la première République noire qui, peinant à sortir la tête de l’eau depuis plus de deux siècles, ne cesse de faire l’objet d’analyses pour les sciences humaines et sociales. Retracer l’histoire d’Haïti est à chaque fois un exercice passionnant mais déroutant, comme si les grilles de lecture utilisées ne suffisaient pas à rendre compte de la complexité de ce peuple coupé de lui-même mais tellement ancré dans le paradoxe de sa terre et dans l’Histoire Globale (Testot, 2008). La deuxième porte d’entrée sur ce livre est la première mondialisation –un des objets de l’Histoire Globale –dont a été saisi précocement ce peuple depuis l’arrachement à l’Afrique, la «Porte du non-retour», la traversée transatlantique et la confrontation à l’héritage précolombien. Revenir sur ce long processus historique du commerce triangulaire, de l’esclavage, de la colonisation, de la guerre jusqu’à l’Indépendance de 1804 n’est pas moins fastidieux, tant le mot « mondialisation », dans son sens contemporain, est galvaudé et prête à des interprétations réductrices.
Ainsi, une troisième façon de découvrir ces pages que nous livre René Saurel Edouard est d’avoir en tête, tout au long de la lecture,Haïti face à la mondialité. Cette porte, plus étroite, se lit d’emblée dans le titre de l’ouvrage et au fil du raisonnement de l’auteur à travers le «Capital humain» qu’il considère comme moteur du
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développement social des Haïtiens et en particulier des enfants/élèves haïtiens. Dans les salles de classe, dans certaines familles, comme dans la vie sociale de tous les jours, ces enfants sont confrontés à la coexistence, voire unegéopolitique des langues– ici principalement le créole haïtien et le français mais on peut aussi ajouter l’anglais et l’espagnol – dans leur psyché d’écoliers.
Si « capital » relève de la mondialisation, « humain » relève de la mondialité, terme cher à E. Glissant (2005) qui en a sorti lessignifiés notamment à partir de la négritude et de la créolité. La mondialité invite à (re) mettre de l’humanité et de la créativité dans les rapports de force que véhicule la mondialisation (Derivois, 2017) dans la géo-économie et le marché du savoir. En faisant du «capital humain» le socle de cet ouvrage où l’impact du passé d’Haïti est réinterrogé dans les apprentissages et la réussite scolaires, René Saurel Edouard fait un pari risqué mais nécessaire. Risqué car «»capital humain  résonne avec toute l’histoire ancienne d’Haïti et l’histoire du monde globalisé actuel, avec tout ce que cela comporte de domination et de guerre de/sur l’imaginaire, notamment à travers les langues.
Entreprise osée donc que d’utiliser un vocabulaire capitaliste pour appeler à mettre en évidence l’humanité de l’homme. Mais cette entreprise est nécessaire pour tenter de réconcilier les histoires au sein de l’Histoire Globale, réduire les clivages entre les bons et les méchants, entre le créole et le français. Les mots ont une histoire, ils façonnent l’imaginaire mais par-delà les mots, l’auteur interroge les conditions de réconciliation du peuple haïtien avec lui-même et avec les autres. Il interroge le rapport à la langue qui est à considérer non pas uniquement dans sa dimension linguistique mais surtout en tant que vision du monde, vision sur/de soi et sur/de l’autre – l’autre en soi et autour de soi.
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Dans ce pays « en échec », marqué par des traumatismes anciens et actuels, dans ce bout d’île en errance identitaire, l’auteur interroge également le rôle des ONG et de l’Etat dans ce diagnostic socio-politique de l’éducation en Haïti. Qu’est-ce qui empêche les enfants haïtiens de développer leur capital humain ? se demande René Saurel Edouard. L’auteur préconise avec fermeté la prise en compte de la langue maternelle. Mais la langue maternelle ne se réduit pas aux mots et à la grammaire, elle témoigne d’un ancrage identitaire, existentiel comme condition préalable à l’altérité linguistique et humaine. La langue maternelle est à entendre comme grille de lecture du monde, grille de lecture de soi dans le monde.
« Je parle et surtout j’écris en présence de toutes les langues du monde », constate Glissant, 1996. Ce n’est pas le fait de parler français, d’apprendre en français qui éloigne les enfants/élèves haïtiens d’eux-mêmes. Ce n’est pas la diversité linguistique qui pose problème en Haïti mais la (sur-) valorisation du françaisau détriment du créole. Ce qui pose problème, c’est la domination linguistique, ce sont les traces historiques du rapport dominant/dominé dans la façon de s’exprimer, de s’adresser, de se parler à soi-même et à l’autre. Dans la façon de se regarder et de regarder l’autre. Parler en présence de toutes les langues du monde, c’est parler en présence de soi, c’est reconnaître la part d’altérité mais aussi le fait que toutes les langues sont autant de portes d’entrée sur soi-même et sur le monde. Utiliser des mots créoles, des mots français avec tous les accents du monde pour s’adresser à l’autre maisen présence de soi. Ne jamais se déconnecter de soi. René Saurel Edouard parle à juste titre de la nécessaire alliance entre français et créole pour optimiser le capital humain des élèves haïtiens. En un mot, passer de la mondialisation hégémonique des savoirs et des langues à la mondialité de l’expression de soi.
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En ce sens ce livre peut parler à tous, au-delà d’Haïti. Depuis les habitations coloniales, Haïti a été touché par les méfaits de la mondialisation. Ce qui se voit moins, c’est que le peuple qui a dû composer avec une diversité de langues africaines, européennes et amérindiennes, a aussi été frappé fondamentalement de mondialité, une mondialité à l’œuvre notamment chez les « marrons du Syllabaire » (Fouchard, 1988) qui, transgressant les signifiants esclavagistes et colonialistes, ont accouché de 1804 – la liberté d’être, de se lire, de s’écrire et de se dire dans sa langue.
Aujourd’hui, avec les effets de la mondialisation ressentis notamment à travers l’ambivalence de l’aide humanitaire, ce peuple, manifestement coupé de lui-même sur le plan linguistique par les institutions, l’est encore plus sur le plan identitaire. Avec la mondialité silencieuse qui remodifie les géographies identitaires et linguistiques, il devient encore possible de récolter les rejetons du Syllabaire, moyennant une implication forte de l’Etat au niveau des politiques d’éducation. Telle la symbolique « Porte du non-retour » (Sénégal, Guinée, Bénin, Togo), Haïti est au carrefour de l’Afrique, de l’Europe, des Amériques et du monde. Les barbelés idéologiques, linguistiques sont encore dans la société, les institutions, les familles et les salles de classe. Le peuple, lui, se retrouve plus que jamais face auxportes de la mondialité. Il n’y a pas d’autre choix que de risquer la traversée. Différemment cette fois. Ce livre nous y invite. Pr Daniel Derivois,Ph.D Professeur de psychologie et psychopathologie clinique à l’Université de Bourgogne Franche-Comté – Laboratoire de psychologie Psy-DREPI EA 7458 (Dynamiques Relationnelles et Processus Identitaires). Il est également conseiller en éducation pour GRHAN-France.
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Références Derivois, D. (2017).Clinique de la mondialité. Vivre ensemble avec soi-même, vivre ensemble avec les autres. De Boeck Université. Fouchard, J. (1988).Les Marrons du Syllabaire. Editions Henri Deschamps. Glissant, E. (2005).La Cohée du Lamentin. Gallimard Glissant, E. (1996).Introduction à une poétique du divers, Paris, Gallimard, 1996, pp. 18-19 Testot, L. (2008).L’Histoire globale. Editions Sciences humaines
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