Le système éducatif en Afrique noire

Antoine Nguidjol

Description

L'auteur entraîne le lecteur dans un tour d'horizon critique de l'institution scolaire africaine. Selon lui, l'école africaine est une "gendarmerie intellectuelle" issue du legs napoléonien et d'un christianisme missionnaire. La question scolaire est devenue cruciale au point de mériter une évaluation, un demi-siècle après les indépendances. La conjoncture décrite par l'auteur, bien que peu reluisante, n'annihile pas la perspective, pour les Africains, de produire eux-mêmes les connaissances qui leur sont nécessaires.

Sujets

• Éducation

Informations

• Publié par: L'Harmattan
• Date de parution: 01 avril 2007
• Nombre de lectures: 252
• EAN13: 9782336269542
• Langue: Français

Extrait

Etudes Africaines
Collection dirigée par Denis Pryen et François Manga Akoa

Déjà parus
Augustin RAMAZANI BISHWENDE, Ecclésiologie africaine de Famille de Dieu , 2007.
Pierre FANDIO, La littérature camerounaise dans le champ social, 2007.
Sous la direction de Diouldé Laya, de J.D. Pénel, et de Boubé Namaïwa, Boubou Hama-Un homme de culture nigérien , 2007.
Marcel-Duclos EFOUDEBE, L’Afrique survivra aux afro-pessimistes, 2007.
Valéry RIDDE, Equité et mise en œuvre des politiques de santé au Burkina Faso , 2007.
Frédéric Joël AIVO, Le président de la République en Afrique noire francophone , 2007.
Albert M’PAKA, Démocratie et société civile au CongoBrazzaville , 2007.
Anicet OLOA ZAMBO, L’affaire du Cameroun septentrional. Cameroun / Royaume-Uni , 2006.
Jean-Pierre MISSIÉ et Joseph TONDA (sous la direction de), Les Églises et la société congolaise aujourd’hui, 2006.
Albert Vianney MUKENA KATAYI, Dialogue avec la religion traditionnelle africaine, 2006.
Guy MVELLE, L’Union Africaine : fondements, organes, programmes et actions , 2006.
Claude GARRIER, Forêt et institutions ivoiriennes , 2006
Nicolas MONTEILLET, Médecines et sociétés secrètes au Cameroun , 2006.
Albert NGOU OVONO, Vague-à-l’âme, 2006.
Mouhamadou Mounirou SY, La protection constitutionnelle des droits fondamentaux en Afrique : l’exemple du Sénégal, 2006.
Toumany MENDY, Politique et puissance de l’argent au Sénégal , 2006.
Claude GARRIER, L’exploitation coloniale des forêts de Côte d’Ivoire , 2006.
Alioune SALL, Les mutations de l’intégration des Etats en Afrique de l’Ouest , 2006.
Jean-Marc ÉLA, L’Afrique à l’ère du savoir : science, société et pouvoir , 2006.
Le système éducatif en Afrique noire

Antoine Nguidjol
© L’HARMATTAN, 2007
5-7, rue de l’École-Polytechnique ; 75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com [e-mail] [e-mail]
9782296028845
EAN : 9782296028845
Sommaire
Etudes Africaines - Collection dirigée par Denis Pryen et François Manga Akoa Page de titre Page de Copyright AVANT PROPOS CHAPITRE I - LA RADIOSCOPIE DU SYSTEME EDUCATIF AFRICAIN
1. Le savoir, l’absolu et l’oubli de soi 2. L’écriture comme forme initiale de l’aliénation 3. Le mutisme initiatique : simple mutisme méthodologique ? 4. La valeur d’usage des signes Le double héritage de l’école africaine Le voile noir de l’enseignement en Afrique noire
CHAPITRE II - L’INSERTION DE L’ECOLE AFRICAINE DANS L’INDUSTRIE CULTURELLE OCCIDENTALE
1. La marchandise culturelle et le mythe du Cargo 2. La spécificité de la marchandise culturelle en Afrique noire : une « culture d’occasion » 3. Le mensonge de l’utilité 4. Le bilan d’un marché de dupe 5. Détruire l’antinomie entre le monde interne et le monde externe en Afrique noire
CHAPITRE III - L’UNIVERSITE AFRICAINE : OU LE SUPERMARCHE DU SAVOIR MINIMUM
1. Petite leçon d’histoire 2. Les plans d’ajustements structurels du FMI: l’arbre qui cache la forêt d’incohérences des Etats africains, 3. Le pouvoir de nomination à l’université : le signe de la paralysie 4. Le cours magistral et le meeting politique Quelques propositions
CHAPITRE IV - LES GRANDS AXES D’UNE POLITIQUE NATIONALE DE L’EDUCATION EN AFRIQUE NOIRE
Penser le champ éducatif ESQUISSE DE SOLUTIONS
CHAPITRE V - UNE REFLEXION SUR L’ENSEIGNEMENT DE LA PHILOSOPHIE EN AFRIQUE NOIRE
Une culture philosophique qui fait si bon ménage avec l’amnésie Que veut dire enseigner la philosophie ? La prééminence de la fonction didactique en philosophie LE TEXTE : un ensemble de signes en attente
AVANT PROPOS
L’aventure ambiguë est un classique de la littérature africaine que beaucoup connaissent bien.
Le roman raconte le drame de Samba Diallo, jeune néophyte confié à l’éducation de Maître Thierno, responsable d’une école coranique dont la pédagogie particulièrement contraignante vise à conduire l’initié à l’oubli de soi et à l’élévation de l’âme vers la seule chose vraiment essentielle : Dieu.

« Au foyer, ce que nous apprenons aux enfants, dit le prédicateur, c’est Dieu. Ce qu’ils oublient, c’est eux-mêmes, c’est leurs corps et cette propension à la rêverie futile qui durcit avec l’âge et étouffe l’esprit. » (C. Hamidou Kane, L’aventure ambiguë, Julliard, Paris, 1961)

La soumission de l’homme à la transcendance de Dieu, bien que rassurante, ne durera cependant que le temps d’être balayée par un événement aussi terrifiant qu’incompréhensible.

Les « Diallobé » se réveilleront donc un matin au milieu de tirs de canons, attaqués par d’étranges ennemis qui les contraindront à défendre la terre leurs ancêtres ; mais l’ennemi sera plus fort qui deviendra le maître du pays, ayant « vaincu sans avoir raison ».

L’école occidentale d’Afrique est la suite logique de cette guerre, et sa finalité la conséquence tout aussi logique de cette guerre perdue.
Guerre subtile et sournoise qui, par le moyen de l’apprentissage scolaire, parachève la déconstruction de la structure mentale que les armes n’ont pu obtenir.

« Si je leur dis d’aller à l’école nouvelle, avoue le chef des Diallobé, ils iront en masse. Ils apprendront toutes les façons de lier le bois au bois que nous ne savons pas. Mais apprenant, ils oublieront aussi. » ( Ibid .)

Terrible prémonition ....
Il n’empêche, Samba Diallo, le plus intelligent des disciples de l’école coranique est chargé de s’inscrire à l’école nouvelle. Mais sa mission prend les allures d’une réelle crise d’ambivalence à mesure qu’il pénètre au cœur du savoir occidental :
« Il arrive, confie-t-il, que nous soyons capturés au bout de notre itinéraire, vaincus par notre aventure même. Il nous apparaît que tout au long de notre cheminement, nous n’avons cessé de nous métamorphoser, et que nous voilà devenus autres. Quelque fois, la métamorphose ne s’achève pas ; elle nous plonge dans l’hybride et nous y laisse. Alors, nous nous cachons, remplis de honte. » ( Ibid )
CHAPITRE I
LA RADIOSCOPIE DU SYSTEME EDUCATIF AFRICAIN

1. Le savoir, l’absolu et l’oubli de soi
Le roman d’Hamidou Kane pose de toute évidence une série de questions importantes en même temps qu’il dresse de façon prémonitoire un constat d’échec.

L’expérience pathétique du héros nourrit le doute. Elle conduit à se demander si l’école n’est pas une autre facette de la guerre, et si l’acte pédagogique n’est pas la préfiguration de la défaite. Car, si l’école a pu être présentée à l’Africain comme un moyen de libération, on peut constater qu’elle n’a entraîné ni la fin des contraintes externes pesant sur son existence, ni une libération intellectuelle grâce à laquelle il peut désormais distinguer entre ce qui a valeur pour lui et les canons « universels » qui servent de base à la domination étrangère.

“Au foyer, ce que nous apprenons aux enfants, dit le prédicateur, c’est Dieu. Ce qu’ils oublient, c’est eux-mêmes.”

On peut en dire autant de l’apprentissage scolaire, encore hélas placé sous la domination de l’incitation à l’automutilation intellectuelle.

2. L’écriture comme forme initiale de l’aliénation
L’une des questions fondamentales qui se pose à l’école africaine dès l’origine réside dans l’acceptation tacite de l’écriture comme unique foyer du savoir, entraînant ainsi la mise entre parenthèses du parler et du vécu comme foyers possibles du sens.

Dès l’école maternelle, le psychisme de l’élève est imprégné par le triptyque “écriture — vérité — et présence”.

Autrement dit, l’écriture, l’être et la vérité correspondent ; ils sont synonymes et dynamiques. Tandis que leur absence ne laisse d’autre choix à l’africain que de sacrifier au culte de la transcendance et à l’a priori qu’il n’est rien parce qu’il n’a rien écrit. Ce que du reste Césaire c&#